Ce n’est pas sans raison, que l’homme on accompare

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Ce n’eſt pas ſans raiſon, que l’homme on accompare
A l’arbre renuerſé, dont la racine en haut
La cyme tend en bas, puiſque touſiours il faut,
Quil ait ſon cẽtre au ciel, qu’il ayt ſon Dieu pour phare :
Comme de ſon treſor vit le cœur de l’auare,
Et de tous autres biens rien du tout ne luy chaut,
Ainſi l’homme Chrestien né pour franchir ce ſaut
Doit touſiours tendre au lieu, ou git ſon bien plus rare :
Mais quel ciel voi-ie icy encor plus ranuersé ?
Vn Dieu fait homme en terre, vn homme au ciel placé,
Vn ciel tout criſtallin quint — eſſencé de marbre :
Eſtre humble par la Croix, & s’en glorifier,
Se voir n’eſtre que terre, & ſe deifier,
N’eſt-ce ranuerſer tout pour redreſser cet arbre ?