Fables de La Fontaine (éd. 1874)/Le Rat de Ville, et le Rat des Champs
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IX
LE RAT DE VILLE ET LE RAT DES CHAMPS
Autrefois le rat de ville
Invita le rat des champs,
D’une façon fort civile,
À des reliefs d’ortolans.
Sur un tapis de Turquie
Le couvert se trouva mis.
Je laisse à penser la vie
Que firent ces deux amis.
Le régal fut fort honnête ;
Rien ne manquait au festin :
Mais quelqu’un troubla la fête
Pendant qu’ils étaient en train.
À la porte de la salle
Ils entendirent du bruit :
Le rat de ville détale ;
Son camarade le suit.
Le bruit cesse, on se retire :
Rats en campagne aussitôt ;
Et le citadin de dire :
Achevons tout notre rôt.
C’est assez, dit le rustique :
Demain vous viendrez chez moi.
Ce n’est pas que je me pique
De tous vos festins de roi :
Mais rien ne vient m’interrompre ;
Je mange tout à loisir.
Adieu donc. Fi du plaisir
Que la crainte peut corrompre !