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Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Atlantique (océan)

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Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 3p. 865).


Atlantique (Océan), une des cinq grandes divisions hydrographiques du monde, l’ancien et le nouveau continent, ainsi nommé à cause de la célèbre Atlantide, que les anciens croyaient avoir existé à l’ouest des côtes de l’Europe. En prenant pour limites de l’océan Atlantique, au N. et au S., les deux cercles polaires, où il se confond avec les deux océans glacials, il occupe une superficie de 894, 300 myr. c. Il baigne, à l’est, le long des côtes européennes, la Norvège, la Suède, le Danemark, le nord de l’Allemagne, la Hollande, les îles Britanniques, la France, l’Espagne et le Portugal ; puis en Afrique, tous les royaumes, colonies et tribus, depuis le détroit de Gibraltar jusqu’au cap de Bonne-Espérance. Dans le nouveau monde, il touche l’Amérique du Nord, le Mexique, la côte orientale de l’isthme de Panama, la Colombie, la Guyane, le Brésil, les provinces du Rio de la Plata et la Patagonie. Le parallélisme remarquable de ses côtes opposées, les nombreux courants qui agitent ses ondes, et que nous indiquerons bientôt, lui donnent plutôt l’aspect d’un immense torrent que d’une mer ouverte. Au nord, il découpe les côtes d’Amérique par la baie d’Hudson, le golfe Saint-Laurent, la. mer des Antilles, le golfe du Mexique, à peu près comme celles de l’Europe par la mer Baltique et la mer du Nord, la Manche, le golfe de Gascogne, la Méditerranée et la mer Noire. Au midi, au contraire, les côtes d’Amérique, comme celles d’Afrique, offrent très-peu de larges coupures ; le renflement du Brésil correspond à l’enfoncement du golfe de Guinée, de même que la protubérance, formée par les côtes de Sénégambie et du Soudan, répond à l’enfoncement de la mer des Antilles.

Les Iles que forme l’océan Atlantique se trouvent surtout près des côtes d’Europe et d’Amérique ; les principales sont : en Europe, l’Islande et le groupe britannique ; en Afrique, Madère, les Açores, les Canaries, le groupe du cap Vert, l’Ascension et Sainte-Hélène ; en Amérique, les grandes et les petites Antilles, Terre-Neuve, Cuba, les îles Lucayes et les îles Malouines. Il reçoit les eaux des plus grands fleuves de la terre : en Amérique, le Saint-Laurent, le Mississipi, l’Orénoque et le fleuve des Amazones ; dans l’ancien continent, le Rhin, la Loire, le Sénégal, le Niger ou Kouâra.

Comme nous traitons, aux article Mer et Océan, les questions générales qui se rapportent aux grandes masses d’eau, nous ne parlerons ici que de quelques phénomènes particuliers qui appartiennent à l’Atlantique.

Un fait singulier, observé depuis plusieurs siècles, mais jusqu’ici inexpliqué malgré les recherches des géographes et des géologues, c’est la retraite des eaux sur certains points des rivages atlantiques, et l’élévation des côtes correspondantes. L’Atlantique est traversé par plusieurs grands courants, qui peuvent se classer sous les » noms suivants : courant équatorial, de l’est à l’ouest, en sens contraire de la rotation de la terre et dans le même sens que les vents alizés, ce qui l’a fait surnommer courant alizéen ; courant septentrional ; connu sous le nom anglais de gulfstream, de l’ouest à l’est, entre les 31° et 44° de latitude nord ; courant méridional, de l’ouest à i’est, entre 3° et 4° de latitude sud ; enfin, le courant polaire, qui se dirige du pôle vers l’équateur. Le courant équatorial et les deux autres sont attribués, par les physiciens, à l’intumescence produite sur le dos de l’océan Atlantique par la double action attractive du soleil et de la lune ; quant au courant polaire, il s’explique par deux causes :la pesanteur, relativement plus grande, que les grands froids polaires donnent aux eaux de cette latitude, et la légèreté que prennent les mers équatoriales sous l’influence de la chaleur du tropique. On conçoit que, suivant les lois de l’équilibre des liquides, les eaux des pôles doivent tendre à couler vers l’équateur, où, d’ailleurs une rapide et considérable évaporation produit un vide constant. Nous n’avons énuméré ici que les courants principaux, et ceux que la navigation met à profit pour accélérer la marche des navires ; nous devons cependant ajouter que, dans certaines régions de l’Atlantique, on rencontre des courants opposés côte à côte et marchant en sens contraire avec des vitesses différentes ; à la rencontre de deux courants opposés, il se produit souvent un tourbillon, ou mouvement giratoire, très-funeste aux vaisseaux qui tombent dans ce gouffre :le centre de la spirale les attire, les fait tournoyer et sombrer. Un de ces terribles courants tournants se trouve à l’est des îles Bermudes, et au sud de Terre-Neuve.

L’Atlantique, si on en excepte les régions polaires, est aujourd’hui connu dans toutes ses parties. Les côtes ont été complètement explorées, et, l’année dernière encore, les belles études hydrographiques du capitaine Mouchez ont complété nos connaissances sur les côtes du Brésil, où les cartes, publiées par ce savant explorateur, ont fait connaître l’existence d’un grand nombre d’écueils, ports et anses, dont la position exacte a été signalée. « J’ai partout côtoyé le rivage, dit M. Mouchez, dans son rapport à l’Académie des sciences (30 mai 1864) ; tous les écueils ont été reconnus de très-près, et souvent rencontrés avec la quille du bâtiment avant de l’être par le plomb du sondeur. Des plans particuliers ont été dressés pour toutes les localités offrant un mouillage suffisamment


abrité ; les longitudes et les latitudes ont été déterminées avec d’excellents chronomètres… » Les voies transatlantiques sont aujourd’hui parfaitement décrites et connues des navigateurs ; grâce aux courants dont nous avons parlé, et que Al. de Humboldt compare à d’immenses fleuves allant d’Europe en Amérique et vice versa, la mer Atlantique est, de nos jours, aussi familière à nos marins que la Méditerranée l’était jadis aux pilotes phéniciens, grecs et romains.