Dictionnaire historique, critique et bibliographique/1re éd., 1766/Zuingle (ulric)

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ZUINGLE, (Ulric ou Huldrich né à Vildehausen en Suisse, le 1er. de Janvier 1487, apprit les langues a Berne, & • continua ses études à Rome, à Vienne & à Bâle. Apres avoir fait son cours de Théo logie, il fut Curé à Glaris en 15o6, & ensuite dans un gros Bourg nom mé Notre Dame des Hermites : c’é toit un lieu de dévotion fort fa meux, où les Pélerins venoient en foule & faisoient beaucoup d’offran des. Zoi g’e y découvrit d’etranges abus, & vit que le peuple étoit dans des erreurs grossieres sur l’efficacité des pélérinages, & sur une foule d’autres pratiques ; il se déchaina COIltIC Voyez. contre ces abus. Tandis qu’il s’occu poit de cette réforme, Leon X fai soit publier en Allemagne des Indul gences par les Dominicains , & en Suisse par un Cordelier Milanois. zuingle , fâché que ce Moine lui eut été préféré , commença à déchirer le voile qui couvroit quelques pra tiques superstitieuses. Il attaqua en suite non-seulement l’autorité du Pape , le Sacrement de Pénitence , le mérite de la foi , le péche origi nel, l’effet des bonnes œuvres , mais encôre l’invocation des Saints, le sa crifice de la Messe , les loix Ecclé siastiques , les vœux , le célibat des Prêtres & l’abstinence des viandes. Zuingle s’attira les invectives du Clergé de son pays par ces nouveau tés ; mais il avoit pour lui la Ma gistrature. Il engagea le Sénat de - Zurich à s’assembler , pour conférer touchant la Religion ; on alla aux voix : la pluralité fut pour la réfor mation. On attendoit en foule la sentence du Sénat , lorsque le Gref fier vint annoncer que Zuingle avoit gagné sa cause ; tout le peuple fut dans le moment de la Religion du Sénat. ce changement fut confirmé dans plusieurs autres assemblées. Les Magistrats abolirent successivement la Messe & toutes les cérémonies de l’Eglise Romaine. Ils ouvrirent les Cloîtres ; les Moines rompirent leurs vœux, les Curés se marierent , & zuingle lui-même épousa une riche veuve. Voilà le premier effet que produisit dans le Canton de Zurich la réforme de Zuingle. Il étoit fort occupé de la difficulté de concilier le sentiment de Carlostad sur l’Eu charistie , avec les paroles de J. C., qui dit expressément : Ceci est mon Corps. Il eut un songe dans lequel il croyoit disputer avec le Secretaire de Zurich , qui le pressoit vivement sur les paroles de l’institution : il vit paroître tout à coup un fantôme blanc ou noir , qui lui dit ces mots ; Lâche que ne réponds-tu ce qui est écrit dans l’Exode ; L’AGNEAU EST LA PAQUE , pour dire qu’il en est le signe. Cette réponse du fantôme fut un Tome IV. triomphe ; & zuingle n’eut plus de difficulté sur l’Eucharistie. Il enseigna qu’elle n’etoit que la figure du Corps &duSangdeJ.C. :iltrouvadans l’Ecriture d’autres exemples où le mot Est s’employoit pour le mot signifie : tout lui parut alors facile dans le sentiment de Carlosta i. L’ex plication de Zuingle , favorable aux Sens & à l’imagination , se ré pandit en Allemagne , en Pologne , en Suisse , en France, dans les Pays Bas , & forma la Secte des Sacramen taires. Plusieurs Cantons resterent constamment attachez à la Religion Romaine , & la guerre fut sur le poinr d’éclater plus d’une fois en tre les Catholiques & les Protes , tans ; enfin les Cantons de Zurich & de Berne défendirent de transpor ter des vivres dans les cinq Cantons Catholiques , & on arma de part & d’autre. Zuingle fit tous ses efforts pour éteindre le feu qu’il avoit allu mé ; il n’étoit pas brave & il fal loit qu’en qualite de premier Pasteur de Zurich il allat à l’armée ; il sen toit qu’il ne pouvoit s’en dispenser , & il ne doutoit pas qu’il n’y périt. Une Comete , qui parut alors , le confirma dans la persuasion qu’i1 seroit tué ; il s’en plaignoit d’une maniere lamentable , & publioit que la Comete annonçoit sa mort & de grands malheurs sur Zurich. Mal gré les plaintes de Zuingle, la guerre fut résolue , & il fut obligé d’accom pagner une armée de 2o mille hom mes. Les Catholiques se mirent der- : riere un défilé par où les ennemis ne pouvoient passer que l’un après l’autre. La plus grande partie de l’armée des Zuingliens périt les ar mes à la main , & l’autre fut mise en fuite. Zuingle fut du nombre des morts :ce futle 11 Octobre 1531 ; il avoit environ 44 ans. Les Catho liques brulerent son corps, tandis que son parti le regardoit comme un martyr. Ce Réformateur n’étoit ni savant, ni grand Théologien, ni bon Philosophe , ni excellent Litté rateur ; il avoit l’esprit juste maisbor né ; il exposoit avec assez d’ordre ses Nn pensées ; mais il pensoit peu profon dement si l’on en juge par ses ou vrages qui ont été recueillis en 5 vol. in-fol. par les soins de Gualthe rus. Zuingle adressa quelque-temps avant sa mort une conteslicn de foi à Françoi, I, dans laquelle en expli quant l’article de la vie eterneile, il dit à ce Prince qu’il doit espérer de voir l’assemblée de tout ce qu’il y a eu d hommes saints, courageux & vertueux, dès le commencement du monde. * Là vous verrez, dit-il, les , , deux Adam, le racheté & le ré , , dempteur ; vous verrez un Abel, , , un Enoch ; vous y verrez un Her , , cule, un Thesee, un Socrate, un , , Aris ide, un Antigonus, &c., , La réforme introduite en Suisse par Zuingle fut adoptée dans plusieurs autres pays ; on seconda ses efforts à Berne, à Bâle, à Constance, &c. Geneve la reçut en partie, & la différence qu’il y avoit entre les dogmes de Zuingle & ceux de Cal vin n’altéra jamais la communion de leurs partisans.