Cours d’agriculture (Rozier)/CIRE

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 354-366).


CIRE.


Tableau du travail sur la Cire.


Section première. D’où provient la Cire originairement ?
Sect. II. Sur quelles espèces de plantes les abeilles ramassent-elles la matière à Cire, & comment font-elles cette récolte ?
Sect. III. Quel est le laboratoire où l’abeille prépare la Cire, & comment l’en fait-elle sortir ?
Sect. IV. De quels usages est aux abeilles la grande quantité de Cire brute quelles amassent ?
Sect. V. De la manière de préparer la Cire, quand on l’a sortie de la ruche.
Sect. VI. Quelles qualités doit avoir la Cire pour être bonne ?
Sect. VII. Des moyens industrieux qu’on a mis en usage pour augmenter le produit de la Cire.
Sect. VIII. Des différens usages auxquels la Cire est employée.


Section Première.

D’où provient la Cire originairement ?


Tous les auteurs dont les observations & les découvertes ont étendu nos connoissances dans l’histoire naturelle, conviennent que la cire est, dans son origine, cette poussière contenue dans de petites capsules, sous les anthères ou sommet des étamines des fleurs, (voyez ces mots) qui, dans le temps de la fécondation, vivifie le germe de la plante. M. Bernard de Jussieu s’est assuré par les expériences qu’il a faites sur la poussière des étamines de toutes sortes de fleurs, qu’elle contient les principes de la cire parfaite : il a observé que les grains de cette poussière, qu’il avoit mis dans l’eau, s’y gonfloient jusqu’à crever, & qu’au moment ou un de ces grains se crevoit, il en sortoit un petit jet de liqueur onctueuse & huileuse, qui surnageoit l’eau sans jamais se mêler avec elle. Il a très souvent répété cette expérience sur la poussière des étamines de différentes fleurs, & elle lui a toujours montré les mêmes effets. Cette poussière des étamines des fleurs est, par conséquent, la matière première de la cire, puisqu’elle en contient les principes, quoiqu’ils n’y soient pas combinés & réunis comme ils le sont dans la cire parfaite, ainsi que le prouvent les expériences même de M. Bernard de Jussieu ; & si cela étoit, nous n’aurions pas besoin du secours des abeilles pour avoir de la cire.

Cette matière à cire, comme l’a observé Swammerdam, est un assemblage de petits globules plus ou moins arrondis & alongés, dont chacun peut être considéré comme un petit sac membraneux rempli de cire, ou d’une matière très-prochaine à le devenir. Tous ces petits globules d’une même fleur sont semblables, & leur figure varie selon les différens genres de plante. Dans un mémoire de M. Geoffroi, qui se trouve dans la Collection Académique des Sciences, publiée en 1711, page 210, on y lit que ce célèbre observateur a remarqué que ces globules, dans la plupart des plantes, sont en forme de boule, quelquefois un peu alongée, & que dans d’autres, ils ont des figures tout-à-fait différentes, & extrêmement variées.


Section II.

Sur quelles espèces de plantes les abeilles ramassent-elles la matière à Cire, & comment font-elles cette récolte ?


Les abeilles qui connoissent parfaitement la matière qu’elles doivent employer, vont ramasser sur toutes sortes de fleurs la poussière de leurs étamines. Aristote assure que l’abeille, en faisant sa récolte, ne change point d’espèce de fleur, & que si elle a commencé à faire sa charge de la poussière des étamines du lys, elle n’ira pas à la tulipe pour finir la boule de cire brute qu’elle veut emporter.

M. de Réaumur a remarqué, au contraire, qu’elle va indifféremment d’une espèce à l’autre ; il est certain cependant que les deux petites pelotes qu’elle porte à ses jambes sont toujours de la même couleur, & qu’on n’en voit pas une être jaune, & l’autre brune : peut-être qu’en changeant d’espèce de fleur, elle ne va qu’à celles dont la couleur de la poussière des étamines est la même que celle dont elle est déjà chargée. Il semble que M. Maraldi ait pensé que l’abeille trouvoit la cire brute où il ne peut y en avoir, lorsqu’il dit : « qu’elle recueille la cire sur les feuilles d’un grand nombre d’arbres & de plantes, & sur la plupart des fleurs qui ont des étamines. »

Les abeilles ne recueillent la matière à cire que sur les fleurs qui ont des étamines qui fournissent cette poussière qu’elles vont chercher, & non pas sur les feuilles des arbres & des plantes où elles n’existent point, mais une matière sucrée & gluante. (Voyez le mot Miellée)

Lorsqu’une abeille, dont le corps est couvert d’un poil épais & touffu, entre dans le calice d’une fleur dont les étamines sont bien chargées de cette poussière, elle cherche à frotter avec les diverses parties de son corps le sommet des étamines, & la poussière dont il est couvert, ses poils très-pressés les uns contre les autres, retiennent cette poussière, & en peu de temps elle en sort toute poudrée : quelquefois on voit arriver à la ruche des abeilles tellement couvertes, qu’elles paroissent jaunes, brunes, rouges, selon la couleur de la poussière qu’elles apportent ; cependant il est plus ordinaire qu’elles la ramassent pour en faire deux petites pelotes qu’elles appliquent dans la cavité triangulaire qui est à chaque jambe de la troisième paire. Leurs quatre jambes postérieures étant fournies d’une brosse plate, les deux premières étant aussi couvertes de poils entre la quatrième & cinquième articulation, on conçoit qu’il leur est facile d’ôter de dessus toutes les parties de leur corps la poussière dont il est couvert ; pour cet effet, elles passent leurs brosses sur les diverses parties de leurs corps où la poussière est arrêtée : à mesure que la brosse travaille, la jambe de la première paire passe à celle de la seconde les petits grains qu’elle a ramassés ; & celle-ci les place sur la palette triangulaire de la troisième paire, où elle les aplatit en donnant par-dessus quelques petits coups très-précipités. La grande activité que met l’abeille dans tous ses mouvemens, ne permet pas d’observer, comme on le désireroit, toute la suite de cette opération extrêmement curieuse : en voyant sur la palette triangulaire de chaque jambe de la troisième paire, une petite boule de la grosseur quelquefois d’un grain de poivre, on juge que toute l’action dont on a été témoin, tendoit à y placer successivement par petits morceaux la petite boule qu’on y apperçoit.

Lorsque les anthères ou capsules qui renferment la poussière des étamines ne sont pas ouverts, l’abeille qui fait qu’elles contiennent la poussière dont elle veut se charger, y porte aussitôt les dents, qui, étant en forme de pinces, sont très-propres à déchirer ces capsules : étant parvenue à les ouvrir, elle saisit avec ses dents les petits globules de poussière qui en sortent, & aussitôt une des jambes de la première paire s’approche pour s’en saisir & les passer à la jambe de la seconde paire, qui l’empile dans la palette triangulaire des jambes postérieures. Cette opération extrêmement précipitée est faite tour à tour par les jambes de chaque côté ; en sorte qu’une jambe de la première paire ne s’est pas plutôt retirée, après avoir saisi au bout des dents les petits globules de poussière, que celle de l’autre côté s’avance tout de suite pour faire la même chose, & ainsi successivement l’une après l’autre.

Si les fleurs sont bien épanouies, & que le sommet des étamines soit ouvert, une abeille a bientôt fait sa charge, & placé la petite pelote dans la palette triangulaire : c’est alors les brosses des jambes de la dernière paire qui font le plus d’ouvrage ; elles se donnent réciproquement les grains de poussière qu’elles ont ramassés, & en passant dessous le ventre, elles conduisent la brosse qui est chargée de poussière au bord de la palette de l’autre jambe, qui par ses frottemens s’en décharge, les rassemble dans la palette triangulaire, & les y fixe en les frappant. Après que la charge est faite, on part tout de suite pour aller la déposer au lieu de sa destination.

À toutes les heures du jour, les abeilles retournent des champs plus ou moins chargées de cette matière à cire : le matin est le moment le plus favorable à cette récolte, parce que cette matière, encore imprégnée de la rosée ou de la liqueur qui transpire des étamines, rend leur travail plus court & plus aisé ; elles façonnent & arrangent ces petits grains pour les emporter avec plus de facilité que quand ils sont desséchés par l’ardeur du soleil : l’humidité dont ils sont pénétrés aide à leur réunion pour en former une masse : aussi on remarque que les abeilles qui rentrent vers le milieu de la journée, sont bien moins fournies, & leurs pelotes sont plus petites que si elles avoient fait leurs voyages le matin.

L’abeille de retour de la campagne, & qui rentre dans l’habitation avec une bonne charge de matière à cire, bat des ailes en marchant sur les gâteaux, pour inviter ses compagnes à venir la soulager du poids de son fardeau : trois ou quatre se rendent aussitôt à son invitation, s’approchent & s’arrangent autour d’elle pour l’en débarrasser ; chacune prend avec ses dents une petite portion de la pelote, la broie, la mâche, & après l’avoir avalée, en reprend une autre portion, jusqu’à ce que la pourvoyeuse soit entièrement déchargée. Si elle est seule à se débarrasser de son fardeau, l’opération est bien plus longue : on la voit se contourner pour prendre avec ses dents une partie de la pelote qu’elle porte à ses jambes postérieures, & se redresser ensuite : les dents alors agissent l’une contre l’autre de droite à gauche, avec une vîtesse surprenante, & quand elles ont suffisamment broyé & mâché la petite portion de cire brute dont elles s’étoient saisie, elle tombe dans la bouche, & la langue par ses inflexions, la pousse vers l’œsophage, d’œil elle passe dans l’estomac..


Section III.

Quel est le laboratoire où l'abeille prépare la Cire, & comment l'en fait-elle sortir ?


La cire brute acquiert sa perfection dans le corps de l’abeille, où elle devient de la cire parfaite : son second estomac est le laboratoire destiné par la nature, à l’altération, digestion, & décoction de la poussière des étamines des fleurs, pour être changée en cire parfaite ; c’est-là où les principes de la vraie cire, qui se trouvent dans la matière première, sont analysés, combinés & réunis pour former de la cire ; il faut donc que l’abeille mange & digère la poussière des étamines des fleurs, pour construire ses édifices qui sont en cire.

Swammerdam qui n’avoit point découvert la bouche des abeilles, ne se doutoit pas que la poussière des étamines des fleurs fût convertie en cire dans leur estomac, ne connoissant d’autre ouverture pour conduire les alimens dans leurs corps, que celle qu’il supposoit au bout de la trompe : ces globules ne lui paroissoient pas de nature à y être introduits, quoiqu’ils soient extrêmement petits. M. Maraldi pensoit, ainsi que lui, que pour convertir la cire brute en cire parfaite, les abeilles y ajoutoient quelque liqueur, étant persuadés l’un & l’autre qu’il ne leur suffisoit point de la broyer & de la pétrir avec leurs pattes. L’observateur Hollandois, qui avoit remarqué au bout de l’aiguillon de l’abeille une goutte de cette liqueur venimeuse, qu’elle insinue avec son dard dans la piqûre qu’elle fait, se condenser, se durcir, & rester transparente, avoit soupçonné qu’elle avoit une qualité propre à changer en cire la poussière des étamines des fleurs ; il croyoit avoir fait des expériences favorables à son opinion ; il se pourvut en conséquence d’une quantité suffisante de cette liqueur, pour répéter son expérience en grand : comme il ne dit rien du résultat de cette dernière, c’est une preuve qu’elle n’a pas réussi comme il s’en étoit d’abord flatté.

M. de Réaumur a mêlé la cire brute avec du miel, & une autre fois avec la liqueur venimeuse ; toutes ces expériences n’ont pas eu le moindre succès : il a enlevé aux abeilles la petite pelote de cire brute qu’elles apportent attachée à leurs jambes postérieures, pour s’assurer si ce n’étoit point de la cire toute faite, il l’a pétrie entre ses doigts, sans que les grains de cette poussière ne soient jamais ramollis, ni devenus flexibles. Les ayant ensuite examinés à la loupe, il a reconnu que cette petite masse n’étoit qu’un assemblage de petits globules, dont chacun, malgré la pression, conservoit sa forme & sa figure. D’autres fois il a mis ces petites masses de cire brute dans une cuillère d’argent sur le feu ; elles ont conservé leur figure, se sont desséchées par la chaleur, ont été réduites en charbon, mais jamais elles ne se sont liquéfiées. Qu’on sorte la cire brute des alvéoles où elle est renfermée depuis six à sept mois, & imbibée de miel ; qu’on la pétrisse, qu’on lui fasse subir les épreuves du feu, elle ne sera pas plus fusible, ni ductile que celle qu’apportent journellement les abeilles. Il ne leur suffit donc point de pétrir la cire brute avec leurs pattes, pour la convertir en vraie cire.

On observe que les petites pelotes qu’apportent les abeilles, & qui sont attachées à leurs jambes postérieures, sont de diverses couleurs, suivant les différentes espèces de fleurs sur lesquelles est ramassée cette poussière des étamines dont elle est formée : cette diversité de couleurs peut encore être remarquée dans la cire brute qu’on sort des alvéoles, quoique d’une manière moins sensible. La cire, au contraire, a constamment une couleur uniforme : quand elle sort du laboratoire de l’abeille, elle est toujours d’un très-beau blanc, & en jaunissant, à mesure qu’elle vieillit, elle conserve l’uniformité de couleur. Si les abeilles n’y apportoient pas d’autre préparation que celle de la pétrir & de la broyer, sa couleur seroit bigarrée, c’est-à-dire, un mélange de plusieurs couleurs réunies, dont le résultat ne seroit jamais un beau blanc, tel qu’elle l’a au sortir de l’estomac de l’abeille.

Un essaim qui part, & qu’on place tout de suite dans une ruche, y commence d’abord les premières ébauches d’un gâteau, souvent même à l’arbre où on l’a pris ; cependant aucune des abeilles dont l’essaim est composé, ne porte de pelote de cire à ses jambes, à moins qu’il n’y en ait quelqu’une de celles qui retournoient de la provision, lorsque l’essaim est parti, & qui ait été entraînée par le tumulte qui s’est fait au moment du départ ; & leur provision apparente n’est jamais capable de fournir les matériaux nécessaires qu’emploie dans un jour un essaim pour bâtir un gâteau de dix-sept à dix-huit pouces de long, sur quatre ou cinq de large, sans qu’il soit sorti pour aller à la récolte : c’est ce qu’on peut observer soi-même en tenant renfermé un essaim pendant vingt-quatre heures, immédiatement après l’avoir placé dans une ruche. Qu’on sorte enfin brusquement des abeilles de leur habitation pour les placer dans une autre, dans la saison qu’elles travaillent en cire : ne s’attendant point à ce délogement précipité, elles ne pourront certainement pas se pourvoir & emporter à leurs pattes de petites pelotes de cire qu’on ne leur donne pas le temps de préparer : cependant elles seront à peine dans leur nouvelle habitation qu’elles y travailleront, & commenceront un gâteau. Qu’on ouvre leur estomac, on le trouvera rempli de cire sous la forme d’une liqueur un peu épaisse ; souvent les globules de poussière auront encore leur première figure : il est aisé de s’en convaincre, en les observant avec une forte loupe.

Pour peu qu’on ait observé des abeilles avec attention, lorsqu’elles construisent leurs alvéoles, on est convaincu que la cire qu’elles emploient, sort de leur bouche en forme de liqueur mousseuse ou d’écume très-blanche. Il n’est donc point possible de croire que la cire brute soit conduite dans leur estomac, comme un aliment dont l’excédent de ce qui a servi au renouvellement de leur substance, ne doit sortir que sous la forme d’un excrément inutile. L’estomac qui travaille, & qui contient la cire, est capable de contraction, comme celui des animaux qui ruminent, & c’est par ce mouvement que la cire est renvoyée à la bouche. Lorsque l’abeille veut employer la cire qu’elle a en réserve dans son laboratoire, les diverses parties de son estomac, en se contractant, se rapprochent successivement du centre ; la cire qui s’y trouve contenue sous une forme liquide, étant comprimée, elle remonte & sort par l'œsophage ; & arrivée à la bouche, la langue, par ses inflexions, aide à sa sortie, & l’applique où elle est nécessaire.

M. Wilhelmi, en rendant compte à M. Bonnet, dans une lettre du 22 août 1768, des nouvelles découvertes de la Société Économique de la haute Luzace, rapporte qu’on avoit observé que les abeilles effluent la cire par les anneaux dont la partie postérieure de leur corps est formée. Cette société s’étoit convaincue de ce fait, en tirant avec la pointe d’une aiguille l’abeille qui travailloit en cire dans l’alvéole ; en lui alongeant le corps, on vit sous ces anneaux la cire dont elle étoit chargée, sous forme de petites écailles. M. de Hombostel, qui avoit fait la même découverte, n’hésite point à assurer que l’abeille produit la cire par transsudation ; ces petites écailles qu’on trouve sous les anneaux du corps des abeilles, sont les éclats de cire qui se trouvent aux parois des cellules, & qui se glissent sous les anneaux des abeilles, quand elles se retirent après avoir travaillé dans l’intérieur. M. Wilhelmi en est convenu dans sa réponse à la lettre de M. Bonnet, qui lui témoignoit sa surprise sur un fait de cette nature, en lui disant : « que M. de Réaumur avoit démontré que la cire sortoit de la bouche de l’insecte en forme d’écume, & que ce qu’il avoit vu & revu, étoit chose certaine. »

M. Arthur Dobbes, dans un mémoire qu’il a donné au Journal économique, du mois d’octobre 1753, pag. 163, prétend que la cire qu’emploient les abeilles pour bâtir leurs édifices, sort de leur corps par l’anus, & qu’elle n’est que le marc de la poussière des étamines, que les abeilles ont digérée, dont la partie la plus substantielle sort par la bouche, & est déposée dans les cellules pour servir de nourriture aux vers. Il a observé des abeilles se promener avec vîtesse sur un gâteau, & en battre la supercificie avec l’anus, en continuant cette manœuvre tant qu’elles avoient quelque chose à y déposer, & que d’autres les suivoient pour façonner avec leurs dents la matière que les premières y avoient laissée. Il témoigne de la surprise que ce fait ait échappé à M. de Réaumur, qui a fait mille observations pour découvrir comment les abeilles travailloient en cire. Mais comment M. Arthur qui croit avoir mieux vu que M. de Réaumur, n’a-t-il pas observé que les dents de l’abeille étoient en mouvement, & agissoient dès qu’elle avoit frappé la surface du gâteau avec l’anus, sans retourner en arrière pour travailler la matière qu’il assure qu’elle avoit déposée par cette voie il ne seroit point étonnant qu’il sortît par l’anus quelque goutte liquide dans le moment que l’estomac à cire, qui en est très-voisin, se contracte afin de renvoyer à la bouche, par ce mouvement de contraction, la matière dont il est rempli. Lorsqu’une abeille travaille en cire, le mouvement de contraction que fait son estomac est nécessairement la cause que l’anus frappe de temps en temps la surface où elle se trouve.

L’opinion de M. Arthur annonce une personne peu versée dans l’Histoire Naturelle de l’Abeille, dont il est nécessaire de connoître parfaitement l’organisation, pour rendre raison de ses ouvrages. Il est donc certain, ainsi que l’a observé M. de Réaumur, que l’abeille ne rend par l’anus que les fèces du miel & de la cire brute qu’elle a digérée ; & quoiqu’ils le coagulent, ils ne font pas plus de la cire parfaite que la goutte de venin que Swammerdam avoit vu se condenser & se durcir au bout de l’aiguillon. Il n’est point surprenant que M. Arthur leur ait trouvé une odeur de cire, & une qualité glutineuse ; l’abeille qui se nourrit de miel & de cire brute, doit rendre des excrémens qui participent à leurs qualités.

Lorsqu’on observe une abeille occupée à travaillera ses alvéoles, on voit sa tête se contourner, ses dents se désunir, & sa langue, par ses inflexions, aider à sortir la liqueur qui est dans la bouche : elle paroît alors sous la forme d’une liqueur mousseuse, ou d’écume blanche, que la langue qui fait l’office d’une truelle, applique aux endroits ou elle est nécessaire, & que les dents travaillent tout de suite en la battant pour l’aplatir ; elle est toujours très-blanche quand elle sort de la bouche de l’abeille, ce n’est qu’en vieillissant qu’elle devient jaune ; le miel qui est contenu dans les alvéoles, & qui est jaune lui-même, contribue à lui donner cette couleur quand elle est encore toute fraîche : mais l’éclat de sa première blancheur est encore plus altéré par le séjour que font les vers dans les cellules, & par les vapeurs de la ruche qui sont toujours très-considérables.


Section IV.

De quels usages est aux abeilles, la grande quantité de Cire brute quelles amassent ?

Nous venons de remarquer que les abeilles emploient la poussière des étamines des fleurs, à faire la cire dont elles se servent pour bâtir leurs édifices : mais de toute cette matière qu’elles apportent en grande quantité dans leur ruche, une très-petite partie est convertie en vraie cire : ainsi que le miel, la cire brute sert de nourriture aux abeilles dans les temps de disette où elles ne trouvent pas de quoi vivre dans la campagne. Les anciens, suivant le langage de leurs poètes la nommoient l’ambroisie des abeilles, & le miel leur nectar : Pline est du sentiment qu’elles s’en nourrissent lorsqu’elles travaillent. Dans la Hollande, la Flandre, le Brabant, elle n’a pas d’autre nom que celui de pain des abeilles. Swammerdam assure qu’il est contre toute vraisemblance qu’elles prennent une nourriture aussi solide ; cela n’est point étonnant, puisqu’il dit qu’elles n’ont ni bouche ni gosier, ni enfin d’autre organe pour le passage des alimens, que la trompe. M. de Réaumur, qui a découvert les organes par lesquels les alimens passent dans leur estomac, & que Swammerdam ne connoissoit point, a fait l’expérience la plus décisive, pour démontrer que les abeilles se nourrissent de cire brute, & qu’elles en font une consommation qui paroît étonnante.

Il s’étoit assuré que dans une ruche de dix-huit mille abeilles, chacun faisoit par jour quatre à cinq voyages, ce qui faisoit environ quatre-vingt-quatre mille par jour, qui devoient produire un pareil nombre de boules de cire brute, à réduire même les choses à moitié : il pesa huit de ces boules de cire, qui donnèrent le poids d’un grain. En divisant 84000 par 8, on a donc le poids des boules de cire ramassées dans une journée qui est de 10500 grains : or, la livre n’est composée que de 9216 grains : sa récolte de cire brute faite dans une journée pèse par conséquent plus d’une livre. Il y a dans une année plusieurs jours d’une récolte aussi abondante ; souvent il y en a plus de quinze depuis le mois de mai jusqu’à la fin de juin, & dans les jours les moins favorables elles ne laissent pas d’en apporter une certaine quantité. Pendant six à sept mois qu’elles sortent, elles doivent donc en faire une provision très-grande : cependant si au bout de l’année on sort la cire d’une ruche, à peine y trouvera-t-on quelquefois deux ou trois livres de cire. Les abeilles n’extraient par conséquent qu’une très-petite portion de cire de cette immense quantité de poussière des étamines qu’elles ramassent ; la plus grande partie sert à les nourrir, & sort ensuite de leurs corps en forme d’excrémens. Il faut encore remarquer que les faux bourdons, dont le nombre est souvent de huit à neuf cens & plus, ne mangent que du miel, du moins on n’a jamais trouvé dans le conduit ni dans le dépôt des alimens, de la cire brute, quelque nombre qu’on en ait ouvert.

Quoique les édifices soient construits, les ouvrières continuent toujours à recueillir & à apporter de la cire brute : il faut bien remplir les magasins, & se précautionner pour les temps de disette où la campagne n’offrira plus de récolte à faire, & pourvoir à la nourriture de la famille qui naît tous les jours ! On ne cesse donc point d’apporter de cette provision tant qu’on en trouve à ramasser ; l’abeille qui arrive avec ses deux petites pelotes de cire brute, lorsque les édifices sont construits, que les gâteaux remploient la ruche, n’invite plus ses compagnes à venir la décharger de son fardeau : son bourdonnement & ses battemens d’ailes seroient inutiles, elles ne se rendroient point à ses invitations, parce qu’elles sont rassasiées de la provision qu’elles apportent, & qu’il n’y a plus d’édifices à bâtir : elle va donc toute seule déposer dans les magasins la provision qu’elle a ramassée. Arrivée à sa destination, elle s’accroche par ses jambes antérieures contre les bords de l’alvéole où elle veut entrer pour se débarrasser de son fardeau ; elle recourbe son corps en-dessous, en le rapprochant de sa tête pour faciliter son entrée dans l’alvéole, Lorsqu’elle y est entièrement, le bout des jambes de la seconde paire, frappe & pousse au fond de la cellule la petite pelote dont les dernières jambes sont chargées, oc elle part tout de suite pour aller faire d’autres provisions. À peine est-elle sortie, qu’une autre arrive, entre la tête la première, & va pétrir avec ses dents, & ensuite avec l’extrémité de ses jambes, les pelotes qui viennent d’être déposées contre le fond de la cellule, afin qu’elles ne forment qu’une masse qu’elle a soin d’aplanir, en rendant sa surface parallèle à l’ouverture de la cellule. Cette cire brute, pétrie & humectée avec le miel qui sort de la bouche de l’abeille, est moins sujette à se dessécher, ou à une fermentation qui la corromproit. Souvent l’abeille qui apporte sa provision, prend elle-même avant de sortir, le soin de l’entasser, & de l’arranger comme il convient qu’elle le soit pour se conserver.


Section V.

De la manière de préparer la Cire, quand on l’a sortie de la ruche.


Les gâteaux ou rayons qu’on sort d’une ruche, & qui sont remplis de miel, sont la cire que les abeilles ont travaillée : lorsqu’on en a parfaitement séparé le miel par les diverses opérations dont il est parlé à l’article du miel : on met cette cire tremper deux ou trois jours dans de l’eau bien claire ; on a soin de la remuer de temps en temps, afin d’en séparer toutes les parties de miel qui pourroient y être restées malgré la pression qui a été employée pour les faire sortir. Il ne faut point laisser cette cire exposée aux abeilles pour qu’elles profitent & enlèvent le miel qui s’y trouve : elles la broieroient toute en petits morceaux, & la dissiperoient entièrement ; quand elle a trempé suffisamment dans l’eau claire, & que le miel en est bien séparé, on la met alors dans un chaudron, en y ajoutant de l’eau jusqu’à ce qu’il soit rempli aux deux tiers, & on le met sur un feu clair & très-modéré ; à mesure que l’eau bout, & que la cire se fond, on la remue avec une spatule de bois, afin qu’elle ne se brûle pas en s'attachant aux bords du chaudron ; il ne faut pas trop laisser cuire la cire, elle deviendroit cassante & brune, & le blanchissage ne remédieroit point ou difficilement à ces défauts. Quand elle commence à fondre, il est bon de diminuer le feu, & dès qu’elle est fondue, on la verse tout de suite avec l’eau dans laquelle elle a été fondue, dans des sacs d’une toile forte & claire, qu’on met tout de suite à la presse, si on en a une, & au-dessous de laquelle on a eu la précaution de placer des vases pour la recevoir, dans lesquels on a versé un peu d’eau chaude, afin que tout corps étranger aille au fond ; la presse doit être propre, & avoir été bien lavée auparavant de s’en servir, afin qu’aucune saleté ne se mêle avec la cire pour en altérer la qualité & la couleur. Avant d’y mettre le sac, on la mouille avec un balai trempé dans l’eau fraîche, on presse tout de suite & doucement, pour que la cire n’aille pas au-delà du vase qu’on a placé pour la recevoir.

Quand on n’a point de presse, on peut se servir d’un sac de toile grossière & forte, fait en forme de capuchon pointu, dont l’ouverture soit large. Avant d’y verser la cire, il faut le tremper dans l’eau chaude, & le tordre ensuite légèrement : par ce moyen l’eau qui en sortira par la pression, ne rejaillira pas contre ceux qui le presseront quand on y aura versé la cire. On attache à deux endroits de l’ouverture du sac, une corde qui sert à le suspendre à un clou qu’on enfonce à la poutre ou à une des solives de la chambre où l’on fait cette opération ; après avoir versé l’eau & la cire dans le sac sous lequel on a placé un vase pour la recevoir, on le presse entre deux gros bâtons bien unis & humectés avec de l’eau fraîche : on presse d’abord légèrement en conduisant avec assez de vîtesse les deux bâtons, depuis l’ouverture jusqu’au bout du capuchon ; on réitère la pression en serrant plus fort jusqu’à ce que la cire soit toute ou en grande partie sortie du sac. On remet le marc qui reste dans l’eau fraîche, dans laquelle on le laisse deux ou trois jours se dépouiller de toute ordure ; on le fait refondre une seconde fois, ensuite on le presse comme on a déjà fait.

La première cire qui est sortie du sac se fige & se sépare de l’eau à mesure qu’elle se refroidit ; quand elle en est bien séparée, on la retire, & on enlève avec un couteau les ordures qui restent attachées au-dessous de chaque morceau. Pour en former des pains, on la remet dans une chaudière avec une moindre quantité d’eau que celle qu’on a mise la première fois ; on la fait fondre sur un feu petit & clair ; quand elle est fondue & qu’elle a été écumée, on la verse dans des vases dont l’ouverture sera beaucoup plus large que le fond, on la laisse refroidir sans toucher aux vases, qu’on peut couvrir, si l’on craint que la poussière aille s’y reposer. Quand elle est parfaitement refroidie & qu’on sort le pain, on le ratisse par-dessous pour ôter les saletés. Afin d’avoir plus d’aisance pour le sortir du vase, on prend une petite corde qu’on noue par les deux bouts, on la passe à un bâton qu’on met en travers sur les bords du vase, la corde demeure attachée à la cire à mesure qu’elle se refroidit ; & quand on veut sortir le pain du vase, ou le tire par cette corde.


Section VI.

Quelles qualités doit avoir la Cire, pour être bonne ?


Il y a beaucoup de différence entre les cires faites par diverses abeilles : elle consiste principalement en ce que les unes sont plus aisées à blanchir, tandis qu’on réussit plus difficilement à d’autres. Il y en a qui n’acquièrent jamais un degré parfait de blancheur, malgré tous les soins & toutes les peines qu’on prend pour y parvenir : telle est la cire que fournissent les abeilles de la forêt de Fontainebleau ; celle des montagnes sur lesquelles il y a beaucoup de buis, est toujours d’un plus beau blanc que celle des pays en plaine. La cire de l’île de Corse, tant estimée des romains par rapport à sa blancheur, tiroit cette qualité de la quantité de buis que les abeilles y avoient à leur disposition. La moisissure qui altère considérablement sa qualité, l’empêche d’acquérir jamais un beau blanc au blanchissage. Quand elle a été trop cuite à la première fonte, ou qu’elle a été brûlée, le blanchissage lui fait perdre difficilement la couleur brune qu’elle a prise dans la chaudière.

La cire diffère aussi beaucoup par l’odeur : celle des montagnes où les abeilles ont à discrétion toutes sortes de plantes aromatiques, à une odeur plus agréable que celle des plaines & des pays gras. La meilleure cire doit être jaune, grasse, unie, légère & d’une bonne odeur : on peut lui donner la couleur qu’on désire, elle dépend des ingrédiens qu’on y mêle ; pour l’ordinaire on a recours à cet expédient, lorsqu’elle n’est pas d’une bonne qualité, où qu’elle a été trop cuite à la première fonte ; aussi faut-il toujours se défier de toute cire qui n’est pas jaune. Quand elle est en pain & qu’elle paroît assez blanche, c’est souvent parce qu’on a usé de supercherie pour lui donner cette couleur, en y mêlant quelques pincées de poudre à poudrer, lorsqu’elle est fondue.


Section VII.

Des moyens industrieux qu’on a mis en usage pour augmenter le produit de la Cire.


Dès qu’on a reconnu l’utilité de la cire, on s’est occupé d’en augmenter le produit ; on a imaginé pour cet effet de faire Voyager les abeilles, & ; de les conduire d’un pays dans un autre 1, pour les mettre à portée d’en moissonner les richesses. Les égyptiens font les premiers qui aient imaginé ces voyages ; le peuple qui habite aujourd’hui les riches contrées de l’Égypte, fuit encore l’exemple de ses ancêtres. Dans la haute Égypte les productions de la terre sont plus précoces de six semaines que dans la basse : afin que les abeilles en profitent, vers la fin d’octobre, les habitans de la basse Égypte qui ont des ruches, les mettent dans des bateaux, & leur font remonter le Nil : chaque ruche sur laquelle est écrit le nom du propriétaire, est numérotée & inscrite sur un registre au moment de rembarquement ; elles arrivent dans la haute Égypte dès que le Nil est retiré, & au moment que les campagnes déjà fleuries offrent à ces ouvrières d’abondantes moissons. Toutes les ruches restent sur les bateaux où elles sont arrangées les unes sur les autres en forme de pyramide ; lorsqu’on juge que les abeilles ont recueilli aux environs toute la matière à cire, les bateaux dépendent le fleuve, & s’arrêtent trois ou quatre lieues plus bas que l’endroit dépouillé par les abeilles. Après le séjour nécessaire pour ramasser la récolte que leur offre le nouveau canton, les bateaux descendent encore la rivière, en s’arrêtant toujours dans les endroits où les abeilles peuvent ramasser des provisions. On arrive enfin dans la basse Égypte, d’où on étoit parti au commencement de février, qui est le temps où la campagne offre à son tour une très-grande abondance aux abeilles ; alors chaque propriétaire va reconnoître ses ruches & les retirer, & profiter ainsi des récoltes faites dans la hauts Égypte.

Les italiens habitans les rivages du Pô, ainsi que les grecs, suivent l’exemple tracé par les égyptiens. Au rapport de Columelle, les grecs transportoient leurs abeilles de l’Achaie dans l’Attique, parce qu’elle donnoit des fleurs quand celles de l’Achaie étoient passées. Bien des personnes, dans le pays de Juliers, portent les ruches aux pieds des montagnes & des côteaux où abondent les fleurs qui sont passés dans les plaines. Cet usage est connu en France, & surtout en Bretagne, & pas assez suivi ailleurs ; un particulier d’Yèvres-la-ville, diocèse d’Orléans, envoyoit ses ruches dans la Beauce ou dans le Gâtinois, quelques fois même en Sologne. Les gâteaux étoient bien assujettis dans les ruches par quelques petits bâtons mis en travers : l’ouverture étoit fermée avec une toile claire, afin que l’air pût se renouveler sans laisser sortir les abeilles ; on mettoit les ruches deux à deux de front sur une charrette, en observant que l’ouverture fût en haut, ou de côté, si on en mettoit plusieurs les unes sur les autres. Arrivées à leur destination, il les logeoit de côté & d’autre, jusqu’à ce que la saison ne permît plus aux abeilles de travailler : alors il les ramenoit chez lui avec les mêmes soins qu’il avoit pris pour leur départ. C’est un fait connu de tout le monde.


Section VIII.

Des différens usages auxquels la Cire est employée.


La consommation de la cire est très-grande dans tous les pays. Le luxe l’a rendue d’une nécessité indispensable pour les besoins de la vie domestique & pour les arts ; outre la quantité immense de bougies qu’on en fait pour nous éclairer dans nos appartemens & pour brûler dans nos temples, la pharmacie la fait entrer dans presque tous ses onguens & dans quelques baumes ; la chirurgie en fait des anatomies qui ressemblent parfaitement à la nature, & qui épargnent à ceux qui l’étudient l’horreur & le dégoût qu’inspire la dissection des cadavres. Les arts de curiosité en font toutes sortes d’ouvrages, & l’emploient à nous représenter la nature des objets dans l’éclat de leur plus grande beauté, en leur donnant cet air de ressemblance & ce ton de fraîcheur, capables de réjouir agréablement notre imagination en trompant nos yeux. M. D. L. L.

La France ne produit pas le quart de la cire qu’elle consomme ; notre luxe, plus que nos besoins réels, paie à l’étranger une contribution, immense. Cependant, en moins de dix ans, le gouvernement pourroit mettre au pair le produit en cire du royaume avec sa consommation ; il ne s’agit pas de promettre & même de donner des gratifications, le paysan croit que son imposition sera augmentée en raison de la gratification qui lui aura été accordée ; dans combien de provinces n’a-t-on pas refusé de planter des mûriers distribués gratuitement par MM. les intendans ! la crainte a retenu ces plantations, & est encore un obstacle invincible ; il est ridicule, soit ; mais il n’existe pas moins, & j’en ai les preuves les plus claires.

À mon avis, le seul moyen qui me paroît efficace est une déclaration, du roi dont l’effet auroit lieu pendant dix ans, dans laquelle il seroit spécifié 1°. que tout taillable possesseur de dix ruches, chacune du poids de dix livres, déduction faite du bois, seroit exempt de taille d’un écu par ruche ; 2°. que le possesseur de huit ruches du poids ci-dessus énoncé, seroit exempt de quarante sols par ruche ; 3°. que ceux qui n’auroient qu’une ruche ou jusqu’à sept inclusivement, seroient exempts de trente sols par ruche ; 4°. que toutes ruches au-dessous du poids de dix livres, seroient réputées être de la classe de celles du N°. 3 ; 5°. que cette remise d’imposition ne pourroit être reversible sur aucune autre imposition, comme vingtièmes, capitation, logement de gens de guerre ; & avec une semblable déclaration, le propriétaire retiendroit la gratification dans ses mains, & ne seroit pas obligé de faire souvent des voyages infructueux dans la capitale de la province, ou auprès des subdélégués des intendans. Les frais de semblables voyages absorberoient la valeur de la gratification.

Je conviens que cette diminution de taille seroit pendant dix années une perte pour le trésor royal : ne seroit-elle pas compensée par l’argent qui resteroit dans le royaume, & surtout par cet argent précieux qui circuleroit dans nos campagnes, qui en ont un si grand besoin !

Nous ne parlerons pas ici de la manière de préparer la cire, de son blanchiment, &c. Ces pratiques concernent les arts, & non pas l’agriculture.