De la fréquente Communion.../Partie 1, Chapitre 4

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Chez Antoine Vitté (p. 245-249).

Chapitre 4


qui sont ceux qui meritent d’assister à la messe, selon S Denys.

response. Si v ous aviez bien compris l’esprit veritable de cette sainte discipline, qui s’observoit à la naissance de l’eglise, non seulement vous vous seriez abstenu de la rapporter comme vous estant favorable, mais vous auriez facilement reconnu, qu’il ne se peut rien concevoir qui soit plus contraire à vos maximes, et qui ruine davantage toutes vos pretensions. Car que sert-il de nous dire, qu’avant la celebration des mysteres, on chassoit tous ceux qui n’estoient pas disposez à recevoir l’eucharistie, si vous ne nous enseignez, qui estoient ceux qu’ils n’y jugeoient pas disposez. Et s’il se trouvoit, qu’ils eussent mis de ce nombre, non seulement ceux, qui ne font pas profession de vivre vertueusement, (à qui neantmoins vous conseillez la frequente communion, ainsi que je le feray voir,) mais ceux mesmes, qui estoient une fois tombez de l’estat d’une vie sainte et chrestienne, quoy qu’ils eussent dessein d’y r’entrer : non seulement ceux, qui portans à la haste aux pieds d’un prestre leurs habitudes enracinées, et leurs crimes encore tous vivans, doivent, selon vous, estre aussi-tost admis à l’eucharistie, mais ceux mesmes, qui s’estans desja retirez de la vie contraire à la vertu, ne sont pas encore purifiez des images qui leur restent de leurs déreglemens passez : non seulement ceux, qui sont remplis de l’amour d’eux-mesmes, mais aussi ceux, qui n’ont pas encore l’amour divin, pur, et sans aucun meslange : non seulement ceux, qui sont si attachez au monde que de merveille ;

mais tous ceux, qui ne sont pas encore parfaictement unis à Dieu seul, et entierement irreprochables.

si, dis-je, il se rencontroit, que toutes ces personnes eussent esté chassées du sacrifice, cette sainte discipline feroit-elle voir autre chose, sinon, que ceux que vous admettez, ou plustost que vous poussez à la frequente participation des mysteres ; ne devroient pas seulement y assister, selon le sentiment de ces grands saints, que vous confessez avec tous les catholiques au commencement de ce discours, nous devoir servir de regle. Je ne desire pas que vous m’en croyez, mais escoutons tous deux vos propres tesmoins ; et principalement celuy d’entr’eux qui vous en peut le mieux informer, comme estant le seul qui ait escrit particulierement de ces choses. Le grand S Denis declare ce que vous rapportez, qu’apres l’evangile, et la lecture des saintes lettres, ceux, qui n’estoient pas disposez à recevoir l’eucharistie, estoient mis dehors : mais parce que vous avez oblié de nous dire, quels estoient ces gens-là, que l’on mettoit hors de l’eglise, il faut que ses paroles vous l’apprennent ; ouvrez donc les yeux et les oreilles du cœur, et voyez si vous pourrez soustenir la splendeur de ces esclairs, et le bruit de ce tonnerre. Cette doctrine est-elle conforme à la vostre ? Et si ce grand saint avoit preveu tous vos excez, et tous les desordres que vous voulez establir, (comme l’esprit qui l’animoit les prevoyoit bien) les auroit-il peu estouffer avec des paroles plus pressantes ?