Discussion:Lélia
Ajouter un sujet- L. Vincent : Il y a eu deux éditions de Lélia, celle de 1833 et celle de 1839 ; … … Les deux éditions sont différentes. Les divergences sont parfois nombreuses et les coupures importantes. Ces changements et ces coupures suppriment en général des expressions très fortes, des tableaux d’un réalisme tel, qu’ils provoquèrent d’amères critiques.
Éditions
[modifier]- première version : Édition originale 1833
- JP Méline, Bruxelles [1]
- Lélia, 2 tomes, Paris, Henri Dupuy et L. Tenré, imprimeur-éditeur, 1833, dédicace de George Sand à Gustave Planche [2] [3] [4] [5]
- 2ème version avec une fin différente : 1839 chez Felix Bonnaire (3 vol. - in-8°) [6] [7]
- Lélia, tome I et II Bruxelles, Société belge de librairie, 1841 [8] [9]
- Œuvres de George Sand, nouvelle édition, revue par l’auteur et accompagnée de morceaux inédits, Lélia, Paris, Perrotin, 1842 [10], Lélia II Spiridion [11]
- Lélia, Préface et notice nouvelle, illustré par Tony Johannot et Maurice Sand, Paris, Michel Lévy frères, 1867, IA Gallica --
- Calmann Lévy, 1881, [12]
Controverse sur la présentation de la page
[modifier]Sources
[modifier]Critiques, résumés, …
[modifier]- 1837 : Gazette des salons : journal des modes et de musique, artistique, littéraire et théâtral [13]
Lélia, la gigantesque création où s’est révélée G. Sand ; nouvelle Médée, au front pâle, aux yeux fixes et fascinateurs, qui verse à flots de sa coupe l’incrédulité, la haine, l’isolement et le suicide. Un jeune poète, mélancolique et confiant, s’attache à cette femme qui n’a déjà plus de cœur à donner, et qui repousse ses désirs, parce qu’elle ne croit pas ou ne croit plus à l’amour des sens. De là des monologues enthousiastes, des lettres d’amour délirant. Et puis, victime d’une infâme supercherie, Sténio est poussé par Lélia aux bras d’une courtisane. Désabusé et flétri, l’infortuné se roule dans la débauche, résolu d’y noyer sa vie. Trenmor, l’ami de Lélia et le sien, veut l’arracher, mais trop tard, à cette existence corrosive. Sténio finit par le suicide ; il se jette dans le lac d’un couvent de Camaldules, où son ami l’avait laissé pour chercher un peu de calme au sein de la solitude. Enfin, Lélia ramenée en scène pour pleurer sur le cadavre de l’homme qu’elle a perdu, est étranglée par un moine fou qui l’avait aimée autrefois. Tissu d’infamies dont l’invraisemblance peut à peine diminuer l’horreur !!!…
L’impression qui naît de la lecture de Lélia est toute de trouble et d’atroce souffrance. Il n’y a pas, en effet, d’infortune plus poignante, que l’union de deux êtres qui ne devaient pas se rencontrer, ou que la séparation de ceux qui devaient s’unir pour être heureux. Mais il ne faut pas qu’un mal dont quelques individus sont coupables devienne un prétexte d’outrager la société elle-même, et de se jeter dans le dévergondage le plus effréné de l’intelligence et du cœur. Luttons de toutes nos forces contre l’égoïsme, contre l’avidité insatiable d’argent, contre les préjugés qui enchaînent l’amour aux convenances d’un sordide intérêt, qui compte pour rien la vie toute entière de l’âme ; mais n’attaquons point la base et le soutien des familles, et de la société qu’elles composent. Que chacun de nous se dise : Je souffre, mais j’aurais pu ne point souffrir ; je veux donc faire que d’autres ne souffrent pas, ou souffrent moins que moi. Mais ne disons jamais : Puisque je souffre, je veux devenir coupable : puisque je souffre, c’est qu’il n’y a pas au monde de loi morale ; c’est qu’il n’y a pas de règle pour mes passions, c’est qu’il n’y a rien pour apaiser la soif de bonheur qui me dévore, et je veux imaginer tout pour effacer en moi jusqu’à l’idée de cette souffrance.
Quand on a repoussé Lélia, avec ses pensées lugubres et subversives de l’ordre moral, on sent le besoin d’admirer ses formes si riches, si nerveuses, nous voudrions ajouter si grandioses ; sa publication a excité dans le monde littéraire de vives oppositions et les plus rudes assauts de la critique. Et sans doute G. Sand s’y était préparée ; car on ne jette pas impunément à la société une provocation si soudaine, si haineuse et si complète sans en mesurer la portée, sans attendre de pied ferme une vigoureuse réaction. D’ailleurs, briser la plume qui avait tracé Lélia c’eût été de sa part s’avouer vaincue, faire tacitement une sorte d’amende honorable aux vices sociaux qu’elle venait de flageller. Mais G. Sand avait épuisé dans ses dernières pages tout ce que son âme contenait de fiel. Et si dans les livres qu’elle publia plus tard, on reconnaît sans peine les fortes inspirations qui créèrent Indiana et Lélia, on y trouve aussi moins d’exaltation, et l’individualité du moi s’y fait moins sentir. Le Secrétaire intime est un long rien, gracieux et coquet, qui ne recèle pas même l’ombre d’une pensée ; on dirait que cette bluette capricieuse est choisie exprès pour faire ressortir plus encore les teintes sombres de Lélia.
- 1839 Revue des Romans