Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carlovingienne à la Renaissance/Armoire

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ARMOIRE, s. f. (amaire, almaire). Ce mot était employé, comme il l’est encore aujourd’hui, pour désigner un meuble fermé, peu profond, haut et large, à un ou plusieurs vantaux, destiné à renfermer des objets précieux.

De tous les meubles, l’armoire est peut-être celui qui a conservé exactement ses formes primitives. On a retrouvé à Pompéi des armoires ou empreintes d’armoires qui donnent la structure et l’apparence des meubles de cette nature dont on se sert encore aujourd’hui.

Autrefois, dans les églises, il était d’usage de placer des armoires de bois, plus ou moins richement décorées, près des autels, pour conserver sous clef les vases sacrés, quelquefois même la sainte Eucharistie. Des deux côtés de l’autel des reliques de l’église abbatiale de Saint-Denis, Suger avait fait disposer deux armoires contenant le trésor de l’abbaye[1]. Derrière les stalles, sous les jubés, des armoires contenaient les divers objets nécessaires au service du chœur, parfois même des vêtements sacerdotaux ; beaucoup de petites églises n’avaient pas de sacristies, et des armoires en tenaient lieu. Il va sans dire que les sacristies contenaient elles-mêmes des armoires dans lesquelles on déposait les trésors, les chartes et les livres de chœur. Près des cloîtres, dans les monastères, une petite salle, désignée sous le nom d’armaria, contenait des meubles renfermant des livres dont les religieux se servaient le plus habituellement pendant les heures de repos. Le gardien de la bibliothèque du couvent était appelé armariatus ou armarius[2].

Les armoires placées près des autels étaient assez ornées pour ne pas faire une disparate choquante au milieu du chœur des églises, alors si remplies d’objets précieux. Autant qu’on peut en juger par le petit nombre de meubles de ce genre qui nous sont conservés, les armoires, jusqu’au XIVe siècle, étaient principalement ornées de peintures exécutées sur les panneaux pleins des vantaux, et de ferrures travaillées avec soin, rarement de sculptures La forme générale de ces meubles était toujours simple, et accusait franchement leur destination. Un des exemples les plus anciens d’armoires réservées au service du culte existe dans l’église d’Obazine (Corrèze). Cette armoire (fig. 1) se compose de pièces de bois de chêne d’un fort échantillon. Les deux vantaux, terminés en cintre à leur extrémité supérieure, sont retenus chacun par deux pentures de fer forgé, deux verrous ou vertevelles les maintiennent fermés. On ne remarque sur la face de cette armoire, comme décoration, qu’un rang de dents de scie sur la corniche et de très-petits cercles avec un point au centre, gravés régulièrement sous cette corniche et autour des cintres des vantaux. Les angles sont adoucis au moyen de petites colonnettes engagées. Ce meuble, qui paraît dater des premières années du XIIIe siècle, était probablement peint, car on remarque encore quelques parcelles de tons rouges entre les dents de scie de la corniche. Les deux côtés de l’armoire d’Obazine sont beaucoup plus riches que la face ; ils sont décorés d’un double rang d’arcatures portées par de fines colonnettes annelées (fig. 2). Ces deux figures font comprendre la construction de ce meuble, qui se compose de madriers de 10 centimètres d’épaisseur environ, fortement assemblés, et reliés en outre à la base de la face par une platebande de fer. Pour compléter ces figures, nous donnons (3) le détail d’un des chapiteaux de l’arcature, (4) la vertevelle, et (5) l’extrémité de l’un des deux verrous, se terminant, pour faciliter le tirage ou la poussée, par une tête formant crochet. Cette recherche dans la ferrure d’un meuble aussi grossier en apparence fait ressortir le soin que l’on apportait alors à l’exécution des objets mobiliers les moins riches. Ces verrous sont forgés, et les deux petites têtes qui terminent leurs extrémités sont remarquablement travaillées.

La cathédrale de Bayeux conserve encore, dans la salle du trésor, une armoire du commencement du XIIIe siècle, d’un grand intérêt. Cette armoire, mutilée aujourd’hui, occupait autrefois tout un côté de la pièce dans laquelle elle est placée. Elle était destinée à renfermer des châsses[3], et l’on y voit encore l’armure de l’homme d’armes du chapitre (armiger capituli)[4] gentilhomme qui, par son fief relevant de la couronne, était tenu d’assister, armé de toutes pièces, à l’office de la cathédrale aux grandes fêtes, et de se tenir près de l’évêque toutes les fois qu’il officiait solennellement[5]. Cette armoire était entièrement couverte de peintures représentant des translations de reliques. Les sujets qui garnissent les panneaux sont blancs sur un fond vermillon ; les montants et traverses sont remplis par un ornement blanc courant sur un fond noir avec filets rouges ; les fleurons sont blancs, noirs et rouges. Nous donnons (fig. 6) la moitié de cette armoire, qui se composait autrefois de huit travées. Une seule tablette épaisse la sépare horizontalement au droit de la traverse intermédiaire, de sorte que les panneaux, s’ouvrant deux par deux, laissaient voir séparément les cellules du meuble ; il fallait forcer l’une après l’autre toutes les vertevelles pour s’emparer des objets renfermés dans chacune de ces cellules. On remarquera la disposition des verrous fermant à la fois deux panneaux en s’engageant dans un piton posé sur les montants, et le dépassant assez pour mordre sur le panneau qui n’est pas muni de vertevelle. La figure 7 présente quelques détails des ferrures ; la figure 8, un détail de l’un des fleurons terminant le montant du milieu, et les peintures de ces montants et traverses.

Ces exemples font voir que la principale décoration de ces meubles était obtenue au moyen des ferrures nécessaires et de peintures recouvrant les panneaux. La menuiserie était d’une grande simplicité ; les planches formant les panneaux, assemblées à grain d’orge (fig. 9) ou simplement collés à joints vifs. Il semble qu’alors on tenait à conserver à ces armoires l’aspect d’un meuble robuste, bien fermé. Ce ne fut que a beaucoup plus tard que la sculpture vint décorer ces menuiseries. Nous ne pourrions affirmer cependant qu’il n’y eût pas, avant le XVe siècle, d’armoires sculptées : mais en observant les rares exemples d’objets de menuiserie romane, on pourrait admettre que les panneaux (lorsque la peinture seule n’était pas appelée à les décorer) recevaient une sculpture plate, champlevée, telle que celle que nous voyons encore conservée sur l’une des portes de la cathédrale du Puy en Velay. Les panneaux de cette porte, de sapin, représentent des sujets peints sur une gravure dont les fonds sont renfoncés de 2 ou 3 millimètres. Nous avons vu en Allemagne, dans la cathédrale de Munich, des armoires du XVe siècle dont les planches sont ainsi travaillées ; les fonds sont peints en bleu sombre, et les ornements conservent la couleur naturelle du bois. Souvent aussi les vantaux des armoires-trésors étaient-ils bordés de bandes de fer battu, étamé ou peint, avec rehauts dorés. Ces bandes de fer, croisées en façon de treillis avec rivets aux rencontres, étaient posées sur cuir, sur drap ou vélin. Mais une des plus belles armoires anciennes connues se trouve dans le trésor de la cathédrale de Noyon. Les panneaux sont entièrement peints à l’extérieur et à l’intérieur, et déjà le couronnement de ce meuble, qui date des dernières années du XIIIe siècle, est orné de sculptures. Cette armoire était certainement destinée, comme celle de Bayeux, à renfermer des châsses et ustensiles réservés au culte. A l’extérieur, les panneaux sont couverts de peintures fines sur fond pourpre damasquiné, et bleu semé de fleurs de lis blanches, représentant des saints ; à l’intérieur, ce sont des anges jouant de divers instruments de musique, tenant des encensoirs et des chandeliers. De petits créneaux se découpent sur le couronnement. Ce genre d’ornement fut employé fréquemment dans le mobilier pendant le XIVe siècle. Voici un ensemble de cette armoire (10) ; nous supposons les volets ouverts, et, comme on peut le remarquer, ces volets sont brisés, c’est-à-dire qu’ils se développent en dix feuilles, afin de ne pas présenter une saillie gênante lorsque l’armoire est ouverte. Les volets sont suspendus à des pentures de fer étamé, et la peinture est exécutée sur une toile marouflée sur le bois. M. Vitet, dans sa Description de la cathédrale de Noyon, et M. Didron, dans les Annales archéologiques[6] ont donné une description étendue de ce meuble ; nous y renvoyons nos lecteurs, car nous ne pourrions rien ajouter à ce que ces deux savants archéologues en ont dit. Nous joignons à la figure 10 une partie coloriée de l’armoire de Noyon (pl. I)[7], qui nous dispensera de plus longs détails. Les deux côtés du meuble de Noyon sont décorés de chevrons peints en blanc, alternés avec d’autres chevrons jaunes.

Le moine Théophile, dans son Essai sur divers arts, ouvrage qui date du XIIe siècle, donne la manière de préparer les panneaux, les portes de bois destinés à recevoir de la peinture. Cette méthode paraît avoir été suivie dans la fabrication des deux armoires de Bayeux et de Noyon. Il dit[8] : « … Que l’on joint d’abord les planches avec soin, pièce à pièce, et à l’aide de l’instrument à joindre dont se servent les tonneliers et les menuisiers (le sergent). On les assujettit au moyen de la colle de fromage… » L’auteur donne ici la manière de faire cette colle : « … Les tables assemblées au moyen de cette colle, quand elles sont sèches, adhèrent si solidement, qu’elles ne peuvent être disjointes ni par l’humidité ni par la chaleur. Il faut ensuite les aplanir avec un fer destiné à cet usage. Ce fer, courbe et tranchant à la partie intérieure, est muni de deux manches, afin qu’il puisse être tiré à deux mains. Il sert à raboter les tables, les portes et les écus, jusqu’à ce que ces objets deviennent parfaitement unis. Il faut ensuite les couvrir de cuir, non encore tanné, de cheval, d’âne ou de bœuf. Après l’avoir fait macérer dans de l’eau et en avoir raclé les poils, on en exprimera l’excès d’eau : dans cet état d’humidité, on l’appliquera (sur le bois) avec la colle de fromage. » Dans le chapitre xix, Théophile indique le moyen de couvrir ces panneaux revêtus de cuir d’un léger enduit de plâtre cuit ou de craie ; il a le soin de recommander l’emploi de la toile de lin ou de chanvre, si l’on n’a pas de peau à sa disposition ; puis enfin, au chapitre suivant, il donne les procédés pour peindre ces tables ou portes en rouge, ou de toute autre couleur, avec de l’huile de lin, et de les couvrir d’un vernis.

Le goût pour les meubles plutôt décorés par la peinture que par la sculpture paraît s’être affaibli à la fin du XIVe siècle ; à cette époque, les moulures et les ornements taillés dans le bois prennent de l’importance et finissent par se substituer entièrement à la polychromie. Il faut dire qu’il en était alors de la menuiserie et de l’ébénisterie comme de la construction des édifices ; on aimait à donner à la matière employée la forme qui lui convenait. Les larges panneaux, composés d’ais assemblés à grain d’orge ou simplement collés sur leurs rives, mais non barrés, emboîtés ou encadrés, exigeaient des bois parfaitement secs, si l’on voulait éviter qu’ils ne vinssent à se voiler, ils se désassemblaient facilement, se décollaient ou se fendaient, malgré les préparations auxquelles ils étaient soumis et les toiles, cuirs ou parchemins collés à leur surface. On prit donc, pendant les XIVe et XVe siècles, le parti de ne donner aux panneaux des meubles que la largeur d’une planche, c’est-à-dire de 18 à 25 centimètres, et d’encadrer ces panneaux, afin de les maintenir plans, d’empêcher leur coffinage. Ce fut une véritable révolution dans la menuiserie et l’ébénisterie. La construction et la forme des meubles, soumises à ce nouveau principe, changèrent d’aspect. Les boiseries, comme tous les objets destinés à l’ameublement, au lieu de présenter ces surfaces simples, unies, favorables à la peinture, furent divisées par panneaux de largeur à peu près uniforme, compris entre des cadres, des montants et traverses accusés et saillants. Toutefois ces pièces principales étaient toujours assemblées carrément ; on ne connaissait ou l’on n’admettait pas les assemblages d’onglet : et en cela les menuisiers et ébénistes agissaient sagement ; l’assemblage d’onglet étant une des plus fâcheuses innovations dans l’art de la menuiserie, en ce qu’il ne présente jamais la solidité des assemblages à angle droit, et qu’au lieu de maintenir les panneaux, il est soumis à leur déformation.

A la fin du XIIIe siècle et au commencement du XIVe, on mariait volontiers cependant la peinture à la sculpture dans les meubles, et le bois sculpté destiné à être peint était parfois couvert de vélin sur lequel on exécutait des gaufrures, des dorures, des sujets et ornements coloriés. Nul doute que, parmi ces grandes armoires qui étaient disposées près des autels, il n’y en eut qui fussent ainsi décorées ; mais c’est surtout dans les palais que ces meubles sculptés et revêtus de gaufrures et peintures devaient se rencontrer, car jusqu’au XVe siècle l’armoire, le bahut, la huche, étaient à peu près les seuls meubles fermants, d’un usage habituel, chez le riche seigneur comme chez le petit bourgeois.

Les vantaux des armoires présentent donc rarement, à partir de la fin du XIVe siècle, des surfaces unies recouvertes de peinture ; ils se composent de plusieurs panneaux embrevés à languettes dans des montants et traverses. Mais, à dater de cette époque, l’art du menuisier et du sculpteur sur bois avait fait de grands progrès : on ne se contente pas de panneaux simples ; autant pour les renforcer par une plus forte épaisseur vers leur milieu que pour les décorer, ils présentent, le plus souvent, un ornement en forme de parchemin plié. Tels sont les panneaux du vantail de la petite armoire que nous donnons ici (11)[9], fermée par un simple verrou (12). Deux pentures suspendent le vantail ; voici le détail, moitié d’exécution, de l’une d’elles (fig. 13). A l’appui de la figure 11, nous donnons diverses combinaisons de ces panneaux figurant des parchemins pliés, si fort en vogue pendant le XVe siècle (fig. 14).

La salle du trésor de l’église Saint-Germain l’Auxerrois, située au-dessus du porche, contient encore ses armoires, qui datent de la construction de cette partie de l’édifice, c’est-à-dire de la fin du XVe siècle. Ces meubles sont fort bien exécutés, comme toute la menuiserie de cette époque, parfaitement conservés, et garnis de leurs ferrures. Les armoires du trésor de Saint-Germain l’Auxerrois portent sur un banc (fig. 15) dont la tablette se relève. Ici les vantaux sont unis, sans peintures, décorés seulement de jolies pentures de fer plat découpé et d’entrées de serrures posées sur drap rouge ; car alors les ferrures de meubles, n’étant pas entaillées dans le bois comme elles le sont aujourd’hui, s’appliquaient sur des morceaux de cuir ou de drap découpé. La peau ou le drap débordait quelquefois la ferrure par une petite fraise, et se voyait à travers les à-jour de la serrurerie. Les vis n’étaient pas encore usitées à cette époque pour attacher les ferrures aux bois[10] ; les pièces de serrurerie sont toujours clouées ; les pointes des clous étaient même souvent rivées à l’intérieur, afin d’éviter qu’on ne pût les arracher ; dès lors, pour pouvoir frapper sur les têtes de clous sans gâter le bois, et pour que les ferrures portassent également sur toute leur surface, l’application d’un corps doux, flexible, entre elles et le bois, était nécessaire : la présence du drap ou de la peau est donc parfaitement motivée.

Les pentures, moitié d’exécution, de l’armoire que nous donnons (fig. 15), sont faites de fer battu ajouré : celles des vantaux du haut (16) sont ornées d’inscriptions : Sancte Vicenti, ora pro nobis[11], et de feuillages, compris entre deux tringlettes de fer carré décorées par des coups de lime qui composent, par leur alternance, un petit rinceau de tigettes, ainsi que l’indique la coupe A ; celles des vantaux du bas sont simplement ajourées, sans tringlettes. Nous donnons (fig. 17) l’extrémité de l’une d’elles. La construction de ce meuble est fort simple. Les montants ne sont pas des poteaux carrés, mais des madriers de 10 centimètres de face sur 5 centimètres d’épaisseur, reliés par des traverses sur lesquelles une moulure (fig. 18) est clouée. Une frise à jour (19) couronne la traverse supérieure entre les têtes des montants. Le banc à et les côtés du meuble sont formés de panneaux présentant des parchemins pliés. On remarquera que les montants sont terminés par des fleurons. A dont la face antérieure seule est ornée de crochets sculptés aux dépens de l’équarrissage du bois. Ces armoires sont disposées pour la pièce qu’elles occupent. Celle-ci est boisée ainsi que le plafond, dont les nerfs saillants viennent retomber sur des culs-de-lampe sculptés représentant divers personnages.

Généralement, les ferrures des meubles, toujours apparentes, sont étamées, peintes ou dorées, forgées avec soin. C’est surtout à partir du XVe siècle que les entrées de serrures des meubles sont richement travaillées, présentent des compositions obtenues au moyen de feuilles de fer battu découpées rapportées les unes sur les autres, et formant ainsi des successions de plans qui paraissent fort compliqués, quoique d’une fabrication très-simple. (Voy. Fabrication des meubles, Serrurier.)

Dans les salles de trésor des églises, les armoires, bardées de bandes de fer battu maintenues avec des clous à tête ronde, sont généralement d’un travail fort grossier. On plaçait également, dans les trésors, de petites armoires portatives destinées à contenir quelques reliques précieuses que l’on déposait, avec le meuble qui les contenait, sur les autels ou les retables, à certaines époques de l’année, ou que l’on portait en procession. La miniature dont nous donnons une copie[12] reproduit une de ces petites armoires (fig. 20). Elle est complètement dorée et semble contenir une couronne et un calice.

Il ne paraît pas que les armoires affectées aux habitations privées aient eu des formes particulières ; elles ne se distinguaient des meubles destinés à un usage religieux que par les sujets profanes peints ou sculptés sur leurs surfaces, par des écussons armoyés, des devises ou sentences.

Les provisions d’armes de main et les armures même, chez les seigneurs châtelains, étaient soigneusement rangées dans de grandes armoires disposées à cet effet dans de vastes salles.

Pour le bourgeois et le paysan, l’armoire était le meuble principal de la famille[13], et il est resté tel dans beaucoup de campagnes, où la fille qui se marie apporte toujours l’armoire dans la maison de son époux. Il n’y a guère de maison de paysan, en France, qui n’ait son armoire de chêne ou de noyer, et ce meuble se distingue des autres par son luxe relatif. L’armoire est le trésor de la famille du paysan ; il y renferme son linge, l’argenterie qu’il possède, ses papiers de famille, ses épargnes. Ce meuble, qui représente son avoir, est entretenu avec soin, luisant, les ferrures en sont brillantes. Pour que cette tradition se soit aussi bien conservée, il faut que l’armoire ait été, pendant toute la durée du moyen âge, la partie la plus importante du mobilier privé ; aussi les armoires des XVIe et XVIIe siècles ne sont-elles pas rares, et nous ne croyons pas nécessaire d’en donner ici un exemple.

  1. Dom Doublet. — Du Cange, Gloss., Armaria, Armariolus.
  2. Udalricus, lib. III Constiet, Cluniac, cap. x « Præcentor (cantor) et armarius : armarii nomen obtinuit eò quòd in ejus manu solet esse bibliotheca, quæ et in alio nomine arinarium appellatur. »
  3. Hist. somm. de la ville de Bayeux, par l’abbé Béziers, 1779.
  4. Voyez la description et la gravure de cette armoire dans la Revue de l’architecture de M. Daly, tome X, page 130. La gravure, entière et fort exacte, est faite sur les dessins de M. Ruprich Robert.
  5. Hist. somm. de la ville de Bayeux, par l’abbé Béziers.
  6. Tome IV, page 369.
  7. Ce dessin colorié nous a été communiqué par M. Bœswilwald, architecte.
  8. Cap xvii.
  9. Nous devons ce dessin à l’obligeance de M Ruprich Robert. Cette armoire est posée à l’angle d’une salle de l’église de Mortain (abbaye Blanche), garnie de stalles ; elle était élevée au niveau de l’appui des siéges et se raccordait avec la boiserie formant leur dossier.
  10. La fabrication à la main, des vis, était trop longue et difficile, pour que l’on employât ce moyen d’attache dans la menuiserie. La vis ne se trouve que dans les armes.
  11. L’église Saint-Germain l’Auxerrois fut primitivement dédiée à saint Vincent.
  12. Manusc. anc. fonds Saint-Germain. — Psalm., Bibl. nat., no 37.
  13. « A Roem fist mainte malice (l’archevêque Maugier),
    « N’i lessa teile ne galice,
    « Ne croix, ne boen drap en almaire,
    « Ke Maugier ne fist forz traire ;
    « … »

    (Le Roman de Rou, XIIe siècle, vers 9685 et suiv., 2e partie)