Contes de l’Ille-et-Vilaine/L’Enfant vendu au diable

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Contes de l’Ille-et-Vilaine
Contes de l’Ille-et-VilaineJ. Maisonneuve (p. 216-217).


L’ENFANT VENDU AU DIABLE

On raconte, à Bruz, qu’un batelier du village de Pierrefitte, dont la femme venait d’accoucher d’une fille, passa un pacte avec le diable. Il promit à Satan de lui livrer son enfant lorsqu’elle aurait sept ans, si, à cette époque, sa fortune était faite.

Le batelier et sa femme, qui avaient toujours été misérables, étonnèrent leurs voisins par le changement de vie qui s’opéra dans leur ménage du jour au lendemain. Ils vivaient maintenant comme des rentiers, avaient pris une domestique pour les servir, et achetaient des terres.

Les bonnes femmes du village remarquèrent, par exemple, une chose étrange chez la petite fille. Chaque fois que sa mère la laissait seule à la maison, elle la trouvait, en rentrant, blottie sous son berceau. Plus tard, quand quelqu’un entrait chez ses parents, elle allait bien vite se cacher au même endroit.

L’époque fatale arriva. La servante du batelier à laquelle on avait confié l’enfant s’absenta un instant seulement, et, à son retour, elle trouva la petite fille étranglée. Personne n’avait été vu dans la maison où rien, d’ailleurs, n’était dérangé.

Le père, en apprenant cet événement, se souvint du marché qu’il avait conclu avec le diable, et eut un tel chagrin de la perte de sa fille, qu’il en mourut.

À partir de ce jour, personne ne voulut habiter la maison du batelier, qui prit le nom de maison du diable. Elle ne tarda pas à tomber en ruines et, aujourd’hui, elle a disparu.

(Conté par le père Patard, âgé de 65 ans,
fermier à la Croix-Madame, commune de Bruz.)