Brèves apologies de nos auteurs féminins/Colombine

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COLOMBINE[1]



Au cours de sa carrière littéraire, que de tristes événements ont malheureusement abrégée, Colombine a cueilli de beaux lauriers.

Les premiers sont ceux que Madeleine lui a décernés en 1901 à titre de chroniqueuse :

« Mlle Éva Circé, écrivait-elle dans la Patrie, écrit des chroniques ravissantes dans les Débats sous le pseudonyme de Colombine ou Musette. Ces articles sont vécus et marqués du cachet de la plus vive originalité. On y sent un esprit finement observateur, un cœur généreux et une âme d’artiste. Elle peint la nature avec un merveilleux coloris, elle chante l’amour en une mélodie suave, elle plaint le malheur en une réclamation touchante et ne peut voir la souffrance sans en gémir par tout son être. Colombine est une généreuse créature, ses chroniques la révèlent grande amie des opprimés et sa charité va vite aux parias, aux déchus, comprenant que ceux-là souffrent plus que tous autres.

« Colombine ou Musette s’est déjà fait une jolie réputation littéraire, et nous souhaitons à la charmante collègue un succès toujours croissant dans la carrière si belle où elle a déjà cueilli des roses dont l’éclat embellira toute sa vie. »

Ceux que Françoise lui décernaient en 1903, dans son Journal à l’occasion de son livre : Bleu, blanc, rouge, sont tout aussi beaux :

« Ce que j’admire chez Colombine, nous dit-elle, c’est l’honnêteté de ses opinions, plus encore peut-être que la couleur, la souplesse, le charme de ses récits…

« Colombine s’applique encore à être vraie non seulement dans l’expression de sa pensée, mais lorsqu’elle peint les scènes de la vie réelle qu’elle saisit dans les manifestations les plus significatives.

« L’amour de la vérité, les dons spéciaux de vision et d’observation sont de grandes qualités au service d’un écrivain. Et quand on sait joindre à ces heureuses dispositions, la poésie de la tendresse, de la pitié, de la douleur, les œuvres prennent une autorité qui résiste à l’action dévastatrice du temps et à l’oubli. »

Ce livre de Colombine est habilement agencé. La poésie s’y mêle à la prose. Après chaque chronique ou récit, le lecteur est diverti par une pièce de vers. Nous en avons ainsi seize, formant en tout sept cent cinquante vers. Peut-on s’expliquer maintenant que l’auteur de l’Anthologie les ait oubliées ?

Colombine eut aussi un magnifique succès lorsqu’elle vint, au retour d’un voyage au pays du Lac St-Jean en compagnie de Gaëtane et de Madeleine, communiquer, elle aussi, comme ses compagnes, ses impressions au public de Québec dans une conférence à l’Institut Canadien. Elle avait le désavantage de se faire entendre la dernière, et cependant elle tint son auditoire sous le charme de sa parole imagée et colorée.

Comment ne pas regretter après cela que certaines circonstances déplorables soient venues terminer en 1908 une carrière aussi brillamment commencée ?




  1. Mme Salomon Côté, de Montréal.