De l’Invention Oratoire (trad. Liez)/Notes

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Rhétorique (Œuvres complètes), Texte établi par NisardDidotvol. 1 (p. 169-172).
NOTES SUR L’INVENTION.

LIVRE PREMIER.

II. Eloquentia persuadere potuissent. L’Éloquence, considérée comme une faculté commune au poète et à l’orateur, a jeté, parmi les peuples, les premiers fondements de la civilisation. Telle était l’opinion des Grecs, de tous les poètes, de tous les philosophes, de tous les historiens de l’antiquité. Voyez Cicéron, de Oratore, liv. I, cbap. 8 ; Horace, Art poét., vers 391 ; Virgile, Énéid., liv. viii ; Diodore de Sicile, liv. i, pag. 11, édit. de Wesseling, etc. ; l’Histoire critique de l’Éloquence chez les Grecs, par Belin de Ballu, tom. i ; et surtout J. J. Rousseau, chap. 9 et 10 de l’Essai sur l’origine des langues.

V. Gorgias Leontinus. Cicéron parle souvent de Gorgias, né à Léontini, ville de Sicile. Il vécut jusqu’à l’âge de cent huit ans. Il ne subsiste plus que deux fragments attribués à Gorgias.

Aristoteles. « Il ne fallait rien moins que tout le pédantisme et tout le fanatisme des siècles qui ont précédé la renaissance des lettres, pour exposer à une sorte de ridicule un nom tel que celui d’Aristote. On l’a presque rendu responsable de l’extravagance de ses enthousiastes. Mais celui qui disait en parlant de son maître : Je suis ami de Platon, mais plus encore de la vérité, n’avait pas enseigné aux hommes à préférer l’autorité à l’évidence ; et celui qui leur avait appris le premier à soumettre toutes leurs idées aux formes du raisonnement, n’aurait pas avoué pour disciples des hommes qui croyaient répondre à tout par ce seul mot : Le maître l’a dit… Mais ce nom, quoiqu’on en ail fait un si funeste abus, n’en est pas moins respectable. Aujourd’hui même que les progrès de la raison ont comme anéanti une partie de ses ouvrages, ce qui reste suffit encore pour en faire un bomme prodigieux. Ce fut certainement une des têtes les plus fortes elles plus pensantes que la nature eût organisées. Il embrassa tout ce qui est du ressort de l’esprit humain, si l’on excepte les talents de l’imagination ; encore s’il ne fut ni orateur ni poète, il dicta du moins d’excellents préceptes à l’éloquence et à la poésie. Son ouvrage le plus étonnant est sans contredit sa Logique. Il fut le créateur de celle science, qui est le fondement de toutes les autres ; et pour peu qu’on y réfléchisse, on ne peut voir qu’avec admiration ce qu’il a fallu de sagacité et de travail pour réduire tous les raisonnements possibles à un petit nombre de formes précises, à l’aide desquelles ils sont nécessairement conséquents, et hors desquelles ils ne peuvent jamais l’être… C’est à lui qu’on est redevable de cet axiome célèbre dans l’ancienne philosophie, et adopté dans la nôtre, que les idées, qui sont la représentation des objets, arrivent à notre esprit par l’organe des sens. C’est le principe fondamental de la métaphysique de Locke et de Condillac ; c’était peut-être la seule vérité essentielle qu’il y eût dans celle d’Aristote, et c’est la seule qu’on ait rejetée des écoles…. Les bornes de l’esprit d’Aristote ont été en philosophie, durant vingt siècles, les bornes de l’esprit humain…. Ce n’est pas que dans ses meilleurs ouvrages sa manière d’écrire n’ait des défauts très-marqués. Il pousse jusqu’à l’excès l’austérité du style philosophique et l’affectation de la méthode : de là naissent la sécheresse et la diffusion. Il semble qu’il ait voulu en tout être l’opposé de Platon son maître, et que, non content d’enseigner une autre doctrine, il ait voulu aussi se faire un autre style. On reprochait à Platon trop d’ornements ; Aristote n’en a point du tout : pour se résoudre à le lire, il faut être déterminé à s’instruire. Il tombe aussi de temps en temps dans l’obscurité ; de sorte qu’après avoir paru, dans ses longueurs et ses répétitions, se défier trop de l’intelligence de ses lecteurs, il semble ensuite y compter beaucoup trop. On a su de nos jours réduire à un petit espace toute la substance de sa Logique, qui est très-étendue. Sa Poétique, dont nous n’avons qu’une partie, qui fait beaucoup regretter le reste, a embarrassé en plus d’un endroit, et divisé les plus habiles interprètes. Sa Rhétorique, dont Quintilien (on peut ajouter Cicéron) a emprunté toutes ses idées principales, ses divisions, ses définitions, est abstraite et prolixe dans les premières parties ; mais pour le fond des choses, c’est un modèle d’analyse. » (La Harpe, Cours de Littérature, première partie, liv. i, chap. 1.)

VI. Hermagoras. Hermagoras, célèbre rhéteur, né à Temnos en Éolie, était surnommé Carion. Il composa six livres sur la Rhétorique. Il écrivit aussi sur le Beau, sur l’Élocution, sur les Figures et sur d’autres sujets. Il donna des leçons à Rome avec Cécilius, du temps d’Auguste, et mourut dans un âge fort avancé. Cicéron ne le cite nulle part aussi fréquemment que dans ce livre. Voyez Suidas, Quintilien, liv. ni, chap. 1 ; Plutarque, Vie de Pompée. Ernesti croit cependant, non sans quelque raison, qu’il ne faut pas confondre ce rhéteur avec celui dont Cicéron parle dans ses ouvrages.

XXX. Velut Gracchi patris factum. Appius Claudius Pulcher et Tib. Semp. Gracchus avaient, comme censeurs, ôté leur cheval à plusieurs chevaliers romains. Les tribuns s’étaient fortement élevés contre cette mesure. Le peuple demandait justice surtout de la conduite d’Appius. Gracchus alors se leva, et fit serment que si l’on attaquait son collègue, il n’attendrait pas la condamnation qui pourrait aussi le frapper, mais qu’il accompagnerait Appius en exil. L’intégrité reconnue de Gracchus empêcha le peuple d’aller plus loin. Appius fut absous l’an de Rome 584.

XXXI. Æschinem. Eschine, fils de Charinus ou de Lysanias, naquit à Athènes. Passionné pour l’étude, il s’attacha tellement à Socrate qu’il ne le quittait jamais. Aussi ce philosophe disait-il : « Le fils d’un charcutier est le seul qui sache nous honorer. » On l’accuse de s’être approprié plusieurs dialogues de son maître, que Xantippe, veuve de Socrate, lui avait donnés. Diogène Laërce lui attribue sept dialogues intitulés : Miltiade, Callias, Axiochus, Aspasic, Alcibiade, Télaugès et Rhinon. Il nous reste l’Axiochus ; car je ne crois pas que l’un des deux Alcibiade de Platon soit d’Eschine le socratique.

XXXVI. Falsum est non esse plus quam triparti tant argumentationem. Le syllogisme est composé de trois propositions ; savoir : la majeure, la mineure, et la conclusion, qui doit suivre nécessairement des deux premières, pour que le syllogisme soit en forme ; mais l’auteur donne quelquefois cinq propositions au syllogisme, parce qu’à chacune des propositions ordinaires il ajoute quelque preuve qui la confirme. Il le fait, soit pour l’ornement, soit par nécessité, quand la proposition est douteuse. Cette espèce de syllogisme se nomme épicherèmé. En voici un exemple :

1° « Celui-là n’a pas violé les lois dont l’action avait pour but de sauver la république, et qui l’a effectivement sauvée ;

2° Parce que la fin pour laquelle les lois ont été faites est le salut de la république ;

3° Or, Milon a voulu sauver la république, et l’a sauvée réellement en tuant Clodius ;

4° En effet, Clodius était l’ennemi déclaré de la république, dont il aurait causé la perte, s’il n’eût été tué ;

5° Donc Milon n’a point violé les lois en tuant Clodius. »

Supprimez la seconde et la quatrième proposition, et ce raisonnement oratoire n’est plus qu’un syllogisme ordinaire.

XXXVIII. Exempla ponemus. Les paroles que Cornélius Népos, Vie d’Épaminondas, chap. 8, et après lui Élien, Hist. div., xiii, 42, mettent dans la bouche du Thébain sont un peu moins oratoires, mais un peu plus éloquentes que le discours de rhéteur qu’on prête ici au défenseur d’Épaminondas.

XLIX. Cœpionis legem. Q. Servilius Cépion, consul l’an de Rome 647, porta une loi qui abrogeait une disposition de la loi rendue par C. Gracchus, disposition qui accordait aux seuls chevaliers romains le droit de juger. Par sa nouvelle loi, Cépion adjoignit les sénateurs aux chevaliers.

LV. Rhetor Apollonius. Apollonius, surnommé Molon, ou, selon Plutarque, fils de Molon, célèbre rhéteur grec, qui vivait environ quatre-vingts ans avant Jésus-Christ. Il était d’Alabanda, ville de l’Asie Mineure. Il enseigna la rhétorique à Rome et à Rhodes, et compta Cicéron et César parmi ses auditeurs. Comme il entendait peu la langue latine, il pria Cicéron de composer en grec. Le jeune orateur s’empressa d’obéir, dans l’espérance de recevoir d’utiles conseils. Quand il eut achevé, au milieu des transports d’admiration et des applaudissements qu’excitait sa harangue, il vit avec chagrin Apollonius demeurer longtemps muet et pensif ; il ne put s’empêcher de lui témoigner combien il était sensible à cette marque d’improbation. Moi, lui répondit Apollonius, je te loue et je t’admire, Tullius ; mais je plains la Grèce. Il ne lui restait plus que la supériorité des lumières et de l’éloquence, et tu la lui enlèves pour la transporter aux Romains. (Plutarque, Vie de Cicéron, chap. 5.)

C’est de lui que Cicéron apprit à se borner, à ne point s’abandonner aux saillies d’un esprit quelquefois plus fécond (pie juste ; enfin, à se renfermer en tout dans de justes limites. Aussi, lorsque, après avoir passé deux ans dans l’école d’un maître aussi habile, le jeune orateur revint à Rome, on fut moins frappé encore de ses progrès dans l’art de la parole, que du changement qui s’était opéré dans son débit. Sa voix s’était adoucie, et son action était devenue plus modelée. Il paraît qu’Apollonius n’était point partisan de la philosophie. (Cic. de Orat, i, 17.)


LIVRE SECOND.

I. Magno pretio conductum. Pline, xxxv, 36, dit que ce furent les habitants d’Agrigente qui demandèrent à Zenxis un tableau, qu’ils consacrèrent dans le temple de Junon Lacinia. Il s’accorde avec Cicéron dans le reste du récit.

II. Inventore Tisia. Tisias, Sicilien, disciple de Corax, le plus ancien auteur qui ait écrit sur la rhétorique. Aristote rapporte qu’après l’expulsion des tyrans de Sicile, lorsque les affaircs des particuliers, longtemps interrompues, reprirent leurs cours devant les tribunaux, Corax et Tisias rédigèrent quelques préceptes sur l’art de parler en public ; car, ajoute-t-il, personne jusque-la n’avait assujetti les discours à aucun art ni à aucune règle, quoiqu’on en prononçât et qu’on en écrivit même d’assez soignés, et que Protagoras eût mis par écrit, vers ce temps, des dissertations appelées aujourd’hui lieux communs. Ils s’occupèrent surtout de l’éloquence du barreau, et c’est presque la seule chose qui fût enseignée dans leur rhétorique. Aristote ; Cicéron, Brutus, chap. 12 ; de l’Orat., liv. i, etc. ; Quint., ii, 1 7 ; iii, 1, etc.

Rhetor Isocrates. Isocrate, contemporain de Platon, était plus âgé que lui de six ans. Il ne put survivre à la défaite de Chéronée. Après avoir reçu les leçons de Gorgias, de Prodicus et des plus habiles rhéteurs de la Grèce, il fit des plaidoyers pour ceux qui n’étaient pas en état de défendre eux-mêmes leur cause ; mais la faiblesse de.> ;on organe et une excessive timidité l’écartèrent toujours de la tribune et du barreau. Il ouvrit des cours publics d’éloquence, et compta parmi ses disciples, des rois, des généraux, des hommes d’État, des écrivains dans tous les genres. « Malheureusement pour lui, ses ouvrages, remplis d’ailleurs de grandes beautés, fournissent des armes puissantes à la critique. Son style est pur et coulant, plein de douceur et d’harmonie, quelquefois pompeux et magnifique, mais quelquefois aussi traînant, diffus et surchargé d’ornements qui le déparent. Son éloquence n’était pas propre aux discussions de la tribune et du barreau ; elle s’attache plus à flatter l’oreille qu’à émouvoir le cœur. On est souvent fâché de voir un auteur estimable s’abaisser à n’être qu’un écrivain sonore, réduire son art au seul mérite de l’élégance, asservir péniblement ses pensées aux mots, éviter le concours des voyelles avec une affectation puérile, n’avoir d’autre objet que d’arrondir des périodes, et d’autre ressource pour en symétriser les membres, que de les remplir d’expressions oiseuses et de figures déplacées. Comme il ne diversifie pas assez les formes de son élocution, il finit par refroidir et dégoûter le lecteur.... Il ne persuade ni n’entraîne, parce qu’il parait plus occupé de son art que des vérités qu’il annonce…. Malgré ces défauts, auxquels ses ennemis en ajoutent beaucoup d’autres, ses écrits présentent tant de tours heureux et de saines maximes, qu’ils serviront de modèles à ceux qui auront le talent de les étudier. C’est un rhéteur habile, destiné à former d’excellents écrivains, c’est un instituteur éclairé, toujours attentif aux progrès de ses disciples et au caractère de leur esprit. » Voyage d’Anacharsis, chap. 8. Voyez aussi l’Essai sur les Éloges, chap. 7, etc.

V. Causa distribuitur. C’est ainsi que Cicéron s’attache à prouver, dans la Milonienne, chap. 13, que son client n’a point dressé d’embûches à Clodius, et que ce dernier eu a dressé à Milon ; que Milon n’avait aucun motif de haine contre Clodius, tandis que Clodius en avait un très-grave contre l’accusé.

VIII. Defensor autem. Cicéron réfute ainsi le reproche de mauvaise conduite adressée Muréna,pour lequel il plaidait, pro Muren., chap. 6.

XIII. Deindc necessitudo. C’est l’intention qui excuse ou qui aggrave l’action. Mais comment sonder les replis du cœur humain, sans s’exposer à un grand nombre de méprises, toutes les fois que l’intention n’est pas exprimée. Les hommes sont naturellement portés à penser que celui qui a voulu l’action en a voulu aussi toutes les suites. Cette propension est souvent un obstacle insurmontable qui s’oppose au triomphe de l’innocence et de la vérité. Il faut être doué de beaucoup de pénétration et de sagacité, pour juger de ce que pensait intérieurement un accusé, au moment de commettre un délit, si cet accusé n’était pas familiarisé avec le crime. L’homme de bien, chargé de prononcer sur le sort d’un prévenu, ou d’éclairer la conscience des juges, doit, avant d’examiner l’intention, dans l’intérêt de l’accusé, du corps social et du genre humain, écarter les préjugés d’habitude, devenir étranger à ses propres passions, comme à celles des autres ; et si, après le plus mûr examen, il n’est pas absolument content de lui-même, il ne doit jamais aller au delà du doute. C’est la voix de sa conscience qui lui dit alors : Arrête,, et crains de prononcer. Tu veux sauver riimocence, prends garde de laisser échapper le coupable ; tu désires punir un coupable, prends garde de frapper l’innocent. Dans cette pénible alternative, ne confonds jamais l’horreur que le crime inspire, avec celui (pfon accuse de l’avoir commis ; et si tu dois être entrainé par l’erreur, la plus excusable sera toujours celle qui absout, plutôt que celle qui condamne ; celle qui conserve, plutôt que celle qui détruit. Le repentir peut entrer dans l’âme du coupable que tu conserves, et lu ne rappelleras pas à la vie l’innocent que le glaive des lois aura sacrifié. — Je suis persuadé que l’auteur du Traité de l’Invention était, ainsi que tous les rhéteurs anciens, pénétré de ces principes, et que les moyens multipliés qu’il indique à l’orateur ne sont point, comme bien des gens se l’imaginent, des moyens subtils et artificieux de trouver le crime où il n’est pas.

XV. In multas causas. En faisant une aussi longue énumération des lieux communs, Cicéron n’avait certainement pas en vue ces détails insignifiants qui s’adaptent indifféremment à toutes les causes, et qui dès lors n’appartiennent à aucune.

XIX. Prœtoriis exceptionibus. Le préteur de la ville ne rendait point de jugement, excepté dans les affaires importantes ; mais c’était lui qui donnait action aux plaideurs, et les adressait au tribunal qui convenait à leur cause.

XX. Recuperatoris judicio. Le préteur déléguait quelquefois un juge qui, en vertu de sa commission, connaissait des causes dans lesquelles il s’agissait du recouvrement et de la restitution des deniers et des effets des particuliers. Ce juge était ap[ielé rrcuperalor, et le jugement qu’il rendait était nommé judicium recuperatorium. La cause de Cécina, qu’on trouvera au tome ii des Œuvres de Cicéron, fut plaidée devant une commission composée de rccuperatores. On voit aussi dans ce passage que les récupérateurs prononçaient également sur les dommages et intérêts, puisque le chevalier qui a eu la main coupée réclame un dédommagement.

XXI. Possessio heredum secundorum est. On pouvait, dans les cas déterminés par la loi, casser un testament après la mort du testateur : car les personnes qu’il y nommait pouvaient mourir avant lui, où n’avoir pas la capacité requise. D’après ces considérations, on permit de désigner des seconds et même des troisièmes héritiers, qui se remplaçaient les uns les autres.

XXVI. Me… vicisse moleste ferebat.

Ne me dis point qu’elle est et mon sang et ma sœur.
Mon père ne peut plus l’avouer pour sa fille :
Qui maudit son pays renonce à sa famille ;
Des noms si pleins d’amour ne lui sont plus permis ;
De ses plus chers parents il fait ses ennemis ;
Le sang même les arme en haine de son crime ;
La plus prompte vengeance en est plus légitime, etc.

Corneille, les Horaces, act. VI, sc. 6.

La réponse du vieil Horace à l’accusation de Valère, acte V, sc. 3, est plus éloquente sans doute que ne l’étaient les déclamations qu’on faisait sur ce sujet dans les écoles de Rome. Le même discours n’est qu’ébauché par file-Live, 1, 26 ; notre grand Corneille en a fait un chef d’œuvre de pathétique et de dignité.

XXX. Porcam sustinuit. Cet ancien usage est fidèlement conservé dans l’Énéide, viii, 639 :

Inter se posito certamine, reges
Armati Jovis ante aram, paterasque tenentes
Stabant, et cœsa jungebant fœdera porca.

Plusieurs auteurs prétendent que l’on immolait un porc, et non pas une truie. Voyez les notes de Servius et de Piérius sur les vers précédents. On peut aussi, pour avoir une juste idée de la solennité qui accompagnait les traités, consulter encore Virgile, Énéide, liv. XII, depuis le vers 166 jusqu’au vers 216.

XXXII. Si qua rostrata navis… Toute la difficulté roule sur le sens que l’on suppose que le législateur attachait au mot deprehensa ; mais il est peu probable qu’un homme sensé eût jamais prononcé la confiscation contre un vaisseau jeté par la tempête dans le port de Rhodes. Voyez ce que dit Aristote, dans le premier livre de sa Rhétorique, chap. 13, sur l’intention du législateur.

Ex deliberationis partibus. On sait que les trois genres de cause et les trois genres de style se trouvent fort souvent réunis dans un seul et même discours. Vous pouvez, par exemple, louer la vertu ; vous pouvez aussi en prendre la défense contre ceux qui l’attaquent ou qui la persécutent ; vous pouvez enfin la persuader à ceux oui la négligent on qui hésitent à la pratiquer. Il est aisé de voir ici combien les trois genres oratoires se rapprochent l’un «le l’autre. En défendant un accusé, on a quelquefois occasion de faire l’éloge de sa conduite présente ou antérieure, et cette partie de la défense rentre nécessairement dans le genre démonstratif. Les anciens eux-mêmes, auteurs de cette division, avaient reconnu les premiers que souvent les trois genres se confondent. Us ont dit la même chose des trois génies de style.

XL. Meretrix coronam auream ne habeto. Si habuerit, pubtica esto. Hermogène, qui cite le même exemple, fait consister l’ambiguïté dans l’accent : Ἑταίρα χρύσια εἰ φοροίη, δημόσια ἔστω. Meretrix coronam auream si ferat, publica esto. L’accusateur prononce le mot δημοσία (dêmosía) avec l’accent sur la pénultième, et par cela même, il prétend que la courtisane soit vendue ou qu’elle devienne la propriété de la république. Le défenseur met l’accent sur l’antépénultième, et dit qu’il faut prononcer δημόσια (dêmósia), et par conséquent que c’est l’or, et non pas la courtisane, que la loi ordonne de mettre en vente.

XLV. Derogare, ou exrogare, c’est abolir une partie de la loi par une loi contraire, abrogare, c’est annuler entièrenment une loi : subrogare, c’est ajouter à une loi ; obrogare, c’est présenter une loi qui en abroge une autre. Voyez sur ces mots les Antiquités grecques et romaines de Sam. Pitiscus, et les Commentaires du P. Proust sur les livres oratoires de Cicéron, ad usum Delphini. Paris, 1687.

XLIX. Alexandrum. Alexandre, tyran de Phères en Thessalie, déclara la guerre aux Macédoniens et fit Pélopidas prisonnier. Malgré les précautions qu’il prenait pour sa vie, il fut tué par Thébé sa femme, qui s’était mise à la tête de la conjuration contre le tyran. Voyez le chap. 35 du Voyage d’Anacharsis.