Dictionnaire national ou Dictionnaire universel de la langue française/A

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. Première lettre de l’alphabet français, est aussi la première des voyelles. On dit la lettre a, le caractère a, le signe a, le son a, la voyelle a, la vocale a, ou tout simplement l’a. Le son de l’a, la nature de l’a, la valeur de l’a, l’intonation de l’a. Une panse d’a, les jambes, les pieds de l’A. Un grand a, un petit a, un a majuscule, minuscule, romain, italique, gothique. Un a long, grave, ouvert, circonflexe, bref, doux, aigu, moyen ou demi-grave, nasal, aspiré, sourd, muet, affaibli, adouci, initial, médial, final, privatif, augmentatif ; marqué, surmonté d’un accent ; bien ou mal prononcé, accentué, écrit, tracé, formé, gravé, dessiné, peint, etc. Appuyer sur l’a, placer un accent sur l’a, accentuer la voyelle a, etc., etc. La lettre a, chez presque toutes les nations, devint une lettre sacrée parce qu’elle était la première. (Voltaire.) M. de Chateaubriand a fort poétiquement remarqué que la vocale a s’était particulièrement adaptée à la famille des idées rurales. (Ch.Nodier.) A proportion de la délicatesse et de l’organe, on trouvera plus ou moins de modifications entre l’a aigu et l’a grave. (J. J. Rouss.) Les Hébreux appellent l’a alpha ou le bœuf, et en même temps le savant, l’inventeur. (Court de Géb.) Nos imprimeurs ont conservé l’usage de mettre un accent circonflexe sur l’a de l’ablatif de la première déclinaison latine. (Dumarsais.) L’a est la plus sonore des voyelles. (Plis.) Les deux jambes inclinées de l’A ressemblent aux racines végétales de l’alphabet chinois. (Bern. de St Pierre.) J’ai observé que dans les pays froids, comme en Russie, la plupart des terminaisons des noms sont en a. (ld.) L’a nasal s’écrit différemment dans autre et embrasser. (Duclos.) Plusieurs grammairiens admettent un a nasal, encore le bornent-ils à la syllabe initiale et négative qui répond à l’a privatif des Grecs. (Id.)

— Quoique A soit un substantif du genre masculin, comme toutes les autres voyelles, il ne prend pas d’s au pluriel. On dit deux a, trois a, plusieurs a, les a, des a longs, des a brefs, de grands a, de petits a, des a malfor-


més, etc., etc. Homère il est vrai, ne s’assujettit pas à cette règle de l’harmonie, qui rejette le concours des voyelles, et surtout des a. (Volt.) J’ai entendu reprocher avec justice six a consécutifs dans un vers des Scythes ; mais on a repris bien injustement cet excellent vers de Boileau où il y a cinq a rapprochés : Traçât à pas tardifs un pénible sillon. (De Belloy.) Quand on dit deux a, trois a, le mot a est employé matériellement. C’est comme si l’on disait : le caractère a répété deux fois, trois fois. Deux a, c’est deux fois le même signe. Il y a des a longs, des a brefs, de grands a, de petits a ; c’est-à-dire qu’on donne au signe a des formes plus ou moins grandes, et au son qu’il représente une prononciation longue ou brève. Mais, dans toutes ces façons de parler, il n’est point question de plusieurs sons de la voix humaine ; c’est toujours le même signe exprimant un son individuel, et voilà pourquoi il ne prend pas la marque du pluriel.

— Considéré comme signe graphique, l’A n’est-il pas l’angle formé par l’écartement des lèvres vues de profil A, et à l’ouverture de la bouche vue de face ?

— Envisagé sous le rapport de son intonation, l’A prend deux inflexions différentes l’une, qui le rend bref ou aigu ; l’autre, qui le rend long ou grave.

— L’a bref ou aigu se rapproche beaucoup de l’è ouvert comme on peut le voir dans les mots acacia, abattre, amateur, amiable, escadre, etc. Les syllabes dont il fait partie affluent dans notre langue, en raison de la douceur qu’il communique au langage. Aussi le trouve-t-on répété jusqu’à trois ou quatre fois dans le même mot, sans que cette répétition blesse en rien l’oreille, comme on la voit dans apparat, falbala, Canada, anagramme, quadrature, alactaga, etc.

— L’a grave ou long tient un peu de l’o doux, ainsi qu’on peut s’en convaincre en prononçant les mots cadre, théâtre, mât, diable, fable, sabre, etc. L’a grave redoublé ne s’emploie que dans un très-petit nombre de mots, parce que, trop multiplié, il donnerait de la rudesse et même de la trivialité au lan-


gage tandis que, ménagé avec art, il rompt l’uniformité de l’a doux, et contribue par conséquent à la variété des sons.

— L’a marqué de l’accent grave est toujours doux : Voilà, à Paris, çà et là, holà.

— L’a surmonté de l’accent circonflexe, dit M. Napoléon Landais, se prononce toujours la bouche très ouverte, ce qui veut dire qu’il est toujours grave. M. Landais se trompe, car il existe une foule de circonstances où, même avec ce signe, il devient aigu. Cela a principalement lieu dans les 1res et 2e personnes des passés définis, et dans la 3e personne de l’imparfait du subjonctif des verbes en er : nous allâmes, vous allâtes, qu’il allât. La plupart des grammairiens veulent absolument entendre un â grave, dans ces sortes de mots. Cette prononciation, qui pouvait être bonne il y a cinquante ans, est aujourd’hui tout à fait fausse et ridicule c’est l’accent picard transporté à Paris. Il est facile de sentir la différence et la douceur de cet a, en le comparant avec l’a véritablement grave, comme dans nous gâtâmes, vous gâtâtes, qu’il gâtât, où l’on sent que le premier a est bien autrement grave que le second. D’ailleurs, dire que l’accent circonflexe placé sur l’a suffit pour le rendre grave, c’est oublier que cet accent est bien moins un signe d’intonation qu’un signe étymologique. V. accent.

— Quelques grammairiens, dit l’auteur de la Nouvelle Prosodie, confondant sans doute l’orthographe avec le son ou sa durée, s’imaginent découvrir une différence sensible entre pacha, falbala, sofa, acacia, etc., et leurs pluriels pachas, falbalas, sofas, acacias. Suivant eux, l’a est bref dans les premiers, et long dans les derniers. Ici, bien certainement la vue trompe l’oreille, et le préjugé la raison ; car il est impossible de trouver la moindre différence d’intonation entre pacha et pachas, sofa et sofas, acacia et acacias. Que l’oreille, dégagée de l’influence de la vue, soit abandonnée à elle-même, elle sentira, bientôt tout ce que cette prétendue distinction a de vain et de chimérique.

— L’a conserve le son qui lui est propre partout où cette voyelle ne se trouve pas combi-


née, soit avec les voyelles o, u, soit avec les consonnes nasales m, n.

aa. Les deux a d’Isaac et d’Aaron prennent chacun une intonation moyenne. Cependant Racine n’a fait Aaron que de deux syllabes. Partout ailleurs les deux a sont doux et forment chacun une syllabe entière, comme dans Baal.

æ. Ce caractère, dont on faisait autrefois un fréquent usage, se prononce comme é fermé. Nous l’avons conservé dans quelques mots seulement, tels que Cobæa, etc.

ae. L’a immédiatement suivi de l’e conserve toujours son intonation douce, et forme à lui seul une syllabe entière, comme dans aérien, aéronaute, aérolithe, Israël, Raphaël. Il n’y a d’excepté que le mot Caen, qui se prononce kan.

ai, ay. L’a suivi de l’i ou de l’y forme un son dérivé tout à fait semblable celui de l’e, comme dans lait, dais, trait, maison, j’aimai, je payai, j’essayai, j’aidai, faisan, bienfaisance. Cependant l’a est nul dans douairière, et l’a dans daine ne se fait pas sentir. Le tréma placé sur l’a détache l’a de cette lettre, comme dans Caïn, maïs, aïeul, baïonnette. etc. — Les sons aie, aye, qui sont toujours très-ouverts, font entendre à leur suite le son mouillé de l’y ce qui forme une espèce de diphthongue sourde sur laquelle ai s’appuie comme dans balayeur payeur, métayer layette, je bégaie, j’effraie, je paie, que j’aie, etc., qu’on prononce bàlai-ieur, que j’ai-ie, etc. On trouvera dans le dictionnaire tous les mots qui s’écartent de cette règle ou qui s’y conforment.

ao. L’a suivi de l’o conserve ordinairement son intonation douce, et forme à lui seul une syllabe entière : cacao, chaos, Pharaon, etc. Mais l’o est nul dans faon, paon, Laon, Craon, et leurs dérivés. Dans taon, St Laon, août, aoûteron, Saône, c’est l’a qu’on élide. Néanmoins l’a se fait sentir dans aoûier et son participe aoûié ; quant au mot aoriste, l’usage est partagé.

au. L’a suivi de l’u forme un son dérive tout à fait semblable à celui de l’o et prend deux inflexion, l’une forte, comme dans peau, pause, sceau, saule, saut, etc. ; l’autre douce, comme dans aurore, automne, laurier, taureau, j’aurai, augmenter, austère, etc. Le tréma sur l’u détache cette lettre de l’a, et chaque voyelle reprend alors son intonation particulière, comme dans Esaü, Saül, Danaüs, etc.

am, an, aim, ain. L’a suivi de m ou de n prend souvent une intonation différente et forme alors une voyelle qu’on appelle nasale, parce que le son qu’elle produit part un peu du nez, comme dans ambassadeur, champ, danser, etc. Aim et ain forment souvent aussi un son nasal identique de in essaim, faim, pain, bain, saint, etc.

— L’a prend différentes formes, soit dans l’écriture, soit dans l’impression, mais les plus ordinaires sont : l’A majuscule, l’a minuscule et l’a italique. Ces caractères, dont les deux derniers ne diffèrent du premier que par la courbure des lignes et l’arrondissement successif des angles, sont imités de ceux qui étaient en usage dans l’ancien alphabet des Grecs et des Romains. On met un grand A au commencement de tous les noms propres qui ont cette lettre pour initiale Adam, Angleterre, Amérique, etc.

— Une panse d’A, ne se dit que d’un petit a, à cause de sa ressemblance avec une panse (ventre, gros ventre), et parce que l’a commence à se former par une panse, ou par cette partie de la lettre qui est arrondie. De là, on dit proverbialement il n’a pas fait une panse d’a, pour dire il n’a pas formé une seule lettre, et figurément il n’a rien fait. Si je voulais recevoir tous les ans vos quatre mille livres, sans faire une panse d’A, ni œuvre quelconque de mes mains pour votre service, vous seriez l’homme le plus propre à me laisser faire. (Voiture.) On dit aussi, ne savoir panse d’A. Un Belge épais de sens et de structure, ne sachant panse d’A. (L’abbé Dourneau). Ici, ne sachant panse d’a est pour ne sachant faire panse d’A. Depuis deux jours, mon copiste n’a pas fait une panse d’A. (Acad.) Cet homme n’a fait de sa vie une panse d’A. (Id.) Il laisse croire que cet ouvrage est de lui mais il n’en a pas fait une panse d’A, il n’y a pas fait une panse d’A. (Id.)

— Ne savoir ni A ni B, autre façon de parler proverbiale, pour dire ne savoir pas même les premières lettres de l’alphabet, et fig. être d’une ignorance profonde : Puisque tu ne sais ni A ni B, comment enseigneras-tu les autres et. moi ? (Raynouard.) Je veux un mari qui ne sache ni A ni B. (Molière.) Ci-dessous gît M. l’abbé, qui ne savait ni A ni B. (Ménage,) Mais en latin le bon abbé n’y entendait ni A ni B. (Du Belloy.)

— Marqué à l’A, s’est dit aussi proverbialement, pour désigner un homme d’une probité éminente, proprement un homme de la principale, de la meilleure fabrique par allusion aux monnaies, celles qui se fabriquent dans l’hôtel des monnaies de Paris étant marquées de la lettre A.

— Depuis A jusqu’à Z, depuis le commencement jusqu’à la fin.

— N’en être qu’à l’abc. Renvoyer quelqu’un à l’abc V. ABC.

— Très-souvent la lettre A se met pour les mots auxquels elle sert d’initiale ; elle s’emploie aussi comme un simple signe qui indique le premier objet d’une série, ou l’une des parties distinctes d’un objet. Les imprimeurs marquaient autrefois d’un A la première feuille d’un volume.

— En Algèbre, A et les 1res lettres de l’alphabet servent à désigner des quantités connues, et en géométrie il indique l’une des parties d’une figure qui sert à quelque démonstration (l’angle A, l’angle B d’un triangle). Il me paraît absurde de faire dépendre l’existence de Dieu d’A B divisé par Z, (Volt.) Il y a une géométrie matérielle qui se compose de lignes, de points, d’A+B, avec du temps et de la persévérance, l’esprit le plus médiocre peut y faire des prodiges. (Chateaub.)

— Dans un dessin graphique, A désigne une des parties de l’objet dont on donne la description.

— Dans la philosophie scolastique, A indique une proposition générale affirmative.

— A était la première des huit lettres nundinales, et c’est encore la première des lettres dominicales dans le calendrier Julien. Il désigne le dimanche dans le calendrier des livres d’offices de l’ancien rituel.

— A dans les antiphonaires indique les endroits où il faut élever la voix.

— Dans le commerce, A signifie accepté, quand il s’agit d’une lettre de change.

— Sur l’ancre d’un vaisseau, A signifie assure ou assurance.

— En chimie A se met quelquefois pour désigner l’azote, et en minéralogie, pour indiquer l’aluminium.

— En médecine, A, prép. grecque, qui signifie de rechef et en dessus, servait dans les formules à exprimer la répétition qui doit se faire de la chose indiquée, en remontant successivement d’un des ingrédients à l’autre. Aujourd’hui, lorsqu’on prescrit plusieurs remèdes qui doivent être pris à la même dose et mélangés, on les inscrit à la suite l’un de l’autre, on les unit par une accolade devant laquelle on écrit aa qui alors veut dire de chaque… telle dose.

— A, en astron., sert à désigner l’étoile la plus considérable d’une constellation.


— En musique, A, première note du tétracorde hyperboléen, répond à la 6e note de notre gamme, la. En tête d’un morceau de musique, il indique la partie de la haute-contre, alto. J’appelle A la première octave comprise entre l’ut d’en bas et le suivant vers la droite. (J. J. Rouss.)

— Sur les monnaies de France, A désigne la Ville de Paris.

— Sur les maisons, A surmonte d’un trait horizontal A A A est, une marque placée par l’administration municipale, pour indiquer un abonnement au balayage ou un alignement projeté. — On trouvera à leur ordre alphabétique toutes les abréviations dans lesquelles la lettre A est suivie d’autres lettres, comme A. M. (Assurance mutuelle), etc.

— A. v. a. (étym. lat. habet ou ital. ha, il a), 3e pers. du prés. de l’indic. d’avoir, n’est jamais marqué de l’accent grave par lequel on distingue la préposition a (voir ce mot), et se prononce comme a simple, c’est-à-dire qu’il est toujours doux. Ce qui prouve qu’il vient du lat. habet ou de l’ital. ha (il a). C’est qu’anciennement on écrivait il ha. Enfants, oyez une leçon nostre langue ha cette façon, que le terme qui va devant volontiers régit le suivant. (Marot.) C’est sans doute un défaut, dit Voltaire, qu’un verbe ne soit qu’une seule lettre, et qu’on exprime il a raison, il a de l’esprit, comme on exprime il est à Paris, il est à Lyon.

— Le mot a marque l’idée principale de possession : il a des richesses. (La Bruy.) Le lion a l’air noble. (Buff.) L’oiseau-mouche a la fraîcheur des fleurs comme il a leur éclat. (Id.) Chaque homme a son génie. (Volt.)

— Il sert aussi à conjuguer les temps composés de la plupart des verbes : Il y a un Dieu : donc il a créé l’homme (Bossuet.) La nature a mis le sucre tout pur dans la sève d’un roseau. (B. de St.-P.) La nature a pris durant la nuit une vigueur nouvelle. (J. J. Rouss.) Il a écouté avec ravissement le ramage de ce chantre des forêts. (Buff.) La nature a réuni sur le plumage du paon toutes les couleurs du ciel et de la terre. (Id.)

— Souvent aussi il se joint avec son propre participe : Leur zèle n’a eu que peu d’imitateurs. (La Bruy.) Il a eu pour lui le témoignage de sa conscience. (Fléch.)

— Il s’emploie aussi impersonnellement avec y : il y a en Laponie plusieurs espèces de mousses comestibles, farineuses, sucrées, parfumées. (B. de St-P.) Ces murmures forestiers, ces cris, ces chants de joie et de reconnaissance, me disaient d’une manière bien Intelligible il y a ici un Dieu. (Id.) Il y a des gens qui parlent un moment avant que d’avoir pensé. (La Bruyère.)

— Marot a dit : Sur le printemps que la belle Flora les champs couverts de divers fleurs a : Au lieu de : Au printemps, alors que la belle Flore a couvert les champs de diverses fleurs. Cette inversion et ce report de a à la fin du verbe, condamnables partout ailleurs, seraient encore permis dans le style marotique. Pour les différents sens de a, verbe V. avoir.

A. préposition (étym. lat., ad.) Il est toujours surmonté de l’accent grave pour le distinguer de a, 3e pers. du verbe avoir, et se prononce comme ce dernier avec une intonation douce. De même que toutes les autres prépositions, à se place entre deux mots qu’il joint et entre lesquels il établît une relation. Sa principale fonction est de marquer un rapport d’attribution, de tendance, de direction, de transport vers un lieu, un but, un objet, une fin idéale ou réelle. En un mot, il désigne le terme où va aboutir et où doit s’arrêter le mouvement dirigé vers lui. Joint à son complément, il répond exactement au datif des Latins, et très-souvent aussi à leur préposition ad. Dans l’origine, cette préposition était probablement destinée à marquer un rapport entre les objets sensibles : aller à Lyon, à l’église, au marché, retourner à la ville, rentrer au logis, etc. On l’a étendue par degré aux objets immatériels, parce que les idées abstraites, exprimées par des substantifs, ont pour notre imagination presque autant de réalité que les objets physiques, et l’on dit : le chemin est glissant de la vertu au vice, comme on disait : le chemin est pénible d’ici à la montagne. De même, quoiqu’on n’aille pas à l’entendement, à l’intelligence, à la vertu, au vice, comme on va à la guerre, au marché, à l’église, l’analogie a fait employer la même préposition devant tous ces substantifs, bien qu’ils représentent des idées opposées. c’est ainsi que la même préposition est usitée dans des cas bien différents ; et les dernières acceptions ressemblent quelquefois si peu en apparence aux premières, que, si l’on ne saisit pas bien, ou si on laisse échapper le fil de l’analogie, on ne peut plus rendre raison de l’usage. C’est précisément ce qui est arrivé à l’Académie et à M. Napoléon Landais, aussi bien qu’à la plupart de nos grammairiens et de nos lexicographes. Ne s’étant pas donné la peine de rechercher quel pouvait être le caractère essentiel, primitif, fondamental, invariable, de la préposition à, et, ce caractère une fois bien reconnu, bien déterminé, de le suivre et de le retrouver partout et dans toutes les positions, ils ont complètement perdu le fil de l’analogie, et se sont laissés aller jusqu’à voir dans ce petit mot des multitudes presque effrayantes de rapports. Citons-en quelques exemple., afin de prouver toute l’élasticité des principes de l’Académie et de ceux qui l’ont copiée sans réflexion. A, dit l’Académie, marque tendance ou direction, dans aller à Rome, à l’église, au marché. Voilà qui est bien, et vous seriez presque tenté de croire que c’est là, peut-être, la seule, l’unique propriété de cette préposition. Mais patience, vous n’y êtes pas, et l’Académie vous ménage plus d’une surprise. Un ancien secrétaire perpétuel de l’illustre assemblée, Régnier Desmarets, après avoir fait une longue énumération des sens prétendus différents de la préposition à, ajoute : « En voilà quelques-uns des principaux et des plus ordinaires ; car pour les marquer tous, il faudrait faire passer en revue presque tous les mots français, n’y en ayant guère avec lesquels elle ne serve à former quelque phrase, par la propriété qu’elle a de pouvoir être substituée à la place de la plupart des prépositions. » Cet académicien avait une haute idée de la valeur des mots, et l’Académie a suivi pas à pas la doctrine de son ancien secrétaire. Jugez-en plutôt. L’Académie nous a dit tout à l’heure, s’il vous en souvient, que dans aller à Rome, à l’église, au marché, a marquait tendance, direction. Eh bien ! changez les mots, et dites par exemple : canne à sucre, à ne marquera déjà plus ni tendance, ni direction, mais il marquera, au dire de l’Académie, l’espèce, la qualité. Changez les mots et dites : clou à crochet, table à tiroir, lit à colonnes ; et à marquera la forme, la structure ou l’accessoire d’une chose. Changez les mots, terre à blé, moulin à farine, pot à eau, boîte à thé ; et à marquera la destination, l’usage. Changez les mots : armes à feu, fusil à vent, moulin à eau, machine à vapeur, instrument à vent ; et à marquera ce qui sert spécialement, ce qui est nécessaire à l’emploi d’une machine, d’un instrument. Changez les mots : à genoux, à pieds joints, à tâtons, à reculons ; et à marquera la manière d’agir, la manière d’être des personnes et des choses. Changez les mots….. Mais en changeant ainsi les mots, on arriverait infailliblement à épuiser le Dictionnaire, et alors la préposition à exprimerait donc autant de rapports différents qu’il y a de mots dans la langue ? Non, dirons-nous, il est impossible qu’un aussi petit mot marque tant et de si différentes choses. Les prépositions indiquent les rapports, abstraction faite de tout terme antécédent et conséquent : elles ne sont que l’exposant, le signe d’un rapport considéré d’une manière abstraite et générale. Fidèle à l’engagement que nous avons pris de tout expliquer, nous allons tâcher de bien faire connaître la valeur du mot qui nous occupe, et pour cela nous n’aurons pas besoin de passer en revue tous les mots de la langue, ainsi que le fait l’Académie.

— La préposition à, nous l’avons déjà dit, se place entre deux termes qu’elle joint par le sens et entre lesquels elle établit un rapport : aller à Naples, rendre à César ce qui appartient à César. Ici, à établit évidemment un rapport entre aller et Naples ; entre rendre et César, etc. Quel est ce rapport ? On le voit, il n’est autre que celui d’attribution, de tendance. Mais, il ne faut pas l’oublier, la préposition ne sert qu’à indiquer le second terme du rapport, c’est-à-dire qu’elle montre le terme où va aboutir et où doit s’arrêter le mouvement dirigé vers lui. L’espèce ou la nature du rapport est déterminée par le verbe ou l’adjectif qui précède la préposition, comme cela a lieu dans les expressions, aller à, mener à, conduire à, donner à, rendre à, arriver à, tendre à, atteindre à, revenir à, jeter à, retourner à, utile à, favorable à, agréable à, conforme à, convenable à, propre à, nuisible à, etc., etc. Il est naturel que le schisme mène à l’incrédulité, et que l’athéisme suive l’hérésie. (Chateaub.) On dut nécessairement arriver de là au mépris des écrivains du siècle de Louis XIV. (Id.) Le cheval aime l’homme, il aspire à lui plaire. (Rosset.) Dieu ne défend pas les routes fleuries, quand elles servent à revenir à lui ; ce n’est pas toujours par les sentiers rudes et sublimes de la montagne que la brebis égarée retourne au bercail. (Chateaub.) Si l’on jette à la mer une poule morte, le requin s’en approche aussitôt. (B. de S.-P.) D’autres philosophes ont attribué les mœurs des animaux, comme celles des hommes, à leur éducation. (Id.) Les espèces d’huîtres même qui adhèrent aux rochers nagent quand elles viennent de naître. (Id.) Un végétal est semblable au polype animal. (Id.) De toutes les religions qui ont jamais existé, la religion chrétienne est la plus poétique, la plus humaine, la plus favorable à la liberté, aux arts et aux lettres. (Chateaub.) Toutes ces phrases sont construites régulièrement, et le mot à y remplit sa fonction naturelle. Mais il arrive souvent que l’adjectif ou le verbe qui exprime le rapport d’attribution, de direction, marqué par à, ne se trouve pas exprimé dans la phrase, soit par la tendance qu’ont toutes les langues à la concision et à la brièveté, soit parce que les lacunes de l’ellipse sont faciles à remplir. Et voilà précisément ce que l’Académie n’a pas vu ou n’a pas voulu voir, et ce qui l’a entraînée dans ce que nous appellerions volontiers des hérésies grammaticales.

— Quand on dit : Canne à sucre, Vache à lait, Pays à pâturages, Homme à projets, Femme à vapeurs, Manchettes à demeure, Glace à la vanille, la préposition à ne marque ni espèce, ni qualité, mais elle annonce seulement un rapport dont les mots qui suivent complètent


l’idée. En disant : Canne à……, je puis tout aussi bien ajouter d’autres mots que sucre et dire : canne à dard, canne à épée, canne à ressort, canne à pomme d’or, canne à pomme d’argent, canne à pome d’ivoire, canne à vent, canne à vendre, avoir une canne à la main, etc., etc. A ne marque donc pas plus l’espèce, la qualité, que la structure, l’accessoire, l’action de vendre, de porter, etc., etc. Toutes ces expressions sont elliptiques, c’est-à-dire qu’elles sont des manières de parler abrégées. En se donnant la peine de les ramener à leur construction pleine, on voit que le mot à y remplit comme partout, comme toujours, sa fonction naturelle. En effet, une canne à sucre, est une canne (propre à) produire du sucre. Une vache à lait, est une vache (propre) à (donner du) lait. Un pays à pâturages, est un pays (propre) à (fournir des) pâturages. Un homme à projets, est un homme (sans cesse occupé) à (faire des) projets. Une femme à vapeurs, est une femme (sujette) à (avoir des) vapeurs. Des manchettes à dentelles, ce sont des manchettes (au bout desquelles on a mis de la) dentelle. Enfin, une glace à la vanille, est une glace à (laquelle on ajoute de la) vanille. Voilà donc la plénitude de la construction analytique, et c’est faute d’y avoir eu recours que l’Académie a doné une si étrange interprétation à la préposition à.

— Il en est de même dans les expressions suivantes : Terre à blé. Marche à la volaille. Moulin à farine. Cuillère à pot. Bouteille à encre. Voiture à six places. Fille à marier. Maître à danser. Bois à brûler. Tabac à fumer. Tenir à honneur, à injure. (Acad.) Dans toutes ces expressions, ce n’est pas à qui fusrque la destination, l’usage, comme le prétend l’Académie ; mais bien les mots destine, propre, serrant, etc., sous-entendus, ainsi que le prouvent les analyses suivantes : Terre (propre) à (y semer du) blé. Marche ({{corr|destiné|destinée) à la volaille. Moulin (destiné) à (faire de la) farine. Cuillère (destinée) à (puiser dans le) pot. Bouteille’destinée) à (contenir de l’) encre. Voiture (destinée) à (contenir) six places. Fille (propre) à marier. Maître (pour apprendre) à danser, à chanter. Bois (propre) à brûler. Tabac (propre) à fumer. Verre (propre) à boire. Tenir (comme chose propre) à (faire) honneur. La méthode que nous suivons, de réintégrer les mots sous-entendus, a deux grands défauts : elle est nouvelle, elle contient de plus la critique de la méthode adoptée jusqu’à ce jour, et que la prévention, la paresse, l’indifférence pour le progrès, s’obstinent à conserver, comme elles consacrent tant d’autres abus sous le nom d’usages. Il est certain que les mots que nous avons rétablis sont réellement sous-entendus, puisqu’on les trouve souvent exprimés dans tous les écrivains : C’est l’eau qui fait jouer les machines propres à moudre, à forger, etc. (Baudot de St-Martin). Machine qui sert à élever l’eau (Laveaux). Machine destinée à comprimer l’air (Libes). Ce bois est propre à bâtir (Acad.) Ce moellon est propre à faire des fondements. (Id.) Cette étoffe est propre à teindre. (Guizot).

— A, selon M. Landais, se met à la place des prépositions après, avec, vers, pour, dans sur, par, selon, environ, etc. et a le même sens qu’elles. Il ut faut pas trop en vouloir à ce lexicographe s’il avance une opinion aussi erronée. Il se fait ici l’écho de l’Académie et de la plupart des Dictionnaires. Ainsi, suivant M. Landais et ceux qu’il copie, les prépositions seraient comme des sentinelles qui se remplacent tour à tour, et dont l’une peut bien faire les fonctions de l’autre. Mais comment les lexicographes ne se seraient-ils pas trompés sur ce point, eux qui se sont trompés sur tant d’autres, ainsi qu’on pourra le voir dans cet ouvrage, qui est comme l’inventaire de leurs erreurs, de leurs aberrations ! Ils ont constamment erré, parce qu’ils se sont plus occupé du matériel des mots que des idées qu’ils expriment. C’est surtout l’ignorance de l’ellipse, une des plus simples et des plus fréquentes figures de grammaire, qui les a jeté dans ce chaos. De ce qu’on peut dire manger un morceau après un autre, vite d’en conclure que lorsqu’on dit manger à morceau, la préposition à tient la place de la préposition après. Il faut peu de chose, comme on le voit, pour leur faire prendre le change. Parce que l’usage nous permet de supprimer quelques mots dans cette dernière façon de parler, à n’est plus pour à. Quelle étrange idéologie et que Montaigne parlait censément quand il disait : « A la mode de quoi nous sommes instruits, il n’est pas merveille si les écoliers ni les maîtres n’en deviennent pas plus habiles. » Mais nos lexicographes, au lieu de se marteler le cerveau pour trouver de quelle autre préposition le mot a occupe la place dans la phrase que nous avons citée, ne devraient-ils pas plutôt chercher à en connaître la véritable valeur ? Ils verraient que cette expression, manger morceau à morceau, est une expression elliptique, et que c’est un abrégé de manger (en faisant succéder un) morceau à (un autre) morceau. Il n’y a donc aucune espèce d’analogie, sous le rapport de la construction entre manger un morceau après un autre, et manger morceau à morceau, et il faut vraiment aimer à se repaître de chimères pour rapprocher des choses aussi hétérogènes. Mais les lexicographes ne sont pas gens à y regarder de si près. Malheureusement les vocabularistes ne sont pas les seuls qui pensent que telle préposition peut être ainsi mise à la place de vingt autres ; Quelques philosophes professent aussi cette doctrine. Dans un ouvrage d’ailleurs fort remarquable qu’il vient tout récemment de publier sur les Pensées de Pascal, M. Cousin dit que à est employé au lieu de pour dans les phrases suivantes : L’homme est à lui-même le plus prodigieux objet de la nature. Connaissez donc, superbe, quel paradoxe vous êtes à vous-même. Ce joug n’est léger qu’à lui et à sa force divine ; et il ajoute qu’il tient la place de par dans ces deux autres phrases : Se laissant conduire à leurs inclinations et à leurs plaisirs. Ne nous laissons pas abattre à la tristesse. Toutes ces phrases, notez-le bien, sont de Pascal ; eh bien ! ce grand nom n’empêche pas M. Cousin de venir nous dire que l’auteur des Provinciales n’a pas su faire un usage convenable du mot à. Nous sommes fâchés de voir M. Cousin adresser un pareil reproche à l’un de nos plus grands écrivains, à celui qui est regardé à juste titre comme le créateur du style français. Examinons donc avec une scrupuleuse attention les phrases en litige. L’homme est à lui-même le plus prodigieux objet de la nature. Certes, Pascal était libre de mettre pour ; mais il a probablement eu ses raisons en lui préférant à. Massillon a dit : Toute notre vie est une recherche éternelle de nous-mêmes ; on dirait que tout est fait pour nous, que tout le reste n’est rien que par rapport à nous. On dit aussi journellement : Un homme ne fait rien que par rapport à lui, que par rapport à ses intérêts. Il est facile d’après cela de retrouver les mots qu’il a plu à Pascal de supprimer. L’homme est à lui-même le plus prodigieux objet de la nature, est donc un abrègé de : L’homme est (par rapport) à lui-même le plus prodigieux objet de la nature. Sans doute qu’en disant : l’homme est à lui-même, l’homme est pour lui-même, l’homme est par rapport à lui-même, etc., etc., on exprime la même pensée ; mais ce sont là trois constructions différentes et qui n’ont rien de commun entre elles que le sens. Nous avons soumis ces phrases un juge bien compétent, au président de la Société Grammaticale de Paris ; son avis, est tout à fait conforme au nôtre. « Voici à cet égard, dit M, Palla, la nuance que je crois apercevoir : d’abord les deux premières phrases expriment l’opinion que a de lui-même en se comparant au reste de la nature ; mais il me semble que, dans la première, il y a quelque chose de plus que dans la seconde, la supériorité de l’homme y ressort comme une vérité a priori, et le jugement qu’il porte de lui-même s’y trouve comme une conséquence de cette vérité ; son opinion dérive de la loi immuable de son intelligence ; il ne saurait penser autrement. Dans la seconde phrase, au contraire, on pourrait ne voir qu’une vérité contingente, une de ces opinions de l’homme qui se forment quelquefois au point de vue variable de ses sensations, de ses passions, de ses intérêts ; un de ces jugements relatif et de circonstance, suivant lesquels l’homme se considère tantôt comme si grand et tantôt comme si petit : La phrase de Pascal, dans la forme comme au fond, me fait l’effet d’exprimer quelque chose de plus abstrait, de plus métaphysique, de plus rigoureux ; c’est en quelque sorte un axiome emportant avec soi sa démonstration. La phrase de M. Cousin semblerait laisser encore quelque prise au doute, à la discussion ; elle appartient davantage au domaine du sentiment. On peut s’étonner d’abord de voir établir de pareilles distinctions sur le simple changement de ces deux petits mots pour et à ; mais si l’on étudiait leurs différents emplois, je suis persuadé qu’on reconnaîtrait aisément que, dans une foule de cas, ils ont pour effet de produire des nuances analogues à celles ci-dessus, quelquefois même d’en établir de plus tranchées. La relation exprimée par à est, je crois, plus directe, plus intime, plus profonde, plus absolue : pour marque un lien moins étroit, un rapport moins immédiat et moins nécessaire. Pour est plus propre à désigner la destination, l’utilité ; à marque mieux le rapport d’appartenance, de jonction, de conformité ; il est plus général et plus métaphysique. Quand La Fontaine a dit, dans sa fable des Deux pigeons :

Amants….
Soyez-vous l’un à l’autre un monde

Il savait bien que pour, mis à la place de à, aurait affaibli l’expression de son idée. Quand je dis cet homme est pour moi, j’annonce qu’il est de mon avis, qu’il me prêtera son appui dans une circonstance donnée, mais si je dis qu’il est à moi, ne vais-je pas beaucoup plus loin ? N’exprime-je pas qu’il est entièrement à ma discrétion, que je puis compter sur lui en tout et pour tout ? — De même, en disant que telle chose est à moi, j’indique qu’elle m’appartient réellement et actuellement, tandis que si je dis qu’elle est pour moi, on peut douter si je la possède déjà, ou si elle m’est seulement destinée. Je dirais : le ciron est à l’éléphant ce que l’hysope est au cèdre, parce qu’il s’agirait ici d’établir un fait en quelque sorte mathématique, une vérité indépendante de l’action réciproque des êtres ainsi comparés entre eux. Pour ne conviendrait pas, parce qu’il semblerait, au contraire, impliquer cette dernière idée. En résumé, et comme je l’ai dit en commençant, dans la phrase de M. Cousin : l’homme est pour lui-même le plus prodigieux objet de la nature, ces mots pour lui-même me paraissent singulier : à ses propres yeux, suivant son expression, selon son opinion (sens qui n’impliquerai pas nécessairement que l’homme fût dans le vrai, absolu en se considérant comme l’objet le plus prodigieux de la création). Dans la phrase de Pascal l’homme est à lui-même, etc., je vois non-seulement que l’homme a cette opinion, mais qu’elle constitue, aux yeux du philosophe qui la rapporte, une vérité nécessaire et hors de contestation. Cette dernière phrase a, donc un sens plus étendu, plus profond, plus dogmatique, que l’autre ; et M. Cousin a modifié et affaibli la pensée de Pascal en substituant la préposition pour à la préposition à. Quant à la troisième phrase : l’homme est par rapport à lui-même, etc., elle rentre certainement dans le sens de celle de Pascal, mais elle a moins de vigueur et de précision. » Connaissez donc, superbe, quel paradoxe vous êtes à vous-même est également un abrégé de Connaissez donc, superbe, quel paradoxe vous êtes (par rapport) à vous-même, c’est-à-dire par rapport à votre condition véritable que vous ignorez. La même analyse nous servira pour cette autre phrase : Ce joug n’est léger qu’à lui et à sa force divine. N’est-ce pas, en effet, un abrégé de : Ce joug n’est léger que (par rapport) à lui et à sa force divine ? Voyons maintenant les autres phrases : Se laissant conduire à leurs inclinations et à leurs plaisirs, Ne nous laissons pas abattre à la tristesse. D’abord nous ferons observer qu’un grand nombre d’écrivains ont employé cette construction : Je me laisse conduire à cet aimable guide : (Racine.) Pourquoi ne vous laisseriez-vous pas toucher à la bonté de votre Dieu ? (Massillon.) Des lecteurs dont le jugement ne se laisse pas maîtriser à la fortune. (Fléchier.) Ne vous laissez point abattre à la douleur. (Fénelon) Pourquoi vous laissez-vous laissez-vous abattre aux rigueurs de la fortune ? (Id.) Nous conviendrons qu’aujourd’hui on préfère employer par ; mais s’ensuit-il que à dans les phrases ne Pascal aussi bien que dans celles que nous venons de citer, soit mis à la place de par, comme le prétend M. Cousis avec la presque totalité des grammairiens et des lexicographes ? Nous sommes loin de le reconnaître, et c’est selon nous une étrange manière de rendre compte de la nature et de l’emploi d’un mot, que de dire qu’il est mis pour tel autre. Non, à ne tient pas la place de par dans les phrases citées, puisque, Ne nous laissons pas abattre à la tristesse, est un abrégé de Ne nous laissons pas abattre (en nous abandonnant) à la tristesse. A est donc bien pour à, ici comme partout, et nous ne ferons à Pascal ni à tous nos plus grands écrivains le reproche d’avoir employé d’avoir employé certains mots pour d’autres ; même à défaut d’une explication naturelle, nous préférerions avouer sincèrement notre ignorance. Bien certainement on peut dire et l’on dit en effet : ne nous laissons pas abattre par la douleur ; mais qu’est-ce que cela prouve ? Qu’on peut exprimer la même pensée en employant des mots différents ; c’est ainsi que deux voyageurs arrivent au même endroit après avoir parcouru deux routes opposées. Nous terminerons là cette critique nous croyons en avoir dit assez pour faire voir que la préposition à n’a qu’une seule fonction, qu’une seule valeur et qu’elle la conserve dans toutes les positions. Pour cela, il nous a suffi de faire en quelque sorte l’anatomie des phrases, c’est-à-dire de les ramener leur construction pleine. Il serait à souhaiter dit Dumarsais que les auteurs de dictionnaires eussent travaillé selon cette idée, ils se seraient épargné bien des remarques ou fausses ou inutiles, et auraient éclairci bien des passages qu’ils laissent dans les ténèbres.

— À s’emploie souvent devant les mots de, des. À de tels hommes rien ne saurait être impossible. (Acad.) A de plus hauts partis Rodrigue doit prétendre. (Corn.) A de moindres faveurs les malheureux prétendent. (Racine.) A des bœufs gémissants l’Egypte rend hommage. (L. Racine.) Leur âme ne s’abaisse jamais à des déguisements. (Molière.) A des temps si avantageux pour la république succédèrent ceux d’Adrien. (Volt.) Il est très rare que des premiers ministres s’abaissent à de si honteuses lâchetés, découvertes tôt ou tard. (Id.) Pygmalion se défie des gens de bien, et s’abandonne à des scélérats. (Fén.) Mais il faut remarquer que à et de ne sont jamais unis qu’il n’y ait ellipse, et cela se conçoit. En effet, puisque ces deux prépositions indiquent des rapports différents, elles doivent conséquemment avoir des compléments différents, et ne peuvent se réunir que parce qu’on sous-entend les mots qui devraient les séparer. Dire, comme certains lexicographes, que l’emploi de la préposition de après la préposition à constitue ce qu’on appelle un gallicisme, c’est absolument ne rien dire du tout. Si l’on ne trouve pas l’explication de ces sortes de tournures dans les dictionnaires, à quoi donc sont-ils utiles ? Corneille a dit : Ne vous abaissez pas à la honte des larmes. Or, s’il eût dit à des larmes, il eût fait usage d’une construction plus abrégée, et cette phrase reviendrait évidemment à celle-ci : Ne vous abaissez pas à (la honte) des larmes. Corneille nous donne donc les moyens d’analyser toutes les phrases semblables. À de tels hommes rien ne saurait être impossible, c’est pour : rien ne saurait être impossible à l’effort, à la puissance, au pouvoir de tels hommes. A de plus hauts partis Rodrigue doit prétendre, c’est pour : Rodrigue doit prétendre à (l’avantage, à l’honneur) de partis plus hauts. Leur âme ne s’abaisse jamais à des


déguisements, c’est-à-dire, leur âme s’abaisse jamais à (l’emploi) des déguisements, etc.

Arbre à fruit ou à fruits. Faut-il mettre le nom qui suit la préposition au singulier ou au pluriel ? Les dictionnaires ne donnent pas la solution de cette difficulté, qui est cependant assez embarrassante, et il serait même fort inutile de les consulter sur ce point, tant ils sont peu d’accord non-seulement les uns avec les autres, mais le plus souvent aussi avec eux-mêmes. En voici la preuve. Veut-on savoir, par exemple, si l’on doit écrire des fruits à pépin, ou à pépins, des fruits à noyau ou à noyaux, des groseilles à maquereau ou à maquereaux des plantes à fleur au à fleurs etc. etc ? Eh bien qu’on ouvre les dictionnaires à ces différents mots, et l’on verra qu’ils emploient le singulier et le pluriel dans les mêmes circonstances. C’est ainsi qu’on trouve dans l’Académie, au mot pépin : Les fruits à pépin n’ont pas réussi cette année. Les arbres à pépin se plaisent dans cette terre. Et au mot noyau : Il y a des fruits à pépins, et des fruits à noyau. Dans Napoléon. Landais, au mot poire : Sorte de fruit à pépin ; et au mot pomme sorte de fruit à pépins, (Nous ne parlons pas de la différence d’orthographe suivie dans ce dictionnaire pour le mot pépin, qui est écrit ici sans accent, tandis qu’au mot pépin on le trouve avec un accent). Boiste et Laveaux écrivent fruit à pépins, et Noël et Chapsal, fruit à pépin. Voilà pour le seul mot pépin. La même chose a lieu pour les autres mots. Nous n’en citerons que quelques exemples : Des fruits à noyau. (Acad.) Des fruits à noyaux (Boiste). Des groseilles à maquereau. (Acad., Boiste et Nap. Land.) Des groseilles à maquereaux. (Lav.) Acacia, arbre à fleurs blanches et odorantes. (Acad.) Tournesol, plante à grande fleur radiée. (Acad.) Coq-des-jardins, plante vivace à fleur flosculeuse. (N. Land.) Dahlia, il y en a plusieurs espèces : l’une à grandes fleurs rouges, (Id.) etc. Ces citations, qu’il nous serait facile de multiplier suffisent sans doute pour donner une idée de l’incertitude qui règne sur ce point, et par conséquent de l’intérêt que présente sa solution. Pour savoir à quel nombre on doit mettre le nom qui suit la préposition à, il faut principalement s’attacher à distinguer le point de vue sous lequel il est employé.

— Quand deux noms sont unis par à, le second se met au singulier toutes les fois qu’il ne sert qu’à spécifier la nature du premier. Un arbre, des arbres à pain. Une arme des armes à feu. Un bateau, des bateaux à vapeur. Des bêtes à laine. Une boite, des boîtes à thé, à double fond. Une boussole, des boussoles à cadran. Une canne, des cannes à sucre, à épée, à pomme d’or, à pomme d’argent, à pomme d’ivoire. Un cadran, des cadrans à reflexion, à réfraction. Un clou, des clous à crochet, à tête, à grosse tête, à tête ronde, à ardoise, à soufflet. Un couteau, des couteaux à ressort, à gaine, à manche d’ivoire. Une cuillère, des cuillères à pot, à soupe, à café. Un fusil, des fusils à vent. Un homme, des hommes à imagination. Une horloge, des horloges à pendule. Un instrument, des instruments à vent. Une machine, des machines à vapeur. Une maison des maisons à porte cochère. Une manchette, des manchettes à dentelle. Une montre, des montres à répétition. Une mouche, des mouches à miel, à viande. Un moulin, des moulins à farine, à poudre, à papier, à eau, à vent, à foulon. Un oiseau, des oiseaux à bec fin. Un plat, des plats à barbe. Une pierre, des pierres à fusil, à rasoir. Une pension des pensions à vie. Une pompe, des pompes à feu, à vapeur. Une pomme, des pommes à cidre. Une rente, des rentes à perpétuité. Un sac, des sacs à ouvrage. Une terre, des terres à blé, à foulon. Une table, des tables à tiroir. Une vache, des vaches à lait.

– Quand à l’idée de spécification se joint l’idée de pluralité, le nom qui suit la préposition à, se met au pluriel. Une bague, des bagues à diamant, une bête, des bêtes à cornes. Une chasse, des chasses à porteurs. Un chandelier, des chandeliers à branches. Un chapeau, des chapeaux à grands bords. Une femme des femmes à prétention, à sentiments, à vapeurs. Des gens à bons mots, à scrupules. Un homme des hommes à paradoxes, à préjugés, à projets, à systèmes. Un instrument des instruments à cordes. Un lit, des lits à colonnes. Un pays, des pays à pâturages. Un serpent, des serpents à sonnettes. En ramenant, comme nous l’avons fait plus haut, ces sortes d’expressions à leur intégrité, on comprend aisément pourquoi le nom qui suit à doit être au pluriel.

Exceptions. On trouve cependant dans les écrivains certains mots mis au singulier et au pluriel dans des circonstances tout à fait identiques. Les exemples ne nous manqueront pas. En voici un certain nombre : Dans le noisetier, les fleurs à pistil sont éloignées des autres. (J. J. Rouss.) Dans le châtaignier, les fleurs à pistils sont remplacées par deux ou trois fruits très-près l’un de l’autre. (ld.) Dans le buis, les fleurs à étamine ont un calice à trois feuilles, avec deux petites à la pointe ? (Id.) Le mûrier porte les fleurs à étamine sur un chaton. (Id.) Les Grecs et les Romains ont tiré de l’Asie la plupart des arbres à fruit que nous cultivons aujourd’hui. (B. de St-P.) Les flancs de la colline sont tapissés de groupes d’arbrisseaux à fruits ou à fleurs. (Id.) Les branches à fleur du genêt sont courtes et n’ont point d’épines. (J. J. Rousseau.) En Amérique les plantes à fleurs sont sans nombre. (Chateaub.) Jean-Jacques m’a fait observer, au bas des feuilles de tous les fruits à noyau, deux petits tubercules qui les caractérisent. (B. de St-P.) Les arbres du verger, chargés de fruits à noyaux et à pépins, sont encore une autre richesse. (Volt.) Nous passâmes un torrent desséché ; son lit étroit était rempli de lauriers-roses et de gatiliers, arbuste à feuille longue, pâle et menu, dont la fleur lilas, un peu cotonneuse, s’allonge en forme de quenouille. (Chateaub.) Le bec-de-grue à feuilles de vigne a des feuilles ovales, montantes et pubescentes, qui ont l’odeur du baume quand on les frotte. (J. J. Rouss.) Les plus grands courants d’eaux vives qu’il y ait au monde sortent tous des montagnes à glace. (B. de St-P.) La nature a multiplié les montagnes à glaces dans la voisinage des pays chauds. (Id.) Nous avons des montagnes à glace qui peuvent porter tous les végétaux du nord, et des vallées à réverbère qui peuvent produire la plupart de eaux du midi. (Id.) Les fleurs à réverbère sphérique sont celles dont les pétales sont figurés en portions de sphère. (Id.) Les patas à queue courte. (Buffon.) Quels astres merveilleux, si toutefois ce sont des astres, que ces corps lumineux à longues queues qui traversent les aires des planètes sans déranger leur cous, et emploient des siècles à s’approcher et à s’éloigner du soleil. (B. de St-P.) En citant ces exemples, notre intention n’est nullement de nous étayer de l’autorité des écrivains d’où nous les avons extraits. L’orthographe adoptée dans ces passages est, on le pense bien, plutôt celle des imprimeurs que des écrivains eux-mêmes, et cela est tellement vrai, qu’il n’est pas rare de voir le mêma mot changer d’orthographe en passant d’édition en édition. Aucune règle ne peut donc nous guider en cette circonstance. Le sens seul doit déterminer le nombre qu’il faut employer. En effet, on peut écrire une plante à fleur blanche ou fleurs blanches ; une plante à feuille longue ou feuilles longues ; des arbres à fruit ou à fruits, par la raison qu’on dit très bien la fleur ou les fleurs, la feuille ou les feuilles de cette plante, ces arbres produisent du fruit ou des fruits. En se servant du singulier, on envisage les objets en général ; tandis qu’en employant le pluriel, on les prend dans un sens particulier, individuel. Nous devons faire remarquer cependant que l’usage le plus général est de mettre le singulier, à moins que le gens ne nécessite absolument l’emploi da pluriel, comme cela a lieu pour quelques mots, et entre autres pour le mot noyau. On n’écrira pas, par exemple, en parlant des nèfles, que ce sont des fruits à noyau, puisque, de l’aveu même de l’Académie, ce sont des fruits qui ont plusieurs noyaux ; il faut absolument : les nèfles sont des fruits à noyaux. Mais, bien qu’il suit permis de se servir du singulier ou du pluriel, selon le point de vue de l’esprit, nous n’en pensons pas moins qu’il est ridicule de dire, comme M. Nap. Landais, qu’une poire est une sorte de fruit à pépin, en mettant pépin au singulier, et qu’une pomme est une sorte de fruit à pépins, en mettant ici pépin au pluriel. Il fallait évidemment l’un ou l’autre nombre dans ecs deux cas.

– Jusqu’ici nous avons vu la préposition i toujours placée entre deux noms ; mais il arrive souvent que cette préposition est précédée d’un verbe. Le même principe doit être encore appliqué ici. On écrit avec le singulier aller à pied, aller à cheval, aller à marche forcée, tenir à injure, arriver à grand bruit, etc. parce que le mot qui suit est pris dans un sens général et ne rappelle à l’esprit aucune idée de nombre. Mais on écrit avec le pluriel : sauter à pieds joints, aller à pas précipités, marcher à pas lents, supplier à mains jointes, recevoir à bras ouverts, marcher à petits pas, voguer à pleines voiles, etc., parce que l’idée de pluralité se présente naturellement à l’esprii. Le nombre que l’on doit employer en pareille circonstance étant presque toujours indiqué par le sens, il n’y a donc aucune difficulté à cet égard.

D’homme à homme, d’hommes à hommes. On emploie le singulier ou le pluriel, selon qu’on a dans l’esprit l’idée d’un ou de plusieurs : De voleur à voleur, on parle probité. (Fr. de Neufeb.) De larrons à larrons il est bien des degrés (Id.) Disons-nous nos secrets de compère à compère. (Piron.) De valets à valets, on ne se doit pas taire. (Id.) la différence qui se trouve d’homme à homme se fait encore plus sentir de peuple à peuple. (Marm.) Le consistoire prétendait que la loi en question n’était que de calvinistes à calvinistes non pas de calvinistes à papistes. (Volt.) Reviens becqueter, dans ma main à tes besoins toujours ouverte, le millet choisi grain à grain. (Boisard.) Corsaires â corsaires, l’un l’autre s’attaquant, ne font pas leurs affaires. (La Font.) Il nous semble que le sens exigeait de voleur à voleur, et de larrons à larrons ; car, pour parler probité entre voleurs, il suffit du voleur qui porte la parole et du voleur qui écoute ; mais, pour établir bien des degrés entre les larrons, il faut comparer des larrons avec d’autres larrons. Nous ferons cependant observer que le singulier est peut-être plus fréquent. Les caractères vifs ou lents, gais ou sérieux, se trouvent souvent disséminés dans la même ville de frère à frère, et sont également utiles à la société. (B. de St-P.) Le droit des gens tenant à des mesures d’institutions humaines, et qui n’ont point de terme absolu, varie et doit varier de nation à nation. (J. J. Rouss.) Les magistrats doivent rendre la justice de citoyen à citoyen : chaque peuple la doit rendre de lui à un autre peuple. (Montesq.) De peuple à peuple, il est rarement besoin de tiers pour juger, parce que les sujets de disputes sont presque toujours clairs et faciles à terminer. (Id.) On ne sait si on doit placer plusieurs cartels de défi de roi à roi, de prince à prince, entre les duels juridiques ou entre les exploits de chevalerie. (Volt.)

Sept à huit femmes, sept ou huit femmes. L’Académie s’est prononcée pour la dernière de ces expressions ; quant à M. Landais, il se borne à dire que à signifie environ. Voici l’usage. On emploie à entre deux nembres consécutifs, lorsque le substantif qui suit ces nombres représente une chose susceptible d’être divisée. Trois à quatre heures, quatre à cinq francs, sept à huit mètres, neuf à dix lieues, cinq à six pieds, dix à onze livres de sucre, onze à douze myriamètres, douze à treize ans. Tous ces objets peuvent être fractionnés, c’est-à-dire qu’on peut supposer des parties d’heure entre trois et quatre, des parties de franc entre quatre et cinq etc. etc. Les chevaux de Perse sont si bons marcheurs, qu’ils font très-aisément sept à huit lieues de chemin sans s’arrêter. (Buff.) Les talepotes de Ceylan ont des feuilles de sept à huit pieds de largeur. (D. de St-P.) — On emploie également à entre deux nombres qui ne se suivent pas consécutivement, et qui, par conséquent, laissent supposer entre eux un nombre intermédiaire. Vingt à trente personnes, quinze à vingt francs, mille à douze cents chevaux. Les enfants âgés de dix à douze ans sont susceptibles de raisonnements beaucoup plus étendus. (B. de St-P.) Les cocotiers des îles Séchelles ont des feuilles de douze à quinze pieds de long. (Id.) On a pris aux Allemands sept à huit cents hommes. (Racine.) Si les ennemis viennent de perdre une bataille où il soit demeuré sur la place quelque neuf à dix mille hommes des leurs, il en compte jusqu’à trente mille, ni plus ni moins. (La Bruy.)

— Au lieu de à on peut aussi, dans ce cas, se servir de la conjonction ou. Douze jours après, nous arrivâmes à Erzeron, où nous séjournerons trois ou quatre mois. (Montesq.) Les plus hautes montagnes ne sont non plus capables d’altérer la figure de la terre, que quelques grains de sable ou de gravier sur une boule de deux ou trois pieds de diamètre. (J. J. Rouss.)

— Au lieu de à, on emploie ou, quand la substantif qui suit les nombres représente une chose qui n’est pas susceptible d’être divisée par fractions. Trois ou quatre personnes, quatre ou cinq vaisseaux, six ou sept maisons, neuf ou dix volumes. En effet, on ne aurait diviser une personne, un vaisseau une maison, comme on divise une heure, une année, une lieue, etc. etc. Nous sommes si vains, que l’estime de cinq ou six personnes qui nous environnent nous amuse et nous contente. (Pascal.) Il y avait dans la maison du paysan où je logeais cinq ou six femmes et autant d’enfants qui s’y étaient réfugiés. (B. de St-P.) Je suis étonné de voir jusques à sept ou huit personnes se rassembler sous un même toit. (La Bruyère.) Les deux jeunes bergères assises voyaient à dix pas d’elles cinq ou six chèvres. (La Font.) Le tigresse produit comme la lionne, quatre ou cinq petits. (Buff.) Tel est du moins l’usage le plus général. L’Académie proscrit formellement l’emploi de à dans ces sortes de phrases quoique dans toutes les éditions précédentes de son dictionnaire elle ait été d’un sentiment contraire. Peut-être a-t-elle trop légèrement en ceci cédé à la critique. Il y a certainement une grande différence entre ces deux expressions : j’irai chez vous de sept à huit heures, et il y avait sept à huit femmes dans cette assemblée. La première indique un espace divisible entre sept et huit heures ; la seconde indique un nombre approximatif montant à sept, ou tout au plus à huit personnes. À la vérité, il n’y a point de fraction entre sept ou huit femmes, mais il ne s’agit pas ici d’un nombre entre sept et huit, mais d’une estimation de sept à huit femmes. Celui qui dit : il y avait dans cette assemblée sept à huit femmes, n’est pas certain qu’il y avait sept femmes, mais il assure que le nombre qui s’y trouvait montait peut-être à sept ou tout au plus à huit. Le nombre huit est le seul certain et déterminé ; au lieu que dans j’irai vous voir de sept à huit heures, les deux époques sont déterminées et admettent un intervalle. Il y avait dans cette assemblée sept ou huit femmes, n’exprime pas précisément l’estimation faite du nombre et le terme le plus élevé porté à huit. Cette façon de parler n’affirme rien. C’est comme si l’on disait peut-être y en avait-il sept, peut-être y en avait-il huit, voilà mon estimation, je n’assure pas plus l’un que l’autre. Si l’on veut bien réfléchir sur ces deux phrases, on conviendra que ce sont bien là les nuances qui les distinguent, et que par conséquent on peut employer l’une ou l’autre, suivant les vues de l’esprit. Nous ne serions pas embarrassé de citer de nombreux exemples à l’appui ; nous nous bornerons aux suivants. Cela est admirable : on ne veut pas que j’honore un homme vêtu de brocatelle et suivi de sept à huit laquais. (Pascal.) Il y a dans cette tragédie trois à quatre


actions, trois à quatre espèces d’intrigues mal réunies. (Volt.)

— C’est à vous à, c’est à vous de. La plupart des lexicographes et des grammairiens ont imaginé des cas où l’on doit se servir, tantôt de la première de ces expressions, tantôt de la seconde mais ce qu’ils ont dit à cet égard témoigne plutôt de la chaleur de leur zèle que de la solidité de leurs raisons. Voy. être.

— À se joint encore à d’autres verbes dont il modifie la signification, tels que prétendre à, toucher à, suppléer à, s’occuper à, contraindre à, commencer à, forcer à, demander à, s’empresser à, etc. mais comme nous traiterons de cet emploi à ces différents verbes nous y renvoyons le lecteur.

— À et en avec les noms de lieux. = Devant les noms de villes, bourgs, villages, hameaux, c’est toujours la préposition à qu’on emploie. On dit Aller à Montmorency, à Romainville, à St-Cloud, à Versailles, à Manter, à Rouen, à Bordeaux, à Orléans, à Lyon, à La Rochelle, à Marseille, à Toulon, à Alger, à Rome, à Naples, à Florence, à Madrid, à Londres, à St-Pétersbourg, etc. = Devant les noms de contrées, de pays, de royaumes, on emploie en, si les noms sont féminins. Aller en Asie, en Arabie, en Afrique, en Amérique, en Grèce, en Turquie, en Morée en Russie, en Laponie, en Espagne, en Sicile, en Italie, en Sardaigne, en Allemagne, en Prusse, en Pologne, en Suède, en Norwège, en Hollande, en Belgique, en Angleterre, en Irlande, en Écosse, en France, etc. Il en est de même pour les noms de provinces. Aller en Normandie, en Picardie, en Alsace, en Auvergne, etc. = On se sert de au lorsque les noms de contrées, de royaumes, de provinces, sont masculins. Aller au Japon, au Groenland, au Mexique, au Pégo, au Canada, au Maine, au Perche, au Poitou, etc. On dit cependant : en Portugal, en Danemarck, etc. Voici du reste la règle donnée par les grammairiens pour les noms de contrées, de royaumes. On dit Aller en France, en Allemagne, en Amérique, en Asie, en Portugal, etc. On dit : Aller à la Chine, au Pérou, au Japon, etc. D’où vient cette différence ? Quand on n’a que des rapports très-bornés avec un pays, que l’on y arrive difficilement, et que l’on ne pénètre point dans l’intérieur des terres, ou du moins qu’on y pénètre rarement, on considère ce pays comme un point géographique auquel on aboutit : de là l’emploi de la préposition à. Mais quand on a des relations fréquentes avec un pays, qu’on pénètre facilement dans l’intérieur des terres, on l’envisage sous le rapport de son étendue : de là l’emploi de la préposition en. La Fontaine a donc eu tort de dire :

L’un des trois jouvenceaux
Se noya dès le port allant à l’Amérique.

(Le Vieillard et les trois Jeunes Hommes.)

Il devait dire en Amérique, parce que ce continent ne se présente pas à l’esprit comme un lieu étroit, un point géographique. D’ailleurs, malgré la fréquence des rapports, les premières phrases font loi. Après la découverte des Deux-Indes, on a fait le trajet par mer et l’on est arrivé à la Chine, au Brésil, au Mexique. Mais aujourd’hui on peut dire que les Anglais vont en Chine.

— À et dans. Souvent, dans les mêmes circonstances, on emploie la préposition à ou la préposition dans ; cela a lieu surtout en poésie, quand la mesure le rend nécessaire. C’est ainsi que les poètes disent : Entrer dans le cœur on au cœur des malheureux. Naître dans le sein ou au sein de la grandeur. Laisser dans les mains, ou aux mains de quelqu’un, etc. Eh ! qui peut pénétrer dans le cœur des humains ? (Saurin.) Tant d’espoir n’entre point aux cœurs des malheureux. (Gréb.) Et l’amertume naît dans le sein des plaisirs. (Longepierre.) Je plains le cœur superbe au sein de la grandeur. (Chénier.) Il trouve son devoir dans le sein des plaisirs. (La Chaussée.) Il meurt comblé de gloire au sein de l’infamie. (Chénier.) Livrés dans le fond de leurs palais à de vils esclaves. (Massill.) Il faut au fond des cœurs vous faire un héritage. (La Chaussée.) Mais il ne faut pas croire, avec les grammairiens et les lexicographes, que à et dans bien qu’ils puissent se substituer l’un à l’autre dans certaines phrases, expriment le même rapport. Certainement on peut bien dire : Je partirai dans le mois de mai, ou au mois de mai ; mais la première phrase signifie : je partirai avant la fin ou dans le courant du mois, et par la seconde on fait entendre que ce sera dès le commencement. Ce sont là de ces nuances délicates qu’il ne faut pas perdre de vue.

— L’harmonie, le goût, l’élégance peuvent parfois exiger que la préposition à et son complément soient placés plutôt avant le verbe qu’après, et vice versa. À ce nom je devins furieux. (Th. Corn.) J’aime à vous voir frémir ce funeste nom. (Racine.) Au seul nom de Henri, les Français se rallient. (Voit.) Tous tremblaient au seul nom du roi de Suède. (Id.) Le crime à ses yeux paraît crime. (J. B. Rouss.) Cette obéissance paraît digne croit-il à sa suite indigne de paraître ? (Racine.) Que l’Orient vous voie arriver à sa suite. (Id.)

— Quelquefois à suivi d’un nom avec lequel il forme une expression adverbiale ou une phrase incidente, servant à marquer la simultanéité


de deux actions, se met plus souvent et plus élégamment au commencement de la phrase. À l’arrivée de la reine, la persécution se ralentit. (Boss.) À cette raison, les droits les plus sacrés s’évanouissent. (Mass.) A la lâcheté succède la crainte. (Id.) À ces paroles, Télémaque laisse relever Adraste. (Fén.) A la lueur des éclairs, nous aperçûmes d’autres vaisseaux. (Id.) A quelques-uns l’arrogance tient lieu de grandeur. (La Bruy.) A la fierté, au courage, à la force, le lion joint la noblesse, la clémence. (Buff.) A tous ces traits peut-on méconnaître l’amitié ? (Id.) Mais toutes ces inversions et autres semblables qui sont élégantes dans la prose, cessent de l’être dans la poésie, où elles deviennent presque nécessaires pour distinguer les vers de la prose.

— À doit, en général, se répéter devant chaque complément, que ce complément soit ou un substantif, ou un pronom, ou un verbe. La lecture sert à orner l’esprit, régler les mœurs, et à former le jugement. (Lav.) L’éloquence est un art très-sérieux, destiné à instruire, à réprimer les passions, à corriger les mœurs, à soutenir les lois, à diriger les délibérations publiques, à rendre les hommes bons et heureux. (Fén.) L’homme droit, toujours prêt à servir la patrie, à protéger le faible, à remplir les devoirs les plus dangereux, et à défendre, en toute rencontre juste et honnête, ce qui lui est cher, au prix de son sang, met dans ses démarches cette inébranlable fermeté pas sans le vrai courage. (J. J. Rouss.) On demandait à Galilée à quoi servait la géométrie ; à peser, à mesurer, et à compter, répondit-il : à peser les ignorants, à mesurer les sots, et à compter les uns et les autres. (D’Alemb.) Lorsque les mots sont à peu près synonymes, les écrivains suppriment quelquefois la préposition : C’est ordinairement à deux heures après minuit qu’ils commencent à hurler et crier. (Buff.) Mais quand le sens est comparatif, la préposition est indispensable. Ainsi il faut dire : il n’y a point de poète auquel je m’attache avec plus de plaisir qu’à Horace, et non pas qu’Horace ; néanmoins cette préposition ne se répète jamais quand elle est placée devant deux substantifs formant une seule et même expression, un titre de livre, de tragédie etc. On dira, par exemple : de tous les romans de l’antiquité, c’est à Théagène et Chariclée que je donne la préférence ; Crébillon doit sa renommée à Rhadamiste et Zénobie, car il ne s’agit pas des personnages qui ont porté ce nom, mais d’un roman et d’une tragédie désignés chacun au moyen de deux noms inséparables qui n’éveillent qu’une seule idée. Les poètes se permettent quelquefois de supprimer la préposition ; c’est une licence qu’on doit leur pardonner et dont la mesure du vers leur fait une loi.

— « Anciennement, disent quelques grammairiens, on mettait à devant toutes ces expressions : chaque fois, chaque jour, chaque heure, etc., et l’on disait : à chaque fois, à chaque jour, à chaque heure, etc. Aujourd’hui, l’usage vent que l’on supprime cette préposition. » Cette observation, comme tant d’autres que l’on trouve dans les grammaires, est entièrement denuée de fondement, et les faits prouvent que l’on peut encore dire aujourd’hui, selon le : chaque fois ou à chaque fois, chaque heure ou à chaque heure, etc. = A chaque fois, chaque fois qu’on lui en parle. (Acad.) Je ne me souviens plus du tout des vers du cartouche, et tu me les enverras à la première fois. (Mirah.) Un homme de bien, à chaque heure, à chaque moment, a toujours ses affaires faites. (Boss.) A chaque fois, il se tient prêt. (Id.) A chaque demande et à chaque coup il répondait sans se plaindre. (Id.) On inventait chaque jour de nouveaux plaisirs pour me rendre la vie plus délicieuse. (Fénél.) Ainsi florissait la nouvelle ville d’Idoménée sur ls rivage de la mer ; chaque jour, chaque heure, elle croissait avec plus de magnificence. (Id.) Est-ce là l’hérésie des jansénistes, de nier qu’à chaque fois qu’on fait un péché, il vient un remords troubler la conscience ? (Pascal.)

À se déguise souvent par la contraction qu’il subit en se joignant aux articles le et les, avec lesquels il forme des mots composés qui retiennent la double valeur, des éléments dont ils sont formés. Ces mots sont au, pour à le, et aux pour à les. Au sert pour le masculin singulier, et se place devant tous les mots commençant par une consonne. L’égalité est au cimetière, mais elle n’est que là. (Levis.) Aux sert au pluriel pour les deux genres, et se place devant tous les mots, quels qu’ils soient : Aux petits des oiseaux Dieu donne la pâture. (Racine.) Le lapin se soustrait aisément aux yeux de l’homme. (Rosset.) Nos pères ne connaissaient point la contraction. Ils écrivaient et disaient : Al temps d’Innocent III, pour au temps d’Innocent III ; l’apostoile manda al prodome, pour le pape manda au prud’homme. C’est, dit Dumarsais, le ton obscur de l’e muet, et le changement de l en au, comme mal, maux, cheval, chevaux, qui ont fait dire au au lieu de à le ou al. Ainsi, ces mots composés au, aux, équivalents à la préposition à et à l’article même. Mais la contraction est à présent une règle dans les cas dont nous avons parlé, et cette règle n’est sujette qu’à une seule exception : c’est celle que nécessite l’emploi de l’adjectif tout, car l’usage veut qu’on le place entre la préposition et l’article. On dit sans contraction : à tout le monde, à tous les hommes d’où il suit que ces contractions ne sont pas des articles, mais simplement des mots composés de la préposition et de l’article.

— On dit pot à eau, pot à l’eau, pot d’eau ; pot à lait, pot au lait, pot de lait ; pot à au beurre, pot à confitures, pot aux confitures, pot de confitures ; pot à fleurs, pot aux fleurs, pot de fleurs ; magasin à poudre, magasin à la poudre, magasin de poudre ; bouteille à encre, bouteille à l’encre, bouteille d’encre ; bouteille à vinaigre, bouteille au vinaigre, bouteille de vinaigre ; bouteille à vin de Champagne, bouteille au vin de Champagne, bouteille de vin de Champagne ; panier à raisin, panier au raisin, panier de raisin ; boîte à poudre, boîte à la poudre, boîte de poudre ; boîte à tabac, à bonbons, à confitures, à onguents ; boîte au tabac, aux bonbons, aux confitures, aux onguents ; boite de tabac, de bonbons, de confitures, d’onguents, etc. mais ces locutions ne doivent pas être prises indifféremment l’une pour l’autre ; chacune d’elles a un sens propre et distinct. 1o La préposition à, entre deux noms, indique que le premier est spécialement destiné à un usage déterminé ; ainsi pot à lait veut dire pot spécialement destiné à contenir du lait. 2o En se servant de la préposition à, combinée avec l’article le, la, les, on indique non-seulement la spécialité de la destination et la détermination de l’usage, mais encore l’actualité, l’instantanéité de cet usage. Ainsi, pot au lait, veut dire à la fois pot destiné à contenir du lait, et en contenant au moment où l’on parle. 3o La préposition de, enchérissant sur les deux locutions qui précèdent, les renferme et les complète ; elle indique que l’objet dont on parle repond actuellement et pleinement à son usage, ainsi pot de lait veut dire : pot actuellement plein de lait. Cette triple distinction, aussi facile à saisir qu’elle est importante pour la correction du langage, s’applique à chacune des locutions que nous avons citées, et à toutes les locutions analogues. Nous ne sachons pas qu’elle se trouve suffisamment indiquée, encore moins franchement établie, dans aucun dictionnaire de la langue.

— Nous devons signaler quelques emplois vicieux de la préposition à. Dans certaines provinces, et principalement dans le département de la Charente-Inférieure, on dit : Je viendrai à bonne heure. Il s’est levé à bonne heure. Ces phrases sont incorrectes ; il faut dire : Je viendrai de bonne heure. Il s’est levé de bonne heure. Ne dites pas non plus comme l’Académie : A dix que nous étions, pas un ne refusa. L’Académie, qui a sans doute l’intention de faire adopter ce qu’il y a de mieux, aurait dû dire : Sur dix que nous étions, pas un ne refusa. On ne doit pas non plus supprimer à après certains verbes qui l’exigent, et dire, par exemple : Il ressemble son père. Elle ressemble sa mère. Il faut dire : Il ressemble à son père. Elle ressemble à sa mère. De même ne dites pas : Qui de cinq ôte deux, reste trois. Dites : Qui de cinq ôte deux, reste trois (Omiss. Des Dict.) La répétition de à préposition et de a verbe, employés tour à tour dans la même phrase est insupportable. Cette phrase de La Harpe n’est donc pas sous ce rapport exempte de reproche : C’est raisonner étrangement que de dire à un homme qu’il n’a dû sa célébrité qu’à sa méchanceté, et de l’inciter à renoncer à la seule chose qui l’a rendu célèbre. (Omission de presque tous les Dictionnaires.)

Droit civil. A comparaître d’aujourd’hui à huit jours, à huitaine. Le délai doit être franc, c’est-à-dire comporter le nombre de jours voulu, sans compter celui de la signification, ni celui de la comparution. Ainsi, sur une assignation donnée le 1er d’un mois pour comparaître à huitaine, le demandeur ne peut prendre défaut que le 10 de ce même mois. Cet empli de la préposition à a fait la matière d’un procès jugé au Grand-Conseil au mois de mars 1682. Le Grand-Conseil a décidé que la préposition à excluait du délai le jour où l’acte avait été passé. La raison en est que toutes les fois que la préposition à fixe un terme ou un délai, le jour du terme n’est pas compris dans le délai, parce que cette préposition, de sa nature, met une séparation entre le jour d’après lequel le délai doit commencer et le délai fixé ; d’où il suit que ce jour est exclu du délai.

— À entre aussi comme élément nécessaire dans la composition de certains mots auxquels il communique quelque chose de sa signification ; mais alors il perd l’accent qui le distingue. Aguerrir (rendre propre à la guerre) ; améliorer (faire tendre à un état meilleur) ; anéantir (réduire à néant) ; avocat, que l’on écrivait anciennement advocat (appelé à plaider une cause). Ainsi combinée, cette préposition entraîne souvent redoublement de la plupart des consonnes devant lesquelles elle vient se placer, comme dans les mots : accumuler, affamer, aggraver, allier, annuler, apposition, arranger, asujettissement, attenir, etc. Quelquefois même elle occasionne l’intercalation d’une lettre ou d’un son pour adoucir la trop brusque ou trop sourde rencontre de la lettre qui se combine avec elle, comme dans admettre, adjoindre, acquérir, abhorrer, abjuration, ablution, abnégation, abroge, abstraire, abusif, etc. ; ainsi l’a commande la loi suprême de l’harmonie dans les langues.

— À concourt également former un grand nombre de locutions prépositives ou adverbiales, telles que : à côté de, à cause de, au-delà de, auprès de, autour de, au travers de, à couvert de, à fleur de, à force de, à la faveur de, à l'abri de, à la mode de, à l’insu de, à l’opposé de, à l’exclusion de, à moins de, à raison de, au-dedans de, au péril de, aux dépens de, aux environs de, au-dessus de, au-dessous de, au dehors de, au revers de, au devant de, conformément à, sauf à, quant à, par rapport à, au moins, au plus, à peu près, à mesure, au reste, au surplus, etc., etc V. aux différents mots qui entrent dans la composition de ces sortes de locutions.

A. (étym. celt., a, syncope de ou, eau, rivière). Géogr. Pet. rivière qui a sa source dans le dép. de Loir-et-Cher, et qui se jette dans le Beuvron, près de Chambord. On l'appelle A, dit M. Barbichon dans son Dictionn. géogr., parce que assez près de sa source elle forme une petite île qui a la figure d’un A. Voilà une bien jolie étymologie ! A est tout simplement un nom appellatif de rivière, devenu propre de celle-ci ; on en verra de nombreux exemples dans ce dictionnaire. L'A s'appelle aussi Conon ou Baignon.

AA. Numismat., sur les monnaies de France, désigne la ville de Metz.

AA, dans les ordonn. de médec., est l'abr. d'ana, mot grec qui signifie parties égales.

AA ou AAA, dans l'anc. chimie, signifie amalgame.

AA. (ét. celt., aa, eau, rivière). Géogr. Nom donné à un grand nombre de petites rivières, dont une en France, qui se jette dans la Manche, à Gravelines (Pas-de-Calais) ; et plusieurs en Suisse, en Hollande, en Prusse, et dans divers autres états d'Allemagne. Parfois le nom d'aa est joint à la fin d'un mot dont on peut le détacher à volonté, comme Boulder-aa, Treider-aa, Goulden-aa, etc. V. boulder, treider.

AA (Pierre van der). Géographe et libraire éditeur, établi à Leyde dès 1682, mort vers 1730, a publié un grand nombre de voyages et de cartes.

AA (C.-H.). Ministre luthérien, fondateur de la Société des sciences à Harlem ; né en 1618, mort en 1692.

AABAM. s. m. Mot employé par quelques anciens auteurs comme synonyme de plomb.,

AACEN. Géogr. Ville d'Allemagne sur la Koeken. Desau s'en empara après avoir battu l'arrière-garde autrichienne, le 3 aoùt 1796.

AACH. (pr., a-ak). Géogr. Pet. riv. du gr. duché de Bade, dans le cercle du Lac et du Danube ; prend sa source près de la ville qui porte son nom, et se jette dans la partie du lac de Constance appelée Lac inferieur, à 3 kil. O. de Radolf-Zell, après un cours de 20 kil. du N. O. au S.-E.

— Petite ville du grand duché de Bade, à 20 kil. S. O. de Moskirch, et à 10 kil. O. de Stockach, 506 hab.

AACHEN. (pr. â-â-kenn). Géogr. Ville de Prusse. V. aix-la-chapelle.

AAD. Désert de l'Arabie. V. ahkaf.

AADE ou AA. Géogr. Rivière des Pays-Bas, province du Brabant ; prend sa source à l'E. d'Helmont, et rejoint, à Bois-le-Duc, la Dommel et la Diezen, après un cours d'environ 48 kil. du S.-E. au N.-E.

AADJOUNAH. Hist. V. azouna.

AÆDÉ. (pr. a-é-dé). Myth. Une des trois premières muses.

AAGARD (Nic.). Philosophe, mort en 1657.

aagard (Christian). Poète latin estimé, né à Vihorg (Danemarck) en 1616, mort en février 1664.

aagard (Christian l'ainé). Professeur d'éloquence, secrétaire de l'acad. de Soroé, mort en 1657.

AAGESEN (Svend.), (pr. âgh-tcenn). Auteur d'une histoire du Danemarck, en latin, vivait en 1186.

AAHAUS ou AHAUS (pr. â-a-ouce). Géogr. Petite ville de Prusse, sur l'Aa, à 4 kil. N.-O. de Munster.

AAIBA. s. m. (pr. a-a-i-ba). Bot. Petit arbuste des Indes-Orientales.

AAIN-CHARRIN (pr. a-â-ine-kâ-rine). Géogr. Village de Judée, rebâti de 1692 à 1696.

AAIN-EL-GINUM (pr. a-â-ine-ell-ghi-noumm, et. ar., fontaine des idoles). Géogr. Ville d'Afrique, fameuse par sa fontaine et les fêtes religieuses qu'on y célébrait.

AAKBÉ et DIEMERET. s. m. (pr. d-ak-be, dimm-rett.) Myth. Lieux où les musulmans croient que le diable apparut à Abraham pour le détourner de sacrifier Isaac. Les pèlerins qui vont à la Mecque ou qui en reviennent jettent dans cet endroit sept pierres en maudissant le diable et en disant sept fois : « Dieu est grand ! »

AAKIRCHE. Géogr. Ville du Danemarck (Sceland), au centre de l'Ile de Bornholm.

AAL. s. m. Bot. Nom donné à deux arbres de l'Inde, qu'on suppose appartenir à la famille des térébinthacées, et dont l’écorce sert principalement à aromatiser le vin de sagou.

AALAM. Astrologue persan, vivait au iie siècle.

AALBORG. (pr. a-albor-ke ; ét. Celt., Albor, bordé de rochers). Géogr. Ville ancienne de


Danemarck, chef-lieu du diocèse de ce nom, et le plus considérable après Copenhague et Odensee. Elle s'élève sur le bord méridional du golfe de Lum, et est entourée de fosses ; à 72 k. N .-N .-E. de Viborg.

AALCLIM. s. m. (pr. A-alk-limm). Bot. Comment le définirons- nous ? Les naturalistes disent que c'est une plante grimpante des Indes-Occidentales, et Boiste en fait un canard à queue longue et fourchue du Kamtchatka ; et puis les uns l'écrivent par un c et les autres par un k, oalklim. Le plus grand nombre devant naturellement l'emporter, nous dirons que oalclim est le nom donné par les Hollandais à une espèce de baubinie (et non bauhine, comme l'indique M. Landais) de l'Inde, employée en topique pour les tumeurs et les maladies de l'œil. || Plur. des Aalclims.

AALEN. Géogr. Pet. v. du Wurtemberg, sur la Kocher, a 10 k. S. d'Elwangen. Autrefois ville imperiale libre ; 2,400 hab.

AALESUND. Géogr. Ville et port de Norwege, sur le détroit de son nom.

AALHOLZ. Géogr. Petite ville de Bavière. V. traunstein.

AALQUABBE. s. m. (pr. a-ol-kouabbe ; dér. de aal) . Ichthyol. Les Danois donnent ce nom à la lotte. V. gade.

AALSMEER. Géogr. Village de la Hollande, arr. et a 30 k. S.-O. d'Amsterdam ; 1,800 hab.

AALST ou AALSH. Peintre hollandais, né en 1602, mort en 1658.

aalst (Guillaume). Peintre hollandais, né en 1620, mort en 1679.

AALSTIUS (Jean). Ecrivain, ministre de l'Évangile à Hoorn, en Hollande, au xviie siècle.

AALTEN. (ét. celt., al, bord ; tan, en composition ; ten, riviere). Géogr. Gr. vill. du roy. De Hollande, prov. de Gueldre, arr. de Zutphen.

AAM ou HAAM. s. m. P. et mes. Mesures de capacité pour les liquides employées dans les Pays-Bas. L'aam d'Amsterd. equivaut a litres 155,224. L'aam d'Anvers, à litres 142,19.

AAMA. Roi d'Ethiopie, dans le viiie siècle.

AANDYK. Géogr. Village de Nord-Hollande, sur le Zuyderzee ; l,100 hah.

AANGITCH. s. m. (pr. a-ânn-git-che). Hist. nat. Nom donné à un canard à queue longue et fourchue du Kamtchatka.

AAR. (ét. celt., a, eau, riv. ; rhull, vite, rapide, en lat. Arula). Géogr. La plus considérable des riv. de Suisse, après le Rhin et le Rhône. Cette riv., qui charrie des grains d’or, descend des glaciers du Grimsel et du Schreckhorn, traverse Berne et se jette dans le Rhin après un cours de 256 k. Le prince Charles voulant tenter le passage de cette rivière, est repoussé par les Français, commandés par Ney et Heudele (7 août 1799).

AARAU ou ARAU. (ét. celt., aud, bord ; orau, bord de l'AAR). Géogr. Ville de Suisse, ch.-1. du canton d'Argovie ; s'éleve sur les bords de l'Aar, à 40 k. S.-E. de Bâle ; 4,000 hab.

AARBERG ou ARBERG. (ét. celt., berg, élévation, hauteur ; arberg, hauteur de l'Aar ; ou or, sur ; berg, hauteur, arberg, sur la hauteur). Géogr. Pet. v. de Suisse (Berne), sur un rocher de grès dont la base est baignée par l'Aar, à 14 k. N.-O. de Berne.

AARBOURG ou ARBOURG. (ét. cel !., ar, roc ; burg, ville). Géogr. Pet. v. de Suisse), Argovie), au bord de l' Aar, sur un rocher. Elle est dominée par un chât.- fort ; à 11 k. S.-O. d'Aarau.

AARDENBOURG. Géogr. Ville et port de Zéiande, sur la Zwin ; 1,350 hab.

AARE (Dirk van der), Evêque et seigneur d'Utrecht, au xiiie siècle, compétiteur de Guillaume comte de Hollande, mort prisonnier en 1312.

AAREFUGI . V. arefugi.

AARGAU. V. argovie.

AARHUSIUS (Jac.-Math.). Écriv. célèbre dans le xviie siècle.

AARHUUS. Géogr. Ville de Danemarck, ch.-lieu d'un diocèse du même nom qui embrasse la partie orient. du Jutland ; à 58 k. S.-O. de Viborg ; 6,000 hab.

AARON. Premier gr. prêtre des Hébreux, frère aîné de Moïse, fils d’Amram et de Jochabede de la tribu de Lévi. Né l'an 1574 avant J.-C. ; mort dans le désert sur la montagne de Hor, à l'âge de l22 ans, 1452 ans avant J .-C. l'an du monde 1552.

— Les deux a d'Aaron prennent chacun une intonation moyenne. Cependant Racine n'a fait Aaron que de deux syllabes.

Si du grand prêtre Aaron Joad est successeur.

(Athalie.)

aaron d’alexandrie. Prêtre et médecin, le premier qui ait décrit la petite vérole, vivait vers l'an 22 du xvie siècle.

aaron (Isaac). Interprète de l’emper. Manuel Comnène, pour les langues occidentales : né vers le milieu du xie siècle, eut les yeux crevés et la langue coupée pour crime de trahison.

aaron (Pietro). Écrivain musical, né à Florence, vivait en 1520.

AARON (ST). Abbé du 1er monastère fondé dans la Bretagne, vivait au vie siècle.


saint-aaron. Géogr. Comm. du dép. des Côtes-du-Nord, arr. et à 24 kil. de St-Brieux.

saint-aaron. (l'Ile). Géogr. Où l'on a bâti la ville de Saint-Malo. V. saint-malo.

AARON-RASCHID. V. haroun el rachid.

AARTGENS ou ERGENS. (pr. a,-arti-ghenes ou er-ghinse). Peintre hollandais, né à Leyde en 1498, avait été d'abord cardeur de laine, mort en 1564.

AAR-TOYON. s. m. Hist. relig. (littéral. Chef miséricordieux). Nom que les Iakoutes donnent à l'auteur de la création.

AARTSEN (Franç. van). Homme d'état hollandais, auquel on reproche la mort de Harnevelt ; né à La Haye en 1572, mort en 1611.

AARTSEN (Pierre, surnommé Pietro Lungo) (pr. a-art-cenn pi-étro lounn-go). Peintre hollandais, né à Amsterdam en 1507 ou 1519, mort en 1573.

AARWANGEN. (pr. a-ar-van-ghenn). Géogr. Paroisse et bourg de Suisse, canton, et à 42 kil. de Berne, sur la rive droite de l'Aar ; 2,153 hab.

AAS. (ét. celt., a, eau ; agen, as, blessure ; eau des blessures : ou a, eau, iach, salutaire : Aiac, aias, aas, en celt., signifie eau salutaire). Fontaine d'eau vive très-estimée pour la guérison des coups de feu, au dep. des Basses-Pyr. On l'appelait autrefois Fontaine des arquebusades. Cette fontaine, ou plutôt cette source, a donné son nom a un vill. du dép. des Basses-Pyr., à 2 kil. de Laruus, et à 34 kil. d'Oloron.

AASCOW (Urbain Bruan)., (pr. a-asskou). Médecin des armées navales du Danemarck, publia, en 1774, un journal d'observations sur les maladies de la flotte danoise, équipée pour bombarder Alger en 1770.

AASI ou AASSI. (pr. a-aci). Géogr. L'Oronte des Grecs, l'Asius des Romains ; c'est la riv. la plus consid. de la Syrie, descend du Liban, et se jette dans la Méditerranée ; elle a 210 k. de cours.

AAST. (ét. celt., a, eau ; aste, astelle, lieu où croit le bois, forêt). Géogr. Ville et comm. du dep. des Basses-Pyr., cant. De Montaner, à 21 k. de Pau.

AAS-VOGEL. V. stront-vogel.

AAVORA ou AOUARA. s. m. (pr. a-avô-ra ou a-ou-ara). Hist. nat. Nom que l'on donne à plusieurs palmiers de la Guiane.

AAZAZ. Géogr. Château-fort pris par les Turcs, l'an de J.-C. 638.

AB ou ABRA. s. m. (ab est hébreu, abba est syriaque). Père.

AB. s. m. Calend., le 5e mois de l'Année ecclesiastiqne des Hebreux, et le 11e de leur année civile ; le mois d'août chez les Syro-Macedoniens. Il est encore en usage dans l'Orient, où l'on suit l’ère alexandrine. V. thamouz.

ABA. Géogr. Ville de la Phocide au N .-E. sur le Cephise, fondée par Abas, descendant de Pandion, et célèbre par un oracle d'Apollon. Ses habitants la quittèrent lors de l'invasion de Xerxès, et allèrent s'établir dans l'Eubée, qui reçut d'eux, dit-on, le nom d’Abantis.

ABA. s. f. Myth. gr. Nymphe, mère d'Ergiscus.

ABA ou ANBA. s. m. Hist. Nom que le peuple d'Alexandrie donnait anciennement à son patriarche.

ABA, ABAT ou ABE. s. m. Relat. Costume oriental consistant en une espèce de redingote sans manches, avec un large pantalon.

̶— Drap grossier dont ce vêtement est fait et qu'on appelle encore salonika. L'aba sert à habiller en Turquie les soldats, les matelots et les indigents. Les abats n'ont presque plus de valeur. (Encyclop. des g. du m.)

ABA ou OWON. Roi de Hongrie en 1041 ou 1042, massacré en 1041 par ses sujets, dont il était devenu le tyran.

ABAB. s. m. Matelot qu'on lève dans l’empire turc, lorsque les esclaves manquent pour le service de la marine.

ABADA. s. m. Nom d'une nation indigène du Brésil, province de Matto-Grosso.

̶— C'est aussi le nom moderne d'un fleuve de la Thessalie. V. pénée.

ABABANGUAY. s. m. (pr. aba-ban-gue). Bot. Arbre des Philippines.

ABABAYE, Bot. V. papayes.

ABABDEH ou ABDEH, ABABDÉ ou ABADÉ. s. m. (pr. a-bab-dé ou a-ba-dé). Nom d'un peuple de la famille troglodytique, qui habite la partie de la Nubie située à l'E. du Nil. Les Abadehs vivent de leurs troupeaux, recueillent aussi le senc dans les déserts, et le vendent dans les villes. (Depping.)

ABABIL ou ABABILO. s. m. Myth. mahom. Nom des oiseaux dont il est fait mention dans le Coran, et que Dieu envoya contre les Abyssins, lorsqu’ils se disposaient à assiéger la Mecque l’année de la naissance de Mahomet.

ABABOUY. m. Bot. Prunier épineux des Antilles.

AB ABRUPTO. Loc. adv. Empruntée du latin, et qu’on emploie quelquefois pour dire, Brusquement, sans préparation, sans préambule. Il a fait un exorde ab abrupto. Il lui donna un soufflet ab abrupto. On doit lui préférer ex abrupto, dont la prononciation est moins dure. V. ex abrupto.


AB ABSURDO. Loc. adv. emprunptée du latin, et qui signifie d'après l'absurde : Raisonner, démontrer ab absurdo.

ABACA. s. m. Hist. nat. Ce nom, aux îles Philippines, est donné à une espèce de bananier dont les feuilles servent à faire des nattes, des toiles et divers autres ouvrages.

ABACADO. s. m. Hist. nat. Nom du laurier avocatier dans quelques Antilles espagnoles.

ABACA-KHAN. Hist. Empereur mogol, de 1265 à 1282.

ABACATE. adj. et s. des 2 g. Géogr. Nom d'un peuple du Brésil, province de Matto-Grosso.

ABACATUAÏA ou ABACATUÏA. s. m. (pr. a-ba ka-touâ-ia, a-ba-ka-tui-ia). Ichtyol. On distingue sous ce nom, suivant le prince de Nassau, le poisson que Cuvier a nommé vomer de Brown et qu’on a confondu avec l’argyreiore vomer. Mergrave prétend que ce poisson est appelé abukatuxia au Brésil, et il ajoute que les Portugais de cette partie de l'Amérique le nomment peixe-gallo, ce qui signifie poisson-coq.

ABACCO (Antonio). Architecte et graveur italien, né à Rome en 1749, fut élève d’Antonio di San Gallo.

ABACETUS. s. m. (ét. gr., άβακήζ, taciturne). Entom. Genre de coléoptères pentamères, famille des carabiques, tribu des féroniens, dont le type se trouve en Guinée et au Sénégal.

ABACH. Geogr. Bourg de Bavière, sur le Danube, à 15 k. S.-O. de Ratisbonne.

̶— Source d'eau hydro-sulfureuse et saline. Cette eau est froide, transparente et fétide.

ABACO. s. m. (du rom. abac, ou de l'ital. abaco, qui vient du latin abacus, arithmétique). C'est à tort que M. N. Landais regarde ce mot comme ayant été forgé à plaisir par Boiste, car il se prenait autrefois dans la signification d'arithmétique, de l'art de calculer. Un petit écrivain .... qui apprenait aux enfants à écrire avec l’abaco, c'est-à-dire, avec l'arithmétique. (Rouillard, Hist. de Melun.) V. abaque.

̶— Espèce d'auge dont on se sert dans les mines pour laver les métaux, et principalement l'or.

ABACOT. s. m. Hist. Nom donné à une double couronne que portaient les rois d'Angleterre ; elle était sans ornements.

ABACTUS. s. m. (mot tout latin qui signifie expulsé, chassé). Suivant Chambers, il aurait été employé par les anciens pour exprimer seulement l'avortement provoqué par l'art. Mais si l'on en croit James, Chambers s'est trompé.

ABACUC. Prophète d'Israel. V. habacuc.

ABACUS. s. m. Bâton de commandement des Templiers, à pomme plate, sur laquelle est gravée la croix de l'ordre.

ABAD (Mohammed). Premier roi maure de Séville, chef de la dynastie des Abadites ; originaire de la Syrie, il vint s'établir à Séville, devint émir, prince ou roi, en 1013, et transmit son pouvoir à Abad II, son fils, lequel eut aussi pour successeur son fils aîné Abad III, qui, lors de la prise de Séville, en 1091, par les Maures d’Afrique, fut jeté en prison et y mourut.

ABAD, ou ABADA. s. m. Zool. Les anciens appelaient ainsi un animal féroce de l’intérieur de l'Afrique, qui portait deux cornes, l’une sur le sommet de la tête, et l’autre sur le front. Ils supposaient que cette dernière avait des vertus singulières contre les venins et les poisons. Quel est cet animal ? il paraît fabuleux.

— Bot. Nom que Bontius donne au rhinocéros unicorne des Indes.

ABADAVINE. s. f. Ornith. Nom donné par Albin au tarin.

ABADDIR. V. abadir.

ABADDON. s. m. (ét. hébr. du v. abad, faire périr) Hist. sacr. Nom qui désigne dans l'Apocal. l'ange de l'abîme, le roi des sauterelles.

ABADĖH. Géogr. Pet. v. de Perse, à 168 k. N. de Chiraz.

ABADÉH ou ABADÉ. V. ababdeh.

ABADIE (Jacques). V. abbadie.

ABADIOTE ou ABDIOTE. adj. et s. des 2 g. Nom d’une peuplade arabe de l’île de Crète ou Candie, d’une réputation fort équivoque, qui occupe une vingtaine de villages au sud du mont Ida, et que Malte-Brun croit un reste des anciens Sarrasins.

ABADIR, ABADDIR, ABBADIR. s. m Anc. myth. Pierre que Cybèle présenta enveloppée de langes à Saturne, lors de la naissance de Jupiter, et que Saturne avala, croyant dévorer son iïls. On l’appelle aussi Bétyle.

ABADITE. adj. et s. des 2 g. Hist. rel. Nom d’une des sectes musulmanes de l’Arabie. Un abadite. Des abadites. Un musulman abadite. Des musulmans abadites.

— Membre de cette secte. Les abadites sont principalement répandus dans l’Oman.

— Hist. Nom d’une dynastie maure fondée par Abad Ier, et qui occupa pendant 48 ans, au xie siècle, le trône de Séville et de l’Andalousie presque entière. V. abad.

ABADIVA. s. f. V. gade.

ABAEUZ. adj. m. pl. (pr. aba-eu). Aic. jurisp. Altération du mot Abattu. Il se disait des biens vacants. Biens abaeuz.

ABÆUS. (pr.abé-uss). Myth. Surnom d’Apollon.

ABAFFI Ier (Michel). Prince de Transylvanie élu en 1661, mort à Weissembourg en 1690.

— Abaffi II succéda à son père, et mourut à Vienne en 1713, à l’âge de 36 ans.

ABAGA. Hist. Khan des Tatars ; battit les croisés vers la fin du xiiie siècle.

ABAGI. V. abassi.

ABAI. (pr. abé). Pet. ville sur la côte N.-O. de la grande île Kalémemtan, improprement nommée Bornéo.

ABAI. s. m. Nom du mois d’août dans le calendrier turc.

ABAI LARD. V. abélard.

ABAINVILLE. (et. celt. aben, rivière ; vil. habitation, c’est-à-dire, ville près d’une rivière ; ce village est en effet arrosé par l’Ornain). Géogr. Village et eomm. du dép. de la Meuse, arr. et à 30 k. de Commercy.

ABAISIR. s. m. Miner. V. spodium.

ABAISSANT, part. prés, d’Abaisser (pr. a-bé-can, et non a-bè-çan rad. bas). Il est invariable toutes les fois qu’il est suivi d’un complément. Le télescope, en abaissant les cieux, a offert à Herschell de nouveaux astres et de nouvelles planètes. (Sénebier.) Les grands, placés si haut, ne sauraient plus trouver de gloire qu’en s’abaissant. (Massill.)

Des aigles abaissant leur vol audacieux.

(Delille.)

— abaissant, B. adj. Humiliant. Cette acception est omise dans tous les dictionnaires. Une fierté abaissante. Un ton abaissant. Jamais la politique du gouvernement n’a été plus abaissante pour la France. (G. de Beaumont.)

ABAISSE, s. f. (étym., bas). Ce n’est pas, comme le dit l’Académie, une pâte qui fait la croûte de dessous dans plusieurs pièces de pâtisserie, c’est un morceau de pâte qui a été abaissé, c’est-à-dire, dont on a diminué la hauteur en le passant sous le rouleau, et jusqu’à ce qu’il soit devenu mince. Une abaisse est une pièce de pâte mince que l’on emploie de diverses manières.

ABAISSEMENT, s. m. (pr. a-bé-ce-man, et non a-be-ce-man, comme l’indique à tort M. Landais ; rad. bas ; décompos, à., prép. ; bais, altération de baisser, ment, du lat. mens, esprit, manière, action). Au propre, action de baisser à d’abaisser, de s’abaisser, et le résultant de cette action, diminution de hauteur. L’abaissement d’un mur. L’abaissement du mercure dans le baromètre. L’abaissement de la voix. L’abaissement du voile du palais. L’élévation du mercure annonce assez généralement le retour à la sécheresse ; l’abaissement indique la pluie et les orages. (Cbaptal.)

— Fig. Diminution de fortune, de crédit, de courage, etc. Son grand dessein a été d’affermir l’autorité du prince par l’abaissement des grands. (La Bruy.) Ce fut lui qui contribua en effets à V abaissement de la maison d’Autri- che. (Volt.) Après l’abaissement des Carthaginois, Rome n’eut presque plus que de petites guerres et de grandes victoires. (Montesq.) L’élévation ou l’abaissement des états dépend du courage d’esprit de ceux qui les gouvernent. (Napol.)

— S’emploie absolument, c’est-à-dire, sans complément, bien que l’Académie n’en fasse pas mention. Ceux même qui ne nous font pas une guerre ouverte désirent notre abaissement. (Fénel.) Votre abaissement servira de risée à vos propres flatteurs (J.-J. Rous.)

— Etat opposé à celui de grandeur, de puissance, de prospérité. Il a voulu naître dans l’état de faiblesse et d’abaissement où le mystère nous le représente. (Bourd.) Le secret d’ôter aux petits tout sujet de se plaindre dans leur abaissement, et aux grands tout droit de s’enfler de leur élévation. (Id.) Le pécheur est souvent élevé aux honneurs, tandis que l’homme de bien vit dans l’abaissement. (Mass.) La fortune qui avait élevé l’impératrice Catherine de l’abaissement et de la calamité au plus haut degré d’élévation (Volt.) La république de Marseille n’éprouva jamais ces grands passages de l’abaissement à la grandeur. (Montesq.)

— Humiliation volontaire ou forcée. Les juifs charnels n’entendaient ni la grandeur ni l’abaissement du Messie. (Pasc.) Ceux qui ont la cœur humilié, qui sentent le mépris et l’abaissement. (Id.) Pour mieux honorer la profond abaissement de J.-C. dans l’Eucharistie. (Rac.) Psyché se jeta à leurs pieds pour toute réponse et les baisa ; cet abaissement excessif leur causa beaucoup de confusion et de pitié (La Font.)

— Le Dictionnaire de l’Académie ne cite aucun exemple du mot abaissement au pluriel, on pourrait en conclure que le singulier est seul en usage : mais on se tromperait, car on trouve des exemples remarquables du pluriel dans nos meilleurs écrivains. En effet, un homme peut éprouver plusieurs abaissements, celui de sa fortune, de son crédit, de sa réputation, etc. Dieu tire, quand il veut, la lumière des ténèbres et la gloire du fond des abaissements. (Flech.) L’orgueil est un des vices les plus jaloux de se venger des abaissements qu’il éprouve. (Roubaud.) Ce genre d’amour leur inspire une hauteur dans l’esprit qui les sauve des abaissements de la volupté. (Mme de Lamb.)


— Syn. simp. Chute, discrédit, disgrâce, défaveur, abjection avilissement, bassesse. honte, humiliation, mépris, etc.

— Epith. Triste, douloureux, pénible, profond, honteux, humble, lâche, glorieux, volontaire, forcé, grand, prodigieux, excessif, etc.

— Locut. l’abaissement des grands, d’une famille, d’une maison, d’une nation, d’une personne ; état, degré d’abaissement, abaissement de la vie religieuse, de la volupté ; passage de l’abaissement à la grandeur ; réduire à l’abaissement ; mettre, laisser dans l’abaissement ; se trouver dans l’abaissement désirer l’abaissement de ; contribuer à l’abaissement de ; naître dans l’abaissement, sortir de l’abaissement, aimer l’abaissement, se plaire dans ; tenir, se tenir dans l’abaissement ; porter à l’abaissement ; rechercher son propre abaissement, etc.

— Syn. comp, abaissement, bassesse. Par vertu, l’âme se tient dans un état d’abaissement volontaire ; par correction, on la retient dans un état d’abaissement passager. L’homme voit l’abaissement de sa fortune, et l’esclave l’abaissement de sa condition sociale ; mais leur honneur peut rester intact ; l’honneur n’est incompatible qu’avec la bassesse. En littérature, l’abaissement du style lui ôte quelque chose de son elévation, de sa naïveté ; la bassesse du style le salit et le rend trivial.

— Chirurg. Faire l’opération de la cataracte par abaissement ; faire descendre le cristallin qui était devenu opaque dans la partie inférieure du corps vitré. || Abaissement de la matrice. Descente de cet organe dans le vagin. V. chute. On emploie aussi ce mot, surtout en médecine vétérinaire, pour désigner d’autres chutes ou prolapsus d’organes.

— Algèb. Abaissement d’une équation. Réduction d’une équation à un degré moindre, à la forme la plus simple dont elle soit susceptible.

— Astron. Abaissement du pôle d’une étoile. Quantité dont ils semblent s’être abaissés par rapport l’horizon.

— Blason. Addition de quelque pièce faite à l’écu.pour en diminuer la valeur. On dit aussi en ce sens : Diminution d’écu, renversement d’écu, abattement d’honneur.

ABAISSÉ, ÉE. adj. et part. pass. d’Abaisser (pr. a-bé-cé ; rad. bas). il est variable, et s’emploie dans toutes les acceptions du verbe d’où il dérive. Un Dieu abaissé jusqu’à nous (Bourd.) Le voilà mort, sa famille abaissée et le roi rétabli. (Pasc.) Cependant l’obscurité redouble, les nuages abaissés entrent dans l’ombrage des bois. (Chateaubriand.) Dans la tristesse, la paupière est abaissée à demi. (Buff.) S’ils sont plus grands que nous, ils sont aussi abaissés que nous, que les enfants, que les bêtes. (Pasc.) Rien n’est abaissé dans sa contenance. (Villem.)

Alors son œil divin vers la terre abaissé.

(Delille.)

Nous verrons aujourd’hui leur audace abaissé.

(Voltaire.)

— Il régit toujours par. Us verraient par ce coup leur puissance abaissé. (Rae.). Dans le parterre on aime les bravades, on se plaît à voir la puissance abaissée par la grandeur d’âme. {Volt.) On est abaissé par la détraction. (Roubaud.)

— Bot. Se dit de la lèvre inférieure d’une corolle labiée, quand elle forme un angle presque droit avec le tube, comme dans le stachys germanica.

— Blas. Vol abaissé. Se dit des oiseaux quand leurs ailes sont pliées ou que le bout en est tourné vers la. pointe de l’sen, on le-dit aussi du chevron, du pal, etc. quand la pointe finit au cœur de l’écu ; et en général, de toutes les pièces qui se trouvent an-dessous de leur situation ordinaire.

ABAISSER, v. a. 1re conj. (pr. a-bé-cé et non abècé comme l’indique M. Landais ; et. rom. bas ital. basso lat. barb. bassus. Baisser à tel niveau, faire aller en bas, faire descendre. Abaisser un store. Abaisser une lanterne. Abaisser son chapeau sur ses yeux. Abaisser son voile. Abaisser ses regards sur. Voyez comme elle abaisse cette têts auguste devant laquelle s’incline l’univers ! (Boss.) La mais du sommeil avait abaissé leurs panpières. (La Font.)

De Lille sous ses pas abaissez la barrière.

(Volt.)

Madame, ordonnez-lui d’abaisser l’œil sur moi. (Corn.)

— Diminuer la hauteur d’une chose. Abaisser une muraille. Abaisser le terrain, la route. Abaisser une table. Abaisser la voix. Abaisser le ton de la vois, c’est-à-dire, parler plus bas.

— Par extension, diminuer la valeur, le prix, le mérite, la puissance de rendre moins grand, moins puissant. La fortune relève tout à coup ceux qu’elle a le plus abaissés. Jullius étendit les privilèges du peuple pour abaisser le sénat. (Montesq.) C’est le courage d’esprit qui fait perdre ou conserve les états, qui les élève ou qui les abaisse. (Volt.)

— Au fig. Mettre plus bas, humilier, ravaleur, dégrader. Les uns ont pris à tâche d’élever l’homme en découvrant ses grandeurs ; les autres de l’abaisser en représentant ses misères. (Pascal.) Les grands noms abaissent au lieu d’élever ceux qui ne savent pas les porter. (La Rochef.) L’esprit de parti abaisse les plus



grands hommes jusqu’aux petitesses du neuple. (La Bruy.) Dieu abaisse à ses pieds toutes les puissances du monde. (Boss.)

— Se prend quelquefois dans le sens de, Rabaisser. Pourquoi ce penchant à les railler, à les abaisser, à empoisonner leurs actions ? (Bourd.) S’il se vante, je l’abaisse ; s’il s’abaisse, je le vante. (Pasc.) N’est-il plus, on exagère son mérite, pour abaisser ceux qui vivent. (Volt.) Pour abaisser vos plus rares services. (Th. Corneille.)

— L’antithèse oppose souvent les mots élever et abaisser l’un à l’autre. Nous élevons la gloire des uns pour abaisser celle des autres. (La Rochef.)

— Il se prend quelquefois absolument. Il y a dans le monde une puissance supérieure à celle des hommes qui élève et qui abaisse. (Bourd.)

— s’abaisser, v. pr. Devenir plus bas, moins élevé. Le terrain s’abaisse et ouvre un abîme. (Fén.) La voûte s’était abaissée (Fonten.) La poussière s’abaisse et tombe. (Thom.) Quand on charge le chameau, il s’abaisse sur le ventre. (Buff.) La mer s’élève et s’abaisse avec l’astre de la nuit. (Corn.) Il arriva quelquefois que la température atmosphérique s’abaisse à un tel point qu’il en résulte de funestes effets pour les végétaux. (Chaptal.)

— Il est quelquefois employé dans le même sens sans le pronom, bien que cela soit omis dans tous les dictionnaires.

Jamais étoile, lune, aurore, ni soleil,

Ne virent abaisser sa paupière au sommeil.

— Au fig. Manquer à sa dignité, s’humilier, s’avilir, se dégrader. L’humilité n’est souvent qu’un artifice de l’orgueil qui s’abaisse pour s’élever. (La Rochef.) Il a fallu, pour gagner le cœur de l’homme, que sa majesté n’abaissât. (Bourd.) O mon Dieu trouviez-vous tant de grandeur à vous abaisser si profondément pour eux ? (Id.)

— S’exprimer avec beaucoup de simplicité ou avec trop de simplicité. Ils croiraient se trop abaisser en nommant les choses par leur nom. (Fén. ) Varier son style suivant les sujets, s’élever ou s’abaisser à propos. (H.) Sa conversation n’est ni brillante, ni ennuyeuse ; il s’élève, il s’abaisse quand il le faut. (Fléch.) Capable néanmoins de s’abaisser quand il veut ; et de descendre jusqu’au plus simples naïvetés du comique. (Rac) Tantôt sublime et pompeux, tantôt simple et modeste, il saura descendre sans s’abaisser. (D’Aguess.) La dignité du langage, comme celle de la personnes consiste à savoir s’abaisser avec noblesse, et se relever avec orgueil. (Marm.) (Cette acception est complétement omise dans le Dictionnaire de M. N. Landais aussi bien que dans celui de l’Acad., malgré l’exemple qu’elle cite : il descend au style naïf sans jamais s’abaisser ; car s’abaisser n’a pas ici le sens qu’elle lui donne, celui de s’avilir, se dégrader ; on ne s’avilit certainement pas, on ne se dégrade pas non plus en descendant au style naïf.

— s’abaisser à, jusqu’à, jusques à, c’est-à-dire, s’humilier, se soumettre. Il est très-rare que des premiers ministres s’abaissent à de si honteuses lâchetés découvertes tôt ou tard. (Volt.) Pour être aimé, il devait s’abaisser jusqu’à nous. (Bourd.) Il faut quelquefois que la vérité s’abaisse à confondre même les mensonges des hommes méprisables. (Volt.) Un Dieu qui s’abaisse jusqu’à se faire homme, étonne et confond la raison. (Massill.) Je suis bien punie de m’être indignement abaissée jusqu’à un malheureux aventurier. (Lesage.)

Qui suis-je, Seigneur et pourquoi

Le souverain de la nature

S’abaisse-t-il jusques à moi ?

(J.-B. Rousseau.)

— s’abaisser devant, sous, au-dessous de, toujours dans le sens de s’humilier. La république de Gênes s’abaissa encore plus devant Louis XIV que celle d’Alger. (Volt.) J.-C. est un Dieu dont on s’approche avec orgueil, et sous lequel on s’abaisse sans désespoir. (Pasc.) Et moi, dit l’Homme-Dieu, je m’abaisserai au-dessous de tous les hommes. (Bourd.)

Devant l’Être éternel tous les peuples s’abaisse. \sent.

(L. Racine.)

Que devant l’or tout s’abaisse et tout tremble.

Tout est soumis, tout cède à ce métal. (Piron.)

– Syn. simp. Baisser, faire descendre, affaisser, affaiblir, faire décroître, diminuer, réprimer, ruiner, avilir confondre, humilier, mortifier rabaisser, ravaler devenir plus bas, s’affaisser, s’affaiblir ; se diminuer, s’avilir, se ravaler, se dégrader, s’humilier, se soumettre, etc.

— Locut. Abaisser les grands, le sénat, les hommes ; abaisser à ses pieds ; abaisser l’âme, le cœur, le courage, l’esprit, l’état, la fierté, la fortune, le front, la gloire, la grandeur, la hauteur, l’insolence, le mérite, l’œil, l’orgueil, la puissance, les regards, la tête, le trône, la vanité, etc. ; s’abaisser à une lâcheté, à un artifice, à des larmes, à des faiblesses, à des démarches indignes, à des remerciments, à des déguisements, la prière, à des prières, à la plainte, à tout, à se justifier, à feindre, etc.

— Syn. comp. abaisser, baisser, rabaisser, ravaler, avilir. Abaisser, c’est diminuer la hauteur physique ou le prix moral d’une chose. Rabaisser, c’est abaisser davantage. Ravaler, c’est jeter bien bas ce qui avait


beaucoup d’élévation morale. Avilir, c’est imprimer la honte et la flétrissure. Humilier, c’est abaisser l’orgueil jusqu’à terre, devant l’homme, et surtout devant Dieu. On s’abaisse par modestie ; on se rabaisse par simplicité ; on se ravale par faiblesse ; on s’avilit par lâcheté ; on s’humilie par la pénitence.

— Géomét. Abaisser une perpendiculaire sur une ligne. Mener une perpendiculaire à une ligne, d’un point pris hors de cette ligne.

— Algèbre. Abaisser une équation. Réduire à un moindre degré une équation d’un degré supérieur.

— Hortic. Abaisser une branche d’arbre. En diminuer la longueur, la couper près du tronc.

— Chir. Abaisser la cataracte. Passer à travers la sclérotique et les membranes sous-jacentes une aiguille tranchante avec laquelle on abaisse le cristallin dans la partie inférieure du corps vitré.

— Pâtiss. Abaisser la pâte. La rendre aussi mince qu’on le désire, en l’étendant avec le rouleau. Abaissez votre pâte avec le rouleau et formez-en, soit des gâteaux, soit le fond d’une tourte. (Dict.de cuis.)

ABAISSEUR. adj. m. (pr. a-bé-ceur -et non a-be-ceur ; rad. bas). Anat. Qui sert à abaisser. Il se dit de différents muscles dont la fonction est d’abaisser les parties auxquelles ils sont attachés. Un muscle abaisseur. Des muscles abaisseurs. Les muscles abaisseurs ont pour antagonistes les élévateurs ou releveurs, qui, du reste, n’existent pas toujours.

— Il s’emploie aussi comme substantif masculin. L’abaisseur de l’œil, l’abaisseur de la lèvre etc.

— Abaisseur de l’aile du nez. Muscle qui abaisse l’aile du nez et rétrécit la narine.

— Abaisseur de l’angle des lèvres. Muscle s’étendant de la ligne oblique externe de la mâchoire infér. à la commissure des lèvres, où il se termine en pointe.

— Abaisseur de la lèvre inférieure ou carré du menton. Petit muscle mince et quadrilatère qui s’attache à la ligne oblique externe de l’os maxill. infér. et monte dans la lèvre infér., où il se confond avec le muscle orbiculaire.

— Abaisseur de la mâchoire inférieure. La plupart des muscles des régions sus et sous-hyoïdiennes sont des abaisseurs de la mâchoire inférieure.

— Abaisseur de l’œil. Le muscle droit inférieur de l’oeil.

— Abaisseur de la paupière inférieure. Petit faisceau charnu qui fait partie du muscle palpébral. Heister l’a décrit séparément. On ne l’admet plus, aujourd’hui.

— Chirurg : Abaisseur de la langue. Instrument destiné à abaisser la langue et à la maintenir comprimée pour mettre à découvert le fond de la cavité de la bouche. V. slossocatoche.

ABAÎT. s. m. (pr. a-bé), T. de Pêche. Appât. Il est peu usité.

ABAITER ou ABAITTER. v. a. 1re conj. Appâter. Il est peu usité.

ABAJOUE. S. f. (décomp. à-bas-joue, placé au bas de la joue). Mamm. Les zoologistes donnent ce nom à une double poche qu’un assez grand nombre de mammifères portent sur les côtés de la bouche, soit à l’extérieur des joues, comme dans quelques rongeurs ; soit à l’intérieur, entre les joues et les mâchoires comme dans beaucoup de singes, certains rongeurs et quelques nyctères parmi les chauves-souris. Ces poches servent tantôt, ce qui est le plus ordinaire à mettre en réserve les aliments que les animaux qui en sont pourvus n’ont pas le loisir ou la volonté de consommer sur-le-champ ; tentôt comme dans les nyctères, à procurer le gonflement du corps, en permettant le passage de l’air extérieur dans un grand sac sous-cutané, avec lequel elles communiquent. Le cosita n’a ni abajoues, ni callosités sur les fesses. (Buff.) Le même écrivain nous donne la signification matérielle de ce mot lorsqu’il dit : Les sapajous et les sagouins diffèrent des babouins et des guenons, en ce qu’ils n’ont ni poches au bas des joues, ni callosités sur les fesses.

— Dans le langage familier on appelle abajoues des joues volumineuses et pendantes. Cette acception est omise dans l’Académie et dans les autres dictionnaires.

— Charcut. Parties latérales du groin de cochon et de la tête de veau lorsqu’ils sont cuits.

ABAKUR. s. m. Myth. celt. Nom des chevaux de Sunna déesse du soleil.

ABALA. Géogr. Port de mer d’Ethiopie où César, battu par Pompée, aborda avec un seul homme de sa suite.

ABALIÈNATION. s. f. (pr. a-ba-lié-na-cion ; du lat. abalienatio). Droit rom. Cession, abandon, vente, et plus spécialement toute aliénation par laquelle les effets qu’on nommait res mancipi étaient transférés à des personnes en droit de les acquérir, ou par une formule qu’on appelait traditio nexu, ou par une renonciation qu’on faisait en présence du magistrat. Les effets qu’on nomme ici res mancipi, et qui étaient l’objet de l’abaliénation, comprenaient les bestiaux, les esclaves, les terres et autres possessions dans l’enceinte des territoires de l’Italie. Les personnes en droit de les acquérir étaient les citoyens romains, les Latins et quelques étrangers à qui l’on permettait spécialement ce commerce. La transaction se faisait, ou avec la cérémonie des poids, et

— Dr. crim. Déclaration qui résulte d’un jugement en vertu duquel un individu est déclaré non convaincu, et renvoyé de l’accusation portée contre lui. V. absolution. ACQUITTER. v. a. lr"conj. (rad. celt. guyt, libre, exempt de charges). Rendre quitte, libérer d’un engagement quelconque par une attestation eapresse en d’autres termes, donner l’acquit ou la quittance d’un engagement, d’une dette, à la personne qui était liée par cet engagement ou par cette détte, etc. Payer. Acquitterdes droits, desdettes, des contrats des legs, etc. Prenez donc ces cent louis, allez acquitter vos engagements le trente de ce mois, 3t croyez à la Providence. (Billecocq.) Acquitter quelqu’un. C’est-à-dire, Payer pour quelqu’un. Acquitter un ami, un parent, une famille. Il a acquitté complètement son fils. Comm. Acquitter une lettre de change, en tout autre effet de commerce. Certifier qu’on a été payé de la valeur de ces effets, en y apposant sasignature après les mots pour acquit. Fig. Remplir, réaliser, accomplir. Acquitter un devoir, une promesse, sa parole, etc. J’aurai acquitté mon devoir en t’indiquant les chemins dans ce bas monde. [M." Camp. j acquitter, v. n. Fig. Décharger, libérer. La reconnaissance n’acquitte pas d’un grand bienfait, elle n’en peut payer que les intérêts. (Beauch.) Il Ondit dans le même sens acquitter ta conscience, c’est-à-dire, obéir à sa conscience en remplissant un devoir. Dr. crim. Déclarer quelqu’un innocent de l’accusation portée contre lui. Ses juges viennent de l’acquifter. (Acad.) S’ACQUITTER,v. pron. Ss libérer, sé decharger. S’acquiiter d’une dette ; d’où est venu ce proverbe qui .acquitte s’enrichit. 11 s’est acquitté dc vingt mille francs depuis peu. (Acad. cm ce sens il se dit absolument. Il t’est biea acquitté. Il s’acquittera. Fig. Reconnaître par ses services, par son dévouement, etc., les obligations qu’on a à quelqu’un. Le trop grand empressement qu’on a de s’acquitter d’une obligation est une espèce d’ingratitude. (LaRochef.) IlEn ce sens il s’emploie sans complément. Sire, je dois beaucoup à votre majesté mais je pense m’acquitter en quelque sorte avec elle en lui donnant M. de Colbert. (Mazar.) On trouve souvent dans les écrivains du siècle de Louis XIV s’acquitter vers quedqu’un. Et m’acquitter vers vous de mes profonds respects. (Racine). César s’efforcera de s’acquitter vers vous. (Corn.) Mais ce tour a vieilli on dit mieux s’acquitter envers quelqu’un. Fig. Satisfaire à, remplir. S’acquitter d’un devoir, d’une commission, d’un emploi, dé ses fonctions, d’un voeu de sa parole, etc. Il faut s’acquitter de ses devoirs et ne pas s’inquiéter du résultat. (Volt.) Presque tout le monde prend plaisir à s’acquitter des petites obliga- tions. (La Rochef.) S’en acquitter. Se tirer adroitementd’une affaires. Mon Dieu mademoiselle vous vous en êtes acquittée à merveille (Mol.) Jeu. Regagner ce qu’on a perdu, et rester quitte à quitte. J’ai joué contre lui jusqu’à ce qu’il se fût acquitté. (Acad.) j[ Aujeu de billard, s’acquitter c’est-à-dire, se mettre en passe en jouant le premier coup. On dit plutôt donner son acquit. Syn. çomp. acquitter, PAYER.Acquitter, c’est décharger d’un fardeau, d’une obligation payer, c’est donner le prix convenu d’une chose. On ne paie pas un bienfait, on s’ûcquitte envers un bienfaiteur. ACRACH1VE.s. m. ( pr. a-krak-ne et. gr., «ça, sommité ; â-/vi ; duvet). Bot. Genre de graminées chloridées. ACRANIE. s. f. (et. gr., à priv. ; xpavîov, crâne). Anat. Absence partielle eu totale du crâne. ACRAXIEN, ENKE. adj. (et., V. acranie). Anat. Qui n’a point de crâne. ACHANTE. s. m. fèt. gr., «sav-te ; imparfait). Erpét. Genre de lacertieas sa léaards, ayant pour type l’acrante vert, de l’Amérique méridionale. ACRANTHERE. s. m. (et. gr., «bo ?, sommet àvOiffi ;, fleuri). Bot. Genre de rubiacées établisur une espèce à Ceylan. ACRATHÊRON. s. m. (ét. gr. itfoç, sommet àSi-.p barbé de blé). Bot. Genre de gra- minées établi sur une seule espèce, l’acrathé- ron miiiacè, originaire du Nêpaul. ACRE. adj. des 2 g. (de à ?.r, ou àxlç, pointe, piquant). Qui a quelque chose de piquant, de mordicant, de corrosif, qui détermine sur les organes du goût une sensation brûlante et irritante, dont l’impression se fixe principalement à la gorge. Le suc de cette plante est acre. Cette herbe est âcre au goût, a un goût acre. Voilà le fruit le plus dore qu’arbre puisse jamais porter. (Sall.) Puthol. Chaleur Acre. Celle qui est accompagnée d’un sentiment d’ardeur et de picotement. Fig. II a l’humeur un peu âcre. Vous le Prenez sur un ton un peu acre. Le bîlieus : est contentieux se sert de mots piquants, acres, moniants, pleins de sel et de pointes. (Virey). wardf- tes baisers je ne saurais les suppor- tr’r. lis sont trop cfores, trop pénétrants. (J.-J. ACRE, s. 1u. (mot celt. qui signifie chciiiip ; d’où en lat. ager et ntra). Mesure de superficie usitée autrefois en Franc*. Elle variait selon les provinces où elle était en* usage. Sa valeur ordinaire était de 50 ares. ACRE, ou saint-Jean d’acre. Géogr. L’ancienne Ptolémaïs, chef-lieu du pachalik d’Acre, en Syrie, sur la mer, à 122 kil. N.-O. de Jérusalem ; 20,000 hab. Fortifications anciennes et modernes. Bonaparte l’assiégea avec opiniâ- treté, mais inutilement, en 1799. ACRE s. f. Entom. Genre de lépidoptères diurnes, aux ailes oblongues et arrondies. AGREMENT, s. m. Comm. Sorte de cuirs apportés de la mer Noire à Constantinople. ACRÉMONIEN ENNE. adj. Bot. Qui ressemble à un acrémonion. Il acrémoniens. s. m. pi. Famille de champignons. ACHÉMOMON. s. m. (en gr., rejeton). Bot. Genre de champignons qui naissent sur les feuilles décomposées ou les bois pourris. ÂCRETÉ. s. f. Qualité de ce qui est acre. L’âcreté d’une herbe, de la bile, du sang, des humeurs. C’est à l’c£creté du sang, et surtout à celle des humeurs, qu’il faut attribuer la fureur de beaucoup d’hommes devenus atroces pendant la révolution. (Sali.) Fig. Il a de l’Bcretédans l’esprit. (Raym.) ACRIBOLOGIE. s. f. (du gr. àxf tgo>.oT&a examen approfondi). Néol. Choix rigoureux des mots. Précision dans le style. ACRIDIEN, EISNE. adj. Entom. Qui ressemble à une sauterelle. Ils. m. pi. Grande famille d’insectes orthoptères. ACRIDOCARPE. s. m. (et. gr., àxpU, sauterelle xafi :oç, fruit ). Bot. Genre de malpighiacées, arbres ou arbrisseaux grimpants, de l’Amérique tropicale, et dont le fruit offre quelque ressemblait avec la sauterelle. ACRIMONIE, s. f. (ét. celt., acar, tête, et monnun, d’humeur bizarre, chagrine, difficile à contenter.) Acreté, acidité, âpreté, se dit au propre des substances dont la saveur est mordante et piquante. Altération particulière que l’on supposait se développer dans les humeurs du corps humain sous l’influence de certaines substances introduites dans l’éconemie. Quoique cette hypothèse soit entièrement et justement abandonnée, on ne peut nier cependant qu’il ne se développe quelquefois dans l’estomac de l’homme, comme dans celui des animaux, une acrimonie acide connue sous le nom d’aigreurs. (Dict. des Sc. méd.) Fig. Ardeur, véhémence, vivacité, sévé- rité. Se prend ordinairement en mauvaise part. Il y a de l’acrimonie dans son caractere, dans ses discours. (Acad.) ACRIMONIEUX, EUSE. adj. (ét. celt., V. acrimonie). Qui a de l’acrimonie. Il Se dit, au propre, des substaneps dont la saveur est mordante, âpre, piquante. Fig. Caractère acrimonieux. Discours acrimonieux. Les critiques de profession prouvent trop souvent qu’on peut être acrimonieux sans être piquant. (Carp.j ACRINIE. s. f. Pathol. Diminution, absence de sécrétion. ACRIOPSIDE : s. f. Bot. Genre d’orchidées, plantes parasiter de Java. ACRIPEiVîVE. adj. des 2 g. Ornith. Qui a des plumes pointues. ACRIPÈZE. s.-f. (et. gr., ôxfu, sauterelle ; mÇô ;, piéton.) Entom. Genre de locustaires orthoptères de la Nouvelle-Hollande. ACRISIE. s. f. (ét. gr., et priv. xotmç, crise). Pathol. Terminaison d’une maladie sans crise évidente. ACROAMATIQUE, ACROATIQUE. adj. des 2 g. (ét. gr., àxfoào^ai, entendre). Bibliol. Se dit des livres qui traitent des matières sublimes ou cachées. On dit mieux ésotérique. ACROBAPTE. adj. des 2 g. (et. gr. 0*005, sommet, eatrémité ga-xô ?, teint). Ornith. Entom. Qui porte une tache brune à l’extrémité de ses ailes. ACROBATE, s. des 2 g. (en gr. âxçoBivtif). Nom sous lequel les anciens désignaient les danseurs etles danseuses de corde. ACROBATICON. s. m. Hist. anc. Échelle pliante sur laquelle on montait pour reconnaître les travaux et la position des ennemis. ACROBATIQUE, adj. des 2 g. Qui concerne les acrobates. Il Mécan. Se dit des machines propres à monter les fardeaux. ACROBIE. s. f. (ét. gr., ôx ?o ; sommet, pjiu, je bourgeonne). Bot. Groupe de végétaux, comprenant les hépatiques et les mousses, etc., et dont l’accroissement a lieu uniquement par le sommet de la plante. ACROCARPE. adj. f. fét. gr., d^o ;, sommet /.api» ;, fruit.) Bot. Se dit des mousses qui fructifient à l’extrémité des :ameaux. Il achoc«kpes. s. f. pi. Famille de mousses. ACROCENTRE. s. m. (ét. gr., ôxpor, sommet mvtjov, centre). Bot. Section du genre centaurée. ACROCEPHALE. s. m. Bot. Genre de labiatées ocimoïdées, originaires .de l’Inde. t ACROCÉRAUiVIENS. adj. m. pl. iét. gr., ô/.f oc,sommet xspauvàç, foudre). Epithète donnée à une chaîne de montagnes del’Epire, au N.-O., parce que lea sommets les plus élevés étaient souvent frappés de la foudre. Les monts Acrocérauniens sont appelés aujourd’hui Khixniaroli ou monts de la Chimère. ACÏSOCÈRE. s. m. (et. gr., axf sç, sommet ; itéja ;, corne). Entom. Genre de diptères vésiculeux, dont les antennes sont insérées sur le sommet de la tête, et dont le type est l’acrocère globeux. ACROCHÈTE. s. m. (pr. a-kro-kè-te et. gr., ixjo ;, sommet ; yaa," chevelure. Entom. Genre de diptères straty omides, ayant pour type l’acrochète fascié du Brésil. ACROCIIORDE. s. m. Erpét. Genre d’ophi- diens revêtus d’écaillés en forme de verrues, dans la Nouve’le-Guinée. ACR.OCHORDON. s. m. (et. gr., < ?«- extrémité, élévation cordel. Pathol. On a décrit sous ce nom des productions organiques dures, sensibles, grêles, surtout vers leurs extrémités adhérentes, auxquelles en a trouvé quelques ressemblances avec un bout de corde. Ce sont de petits tubercules pédiculés, tels que verrues ou poireaux. V. ACNÉet IOVTFIOS. ACROCINÉ. s. m. (et. gr., izçm, pointe ; x’.v£w,je meus). Entom. Genre de coléoptères, ayant pour type le bel insecte appelé vulgairement le grand Arlequin de Cayenne. ACROCOME. s. m. (ét.gr.,£x ;o ;, extrémité ; xô ;jt<jchevelure). Bot. Genre de palmier de Ia Guiane, ainsi nommé à cause de l’élégante masse de feuilles qui couronne sa tige. ACRODACTYLE. s. m. ;ét. gr., £x ?ov, extrémité Sôxfj/.o ;, doigt). Entom. Genre d’ichneumoniens hyménoptères. ACRODE. s. m. (ét. gr., Ôx ?oç, extrémité ; oSot ;, dent). Ichthyol. Genre de poissons fossiles, de la famille des cestraciontes. ACRODICLIDE. s. f. (ét. gr., œtPov, sommet SwXî ;, iSo ;, porte à deux battants). Bot. Genre de lauracées, ayant pour type le laurier triandre de l’Amérique tropicale. ACRODOÎV. s. m. (et. gr., &psv, extrémité ; iSoù ;, dent). Entom. Genre de coléoptères ayant une dent simple au milieu du menton. ACROBRION. s. m. Bot. V. céphalanthe. ACROGÈNE. adj. des 2 g. (ét. gr. £c ?B ;, sommet ; fenàm, je produis). Bot. Syn. de Acotyîédone. || Miner. Se dit d’un cristal dérivant d’un rhomboïse par des décroissements sur les ongles et les bords supérieurs. Chaux carbonatée acrogène. ACROLITHE. s. m. (ét. gr., âxjoç. haut ; liOo ;, pierre). Ant. gr. Statues de bois ou de bronze dont les extrémités étaient en marbre. ACROLOGIE. s. f. (ét. gr., ox ?oî, extrême ; discours). Néol. Recherche des premiers principes ou de l’absolu. ACROLOGIQUE. adj. des 2 g. Qui concerne l’acrologie. ACROLOFHE. s. m. Entom. Genre de lé- pidoptères nocturnes. ÂeROHIAX, ALE. adj. dont le plur. est acromiaux. (et. gr., «xpoç, extrême «[mÇ, épaule). Anat. Qui appartient à l’acromion. Artère acromiale. Veine acromiale. ACRO2UIE. s. f. Entom. Genre de diptères voisin du genre hybos. ACROMIO-IIUMÉRAL. adj. et s. m. Anat. Se dit d’un muscle de l’acromion à l’humérus, appelé aussi Deltoïde. ACROMÏOHT. s. m. (ét. gr., i, extrême ; taiivi, épaule). Anat. Apophyse considérable qui termine l’épine de l’omoplate et qui s’articule avec la clavicule. ACROMIS. s. m. Entom. Genre de coléoptères ayant pour type l’acromis de Cayenne. ACROMPHALE ou ACROMPHAMO3V. s. m. (ét. gr., ôzjo ;, extrême ; ôjioàlo ;, nombril). Anat. Extrémité du cordon ombilical qui tient au nombril de l’enfant. ACROPATHIQUE. adj. des 2 g. Qui concerne l’acropathie. ACROPELTE. s. f. (ét. gr., okooî, extrême ; «{Vci),petit bouclier). Bot. Genre d’algues floridées dont les sporidies sont cachées dans des disques en forme de bouclier à l’extrémité des frondes. ACROPÈRE. s. f. (ét. gr., ôxf5- sommet k^oi, poche). Bot. Genre de la famille des orcb’idées ayant le lobe moyen concave et en forme de sac plante indigène du Mexique. ACROPHORE. s. m. (ét. gr., 0x005,sommet eopô ;, qui porte). Bot. Genre d’àspléuiacées ayant pour type l’acrophore noueux de Java. ACROPODE. s. m. (et. gr., ixooç, sommet ; *9ûî, r.oSâç,pied). Bot. Genre voisin du lotus, et ne différant des aspalathes que Far un stipe ovarien capillaire. ACROPTII..E. s. f. (et. gr., âzpo ;, sommet ; kxuoç, duvet). Bot. Plante vivace rameuse originaire de l’Europe orientale, et ayant de la ressemblance avec la centaurée jacée. ACROSOPHIE. s. f. (et. gr., «505, suprême ; oMla, sagesse). Néol. Sagesse qui n’appartient qu’à Dieu. ACROSPORE. s. m. (ét. gr., ôxoo :, sommet ; sr.ioc ;, semence). Bot. Genre de la famille des byssoïdées, ayant pour type l’acrospore monilioïde ou à chapelet. ACKOSTIC. s. la. Bot. Genre de fougères polypodiacèes à capsulea nues, ayant pour type l’acrostic doré des Antilles. ACROSTICHE. s. m. (et. gr. «xp*îf extrëme : <r :tyoç,rang). Sorte de poésie aujourd’hui fort décriée dans laquelle chaque vers coinmence par une lettre faisant partie d’un nom qu’on écrit en travers à la marge et qu’on prend pour sujet. Si l’on veut faire un acrostiche sur le mot Dieu, le premier vers devra commencer par un D, le deuxième par un I, le troisième par un E, le quatrième par un U. S’emploie aussi comme adjectif. Poésie acrostiche. Vers acrostiches. Lettres acrostiches. ACROTÈRE s. m. Archit. Petit piédestal ordinairement sans base et sans corniche, placé pu milieu et aux côtés des frontons, et destiné à porter des figures, des vases, etc. On appelle aussi acrotères les petits murs ou dosserets qu’on place entre le socle et la tablette des balustrades. Il Signifie aussi Amortissements des toits. Numism. Proue de vaisseau’ sur les mé- dailles, pour désigner une victoire navale ou une ville maritime. àokoterks. s. m. pi. Anat. Les-extrémités du corps, la tête, les mains et les pieds. Peu usité. ACROTIÏAMNE. s. m. Bot. Genre de champignons rameux, croissant au pied des arbres, et ayant pour type l’acrothamne violacé d’Allemagne. ACROTISME. s. m. Philos. Recherche des causes premières. Il Philosophie transcendea-. tale. ACROTRÈME. s. m. (ét. gr-, ôxpav sommet ; Toîjna, trou, cavité). Bot. Genre de dilléniacéesi herbes acaules, appartenant à l’Inde. ACROTRICIIE. s. m. f et. gr., ô.mov sommet 0g !£ poil). Bot. Genre d’épneri dacées ; petits arbustes de la Nouv.-Holiande. £CT. Abréviation des mots actif et activement. ACTA. s. pi. Hyg. Mot latin syn. de Gesta. ACTA DIURSA. s. pi. Antiq. rom. Registres ou journaux dans lesquels on écrivait chaque jour les actes du peuple romain. ACTA SANCTORUM (Actes des saintsl. On appelle ainsi une Vie des Saints très-volumineuse, entreprise par Bollandus et continuée par des collaborateurs qu’il s’était associés eî que pour cette raison on a nommés Bollandistes. V. ce mot.

ACTE. s. m. (en lat. actum, d’agere, faire. agir). Il signifie, Accomplissement d’un fait quelconque, effet résultant de l’action d’un agent, opération de la volonté. Acte volontaire, instinctif, instantané, réfléchi. L’habitude ne se forme que par des actes réitérés et presque continuels. (D’Aguess.) Tous les actes de l’entendement qui nous portent à Dieu nous élèvent au-dessus de nous-mêmes. (J.-J. Rouss.)

— Morale. Il se dit de toutes les actions bonnes ou mauvaises. Un acte vertueux, louable, blâmable, coupable, perfide, etc. Un acte de vertu de piété de générosité, de justice, de grandeur d’âme de prudence, de courage, de scélératesse, de perfidie, d’ingratitude, de perversité, etc. Elles suppliaient Oswald de laisser brûler les juifs, avec autant d’éloquence et de douceur que si elles avaient demandé un acte de clémence. (Mme de Staël.) On voit dans le monde beaucoup d’actes d’ostentation, et fort peu de libéralité. (S. Dubay.)

— Il se dit également de diverses actions considérées par rapport à leurs conséquences, à leurs résultats avantageux ou nuisibles. L’acte le plus important de la vie. Réfléchir à l’acte qu’on va faire. Consommer un acte. Etre responsable de ses actes. Les actes de son administration, de sa gestion.

— Preuve, manifestation, témoignage. Faire acte de démence. Faire acte de soumission.

Faire acte de complaisance. Faire par complaisance une chose à laquelle on n’est pas tenu.

Faire acte de bonne volonté. Essayer une chose pour acquit de conscience, sans espérer de succès. Acte hostile ou d’hostilité. Agression entreprise par un parti ennemi.

Acte d’autorité. Action par laquelle on manifeste son autorité. Il se dit d’un particulier aussi bien que d’un pouvoir établi.

Acte arbitrage. Acte de l’autorité, sans égard pour la loi ou la justice naturelle. Les actes d’autorité relèvent un gouvernement les actes arbitraires le ruinent. (Raym.)

Faire acte de présence. Se présenter dans un lieu où les convenances vous appellent.

— Relig. Il se dit de l’action de recevoir les sacrements. S’il n’y a pas dans le premier acte de la vie chrétienne (le baptême ) un mélange divin de théologie et de morale, rien ne sera jamais divin en religion. (Chateaub.) Il exprime plus particulièrement les mouvements intérieurs de l’âme chrétienne manifestés par la prière. Un acte de foi. Un acte de contrition. Un acte d’humanité. || Il se dit aussi des différentes formules de prières. Ce livre contient des actes d’espérance et de charité.

Acte pur. Théolog. dogm. C’est ainsi que les théologiens appellent Dieu, quand ils le considèrent sous le point de vue de l’acte divin, acte simple, éternel et inséparable de l’essence divine.

– Se prend dans le sens particulier de ce qui est réellement, par opposition à ce qui est seulement possible. De l’eau liquide est de l’eau en acte ; elle est en puissance de l’hydrogène et de l’oxygène, c’est-à-dire qu’elle peut se transformer en ces deux gaz.

— Jurispr. Preuve écrite d’un fait, d’une obligation ou d’une convention. Dans le langage de la loi, ce mot reçoit une double acception : tantôt il est pris pour l’écrit constatant un fait quelconque ; tantôt il est pris pour le fait lui-même. C’est dans ce dernier sens qu’on dit faire acte d’héritier, c’est-à-dire, disposer des biens d’une succession en qualité d’héritier. Il ne faut pas confondre l’acte avec le titre. Celui qui a acheté par écrit, mais de mauvaise foi, le fonds d’autrui, a bien un acte, mais il n’a pas de titre son acte ne signifie rien, du moins quant au propriétaire. (Durant.) Passer un acte. Signer un acte. Faire un acte. Clauses, formule, teneur d’un acte.

Acte administratif. Arrêté, décision de l’autorité administrative ; action, fait d’un administrateur qui a rapport à ses fonctions.

Acte authentique. Celui qui émane de divers fonctionnaires publics, qui a été fait dans l’exercice de leurs fonctions, et qui se trouve dans le cercle de leurs attributions. Tels sont : 1re les actes du pouvoir législatif ; 2e les actes de l’autorité administrative ; 3e les actes judiciaires ; 4e les actes notariés.

Actes capitulaires. Ceux faits dans les chapitres et communautés religieuses.

Acte d’accusation. C’est l’exposé du fait imputé à un accusé et des circonstances qui le rendent criminel.

Actes d’avoué à avoué. Ce sont ceux que les avoués se signifient dans le cours d’une instance.

Actes de l’état civil. Ceux destinés à constater les naissances, adoptions, reconnaissances d’enfants, mariages et décès.

Acte de notoriété. Attestation d’un fait par deux ou plusieurs personnes, constatée par un officier public.

Acte de dernière volonté. Se dit quelquefois d’un testament. Acte double. Acte public ou privé, dont on a fait deux originaux semblables.

Acte en brevet. Celui dont il ne reste pas de minute et qu’on délivre en original.

Actes légitimes. On appelait ainsi en droit romain les actes solennels qui ne pouvaient être faits qu’avec certaines formules.

Acte privé ou sous seing-privé. Ecrit passé ou souscrit sans l’intervention d’un officier public.

Acte de procédure. Celui qui est fait pour l’instruction d’un procès.

Acte public. Celui qui émane d’une autorité publique ou est reçu, par un fonctionnaire ayant qualité à cet effet.

Acte récognitif. Celui par lequel un individu reconnait l’existence d’un titre.

Acte respectueux. Celui par lequel un fils âgé de plus de 25 ans, ou une fille âgée de plus de 21 ans, demande pour se marier le conseil de ses père et mère ou autres ascendants.

— Le mot acte se dit aussi d’une déclaration faite devant un tribunal, soit spontanément, soit d’après l’ordre de la justice, et dont on a constaté l’existence. Demander acte. Prendre acte. On lui a donné acte de sa plainte. Acte de désaveu.

— Dans le langage ordinaire, prendre acte de la déclaration, de l’aveu de quelqu’un, c’est déclarer qu’on se prévaudra, dans l’occasion, de la déclaration, de l’aveu qu’il vient de faire.

— Prov. et fig. Je prends acte de ma diligence, de mon exactitude, c’est-à-dire, je suis bien aise que l’on reconnaisse que je suis arrivé des premiers au rendez-vous.

— Il se dit en outre, surtout au pluriel, des décisions, des mesures prises par l’autorité publique. Les actes de l’autorité. Les actes du sénat. Censurer les actes du gouvernement. Actes d’amnistie. On ne gouverne point par des demi-mesures une nation éclairée il faut de la force, de la suite et de l’unité dans tous les actes publics. (Napol.)

— Il se dit aussi des journaux ou mémoires publiés par quelques sociétés savantes. Les actes de la Société de Leipsick.

— Diplom. Dans le langage diplomatique, on nomme actes, les documents réunis dans une chancellerie, les procès-verbaux d’une négociation, les pièces officielles dans lesquelles sont consignées les stipulations résultant de cette négociation.

Acte de proclamation. Acte en vertu duquel les autorités reçoivent le droit d’interdire et de disperser toutes reunions et assemblées illégales ou dangereuses.

Acte d’insurrection. Acte qui, comme le précédent, constitue une espèce d’état de siège.

Actes de la foi. V. auto-da-fé.

Acte additionnel. Hist. polit. Nom donné à une série d’articles par lesquels Napoléon, dans les cent-jours, voulut compléter la constitution de l’empire. Il les présenta le 22 avril 1815 à l’acceptation des Français.

Actes humains. Théol. mor. Ceux que l’homme fait avec réflexion et de propos délibéré. On les divise en naturels et surnaturels, selon qu’ils ont un motif puisé dans la nature, ou qui se rapporte à la révélation.

Actes des apôtres. Livre du Nouveau-Testament où sont racontées les principales actions des apôtres et l’histoire de l’église primitive à partir de l’ascension du Sauveur, l’an 32, jusqu’à l’arrivée de St Paul à Rome, l’an 65, sous Néron.


— On a nommé Actes des apôtres, 1° une pièce de théâtre, représentée anciennement par les confrères de la Passion et conservés jusqu’à nos jours ; 2° un journal contre-révolutionnaire, publié par Rivarol, Bernasse, etc., et interrompu par ordre de Louis XVI.

Actes de Pilate. Actes du procès de Jésus-Christ envoyés à l’empereur Tibère et lus par son ordre dans tout l’empire.

Acte de baptême. Certificat qui constate la réception du baptême.

Actes du consistoire. Déclarations du conseil d’état des empereurs romains.

Acte constitutionnel. Constitution française publiée en 1793 par la Convention nationale.

— Hist. rom. Actes diurnes ou quotidiens, que César substitua aux grandes annales. V. acta diurna.

Actes du peuple. Ceux qui annonçaient les naissances, les mariages, les décès, les jugements, les condamnations, les comices, etc. ; ils différaient des annales ou des fastes, dans lesquels on n’inscrivait que ce qu’ils avait d’important et de glorieux. On disait dans le même sens, actes urbains, actes des affaires urbaines.

Jurer sur les actes de l’empereur, lui prêter serment de fidélité. Du temps de la république, on jurait sur les lois.

acte, ou acte simple. Ant. rom. Mesure géodésique de 120 pieds romains, ou mètres.

Acte carré. Moitié du jugerum, évalué par Ideler à mètres carrés 1257,53.

Acte double. V. jugerum.

— Musiq. Acte de cadence. Mouvement dans une des parties, et surtout dans la basse, qui force toutes les autres parties de concourir à former une cadence ou à l’éviter.

— Art dram. L’une des parties principales dans lesquelles se divise une pièce de théâtre. Une pièce en cinq actes, en trois actes, en un acte. Les actes se divisent en scènes. Les anciens avaient imposé au poète dramatique l’obligation de partager son œuvre en cinq actes. Et chaque acte en sa pièce est une pièce entière. (Boil.) On ne peut guère finir un acte d’une manière plus grande et plus tragique. (Volt.) Cette scène soutient le cinquième acte qui est assez languissant. (Id.)

ACTÉ. Myth. anc. Le blé, les dons de Cérès.

— acte et cypris. Signifie la table et le plaisir.

ACTÉA ou ACTÉE. Myth. anc. Surnom de Cérès. || L’une des Danaïdes. || Une des Heures. || Géogr. anc. Une des tribus de l’Attique.

ACTÉE. s. f. (en gr. άκτια, sureau). Bot. Genre d’helléboracées, propres à l’hémisphère septentrional. On distingue l’actée cimicifuge, vulgairement chasse-punaise, et l’actée épiée ou herbe de St Christophe.

ACTÉEN, ENNE. adj. Myth. gr. Qui est du pays d’Actée, qui appartient au pays d’Actée ou à ses habitant. || vierge actéenne. Minerve. || dieux actéens. Dieux protecteurs du littoral.

ACTÉGÈTE. s. m. Bot. Genre de célastrinées, arbrisseaux sarmenteux, habitant Java.

AGTÈNE. s. f. (ét. gr., ά priv., κτενωτόζ, dentelé). Entom. Genre de coléoptères troncatipennes, fondé sur une espèce unique de Java, l’actène âtre ou vêtue de noir.

ACTÉNISTE. s. f. (ét., V. actène). Entom. Genre de coléoptères malacodernes, ayant pour type l’acténiste aux ailes noires de Cayenne.

ACTÉNODE. s. f. (en gr. άκτινοειδηζ étoilé). Entom. Genre de coléoptères buprestides, ayant pour type l’acténode jolie d’Amérique.

ACTÉONE. Myth. gr. Grand chasseur, fils d’Aristée et d’Autonoé. Surprit au bain Diane et ses nymphes ; la déesse irritée le métamorphosa en cerf et le fit dévorer par ses propres chiens. || Un des chevaux du char du Soleil.

— actéon. s. m. Moll. V. tornatelle.

— Entom. Nom vulgaire et spécifique du satyre actéon, lépidoptère diurne.

ACTÉPHILE. s. f. (ét. gr., άκτή, rivage φίλοζ, ami). Bot. Genre d’euphorbiacées, fondé sur une espèce unique de Java.

— s. m. Entom. Genre de coléoptères carabiques, ayant pour type le carabe printanier.

ACTER. v. n. 1re conj. (du lat. agere, actum, agir, faire). T. de prat. Faire des actes.

ACTEUR, TRICE. s. (en lat. actor ; d’agere, agir). Artiste dramatique ; celui, celle qui se voue au théâtre, qui exerce la profession de comédien, de comédienne. Ce mot s’applique aussi bien au premier tragique qu’au danseur et au modeste comparse. Se faire acteur, actrice. Bon acteur. Grand acteur. Mauvais acteur. Excellente actrice. Un acteur comique. Un acteur tragique. Un acteur de grand talent. Ce sont surtout les bonnes pièces qui font les bons acteurs. (Raym.) Lorsqu’un acteur est refusé par le public, après les débuts stipulés, son engagement est annulé. (Dictionn. de dr.) Celui, celle qui représente un personnage dans une pièce de théâtre.

— Tout acteur qui n’est pas nécessaire gâte les plus grandes beautés. (Volt.)

— Fig. Celui, celle qui joue un rôle dans une affaire qui est l’agent principal dans une action quelconque, qui feint, pour tromper, des sentiments et des passions qui n’existent pas dans son âme. Dieu ne paraît nulle part dans les autres histoires, les hommes en sont les seuls acteurs. (Mass.) Souvenez-vous que vous êtes ici comme acteur, et que vous jouez votre personnage dans une comédie, tel qu’il plaira


au maître de vous le donner. (Pasc.) Les plus grands acteurs ne sont pas au théâtre. (Prov.)

— ACTRICE. Au fig. Cette femme a été la principale actrice de la ruine de votre frère. (Raym.) La raison est historienne, mais les passions sont actrices. (Rivarol.) || Il est des cas où l’on emploie de préférence le masculin, parce qu’il annonce toujours une idée grande et noble. Dans les scènes de la vie morale, l’âme est tout à la fois acteur et témoin. (Gér.)

— Syn. comp. acteur. comédien. Acteur est un nom générique, Comédien est un nom spécifique. Acteur signifie qui agit, et se dit de celui qui joue un rôle quelconque dans n’importe quelle action de théâtre comédien signifie qui, ridiculise, et se dit de celui qui remplit un rôle quelconque dans une pièce appelée comédie, c’est-à-dire, qui a pour objet de peindre les mœurs et de châtier les ridicules. V. comédien.

ACTIAQUE. adj. des 2. g (pr. ak-ci-d-ke). Myth. anc.

— Epithète d’Apollon, qui avait à Actium une statue colossale servant de point de reconnaissance sur mer.

— jeux actiaques. s. m., pl. Se célébraient tous les trois ans en l’honneur d’Apollon. || Auguste, en mémoire de la défaite d’Antoine, institua à Rome des jeux actiaques, qu’on célébrait tous les cinq ans. || Ere actiaque. Chron. Qui date de la bataille d’Actium.

ACTIBION. s. m. (ét, gr., άκτίζ, rayon είδοζ, forme). Bot. Genre de champignons phacidiacés qui naissent sur les bois morts.

ACTIE. s. f. Entom. V. thrytocère.

ACTIEN, ENNE. adj. Habitant d’Actium, qui concerne la ville d’Actium.

ACTIF, IVE. adj. (dit lat. activus, formé de agere, faire, agir). Qui agit, qui a la vertu d’agir. Qualités actives. Principe actif. L’esprit est actif, la matière est passive. (Acad.) Nul être matériel n’est actif par lui-même. (J.-J. Rouss.)

– Agissant, occupé, vif, prompt. La malveillance est toujours plus active que le bien. (Nap.) La nature est un ouvrier actif. (Buff.) Une mémoire active et fidèle double la vie. (Mirabeau.)

— Prendre une part active dans une affaire. Y concourir de son action, de son influence.

— Dévot. Vie active. Celle qui consiste dans les actions extérieures de piété.

— Physiol. Organes actifs de la locomotion. Ceux qui déterminent les mouvements par leur action. || Sensations actives. Celles qui sont perçues lorsque l’attention dirige l’organe d’un sens vers l’objet dont on veut recevoir l’impression, lorsqu’on regarde, qu’on écoute, qu’on flaire, qu’on palpe ou qu’on goûte. || Vie active. C’est ainsi que Brisson a nommé ce que Bichat avait appelé vie animale, vie relation.

— Pathol. Maladie active. Celle qu’occasionne ou que caractérise l’exaltation de la vitalité. || Traitement actif, remède actif, poison actif. Celui dont l’efiet est prompt et énergique. Hémorrhagies actives. Celles qui proviennent d’un surcroît d’énergie dans les organes qui en sont le siège. Anévrismes actifs du cœur. Ceux qui résultent de l’hypertrophie de cet organe.

— Comptab. Dettes actives. Celles dont on est créancier par opposition à dettes passives, celles dont on est débiteur.

— Avoir voix active et passive. Se dit en parlant d’élections politiques, et signifie, Avoir droit d’élire et d’être élu. Les électeurs payant 500 fr. de contributions ont voix active et passive. (Acad.)

— Hist. polit. Citoyen actif. En 1793, on appelait ainsi celui qui réunissait les conditions requises pour avoir droit de suffrage dans les assemblées. || Se dit encore aujourd’hui du citoyen qui jouit des droits politiques.

— Adm. milit. Service actif. Le temps durant lequel un militaire est sous les drapeaux. La durée du service. actif est bornée trente ans. (Acad.) Il s’emploie aussi en administration civile pour certains services où il faut agir physiquement. Les douaniers font partie du service actif. (Raym.)

— Statist. Commerce actif. Se dit lorsqu’un état vend à l’étranger plus de denrées qu’il ne lui en achète ; il est opposé à commerce passif.

— Droit féodal. Vasselage actif. Se disait du vasselage ou devoir que l’on se faisait rendre, par opposition au vasselage passif, celui que l’on rendait.

— Gramm. Mot actif. Celui qui exprime une action. Actif est opposé à passif. L’agent fait l’action, le patient la reçoit. || Verbe actif. Celui qui marque que le sujet de la proposition fait l’action. Je parle, il lit, nous étudions. || Voix active. Se dit des verbes dont les terminaisons expriment un sens actif. En français, les verbes n’ont que la voix active. V. passif. || Au lieu de dire voix active, on dit au sens actif, ou simplement à l’actif, et dans ce dernier cas, actif se prend substantivement. Tous les verbes qui expriment une action ne sont pas appelés pour cela actifs. Il faut, pour qu’on leur donne ce nom, que l’effet de l’action ait lieu hors du sujet. Par exemple, battre est un verbe actif, parce que l’effet de l’action est hors du sujet ; mais aller, venir, dormir, quoiqu’ils expriment des actions, ne sont point des verbes actifs, mais des verbes neutre. Quelques grammairiens appellent les premiers verbes actifs transitifs, parce que l’effet de l’action passe du sujet à un objet ; et les seconds verbes actifs intransitifs, parce que ce passage n’a pas lieu. V transitif, intransitif.


— Entom. Il se dit des pattes qui servent par leurs mouvements à transporter l’insecte. Quelques papillons n’ont que quatre pattes actives ; les deux antérieures sont inertes.

ACTIF. s. m. (du lat. agere, agir, faire). Dans l’inventaire d’une succession, le bilan d’un négociant, et en général dans l’état estimatif des fortunes privées, ou dans la situation financière d’un pays, l’actif est la réunion de toutes les sommes dues, de toutes les créances à recouvrer tant en capital qu’en intérêts. || Au budget de l’état, l’actif se compose de la perception de tous les impôts, du recouvrement de toutes les créances, quelles que soient leur nature et leur source. || Actif présumé. Celui qui est établi. d’après le calcul moyen du revenu des années précédentes. || Actif net. Celui qui représente le chiffre exact du revenu de l’exercice.

— Hist. nat. Nom d’un petit crustacé.

ACTIGÉE. s. f. (et. gr., άκτίζ, ravon ; γή, terré). Bot. Genre de champignons ayant pour type l’actigée multifide de New-Jersey.

ACTILE. s. f. Genre de coquilles.

ACTIMÈRE. Bot. V. actinomère.

ACTINANTHE. s. f. (ét. gr., άκτίζ, ίνοζ, rayon ; άνθοζ, fleur). Bot. Genre d’ombellifères fondé sur une espèce qui croît en Syrie.

ACTINE. s. f. Entom. V. béris.

ACTINECTE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; νήκτηζ, nageur). Bot. Genre d’échinodermes ayant pour type l’actinecte olivacé.

ACTINÉE. s. f. Bot. Genre de céphalophores, des environs de Buenos-Ayres.

ACTINELLE. s. f. Bot. V. actinée.

ACTINENCHYME. s. m. Bot. Se dit du tissu cellulaire des végétaux, lorsqu’il est disposé sous la forme de rayons.

ACTINERIE. s. f. Polyp. Genre de zoanthaires mous, ayant pour type l’actinérie villeuse ou chargée de poil.

ACTINIAIRES ou ACTININES. f. pl. Polyp. Famille de polypes mous, isolés, rampants, etc., autrefois appelés Anémones de mer. — actiniaire. Adj. Des 2 g. Qui ressemble à une actinée.

ACTINIDIE. s. f. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; είδοζ, forme). Bot. Genre de dilleniacées, fondé sur une seule espèce qui habite l’Inde.

ACTINIDIEN, ENNE ; ACTINIE, ÉE ; ACTINIEN, ENNE,. adj. ACTINISTE. adj. des 2 g. Hist. nat. V. actiniaires.

ACTINIE. s. f. (en gr., άκτίζ, ίνοζ, rayon). Genre de polypes charnus et rayonnés à tentacules nombreux et de couleurs brillantes, s’épanouissant à la manière des fleurs et rudes au toucher ; d’où vient qu’on les appelle Anémones de mer, orties de mer.

ACTINIFORME. adj. des 2 g. Hist. nat. Qui a une forme rayonnée.

ACTINOBOLISME. s. m. (ét. gr., άκτινοβολια, rayonnement). Phys. Mot par lequel les anciens physiologistes désignaient l’action instantanée des esprits animaux, sous l’influence immédiate de la volonté de l’âme.

ACTINOCAME. s. m. Moll. V. bélemnite.

ACTINOCARPE. adj. des 2 g. (ét. gr. άκτίζ, rayon ; καρπόζ, fruit). Bot. Qui a des fruits rayonnés.

— s. m. Genre d’alismacées. V. damasone.

ACTINOCÉNIE. s. f. (et. gr., άκτίζ, rayon ; κενόζ, vide). Bot. Section du genre cénie.

ACTINOCÈRE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon, κήροζ, cire). Polyp. Genre de polypes à corps et pourvu d’un seul rang de tentacules.

ACTINOCHLOÉ. s. m. Bot. chondrosion.

ACTINOCLADION. s. m (et. gr., άκτίζ, rayon, κλαδιον, petite branche. Bot. Genre de champignons mucédinés, ayant pour type l’actinocladion rhodosperme ou à graines rosée.

ACTINOCRINITE. s. m.-,e(ét. gr., άκτίζ, rayon ; κρίνον, lis). Bot. foss. Genre de crinoïdes fossiles des terrains de transition.

ACTINOCYCLE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; κύκλοζ, cercle.) Bot. foss. Genre de bacillariées trouvées à l’état fossile dans les tripolis d’Oran.

ACTINODAPHNE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; δάφνη, laurier). Bot, Genre de laurinées tétranthérées, arbres de l’Inde.

ACTINODE. s. m. (et. gr., άκτίζ, rayon, είδοζ, aspect, figure). Bot. Genre de myrtacées chameliancées de la Nouvelle-Hollande.

ACTINODENDRON. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; δένδρον, arbre). Polyp. Genre d’actinies à tentacules simples et papilles latérales qui les rendent branchus.

ACTINODERME. s. m. Bot. V. géastre.

ACTINODIE. Bot. V. actinode.

ACTINODONTE. s. m. (ét. gr. άκτίζ, rayon ; όδούζ, dent). Bot. Genre de mousses plearocarpes, de l’Archipel indien.

ACTINODURE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; ούρα, queue). Ornith. Genre de gould, grive du Népaul.

ACTINOLÈPE, s. m. (ét. gr. άκτίζ, rayon ; λέποζ, écaille). Bot. Genre peu connu, établi sur une petite plante originaire de Californie.

ACTINOLOBE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon, λοβόζ, lobe). Polyp. Genre d’actiniens ou zoanthaires, ayant pour type l’actinolobe œillet.

ACTINOLYTHE. s. f. Minér. V. actinote.

ACTINOMÈRE. s. f. (ét. gr. άκτίζ, rayon ; μέροζ, partie). Bot Genre de composées, ayant pour type l’actinomère alternifolié de l’Amérique septentrionale.

ACTINOMORPHE. adj. et s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; μορφή, forme). Zool. Se dit des animaux sans vertèbres, à forme circulaire et rayonnée.

ACTINONÈME. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; νήμα, fil, cordon). Bot. Genre de champignons ayant pour type l’actinonème caulicole.

ACTINOPE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; πούζ, pied). Entom. Genre d’aranéides, ayant pour type l’actinope tarsal du Brésil.

ACTINOPHORE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; φορόζ, qui porte). Bot. Genre de sterculiacées bystnériées.

— Entom. Genre de coléoptères lamellicornes, correspondant au genre ateuche.

ACTINOPHRYDE. s. f. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; όφρύζ, sourcil). Infus. Genre d’infusoires à cils très-fins et très-longs.

ACTINOPHYLLE. Bot. V. sciadophylle.

ACTINOTHYTE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; φυτόν, plante Bot. Nom donné aux composées ou plantes à fleurs disposées en rayons.

ACTINOPTÈRES. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; πτερόν, aile). Bot. Section du genre wédélie.

ACTINORHYZE. s. m. Polyp. V. zoanthe.

ACTINOSPERME. s. m. Bot. V. balduina.

ACTINOSPORE. s. m. Bot. V. cimicaire.

ACTINOSTACHYDE. s. f. Bot. V. schizée.

ACTINOSTOME. adj. des 2 g. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; στόμα, bouche). Hist. nat. Qui a la bouche ou l’ouverture rayonnée.

ACTINOTE. Géognos. V. amphibole.

— Bot. Genre d’ombellifères saniculées, & collerette rayonnante, de la Nouvelle-Hollande.

— Genre de polypes, à polypiers striés en rayons, des environs de Trieste.

ACTINOTEUX, EUSE. adj. Géognos. Se dit d’une roche qui contient de l’actinote disgéminé.

ACTINOTIQUE. adj. des 2 g. Géogn. V. actinoteux.

ACTINOTHYRE. s. m. (ét. gr., άκτίζ, rayon ; θυρεόζ, bouclier). Bot. Genre de champignons ayant pour type l’actinothyre graminicole.

ACTINOZOAIRE. adj. et s. m. (ét. gr. άκτίζ, rayon ; ζώον, animal). Zooph. Se dit des animaux sans vertèbres, proprement dits radiaires.

ACTINURE. s. m. (ét. gK, άκτίζ, rayon ; ούρα, queue). Polyp. Genre de rotateurs philodines, à queue à 5 pointes, ayant pour type l’actinure de Neptune.

ACTION, s. f. (pr. ak-ci-on ; lat. actio ; d’agere, agir, faire). L’exercice de toute puissance active ; l’opération par laquelle se produit un effet ; influence de l’être qui agit : mouvement considéré comme cause : résultat de l’acte. L’action du feu, du soleil, du levier. L’action du corps, de l’âme, de la pensée. Une action rapide, forte, vive, soudaine, instantanée. Le goût nous invite, par le plaisir, à réparer les pertes continuelles que nous faisons par l’action de la vie. (Brill.-Sav.) L’action ré- ciproque des corps est constamment réglée par les lois immuables de la nature. (Chaptal.)

— Se dit particulièrement des actes de l’homme, tant physiques qu’intellectuels. Action vitale, naturelle, mécanique. L’action de marcher, de courir. L’action de penser, de réfléchir, d’étudier. Trop peu ou trop de nourriture trouble les actions de l’esprit. (Boss.)

— Occupation plus ou moins active, se dit par opposition à l’inaction. Sa vieillesse quoique pensante n’était pas sans action. (Boss.)

— Dans le sens moral, le mot action désigne la manifestation extérieure de l’activité intéllectuelle ; le produit extérieur de la détermination intérieure.

— Une bonne action. Une action de justice. Des actions de piété, de vertu. De grandes actions. Une belle actions. Des actions immortelles, glorieuses, éclatantes, renommées, nobles, héroïques. Une mauvaise action. Des actions criminelles, sanguinaires, détestables. Une action folle, extravagante, vicieuses frivole, indigne, cruelle, noire. Condamner, blâmer, empêcher, permettre une action. La vertu consiste dans l’habitude des bonnes actions, comme le vice dans l’habitude des mauvaises. (Cond.) Le tribunal infaillible des actions humaines, c’est la conscience mais la juridiction en est trop souvent déclinée par les passions. (Dubay.)

— Il se dit quelquefois de ce qu’on fait, par opposition à ce qu’on dit. Ses actions ne répondent pas à ses discours. Il faut des actions, et non pas des paroles. Il nous faut des hommes d’action, et non des discoureurs. Donne la confiance aux actions des hommes, ne l’accorde pas à leurs discours.. (Démoph.) Jugez-les par leurs aetions et non par leurs discours. (Fen.)

— en action, c’est-à-dire, Es pratique. Le bon n’est que le beau mis en action. (J.-J. Rouss.) On dit aussi avec le pluriel, en actions, c’est-à-dire, en une suite, par une série d’actions. Souvenez-vous qu’en toute chose vos leçons doivent être plus en actions qu’en discours. (Id.) La comédie est l’art d’enseigner la vertu et les bienséances en actions et en dialogues. (Volt.) Omiss. des dietionn.

— Prov. Les actions sont des mâles, les paroles sont des femelles. Il vaut mieux agir que parler.

— Action de grâces. Remerciment, témoignage de reconnaissance. Les airs retentissent de leurs bénédictions et de leurs actions de


grâces. (Mass.) L’armée commença l’action de grâces, toute la France suivit. (Boss.)

— Véhémence, chaleur à dire ou à faire quelque chose. Parler avec action. Parler d’action. Faire une chose avec action. Mettre de l’action dans tout ce qu’on fait.

— Etre en action. Être en mouvement, se remuer, s’agiter souvent.

— Se dit de la contenance, du maintien, du geste d’une personne. En action de suppliant. Ce sens est peu usité.

— Il se dit plus particulièrement de tout ce qui regarde la contenance, le mouvement du corps, les gestes de l’orateur, de l’acteur. Action noble, touchante, violente, véhémente, vive, naturelle, négligée, contrainte. La force de l’action. La chaleur de l’action. Action oratoire. Action théâtrale. Il faut que l’orateur exprime par une action vive et naturelle ce que ses paroles seules n’exprimeraient que d’une manière languissante. (Fén.)

— Langage d’action. Signes naturels où artificiels au moyen desquels on supplée à la parole. La parole conventionnelle qui s’adresse à l’intelligence, nous affecte bien moins vivement que le langage d’action qui parle au sentiment. (Virey.)

— Littérat. Le principal événement qui fait le sujet d’un poème épique, d’un drame, d’un roman. Unité d’action. Action simple. Action compliquée. Une action bien ménagée et conduite avec art.

Que dès les premiers vers l’action préparée,

Sans peine du sujet aplanisse l’entrée. (Boileau.)

|| Mouvement intérêt abondance de faits. Se dit d’un drame, d’une tragédie, étc., où les événements se passent plus en action qu’en récit, et où ils sont nombreux, variés, importants et bien enchaînées entre eux. En général il y a beaucoup de discours et peu d’action sur la scène française. (J.-J. Rouss.) Tout doit être action dans une tragédie. (Volt.)

— Art. mil. Se dit d’un combat, d’un engagement sur terre et sur mer, entre des troupes. Engager une action. Une action sanglante. Un jour d’action. Une action décisive. S’est-il trouvé dans une seule action où il ne se soit attiré les yeux de toute l’armée ? (Mass.) Il se dit plus particulièrement d’une petite bataille. L’action de Bléneau fut une affairé décisive. (Acad.)

— Action d’éclat ou action signalée. Belle action, exploit, haut fait. Sorte d’action de guerre considérée comme un acte individuel, un brillant fait d’armes sur le champ de bataille. Les actions d’éclat ne donnent droit à l’avancement de grade que quand, dans l’armée même, elles ont été mises immédiatement à l’ordre du jour de l’armée. (Bardin.)

— Avoir de l’action. Manège. Se dit d’un cheval ardent. On dit aussi qu’un cheval a la bouche en action, quand il mâche continuellement aon mors et qu’il jette beaucoup d’écume.

— Comm. Part d’intérêt qu’une personne a dans une société commerciale ayant pour but une opération déterminée. On donne aussi ce nom au titre qui établit cette part d’intérêt. Emission d’actions. Montant d’une action. Actions de la banque de France. Action sociale. Une action de mille francs. Créer des actions. Prendre une action. Action nominative. Action au porteur. Vendre, acheter, négocier des actions. Les actions ont haussé, ont baissé. Les actions sont une invention des temps modernes. L’année 1720 fut surtout mémorable par l’immense commerce d’actions qui se fit en France et presque simultanément en Angleterre. (Dict. de la Convers.)

— Fig. et fam. Ses actions haussent, ses actions baissent, se dit de quelqu’un dont la réputation, dont le crédit s accroît ou diminue.

— Fondre une action. T. de bourse. Vendre une action.

— Nourrir une action. Signifiait Payer exactement les sommes pour lesquelles on avait soumissionné à la caisse de la compagnie ; de là, on disait action nourrie.

— Action. Mécan. Mouvement communiqué par un corps à un autre corps. En général, l’action d’un corps sur un autre corps ne dépend que de son mouvement relatif. (D. des Sc. math.)

— Principe de la moindre action. Principe en vertu duquel, lorsqu’il survient quelque changement dans l’état des corps, la quantité d’action qui le produit est la plus petite possible.

— Quantité d’action. Produit de la masse d’un corps par sa vitesse et l’espace parcouru.

— Égalité de l’action et de la réaction. Principe qui forme la troisième des lois fondamentales de la mécanique de Newton qui l’énonce en ces termes : L’action est toujours égale et opposée à la réaction c’est-à-dire, que les actions de deux corps l’un sur l’autre sont toujours égales.

— Jurispr. Droit et moyen de réclamer devant les tribunaux ce qui nous est dû ou ce qui nous appartient. Que l’on considère l’action comme un moyen de réclamer en justice, ou bien comme un droit de poursuivre en justice, dans l’un et l’autre système on considère aussi l’action comme quelque chose de distinct et du droit qui en est la source et de la demande judiciaire par laquelle l’action sera exercée. (Berryat St-Prix.)

— Action arbitraire. Droit rom. Celle dans laquelle le juge peut déterminer le genre de satisfaction que le défendeur devra fournir au


demandeur, et ne pas condamner le premier s’il fournit cette satisfaction.

— Action de bonne foi. Droit rom. Celle dans laquelle le juge a le pouvoir d’estimer d’après l’équité le montant de la condamnation.

— Action civile. Celle qui a pour objet l’intérêt civil ou privé du citoyen qui l’exerce. || Droit rom. On appelle Action civile celle qui dérive du droit civil, par opposition à l’action prétorienne.

— Action criminelle. Celle qui a pour objet l’application de la loi pénale au fait réputé criminel, et la réparation du dommage causé à la société.

— Action directe. Celle qui est donnée contre quelqu’un à raison de son propre fait. Action indirecte, celle qui provient de l’engagement contracté ou du méfait commis par une personne soumise à la puissance de celui contre qui l’action est dirigée. On appelle action contraire, celle qui naît à l’occasion du contrat, d’un fait postérieur, qui peut exister ou ne pas exister.

— Action domaniale. Celle qui concerne le domaine de l’état.

— Action de droit étroit. Droit rom. Celle dans laquelle le juge, astreint par la formule, ne pouvait condamner le défendeur à payer une somme moindre ou plus forte.

— Action hypothécaire. Celle qui appartient au créancier hypothécaire contre le tiers-détenteur de l’immeuble hypothéqué.

— Action immobilière. Celle qui a pour objet la demande d’un immeuble.

— Action mixte. Celle qui, personnelle dans son principe mène au même résultat que l’action réelle.

— Action mobilière. Celle qui a pour objet la demande d’un objet mobilier.

— Action négatoire. Celle par laquelle un propriétaire nie que son héritage soit grevé de servitude.

— Action personnelle. Celle qui est dirigée contre une personne que nous prétendons être obligée envers nous.

— Action pétitoire. Celle par laquelle le propriétaire d’un fonds ou un ayant-droit sur ce fonds, agit contre le possesseur à l’effet de recouvrer sa propriété ou la jouissance de ses droits.

— Action possessoire. Celle par laquelle on demande à recouvrer la possession d’un droit, d’une universalité de meubles ou bien à être maintenu dans cette possession. Dans le premier cas, l’action possessoire est réintégrande ; dans le deuxième, elle est complainte.

— Action préjudicielle. Demande de juger préalablement une question d’état qui sert de préjugé à la question principale.

— Action principale. Celle qui se rapporte au principal objet d’une demande ; par opposition à action incidente.

— Action publique. Celle qui appartient à la société pour le maintien de l’ordre public, et qui est exercée en son nom par un magistrat. A Rome, elle était exercée par tout citoyen.

— Action réelle. Celle qui est dirigée contre le détenteur d’une chose, sans qu’il existe de sa part aucune obligation personnelle.

— Action. Dr. rom. Ordre que donnait le préteur de vérifier l’existence et la criminalité d’un fait, et de prononcer telle ou telle décision après cette vérification faite.

ACTIONISTE. s. m. Celui qui fait commerce d’actions, surtout en Angleterre.

ACTIONNAIRE. s. des 2 g. (pr. ak-ci-onè-re). Fin. et comm. Celui, celle qui a une ou plusieurs actions dans une entreprise commerciale, industrielle ou financière. Les actionnaires de la banque de France, d’un canal, d’un chemin de fer, d’un théâtre, etc. Réunir les actionnaires en assemblée générale.

ACTIONNER. v. a. 1re conj. Prat. Agir en justice contre quelqu’un, intenter action contre lui. S’il ne paie pas, il faudra le faire actionner, l’actionner. (Acad.)

— s’actionner. v. pron. Se donner du mouvement, agir avec activité.

ACTIUM. Géogr. ane. Promontoire et ville de Grèce, en Acarnanie, célèbre par la victoire navale qu’Octave y remporta sur Antoine et qui le rendit seul maître de l’empire. || Ere d’Actium. V. ère.

ACTIVEMENT, adv. D’une manière active ; avec activité, avec promptitude, diligence. Cela n’a pas été conduit assez activement.

— Gramm. On dit d’un verbe neutre qu’il s’emploie activement, lorsqu’il remplit le rôle d’un verbe actif et qu’il est suivi d’un régime ou complément direct. Cest ainsi que dormir, qui est un verbe neutre, est pris activement dans cette phrase : Dormez votre sommeil, grands de la terre. (Boss.)

ACTIVER. v. a. 1re conj. Mettre en activité, hâter, presser. Activez vos gens. Activer une affaire. Faites activer les travaux.

— Médec. Activer la circulation du sang.

— s’activer, v. pron. Etre activé. Ce travail ne peut s’activer davantage.

ACTIVITÉ, s. f. (en lat. activitas ; d’agere, agir, faire). Faculté active, puissance d’agir ; disposition naturelle qui nous porte habituellement à l’action ; qualité dont les éléments sont la promptitude du jugement, l’énergie de la volonté, la facilité des mouvements organiques. Se dit proprement des personnes, et ne s’applique aux choses que métaphoriquement. L’activité de l’âme. L’activité des esprits. L’activité de l’homme. L’activité du feu. La crainte de la douleur, la recherche du plaisir, sont les prin-



cipes de l’activité de l’homme. (Lloyd.) Mirabeau était doué d’une activité prodigieuse. (Villem.)

— Fig. Diligence, promptitude, vivacité dans l’action, dans le travail. Une activité turbulente. Une activité prodigieuse, menaçante. Commencez avec réflexion, suivez avec activité et persévérez. (Lévis.) Du midi au nord, des frontières de l’Italie aux montagnes volcaniques du Vivarais, une chenille excite partout l’activité. (Aimé Martin.)

— Physiq. Sphère d’activité. L’espace dans lequel la faculté d’agir d’un agent naturel est renfermée, et hors duquel il n’a point d’action appréciable.

— Fig. Il se dit aussi quelquefois du cercle, de l’étendue des entreprises des travaux, des projets dont un homme s’occupe, et pour lesquels il dirige et fait agir avec lui un certain nombre de personnes. Malheur à ceux qui se trouvent placés dans sa sphère d’activité (Acad.) Sa sphère d’activité n’est pas fort étendue. (Id.)

— Activité de service. Administ. civile on milit. Se dit des fonctionnaires qui exercent actuellement les fonctions de leur place, de leur grade ; et il exprime le mode d’existence ou la position des militaires qui, par le fait d’un emploi, d’un engagement, d’un enrôlement, comptent dans la force numérique de l’armée, ou dans la force comptabiliaire d’un corps. La durée de l’activité de service se calcule par jours mois et années ; les résultats de cette supputation concourent à déterminer le quantum de la solde de retraite. (Bard.) || On dit aussi dans le même sens l’activité militaire, ou tout simplement l’activité. L’activité s’éteint par la réforme la désertion etc. (Bard.) || Par opposition on emploie, dans l’armée, le terme de non-activité. Du reste, plus d’une de ces expressions sont vagues ou impropres, puisque les officiers en retraite, ceux qui seraient suspendus sans que ce fut de leur fait ou de leur faute, ne sont point en activité, et ne sont pourtant pas en non-activité. (Bard.)

— Philos. Principe intérieur de détermination ou d’action. || Activité libre. Celle que l’être exerce où n’exerce pas, selon sa volonté. || Activité fatale. Celle qui ne peut manquer de se déployer dans une circonstance déterminée.

ACTORE. s. m. (ét. gr., άκτή, rivage ; όροζ, bord). Entom. Genre de diptères brachocères.

— Entom. Genre de coréens anisoscélites, ayant pour type l’actore fossoyeur.

ACTUAIRE, adj. des 2 g. et s. m. Ant. rom. Se disait d’une sorte de navire léger, à voile et à rames. || s. m. Scribe, notaire officier public chargé de dresser les actes publics. || Certains préposés de la milice sous les empereurs ; ils étaient chargés de la comptabilité des vivres et inscrivaient les opérations de la campagne.

ACTUALISATION, s. f. Néol. Action d’actualiser résultat de cette action.

ACTUALISER. v. a. 1re conj. Néol. Rendre actuel, réduire en acte.

— s’actualiser. v. pron. Devenir actuel.

ACTUALITÉ, s. f. Néol. Etat présent, actuel, d’une chose ; qualité d’une chose qui présente une utilité, un intérêt actuel. Cette proposition ne manque pas d’actualité. Ces questions sont palpitantes d’actualité. Ces idées pouvaient jouir dans ce temps-là d’une assez grande actualité : le goût est simple en actualité, c’est- à-dire qu’il ne peut être impressionné par deux saveurs en même temps. (Brill.-Sav.)

— Il se prend aussi quelquefois pour la chose même qui présente cette qualité, et dans ce sens il s’emploie au pluriel. Omission de Landais. Le journalisme ne peut vivre que d’actualités. (Raym.)

ACTUARIOLE. s. m. Ant. rom. Petit navire, diminutif de ceux qu’on nommait actuaires.

ACTUEL, ELLE. adj. (du lat. actualis, rad. Actum, acte ; d’agere, agir, faire). Effectif, réel. Paiement actuel. Mais il s’emploie plus fréquemment dans le sens de, Présent, qui a lieu, qui a cours, qui est usité dans le moment présent, soit par rapport au moment où l’on parle, soit par rapport à un temps passé dont on s’occupe. Le moment actuel. La saison actuelle. L’état actuel. Les mœurs actuelles. La monnaie actuelle. Le langage actuel. La situation actuelle des affaires. On dirait que l’homme, dans l’état actuel de la sociétë, n’a presque rien à faire du simple don de la vie. (Mme de Staël.) Comment l’homme parviendra-t-il à ses fins dans son état actuel d’imperfection ? (Chateaub.)

— Dans ce sens, il se dit aussi des personnes. Omission de l’Académie. Le propriétaire actuel du château de Ferney a conservé la chambre de Voltaire telle qu’elle était à sa mort. (A. Karr.)

— Pathol. Qui a la vertu d’agir immédiatement. Cautère actuel, fer rougi au feu dont on se sert pour cautériser une tumeur, une plaie, etc.

— Logiq. Qui est en acte ou réellement. Volonté actuelle, se dit par opposition à volonté potentielle. || Intention actuelle, par opposition à intention virtuelle. || Grâce actuelle, par opposition à grâce habituelle. Péché actuel, par opposition à péché originel.

ACTUELLEMENT, adv. A présent, présentement, au moment où l’on parle. Il est actuellement en Afrique. On juge actuellement soa procès. Il demeure actuellement en tel endroit. Si l’objet est présent, l’attention et la sensation qu’il fait actuellement sur nous. (Condill.)

— Logiq. En acte ; il est opposé à virtuellement, qui veut dire en puissance.