Kama Soutra (trad. Liseux)/II

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Traduction par Isidore Liseux.
France Loisirs (p. 71-139).

DEUXIÈME PARTIE

DE L’UNION SEXUELLE

I

DES SORTES D’UNION SEXUELLE, SUIVANT LES DIMENSIONS, LA FORCE DU DÉSIR OÙ LA PASSION, LE TEMPS

L’homme est divisé en trois classes, savoir : l’homme-lièvre, l’homme-taureau et l’homme-cheval, suivant la grandeur de son Lingam.

La femme aussi, suivant la profondeur de son yoni, est une biche, une jument, ou un éléphant femelle.

Il s’ensuit qu’il y a trois unions égales entre personnes de dimensions correspondantes, et six unions inégales, quand les dimensions ne correspondent pas ; soit neuf en tout, comme on le voit dans le tableau ci-dessous :

Dans ces unions inégales, lorsque l’homme surpasse la femme en dimensions, son union avec la femme qui, sous ce rapport, vient immédiatement après lui, s’appelle haute union, et elle est de deux sortes ; tandis que son union avec la femme la plus éloignée de lui pour les dimensions s’appelle très haute union, et n’est que d’une sorte.

Égales

Lièvre Taureau Cheval

Biche Jument Éléphant

Inégales

Lièvre Lièvre Taureau Taureau Cheval Cheval

Jument Éléphant Biche Éléphant Biche Jument

Par contre, lorsque la femme surpasse l’homme en dimensions, son union avec l’homme qui vient immédiatement après elle s’appelle Basse union, et elle est de deux sortes ; tandis que son union avec l’homme le plus éloigné d’elle s’appelle très basse union, et n’est que d’une sorte.

En d’autres termes, le cheval et la jument, le taureau et la biche, forment la haute union, tandis que le cheval et la biche forment la très haute union. Du côté des femmes, l’éléphant et le taureau, la jument et le lièvre, forment la basse union, tandis que l’éléphant et le lièvre forment la très basse union.

Il y a donc neuf sortes d’unions suivant les dimensions. De ces unions, les égales sont les meilleures ; celles d’un degré superlatif, c’est-à-dire les très hautes et les très basses, sont les pires ; les autres sont de moyenne qualité, et parmi celles-ci les hautes sont meilleures que les basses.

Il y a aussi neuf sortes d’unions suivant la force de la passion ou désir charnel, savoir :

Hommes

Petite Moyenne Intense

Femmes

Petite Moyenne Intense

Hommes

Petite Petite Moyenne Moyenne Intense Intense

Femmes

Moyenne Intense Petite Intense Petite Moyenne

On dit de quelqu’un que c’est un homme de petite passion lorsque son désir au moment sexuel n’est pas vif, que son sperme est peu abondant, et qu’il ne peut supporter les chaudes étreintes de la femme.

Ceux qui ont un meilleur tempérament sont appelés hommes de passion moyenne ; et ceux qui sont pleins de désir, hommes de passion intense.

De même, les femmes sont supposées avoir les trois degrés de passion, comme il est spécifié plus haut.

Enfin, suivant le temps employé, il y a trois catégories d’hommes et de femmes, savoir : ceux ou celles qui emploient peu de temps, ceux ou celles qui emploient un temps modéré, et ceux ou ce les qui emploient un long temps ; et de là résultent, comme dans les combinaisons précédentes, neuf sortes d’unions.

Mais, sur ce dernier point, les opinions diffèrent au sujet de la femme, et il faut le constater.

Uddalaka dit : « Les femmes n’émettent pas comme les hommes. 22; Les hommes assouvissent simplement leur désir, tandis que les femmes, dans leur conscience du prurit, ressentent une certaine sorte de plaisir qui leur est agréable, mais il leur est impossible de vous dire quelle sorte de plaisir elles ressentent. Un fait qui rend ceci évident, c’est que, dans le coït, les hommes s’arrêtent d’eux mêmes après les hautes unions sont réputées meilleures que les basses, car, dans les premières, il est aisé à l’homme de satisfaire sa passion sans faire de mal à la femme, tandis que, dans les secondes, il est difficile que la femme soit entièrement satisfaite.

L’émission, et sont satisfaits, mais qu’il n’en est pas ainsi pour les femmes. » Cette opinion, toutefois, se heurte à une objection : c’est que si l’homme fait durer l’acte longtemps, la femme l’aime davantage, et que s’il le fait trop vite, elle est mécontente de lui. Et cette circonstance, disent quelques-uns, prouverait que la femme émet aussi.

Mais cette opinion n’est pas fondée ; car s’il faut un long temps pour calmer le désir d’une femme, et que durant ce temps elle ressente un grand plaisir, il est tout à fait naturel qu’elle souhaite de le voir durer. Et là-dessus il y a un verset dont voici le texte :

« Par l’union avec les hommes, la lubricité, le désir ou la passion des femmes sont satisfaits, et le plaisir qu’elles en ressentent est appelé leur satisfaction. » Les disciples de Babhravya, d’un autre côté, disent Que le sperme des femmes continue à tomber du commencement à la fin de l’union sexuelle ; et cela doit être, car si elles n’avaient pas de sperme, il n’y aurait pas d’embryon. Ici encore on objecte : Au début du coït la passion de la femme est moyenne et elle a peine à soutenir les vigoureuses poussées de son amant ; mais par degrés sa passion s’accroît jusqu’à ce qu’elle n’ait plus conscience de son corps, et alors enfin elle éprouve le désir de cesser le coït.

Cette objection, toutefois, est sans valeur ; car même dans les choses ordinaires qui se meuvent avec une grande force, comme une roue de potier, ou une toupie, la motion, pour commencer, est lente, mais par degrés devient très rapide. De même, la passion d’une femme s’étant graduellement accrue, elle éprouve le désir de cesser le coït quand tout son sperme est écoulé. Et il y a là-dessus un verset dont voici le texte :

« L’émission du sperme de l’homme a lieu seulement à la fin du coït, tandis que le sperme de la femme s’écoule d’une manière continue ; et quand le sperme de l’un et de l’autre est tout entier écoulé, alors ils éprouvent le désir de cesser le coït. » Enfin, Vatsyayana est d’avis que le sperme de la femme s’écoule de la même façon que celui de l’homme.

Maintenant, que qu’un pourra demander ici : Si l’homme et la femme sont des êtres de même espèce et concourent tous deux au même résultat, pourquoi ont-ils chacun des fonctions différentes à remplir ?

Vatsyayana répond qu’il en est ainsi parce que les manières d’opérer, aussi bien que la conscience du plaisir, sont différentes chez l’homme et chez la femme. La différence dans les manières d’opérer, l’homme étant agent et la femme patiente, est due à la nature du mâle et de la femelle : autrement l’agent pourrait être quelquefois le patient, et vice versa. Et de cette différence dans les manières d’opérer suit une différence dans la conscience du plaisir, car l’homme pense :

« Cette femme m’est unie », et la femme pense : « Je suis unie à cet homme. »

On peut observer : Si les manières d’opérer sont différentes chez l’homme et chez la femme, pourquoi n’y aurait-il pas une différence dans le plaisir même qu’ils ressentent et qui est le résultat de ces manières d’opérer ?

Mais cette objection est sans fondement : car l’agent et le patient étant des personnes de différente sorte, il y a là une raison pour qu’ils opèrent de différentes manières ; mais il n’y a pas de raison pour qu’il y ait une différence quelconque dans le plaisir qu’ils ressentent, parce que ce Plaisir dérive naturellement pour tous deux de l’acte qu’ils accomplissent.

Là. dessus encore, quelques uns pourront dire : Lorsque différentes personnes sont occupées au même ouvrage, nous voyons qu’elles concourent au même but ou objet ; tandis qu’au contraire, dans l’union de l’homme et de la femme, chacun deux poursuit son but séparément, ce qui est illogique. Mais l’observation n’est pas juste ; car nous voyons quelquefois deux choses faites en même temps, comme dans le combat de béliers, où les deux béliers reçoivent, chacun en même temps, le choc sur leur tête. De même, lorsqu’on lance l’une contre l’autre deux boules à jouer, et encore dans un combat ou lutte d’athlètes. Si l’on observe que, dans ce cas, les éléments employés sont de même sorte, on répondra que, dans le cas de l’homme et de la femme, la nature des deux personnes est aussi la même. Et comme la différence dans leur manière d’opérer provient seulement de leur différence de conformation, il s’ensuit que les hommes éprouvent la même sorte de plaisir que les femmes.

Il y a aussi là-dessus un verset dont voici le texte : « Les hommes et les femmes étant de même nature, trouvent la même sorte de plaisir ; et conséquemment un homme doit épouser une femme qui puisse l’aimer toujours dans la suite. » Étant prouvé que le plaisir des hommes et des femmes est de même sorte, il s’ensuit que, par rapport au temps, il y a neuf sortes de commerce sexuel, de même qu’il y en a neuf sortes par rapport à la force de la passion.

Et comme il existe ainsi neuf sortes d’unions par rapport aux dimensions, à la force de la passion et au temps, la combinaison de toutes ces sortes en produirait d’innombrables. conséquemment, dans chaque sorte particulière d’union sexuelle, les hommes doivent employer tels moyens qu’ils jugeront convenables pour l’occasion.

La première fois qu’a lieu l’union sexuelle, la Passion de l’homme est intense, et le temps qu’il y met, court ; mais dans les unions subséquentes de la même journée, c’est le contraire qui arrive. Il en est tout autrement de la femme, car, à la première fois, sa passion est faible, et le temps qu’elle y met, long ; mais aux reprises subséquentes de la même journée, sa passion est intense et le temps court, jusqu’à ce qu’elle soit pleinement satisfaite.

Des différente sortes d’amour Les hommes versés dans les humanités sont d’avis qu’il y a quatre sortes d’amour, savoir :

1. Amour résultant d’une habitude continue.

L’amour résultant de l’exécution constante et continue de tel ou tel acte est dit amour acquis par pratique et habitudes constantes : comme, par exemple, l’amour du commerce sexuel, l’amour de la chasse, l’amour de la boisson, l’amour du jeu, etc.

2. Amour résultant de l’imagination.

L’amour ressenti pour des choses auxquelles on n’est pas habitué, et qui procède entièrement des idées, est dit amour résultant de l’imagination : comme, par exemple, l’amour que certains hommes, femmes et eunuques éprouvent jour l’Auparishtaka ou congrès buccal, et celui que tout le monde éprouve pour des actes tels que d’embrasser, et baiser, etc.

3. Amour résultant de la foi.

L’amour réciproque des deux Parts, et dont la sincérité n’est pas douteuse, quand chacun voit dans l’autre une moitié de soi-même, est dit amour résultant de la foi par expérience.

4. Amour résultant de la Perception d’objets extérieurs.

L’amour résultant de la perception d’objets extérieurs est bien évident et bien connu de tout le monde, car le plaisir qu’il procure est supérieur au plaisir des autres sortes d’amour, qui n’existent que par lui.

Ce qui est dit dans ce chapitre au sujet de l’union sexuelle est suffisant pour l’homme instruit ; mais pour l’édification de l’ignorant, ce même sujet va être maintenant traité au long et en détail et à leurs femmes. Une foule d’hommes est dans la plus complète ignorance des sentiments de leur femme, et ne s’inquiètent nullement si elle est bien ou mal disposée. Pour posséder à fond le sujet, il est absolument nécessaire de l’étudier ; on saura alors que, comme pour faire du pain il faut préparer la pâte, de même il faut préparer sa femme pour le commerce sexuel, si on veut qu elle en tire satisfaction.

II

De l’embrassement

Cette partie des Kama Shastra, qui traite de l’union sexuelle, est aussi appelée « Soixante quatre » Chatushshashti. Certains vieux auteurs disent qu’on l’appelle ainsi parce qu’elle contient soixante-quatre chapitres. Suivant d’autres, l’auteur de cette partie étant un personnage nommé Panchala, et celui qui récitait la partie des Rig Veda dite Dashatapa, qui contient soixante-quatre versets, se nommait aussi Panchala, le nom de « Soixante-quatre » a été donné à cette partie de l’ouvrage en l’honneur des Iôg Veda. D’un autre côté, les disciples de Babhravya disent que cette partie renferme huit sujets, savoir : l’embrassement, le baiser, l’égratignure avec les ongles ou les doigts, la morsure, le coucher, la production de différents sons, la femme jouant le rôle de l’homme, et l’Auparishtaka, ou congrès buccal. Chacun de ces sujets ayant huit divisions, et huit multiplié par huit donnant soixante-quatre, cette partie est en conséquence appelée « Soixante-quatre ». Mais Vatsyayana affirme que cette partie contenant aussi les sujets suivants, savoir : les coups, les cris, les actes de l’homme durant le congrès, les différentes sortes de congrès, et d’autres encore, c’est par hasard seulement Que ce nom de « Soixante-quatre » lui a été donné. On dit, par exemple : cet arbre est « Saptapama », ou à sept feuilles ; cette offrande de riz est « Panchavama », ou de cinq couleurs, quoique l’arbre n’ait pas sept feuilles, ni le riz cinq couleurs.

Quoi qu’il en soit, il est ici traité de cette partie « Soixante-quatre », et l’on va s’occuper du premier sujet, l’embrassement.

Or l’embrassement, qui indique l’amour mutuel de l’homme et de la femme réunis, est de quatre sortes, savoir :

L’action, dans chaque cas, est déterminée par le sens du mot qui la désigne.

Touchant.

Lorsqu’un homme, sous un prétexte ou sous un autre, va au-devant ou à côté d’une femme et touche son corps avec le sien, c’est l’embrassement touchant.

Persant.

Lorsqu’une femme, dans un endroit solitaire, se penche comme pour ramasser quelque chose, et perce, pour ainsi dire, un homme assis ou debout, avec ses seins, dont l’homme s’empare aussitôt, c’est l’embrassement persant.

Les deux sortes d’embrassements ci.dessus n’ont lieu qu’entre personnes qui ne se parlent pas encore librement.

Frottant.

Lorsque deux amants se promènent lentement ensemble, dans l’obscurité, dans un lieu fréquenté ou dans un endroit solitaire, et se frottent le corps l’un contre l’autre, c’est l’embrassement frottant.

Pressant.

Lorsque, en pareille occasion, l’un d’eux presse le corps de l’autre avec force contre un mur ou un pilier, c’est l’embrassement pressant.

Ces deux derniers embrassements sont particuliers à ceux qui savent leurs intentions réciproques.

Au moment de la rencontre, quatre sortes d’embrassements sont usités, savoir :

Jataveshtitaka, ou l’enlacement d u reptile.

Lorsqu’une femme, se cramponnant à un homme comme un reptile s’enlace à un arbre, attire sa tête vers la sienne dans l’intention de le baiser, et, faisant entendre un léger son de soûtt soûtt, l’embrasse et le regarde avec amour, cet embrassement s’appelle l’enlacement du reptile.

Vrikshadhirudhaka, ou le grimpement à l’arbre.

Lorsqu’une femme, ayant placé un pied sur le Pied de son amant, et l’autre sur une de ses cuisses, passe un de ses bras sur ses reins et l’autre sur ses épaules, chantonne à mi-voix comme si elle roucoulait, et veut, en quelque sorte, grimper sur lui pour avoir un baiser, cet embrassement s’appelle le grimpement à l’arbre.

Ces deux sortes d’embrassements ont lieu lorsque l’amant est debout.

Tila.Tandulaka, ou le mélange de graines de sésame et de riz.

Lorsque les amants sont couchés dans un lit, et s’embrassent si étroitement que les bras et les cuisses de l’un sont enlacés par les bras et les cuisses de l’autre, dans une sorte de frottement réciproque, cet embrassement s’appelle le mélange de graines de sésame et de riz.

Kshiraniraka, ou l’embrassement lait et eau.

Lorsqu’un homme et une femme s’aiment violemment, et, sans s’inquiéter de se faire mal, s’embrassent comme s’ils voulaient pénétrer dans le corps l’un de l’autre, que la femme soit assise sur les genoux de l’homme, ou devant lui, ou sur un lit, cet embrassement s’appelle le mélange de lait et d’eau.

Ces deux sortes d’embrassements ont lieu au moment de l’union sexuelle.

Telles sont les huit sortes d’embrassements que nous a relatées Babhravya.

Suvamanabha nous donne, en outre, quatre manières d’embrasser de simples membres du corps, qui sont :

L’embrassement des cuisses.

Lorsque l’un des deux amants Presse avec force une des cuisses de l’autre, ou toutes les deux, contre a sienne ou les siennes propres, cela s’appelle l’embrassement des cuisses.

L’embrassement du jaghana, c’est-à-dire de la partie du corps entre le nombril et les cuisses.

Lorsque l’homme presse le jaghana ou partie médiane du corps de la femme contre le sien, et monte sur elle soit pour l’égratigner avec les ongles ou les doigts, soit pour la mordre, ou la frapper, ou la baiser, la chevelure de la femme étant dénouée et flottante, cela s’appelle l’embrassement du jaghana.

L’embrassement des seins.

Lorsqu’un homme applique sa poitrine contre les seins d’une femme et l’en presse, cela s’appelle l’embrassement des seins.

L’embrassement du front.

Lorsqu’un des amants applique sa bouche, ses yeux et son front sur la bouche, les yeux et le front de l’autre, cela s’appelle l’embrassement du front.

Suivant quelques-uns, le massage aussi est une sorte d’embrassement, parce qu’il implique un contact de deux corps. Mais Vatsyayana pense que le massage a lieu à un autre moment et dans un but différent, et comme, de plus, il est d’un autre caractère, on ne peut pas dire qu’il soit compris dans les embrassements.

Il y a aussi, là-dessus, quelques versets dont voici le texte :

« Le sujet tout entier de l’embrassement est de telle nature, que les hommes qui s’en enquièrent, ou qui en entendent parler, ou qui en parlent, éprouvent par cela seul un désir de jouissance. Certains embrassements non mentionnés dans les Kama Shastra doivent être néanmoins pratiqués au moment de la jouissance sexuelle, s’ils peuvent de façon ou d’autre Procurer un accroissement d’amour. Les règles des Shastra sont applicables aussi longtemps que la passion de l’homme est moyenne ; mais une fois la roue d’amour mise en motion, il n’y a plus ni Shastra ni règles. »

III

Du baiser

Quelques-uns prétendent qu’il n’y a pas d’ordre ni de temps fixé pour l’embrassement, le baiser, et la pression ou égratignure avec les ongles ou les doigts, mais que toutes ces choses doivent avoir lieu généralement avant l’union sexuelle : tandis que les coups et l’émission de différents sons accompagnent généralement cette union. Vatsyayana, quant à lui, pense que tout est on à un moment quelconque, l’amour n’ayant souci ni d’ordre ni de temps.

À l’occasion du premier congrès, il faut user modérément du baiser et des autres pratiques ci-dessus mentionnées, ne pas les continuer longtemps, et les alterner. Mais, aux reprises suivantes, c’est le contraire qui est de saison, et la modération n’est plus nécessaire ; on peut les continuer longtemps et, afin d’attiser l’amour, les exercer toutes à la fois.

Le baiser portera sur les Parties suivantes : le front, les yeux, les joues, la gorge, la poitrine, les seins, les lèvres et l’intérieur de la bouche. Les gens du pays de Lat baisent aussi les endroits suivants : les jointures des cuisses, les bras et le nombril. Mais Vatsyayana est d’avis que, si ces gens pratiquent ainsi le baiser par excès d’amour et conformément aux coutumes de leur province, il n’est pas convenable de tous de les imiter.

Maintenant, lorsqu’il s’agit d’une jeune fille, trois sortes de baisers sont en usage, savoir :

Le baiser nominal.

Lorsqu’une fille touche seulement la bouche de son amant avec la sienne, mais sans rien faire elle même, cela s’appelle le baiser nominal.

Le baiser palpitant.

Lorsqu’une fille, mettant un peu de côté sa pudeur, veut toucher sa lèvre qui presse sa bouche et, dans ce but, fait mouvoir sa lèvre inférieure, mais non la supérieure, cela s’appelle le baiser palpitant.

Le baiser touchant.

Lorsqu’une fille touche la lèvre de son amant avec sa langue, et fermant les yeux, met ses mains dans celles de son amant, cela s’appelle le baiser touchant.

D’autres auteurs décrivent quatre sortes de baisers, savoir :

Le baiser droit.

Lorsque les lèvres de deux amants sont directement mises contact les unes avec les autres, cela s’appelle un baiser droit.

Le baiser penché.

Lorsque les têtes de deux amants sont penchées l’une l’autre et que, dans cette position, ils se donnent un baiser, s’appelle un baiser penché.

Le baiser tourné.

Lorsque l’un d’eux fait tourner le visage de l’autre en lui la tête et le menton, et lui donne alors un baiser, cela s’appelle baiser tourné.

Le baiser pressé.

Enfin, lorsque la lèvre inférieure est pressée avec force, s’appelle un baiser pressé.

Il y a aussi une cinquième sorte de baiser, qu’on appelle le grandement pressé. On le pratique en tenant la lèvre inférieure deux doigts, puis, après l’avoir touchée avec la langue, on la presse très fort avec la lèvre.

En matière de baiser, on peut jouer à qui s’emparera des lèvres de l’autre. Si la femme perd, elle fera mine de écartera son amant en battant des mains, lui tournera le dos et cherchera querelle en disant : « Donne-moi la revanche. » Si elle une seconde fois, elle paraîtra doublement affligée ; et amant sera distrait ou endormi, elle s’emparera de sa lèvre et la tiendra entre ses dents, de façon qu’elle ne puisse puis elle éclatera de rire, fera grand bruit, se moquera de lui, tout autour, et dira ce qui lui passera par la tête, en remuant sourcils et en roulant les yeux. Tels sont, les jeux et les querelles accompagnent le baiser, mais on peut les associer aussi à la ou égratignure avec les ongles et les doigts, à la morsure et à verbération. Toutefois, ces pratiques ne sont familières qu’aux hommes et aux femmes de passion intense.

Lorsqu’un homme baise la lèvre supérieure d’une femme, et celle-ci, en retour, baise la lèvre inférieure de son amant, cela est le baiser de la lèvre supérieure.

Lorsque l’un d’eux prend entre ses lèvres les deux lèvres de cela s’appelle un baiser cernant. Mais cette sorte de baiser n’est par une femme que sur un homme sans moustaches. Et si, de ce baiser, l’un des amants touche avec sa langue les dents, et le palais de l’autre, cela s’appelle le combat de la langue. Il y a de pratiquer, de la même manière, la pression des dents de l’un la bouche de l’autre.

Le baiser est de quatre sortes, savoir : modéré, contracté, et doux, suivant les différentes parties du corps car différentes sortes de baisers sont appropriées du corps.

Lorsqu’une femme regarde le visage de son amant pendant sommeil, et le baise. Pour montrer son intention ou désir, cela s’appelle un baiser qui attise l’amour.

Lorsqu’une femme baise son amant pendant qu’il est en affaires, ou qu’il a querelle, ou qu’il regarde quelque autre chose, de façon à distraire son esprit, cela s’appelle un baiser qui distrait.

Lorsqu’un amant, rentré tard la nuit, baise sa maîtresse endormie sur son lit afin de lui montrer son désir, cela s’appelle un baiser qui éveille. En pareille occasion, la femme peut faire semblant de dormir à l’arrivée de son amant, de sorte qu’elle puisse connaître son intention et obtenir son respect.

Lorsqu’une personne baise l’image de la personne aimée, réfléchie dans un miroir, dans l’eau, ou sur un mur, cela s’appelle un baiser qui montre l’intention.

Lorsqu’une personne baise un enfant assis sur ses genoux, ou une peinture, ou une image, ou une figure, en présence de la personne aimée, cela s’appelle un baiser transféré.

Lorsque la nuit, au théâtre, ou dans une réunion de caste, un homme allant au-devant d’une femme baise un doigt de sa main si elle est debout, ou un orteil de son pied si elle est assise ; ou lorsqu’une femme, en massant le corps de son amant, met son visage sur sa cuisse, comme si elle voulait dormir, de manière à enflammer sa passion, et baise sa cuisse ou son gros orteil, cela s’appelle un baiser démonstratif Il y a aussi, sur ce sujet, un verset dont voici le texte :

« Toute chose, quelle qu’elle soit, que l’un des amants fait à l’autre, celui-ci doit la lui rendre ; c’est-à-dire, si la femme baise l’homme, l’homme doit la baiser en retour ; si elle le frappe, il doit de même la frapper en retour. »

IV

De la pression, ou marque, ou égratignure avec les ongles

Lorsque l’amour devient intense, c’est le cas de pratiquer la pression ou l’égratignure du corps avec les ongles. Cette pratique a lieu dans les occasions suivantes : lors de la première visite ; au moment de partir pour un voyage ; au retour d’un voyage ; au moment de la réconciliation avec un amant irrité ; et enfin, lorsque la femme est ivre., Mais la pression avec les ongles n’est familière qu’aux amants à passion intense. Ceux qui s’y plaisent associent cette pratique à la morsure.

La pression avec les ongles est de huit sortes, suivant la forme des marques qui en résultent, savoir :

1. Sonore.

Lorsqu’une personne presse le menton, les seins, la lèvre inférieure ou le jaghana d’une autre, si doucement qu’il n’en reste aucune marque ou égratignure, et que le poil seul se dresse sur le corps au contact des ongles, qui eux-mêmes rendent un son, cela s’appelle une pression sonore avec les ongles.

Cette pression est usitée à l’égard d’une jeune fille, lorsque son amant la masse, lui gratte la tête, et veut la troubler ou l’effrayer.

2. Demi-lune.

La marque courbe avec les ongles, qui est imprimée sur le cou et les seins, s’appelle la demi-lune.

3. Cercle.

Lorsque les demi-lunes sont imprimées l’une contre l’autre, cela s’appelle un cercle. Cette marque avec les ongles se fait généralement sur le nombril, sur les petites cavités à l’entour des fesses, et sur les jointures des cuisses.

4. Ligne.

Une marque en forme de petite ligne, qu’on peut faire sur n’importe quelle Partie du corps, s’appelle une ligne.

5. Griffe de tigre.

La même ligne, si elle est courbe, et tracée sur la poitrine, s’appelle une griffe de tigre.

6. Patte de paon.

Lorsqu’on trace une ligne courbe sur la poitrine au moyen des cinq ongles, cela s’appelle une patte de paon. On fait cette marque dans le but d’en tirer honneur, car il faut beaucoup d’adresse pour l’exécuter proprement.

7. Saut de lièvre.

Lorsque cinq marques avec les ongles sont faites l’une près de l’autre aux environs de la mamelle, cela s’appelle le saut du lièvre.

8. Feuille de lotus bleu.

Une marque faite sur la poitrine ou sur les hanches en forme de feuille de lotus bleu s’appelle la feuille de lotus bleu.

Lorsqu’une personne, au moment de partir en voyage, fait une marque sur les cuisses ou sur la poitrine, cela s’appelle un signe de souvenir. Il est d’usage, en pareille occasion, d’imprimer trois ou quatre lignes l’une près de l’autre avec les ongles.

Les endroits sur lesquels doit porter cette pression avec les ongles sont : le creux de l’aisselle, la gorge, les seins, les lèvres, le jafhana ou partie médiane du corps, et les cuisses. Mais Suvamanabla est d’avis que, si l’impétuosité de la passion est excessive, il n’y a pas à se préoccuper de l’endroit.

Les qualités requises pour de bons ongles, c’est qu’ils soient brillants, bien plantés, propres, entiers, convexes, doux et polis. Les ongles sont de trois sortes, suivant leur grandeur, savoir :

Petits.

Moyens.

Grands.

Les grands ongles, qui donnent de la grâce aux mains et attirent, par leur apparence, le cœur des femmes, sont possédés par les Bengalis.

Les petits ongles, dont on peut se servir de diverses manières, mais seulement pour d onner du plaisir, sont possédés par les gens des districts méridionaux.

Les ongles moyens, qui ont les propriétés des deux autres sortes, appartiennent au peuple de Maharashtra.

Ici finit la marque avec les ongles. On peut encore, par leur moyen, faire d’autres marques que celles ci-dessus décrites ; car, suivant l’observation des anciens auteurs, puisque sont innombrables les degrés l’adresse parmi les hommes (qui tous connaissent la pratique de cet art), ainsi sont innombrables les manières de faire ces marques. Et comme la pression ou la marque avec les ongles dépendent de l’amour, Personne ne peut dire avec certitude combien de sortes différentes il en existe réellement. La raison de ceci, pour Vatsyayana, c’est que, si la variété est nécessaire en amour, l’amour doit être produit par la variété des moyens. Voilà pourquoi les courtisanes, qui sont bien au fait des diversités de voies et moyens, sont si désirables ; Car cette variété que l’on recherche dans tous les arts et amusements, tels que le tir à l’arc et autres exercices, à combien plus forte raison doit-on la rechercher en matière d’amour ?

Les marques d’ongles ne doivent pas être faites sur des femmes mariées ; mais on peut imprimer, sur leurs parties secrètes, des sortes particulières de marques, pour remémorer ou accroître l’amour.

Il y a aussi, sur ce sujet, quelques versets dont voici le texte :

« L’amour d’une femme qui voit des marques d’ongles sur les parties secrètes de son corps, même si elles sont anciennes et Presque effacées, se ravive et se renouvelle. S’il n’y a pas de marques longues pour rappeler à une personne le passage de l’amour, alors l’amour diminue comme il arrive lorsqu’on laisse passer un long temps sans qu’il y ait d’union. » Lorsqu’un étranger aperçoit, même de loin, une jeune femme avec des marques d’ongles sur les seins, (Il paraîtrait, d’après ceci, que dans les anciens temps les femmes avaient les seins découverts ; c’est ce qu’on voit dans les peintures de l’Ajunta et autres caveaux, où les seins des grandes dames et des princesses de sang royal sont représentés à nu. ) il est saisi pour elle d’amour et de respect.

Pareillement, un homme qui porte des marques d’ongles ou de dents sur certaines Parties de son corps, influence l’esprit d’une femme, si ferme qu’il soit d’ailleurs. Bref, rien n’est puissant pour accroître l’amour que les marques d’ongles ou de morsures.

V

De la morsure, et des moyens à employer à l’égard des femmes de différents pays

Tous les endroits du corps qui peuvent être baisés sont aussi les endroits qui peuvent être mordus, sauf la lèvre supérieure, l’intérieur de la bouche et les yeux.

Les qualités requises pour de bonnes dents, c’est qu’elles soient égales, d’un brillant agréable à l’œil, susceptibles d’être coloriées, de proportions convenables, intactes, et que l’extrémité en soit fine.

Par contre, sont défectueuses : les dents ébréchées, déchaussées, rudes, molles, grandes, ou mal plantées.

Les différentes sortes de morsures sont comme suit :

La morsure cachée.

La morsure qui ne se révèle que par l’excessive rougeur de la peau mordue s’appelle la morsure cachée.

La morsure enflée.

Lorsque la peau est déprimée des deux côtés, cela s’appelle la morsure enflée.

Le Point.

Lorsqu’une petite portion de la peau est mordue avec deux dents seulement, cela s’appelle le Point.

La ligne de Points.

Lorsque de petites portions de la peau sont mordues avec toutes les dents, cela s’appelle la ligne de points.

Le corail et le joyau.

La morsure qui` est faite avec les dents et les lèvres réunies s’appelle le corail et le joyau. La lèvre est le corail, et les dents le joyau.

La ligne de joyaux.

Lorsque la morsure est faite avec toutes les dents, cela s’appelle la ligne de joyaux.

Le nuage brisé.

La morsure dont les marques en forme de cercle sont inégales, ce Qui provient de l’espacement des dents, s’appelle le nuage irisé. On l’imprime sur les seins.

La morsure du sanglier.

La morsure qui consiste en plusieurs larges rangées de marques, l’une près de l’autre, et avec des intervalles rouges, s’appelle la morsure du sanglier. On l’imprime sur les seins et sur les épaules. Ces deux derniers modes de morsure sont particuliers aux personnes de passion intense.

C’est sur la lèvre inférieure que se font la morsure cachée, la morsure enflée et le point ; la morsure enflée se fait encore sur la joue, ainsi que le corail et le joyau. Le baiser, la pression avec les ongles et la morsure sont les ornements de la joue gauche ; et quand il est question de joue, c’est la joue gauche qu’il faut entendre.

La ligne de points et la ligne de joyaux doivent toutes deux être imprimées sur la gorge, l’aisselle et les jointures des cuisses ; mais la ligne de points seule doit être imprimée sur le front et les cuisses.

Si l’on marque avec les ongles, ou si l’on mord les objets suivants, savoir : un ornement du front, un ornement d’oreille, un bouquet de fleurs, une feuille de bétel ou une feuille de tamala, qui sont portés par une femme aimée ou lui appartiennent, cela signifie désir de jouissance.

Ici finissent les différentes sortes de morsures.

En matière d’amour, un homme doit s’étudier à faire des choses agréables aux femmes des divers pays.

Les femmes des contrées centrales (c’est-à-dire entre le Gange et le Djoumnah) sont d’un caractère noble, non accoutumées aux pratiques désagréables ; elles répugnent à la pression des ongles et à la morsure.

Les femmes du pays de Balhika se laissent gagner par qui les frappe.

Les femmes d’Avantika aiment les plaisirs grossiers, et n’ont pas de bonnes mœurs.

Les femmes du Maharashtra aiment à pratiquer les soixante-quatre arts ; elles articulent des mots bas et malsonnants et veulent qu’on leur parle de même ; elles sont enragées de jouissance.

Les femmes de Pataliputra (c’est-à-dire la moderne Patna) sont du même tempérament que celles du Maharashtra, mais elles n’expriment leurs désirs qu’en secret.

Les femmes du pays de Dravida, si bien frottées et comprimées qu’elles puissent être au moment de la jouissance sexuelle, ont l’émission du sperme très lente : c’est-à-dire qu’elles sont très lentes à parfaire le coït.

Les femmes de Vanavasi sont modérément. passionnées ; elles aiment toute espèce d’amusement, couvrent leurs corps, et réprimandent ceux qui disent des mots bas, grossiers et malsonnants.

Les femmes d’Avanti haïssent le baiser, la marque avec les ongles et la morsure ; mais elles affectionnent différentes sortes d’unions sexuelles.

Les femmes de Malwa aiment l’embrassement et le baiser, mais sans blessure, et elles se laissent gagner par qui les frappe.

Les femmes d’Abhira, et celles du pays entre l’Indus et les cinq rivières (c’est-à-dire le Pendjab), sont folles de l’Auparishtaka ou congrès buccal.

Les femmes d’Aparatika sont pleines de passion ; elles font entendre lentement le son de « Sitt ».

Les femmes du pays de Lat ont les désirs plus violents encore, et elles font aussi entendre le son de « Sitt ».

Les femmes du Stri Rajya et de Koshola (Oude) sont pleines d’impétueux désirs ; leur sperme s’émet en grande quantité, et elles aiment à se droguer pour faciliter cette émission.

Les femmes du pays d’Andhra ont des corps tendres ; elles aiment à se divertir et sont portées aux plaisirs sensuels.

Les femmes de Ganda ont le cœur tendre et parlent doucement.

Maintenant, si l’on s’en rapporte à Suvamana ha, les convenances de nature de telle ou telle personne, prise en particulier, importent plus que les usages généraux du pays entier, et conséquemment ces usages ne doivent pas être suivis dans tel ou tel cas donné. Les divers plaisirs, l’habillement, les exercices et divertissements d’un pays finissent par être empruntés par un autre, et l’on doit, dans le cas en question, les considérer comme originaires de ce pays même.

Des choses mentionnées plus haut, savoir : l’embrassement, le baiser, etc., on doit faire d’abord celles qui accroissent la passion ; on fera ensuite celles qui n’ont pour objet que l’amusement ou la variété.

Il y a aussi, là-dessus, quelques versets dont voici le texte :

« Quand un homme mord violemment une femme, elle doit le lui rendre furieusement avec deux fois autant de force. Ainsi, pour un point elle rendra une ligne de points, et Pour une ligne de Points un nuage basé ; et si elle est très surexcitée, elle entamera immédiatement une querelle d’amour. En même temps elle saisira son amant par les cheveux, lui fera courber la tête, baisera sa lèvre inférieure, et alors, enragée d’amour, fermant les yeux, elle le mordra en divers endroits.

Même le jour et dans un lieu fréquenté, si son amant lui montre quelque marque qu’elle peut avoir imprimée sur son corps, elle sourira à cette vue, et, tournant son visage comme si elle allait l’invectiver, elle lui montrera d’un air irrité, sur son propre corps, les marques que lui-même a pu y faire. Ainsi donc, si hommes et femmes agissent au gré les uns des autres, leur amour mutuel ne subira aucune diminution, fût-ce pendant un siècle. »

VI

Des différentes manières de se coucher, et des diverses sortes de congrès


Dans le cas d’un haut congrès, la femme Mrigi (Biche) devra se coucher de façon à élargir son yoni ; tandis que, dans un bas congrès, la femme Hastini (Éléphant) se couchera de manière à contracter le sien. Mais, dans un congrès égal, elles se coucheront dans la position naturelle. Ce qui vient d’être dit de la Mrigi et de la Hastini s’applique aussi à la femme Vadawa (Jument). Dans un bas congrès, les femmes feront particulièrement usage de drogues, pour que leurs désirs soient promptement satisfaits.

Il y a pour la femme-biche, trois manières de se coucher, savoir :

La position largement ouverte.

Lorsqu’elle baisse la tête et lève la partie médiane de son corps, cela s’appelle la position largement ouverte. À ce moment, l’homme doit appliquer Quelque onguent pour rendre l’entrée plus facile.

La position béante.

Lorsqu’elle lève ses cuisses et les tient toutes grandes écartées, puis engage le congrès, cela s’appelle la position béante.

La position de la femme d’Indra.

Lorsqu’elle ramène ses cuisses, avec ses jambes repliées dessus, sur ses côtés, et dans cette posture engage le congrès, cela s’appelle la position d’Indrani ; la pratique seule peut l’apprendre. Cette position convient aussi dans le cas d’un très haut congrès.

La position serrante est usitée dans le bas congrès et dans le très bas congrès, concurremment avec la position pressante, la position liante et la position de la jument.

Lorsque les jambes de l’homme et de la femme sont étendues droites l’une contre l’autre, cela s’appelle la position serrante. Elle est de deux sortes : la position de côté et la position de dos, suivant la manière dont ils sont couchés. Dans la position de côté, l’homme doit invariablement se coucher sur le côté gauche et faire coucher la femme sur le côté droit ; cette règle est à observer avec toutes sortes de femmes.

Lorsque, le congrès ayant commencé dans la position serrante, la femme presse son amant avec ses cuisses, cela s’appelle la position pressante.

Lorsqu’une femme place une de ses cuisses en travers de la cuisse de son amant, cela s’appelle la position liante.

Lorsque la femme retient de force le Lingam dans son yoni, cela s’appelle la position de la jument. La pratique peut seule l’apprendre ; elle est surtout connue chez les femmes du pays d’Andhra.

Telles sont les différentes manières de se coucher mentionnées par Babhravya. Toutefois il y en a d’autres qu’indique Suvamanabha, et que voici :

Lorsque la femme lève ses deux cuisses toutes droites, cela s’appelle la position levante.

Lorsqu’elle lève ses deux jambes et les place sur les épaules de son amant, cela s’appelle la position béante.

Lorsque les jambes sont contractées et maintenues ainsi par l’amant devant sa poitrine, cela s’appelle la position pressée.

Lorsqu’une des jambes seulement est étendue, cela s’appelle la position demi-pressée.

Lorsque la femme place une de ses jambes sur l’épaule de son amant et étend l’autre, puis met celle-ci à son tour sur l’épaule et étend la première, et ainsi de suite alternativement, cela s’appelle la fente du bambou.

Lorsqu’une des jambes est placée sur la tête et l’autre étendue, cela s’appelle la pose d’un clou. La pratique seule peut l’apprendre.

Lorsque les deux jambes de la femme sont contractées et placées sur son estomac, cela s’appelle la position du crabe.

Lorsque les cuisses sont élevées et placées l’une sur l’autre, cela s’appelle la position en paquet.

Lorsque les jambes sont placées l’une sur l’autre, cela s’appelle la position en forme de lotus.

Lorsqu’un homme, pendant le congrès, tourne en rond et jouit de la femme sans la quitter, la femme lui tenant toujours les reins embrassés, cela s’appelle la position tournante ; elle ne s’apprend que par la pratique.

Au dire de Suvarnanabha, ces différentes positions, couchée, assise et debout, doivent être pratiquées dans l’eau, parce qu’elles y sont plus faciles. Mais Vatsyayana est d’avis que le congrès dans l’eau n’est pas convenable, étant prohibé par la loi religieuse.

Lorsqu’un homme et une femme s’appuient sur le corps l’un de l’autre, ou sur un mur, ou sur un pilier, et se tenant ainsi debout engagent le congrès, cela s’appelle le congrès appuyé.

Lorsqu’un homme s’appuie contre un mur, et que la femme, assise sur les mains de l’homme réunies sous elle, passe ses bras autour de son cou et, collant ses cuisses le long de sa ceinture, se remue au moyen de ses pieds dont elle touche le mur contre lequel l’homme s’appuie, cela s’appelle le congrès suspendu.

Lorsqu’une femme se tient sur ses mains et ses pieds comme un quadrupède, et que son amant monte sur elle comme un taureau, cela s’appelle le congrès de la vache. À cette occasion, il y a lieu de faire sur le dos tout ce qui se fait ordinairement sur la poitrine.

On peut opérer de même le congrès du chien, le congrès de la chèvre, le congrès de la biche, le violent assaut de l’âne, le congrès du chat, le bond du tigre, la pression de l’éléphant, le frottement du sanglier et l’assaut du cheval. Et, dans tous les cas, on doit imiter les allures de chacun de ces différents animaux.

Lorsqu’un homme jouit en même temps que deux femmes, qui l’aiment également toutes deux, cela s’appelle le congrès uni.

Lorsqu’un homme jouit en même temps de plusieurs femmes, cela s’appelle le congrès du troupeau de vaches.

Les sortes de congrès suivantes, savoir : l’exercice dans l’eau, ou congrès d’un éléphant avec plusieurs éléphants femelles qu’on dit n’avoir lieu que dans l’eau, le congrès du troupeau de chèvres, le congrès du troupeau de biches, s’opèrent à l’imitation de ces animaux.

À Gramaneri, plusieurs jeunes gens jouissent d’une femme qui peut être mariée à l’un d’eux, soit l’un après l’autre, soit tous en même temps. Ainsi l’un la tient, l’autre en jouit, un troisième s’empare de sa bouche, un quatrième de son ventre ; et de cette façon ils jouissent alternativement de chacune de ses parties.

Même chose peut se faire quand plusieurs hommes se trouvent en compagnie d’une courtisane. Et les femmes du harem du Roi, de leur côté, peuvent en faire autant quand par hasard elles mettent la main sur un homme.

Les gens des contrées méridionales ont aussi un congrès dans l’anus, qui s’appelle le congrès inférieur.

Ainsi finissent les diverses sortes de congrès. Il y a aussi, sur ce sujet, deux versets dont voici le texte :

« Une personne ingénieuse doit multiplier les sortes de congrès, en imitant les différentes espèces de bêtes et d’oiseaux.

« Ces différentes sortes de congrès, opérées suivant les usages de chaque pays et la fantaisie de chaque individu, engendrent l’amour, l’amitié et le respect dans le cœur des femmes. »

VII

Des diverses manières de frapper et des sons appropriés

Le commerce sexuel peut être comparé à une querelle, à cause des contrariétés de l’amour et de sa tendance à tourner en dispute. L’endroit que l’on frappe avec passion est le corps, et sur le corps les endroits spéciaux sont :

Les épaules.

La tête.

L’espace entre les seins.

Le dos.

Le jaghana, ou partie médiane du corps.

Les côtés.

Il y a quatre manières de frapper, savoir :

Frapper avec le dos de la main.

Frapper avec les doigts un peu contractés.

Frapper avec le poing.

Frapper avec la paume de la main ouverte.

Les coups produisant de la douleur, il en résulte le son sifflant, qui est de diverses sortes, et les huit sortes de plaintes, savoir :

Le son Hinn.

Le son tonnant.

Le son roucoulant.

Le son pleurant.

Le son Phoutt.

Le son Phâtt.

Le son Soûtt.

Le son Plâtt.

Outre cela, il y a aussi des mots qui ont un sens, tels que : « Ma mère ! », et ceux qui expriment prohibition, suffisance, désir de libération, douleur ou louange, auxquels on peut joindre des sons comme ceux de la colombe, du coucou, du pigeon vert, du perroquet, de l’abeille, du moineau, du flamant, du canard et de la caille, qui tous sont usités dans telle ou telle occasion.

Les coups de poing doivent être donnés sur le dos de la femme, pendant qu’elle est assise sur les genoux de l’homme ; elle doit lui rendre ses coups, en l’invectivant comme si elle était en colère, avec accompagnement des sons roucoulant et pleurant. Lorsque le congrès est engagé, on frappe l’espace entre les seins avec le dos de la main, lentement d’abord, puis de plus en plus vite suivant que l’excitation augmente, jusqu’à la fin.

À ce moment on émettra les sons Hinn et autres, alternativement ou comme on voudra, suivant la coutume. Lorsque l’homme, faisant entendre le son Phâtt, frappe la femme sur la tête avec ses doigts un peu contractés, cela s’appelle Prasritaka, ce qui veut dire : frapper avec les doigts un peu contractés. Dans ce cas, les sons appropriés seront le son roucoulant, le son Phâtt et le son Phoutt dans l’intérieur de la bouche, et, à la fin du congrès, les sons soutirant et pleurant.

Le son Phâtt est une imitation du bruit que produit la cassure du bambou ; le son Phoutt ressemble au bruit une chose qui tombe dans l’eau. À chaque fois qu’on lui donne un baiser ou qu’on lui fait une caresse quelconque, la femme doit répondre par un son sifflant. Pendant l’action, si la femme n’est pas habituée à être frappée, elle murmure continuellement des mots qui expriment prohibition, suffisance ou désir de libération, ou des mots tels que : « Mon père ! » « Ma mère ! », entrecoupés de sons soupirant, pleurant et tonnant!. Vers la fin du congrès, l’homme Pressera fortement, avec la paume des mains ouvertes, les seins, le jagnana et les côtés de la femme, et cela jusqu’à la fin ; et la femme fera alors entendre des sons tels que ceux de la caille ou de l’oie.

Il y a aussi, sur ce sujet, deux versets dont voici le texte :

« Les caractéristiques du sexe masculin sont, dans l’opinion générale, la rudesse et l’impétuosité ; tandis que la faiblesse, la tendresse, la sensibilité, et une inclination à éviter les choses déplaisantes, sont les marques distinctives du sexe féminin. L’excitation de la passion et certaines particularités d’habitude peuvent quelquefois produire, en apparence, des résultats contraires ; mais l’état naturel tant toujours par reprendre le dessus. » Aux quatre manières de frapper mentionnées plus haut, on peut ajouter l’emploi du coin sur la poitrine, des ciseaux sur la tête, de l’instrument perçant sur les joues, et des pinces sur les seins et les côtés, ce qui donne en tout huit manières. Mais ces quatre manières de frapper avec des instruments sont particulières aux gens des contrées méridionales, et l’on en voit les marques sur les seins de leurs femmes. Ce sont des particularités locales, mais Vatsyayana est d’avis que la pratique en est douloureuse, barbare, vile, et qu’elle n’est pas du tout à imiter.

En règle générale, tout ce qui est particularité locale ne doit pas adopté ailleurs sans examen ; et, même dans les pays où la pratique est prévalente, il faut toujours en éviter l’abus. Voici des exemples du danger de ces pratiques : Le roi des Panchalas tua la courtisane Madhavasena en se servant d’un coin pendant le congrès.

Shatakami Shatavahana, roi des Kuntalas, fit perdre la vie à sa grande reine Malayavati par l’emploi d’une paire de ciseaux ; et Naradeva, dont la main était déformée, aveugla une jeune danseuse avec un instrument perçant mal dirigé.

Il existe aussi, sur ce sujet, deux versets dont voici le texte :

« Relativement à ces choses, il ne peut y avoir ni énumération ni règle définie. Une fois le congrès commencé, la passion seule régit tous les actes des parties. » Ces actions passionnées, ces gestes ou mouvements amoureux, qui naissent de l’excitation du moment, dans le congrès, ne sauraient être définis : ils sont irréguliers comme des songes. Un cheval qui a une fois atteint le cinquième degré de motion poursuit sa course avec une vitesse aveugle, sans regarder aux trous, aux fossés, aux poteaux qui peuvent barrer sa route : ainsi deux amants, dans la chaleur du congrès ; la passion les aveugle, ils vont, ils vont toujours, avec furie, sans s’inquiéter en rien des excès. Pour cette raison, l’homme qui possède à fond la science d’amour, et qui connaît sa propre force, comme aussi la tendresse, l’ardeur et la force de sa maîtresse, agira en conséquence. Les différents modes de jouissance ne sont pas pour tous les temps ni pour toutes les personnes : on doit, pour les appliquer, consulter le temps, le pays et l’endroit.

VIII

Des femmes qui jouent le rôle de l’homme et du travail de l’homme

Lorsqu’une femme voit son amant fatigué par un congrès prolongé, sans qu il ait assouvi son désir, elle doit, avec sa permission, le renverser sur le dos et lui venir en aide en jouant son rôle. Elle peut le faire aussi pour satisfaire la curiosité de l’homme, ou son propre désir de nouveauté.

Il y a deux façons d’opérer : la femme, pendant le congrès, tourne en rond et monte sur son amant, de manière à continuer l’action sans interrompre le plaisir ; ou bien elle joue le rôle de l’homme dès le commencement. Alors, sa chevelure dénouée mêlée de fleurs, souriante et haletante à la fois, elle appuiera les seins sur la poitrine de son amant, et, baissant fréquemment la tête, lui rendra ce qu’il lui faisait tout à l’heure, ses coups, ses invectives ; elle lui dira : « Tu m’as renversée, tu m’as moulue ; à mon tour de te renverser, de te moudre. » Puis elle aura des semblants de pudeur, se prétendra fatiguée, voudra cesser le congrès. Et elle fera ainsi le travail de l’homme, que nous allons maintenant exposer.

Tout ce que fait un homme pour donner du plaisir à une femme s’appelle le travail de l’homme, et voici en quoi il consiste :

La femme étant couchée sur le lit, et en quelque sorte absorbée par sa conversation, il dénouera sa jupe de dessous, et, si elle commence à l’invectiver, la fera taire en la couvrant de baisers. Alors, son Lingam mis en érection, il promènera ses mains sur divers endroits et maniera délicatement certaines parties du corps. Si la femme est honteuse, et que ce soit la première fois qu’ils se rencontrent, l’homme glissera ses mains entre les cuisses, qu’elle voudrait probablement tenir serrées ; si c’est une très jeune fille, il devra d’abord s’emparer de ses seins, qu’elle voudrait probablement couvrir de ses propres mains, puis il lui passera les bras sous les aisselles et sur le cou. Si, au contraire, c’est une femme expérimentée, il fera ce qui pourra être agréable à l’un et à l’autre et approprié à la circonstance. Ensuite il saisira sa chevelure, et lui tiendra le menton dans ses doigts pour lui donner des baisers. Là-dessus, si c’est une jeune fille, elle deviendra honteuse et fermera les yeux. Quel que soit le cas, la contenance de la femme lui indiquera ce qu’il devra faire pour lui rendre le congrès agréable.

Ici Suvamanabha observe que, tout en faisant à la femme ce qu’il juge le plus convenable pendant le congrès, l’homme doit toujours avoir soin de presser les parties de son corps sur lesquelles elle tourne les yeux.

Les signes de jouissance et de satisfaction de la femme sont les suivants : son corps se relâche, elle ferme les jeux, oublie toute pudeur, et montre un désir croissant d’unir les deux organes aussi étroitement que possible. D’un autre côté, voici les signes auxquels on reconnaît qu’elle ne jouit pas et n’est pas satisfaite : elle choque ses mains, ne laisse pas l’homme se lever, semble abattue, mord l’homme, le frappe, et continue à s’agiter après que l’homme a fini.

En pareil cas, l’homme doit lui frotter le yoni avec sa main et ses doigts (comme l’éléphant frotte avec sa trompe) avant de réengager le congrès, jusqu’à ce que l’irritation soit calmée ; puis, il s’occupera d’introduire son Lingam.

Voici les actes que doit faire un homme :

Pousser en avant.

Lorsque les organes sont rapprochés convenablement et directement, cela s’appelle pousser en avant.

Frictionner ou baratter.

Lorsqu’on tient le Lingam avec la main, et qu’on le fait tourner tout autour dans le yoni, cela s’appelle baratter.

Percer.

Lorsque le yoni est abaissé et que le Lingam en frappe la partie supérieure, cela s appelle percer.

Frotter.

Lorsque même chose est faite sur la partie inférieure, cela s’appelle frotter.

Presser.

Lorsque le yoni est longtemps pressé par le Lingam, cela s’appelle presser.

Donner un coup.

Lorsque le Lingam est retiré à une certaine distance du yoni, et qu’il y rentre ensuite avec force, cela s’appelle donner un coup.

Le coup du sanglier.

Lorsque le Lingam ne frotte qu’un côté seulement du yoni, cela s’appelle le coup du sanglier.

Le coup du taureau.

Lorsque les deux côtés du yoni sont ainsi frottés, cela s’appelle le coup du taureau.

La chasse au moineau.

Lorsque le Lingam est dans le yoni, et qu’on l’y agite avec un rapide mouvement de va-et-vient, sans le retirer, cela s’appelle la chasse au moineau. C’est le dernier acte du congrès.

Quand une femme joue le rôle de l’homme, elle doit, en sus des neuf opérations ci-dessus, faire les trois suivantes :

La paire de pincettes.

Lorsque la femme tient le Lingam dans son yoni, l’y attire, le serre et le garde ainsi longtemps, ce a s’appelle la paire de pincettes.

La toupie.

Lorsque, pendant le congrès, elle tourne en rond comme une roue, cela s’appelle la toupie. La pratique seule peut l’apprendre.

La balançoire.

Lorsque, en pareil cas, l’homme soulève a partie médiane de son corps, et que la femme tourne en rond sur sa partie médiane à elle, cela s’appelle la balançoire.

Si la femme est fatiguée, elle posera son front sur celui de son amant, et restera ainsi sans interrompre l’union des organes. Puis, quand elle sera reposée, l’homme se retournera et recommencera le congrès.

Il y a aussi, sur ce sujet, des versets dont voici le texte :

« Si réservée que soit une femme, et si bien caché qu’elle tienne ce qu’elle ressent, toutefois, lorsqu’elle monte sur un homme, elle trahit tout son amour et toute sa passion. La contenance de la femme doit faire connaître à l’homme ses dispositions, et la manière dont elle veut qu’on jouisse d’elle. La femme qui est dans ses menstrues, la femme qui a récemment accouché, et la femme grosse, ne doivent pas être autorisées à jouer le rôle de l’homme. »

IX

De l’auparishtakai ou congrès buccal

Il y a deux sortes d’eunuques, les uns déguisés en hommes, les autres en femmes. Les eunuques déguisés en femmes imitent celles-ci en tout : costume, parler, gestes, gentillesse, timidité, simplicité, douceur et modestie. Les actes qui s’opèrent sur le jaghana ou partie médiane des femmes se font dans la bouche de ces eunuques : c’est ce qu’on appelle Aupahshtaka. Ces eunuques trouvent dans le congrès buccal un plaisir d’imagination, en même temps qu’un gagne pain, et ils mènent la vie des courtisanes, surtout ceux qui sont déguisés en femmes.

Les eunuques déguisés en hommes tiennent leurs pratiques secrètes, et quand ils veulent exercer une profession, ils choisissent celle de masseur. Sous prétexte de vous masser, un eunuque de cette sorte embrasse et attire à lui les cuisses de son client, puis il lui touche les attaches des cuisses et le jaghana, ou les parties centrales du corps.

Si, alors, il trouve le Lingam en érection, il le presse de ses mains et le frotte pour le maintenir dans cet état. Si, après cela et connaissant son intention, le client ne dit pas à l’eunuque de continuer, celui-ci prend sur lui de le faire et commence le congrès. Si, au contraire, le client lui ordonne d’agir, il s’y refuse et ne consent enfin qu’avec difficulté.

Suit alors une série de huit opérations pratiquées l’une après l’autre par l’eunuque, savoir :

Cette pratique paraît avoir été usitée très anciennement dans certaines parties de l’Inde. Le Shushnata, un ouvrage de médecine qui remonte à deux mille ans, décrit, au nombre des maladies dont il traite, la blessure faite au Lingam par les dents. On trouve des traces de cette pratique jusque dans le VIIe siècle ; il existe, en effet, des scènes d’Aupahshtaka dans les sculptures de plusieurs temples de Shaiva à Bhuvaneshwara, près de Kattak, dans l’Orissa, qui ont été construits vers cette époque. De telles scultures sur de tels édifices donnent à penser que cette pratique était alors très populaire dans certaines régions. Il ne paraît pas qu’elle soit aussi en faveur aujourd’hui dans l’Hindoustan : elle a peut-être cédé la place à la sodomie, introduite depuis la période mahométane.

1. Congrès nominal.

Lorsque, tenant le Lingam de l’homme avec sa main, et le plaçant entre ses lèvres, l’eunuque le frôle de sa bouche, cela s’appelle congrès nominal.

2. Mordillage des côtés.

Lorsque, couvrant l’extrémité du Lingam avec ses doigts rassemblés en forme de bouton de fleur, l’eunuque en presse les côtés avec ses lèvres, en se servant aussi des dents, cela s’appelle Mordillage des côtés.

3. Pression extérieure.

Lorsque, sollicité de continuer, l’eunuque presse le bout du Lingam avec ses lèvres serrées et le baise comme s’il voulait le tirer, cela s’appelle pression extérieure.

4. Pression intérieure.

Lorsque, sur une nouvelle invitation de poursuivre, il introduit le Lingam plus avant dans sa bouche, le presse avec ses lèvres et ensuite le fait sortir, cela s’appelle pression intérieure.

5. Baiser.

Lorsque, tenant le Lingam dans sa main, l’eunuque le baise comme s’il faisait la lèvre inférieure, cela s’appelle baiser.

6. Polissage.

Lorsque, après l’avoir baisé, il le caresse partout avec sa langue, et particulièrement sur l’extrémité, cela s’appelle polissage.

7. Succion de la mangue.

Lorsque, continuant de la sorte, il en introduit la moitié dans sa bouche, le baise et le suce avec force, cela s’appelle succion de la mangue.

8. Absorption.

Et enfin, lorsque, du consentement de l’homme, l’eunuque introduit le Lingam tout entier dans sa bouche et le presse jusqu’à la racine comme s’il allait l’avaler, cela s’appelle absorption.

Chacune de ces opérations terminée, l’eunuque exprime son désir d’en rester là ; malgré la première, le client veut la seconde, puis la troisième, et ainsi de suite.

On peut aussi, pendant cette espèce de congrès, frapper, égratigner, etc.

L’Auparishtaka est également pratiqué par des femmes dissolues et libertines, et par des servantes non mariées, qui vivent de la profession de masseuse.

Les Acharyas (anciens et vénérables auteurs) sont d’avis que cet Auparishtaka est l’affaire d’un chien et non celle d’un homme, parce que c’est une pratique basse et prohibée par la Sainte Écriture, et parce que l’homme lui-même souffre en mettant son Lingam en contact avec les bouches des eunuques et des femmes. Mais Vatsyayana soutient que les prohibitions de la Sainte Écriture ne s’appliquent pas à ceux qui fréquentent les courtisanes, et que la pratique de l’Auparishtaka n’est défendue qu’avec les femmes mariées. Quant au mal qui peut être fait à l’homme, il est aisément remédiable.

Les gens de l’Inde orientale ne s’adressent pas aux femmes qui pratiquent l’Auparishtaka.

Les gens d’Ahichhatra s’adressent à ces femmes, mais s’abstiennent de tout commerce avec la bouche.

Les gens de Saketa ont avec ces femmes toute espèce de commerce buccal, tandis que ceux de Nagara s’en abstiennent, mais font tout le reste.

Les gens du pays de Shurasena, sur la rive méridionale du Djoumnah, font tout sans hésitation, car, disent-ils, les femmes étant malpropres de nature, personne ne peut être certain de leur caractère, de leur pureté, de leur conduite, de leurs pratiques, de leurs confidences ou de leurs discours. Il n’y a Pas lieu, pour cela, de les délaisser ; en effet, la loi religieuse, sur l’autorité de laquelle elles sont réputées pures, établit que le pis d’une vache est propre au moment où on la trait, quoique la bouche d’une vache, et aussi la bouche de son veau, soient considérées comme malpropres par les Hindous. De même un chien est propre lorsque à la chasse il s’empare d’une biche, quoique la nourriture touchée par un chien soit d’ailleurs considérée comme très malpropre. Un oiseau est propre quand il fait tomber un fruit d’un arbre en le becquetant, quoique les objets mangés par des corbeaux ou autres oiseaux soient considérés comme malpropres. La bouche d’une femme, aussi, est propre pour donner ou recevoir des baisers, et pour d’autres actes semblables au moment du commerce sexuel. Vatsyayana, en fin de compte, estime que, dans toutes ces matières d’amour, chacun doit agir conformément aux usages de son pays et à sa propre inclination.

Il y a aussi, sur ce sujet, des versets dont voici le texte :

« Les serviteurs mâles de certains hommes pratiquent avec leurs maîtres le congrès buccal. Il y a aussi des citoyens qui, se connaissant bien les uns les autres, le pratiquent entre eux. Certaines femmes du harem, lorsqu’elles sont amoureuses, agissent de la bouche sur les Yonis l’une de l’autre, et certains hommes font la même chose avec les femmes. Pour faire ceci (c’est-à-dire pour baiser le yoni), on imitera le baiser sur la bouche. Lorsqu’un homme et une femme sont couchés en sens inverse, c’est-à-dire la tête de l’un vers les pieds de l’autre, et se livrent à cette espèce de congrès, cela s’appelle le congrès du corbeau. » Ces sortes de choses passionnent tellement certaines courtisanes, qu’elles abandonnent des amants distingués, honnêtes et instruits, pour s’attacher à des personnes de basse condition, telles que des esclaves et des conducteurs d’éléphants. L’Auparishtaka, ou congrès buccal, ne doit jamais être pratiqué par un Brahmane lettré, par un ministre chargé des affaires d’un État, par un homme de bonne réputation ; car, si la pratique en est permise par les Shastra, il n’y a pas de raison pour qu’on la mette en œuvre, si ce n’est dans les cas particuliers. Ainsi, par exemple, on mentionne dans les livres de médecine le goût, la force et les qualités digestives de la viande de chien, mais il ne s’ensuit pas que le sage doive en manger. Par contre, il y a des hommes, des lieux et des temps à l’égard desquels on peut user de ces pratiques. Un homme doit, en conséquence, considérer le lieu, le temps et la pratique qu’il s’agit d’opérer, si elle convient à sa nature et à lui-même ; après quoi il pourra ou non s’y livrer, selon les circonstances. Mais après tout, ces choses étant faites secrètement et l’esprit de l’homme étant variable, comment savoir ce que fera une personne dans tel ou tel temps et pour tel ou tel objet ?

X

De la manière de commencer et de finir le congrès ; différentes sortes de congrès et querelles d’amour

Dans la chambre de plaisir, décorée de fleurs et embaumée de parfums, le citoyen, en compagnie de ses amis et serviteurs, recevra sa femme, Qui viendra baignée et parée, et il l’invitera à se rafraîchir et à boire librement. Il la fera ensuite asseoir à sa gauche ; puis, prenant sa chevelure et touchant l’extrémité et le nœud de son vêtement, il l’embrassera délicatement avec son bras droit. Ils se livreront alors à une plaisante conversation sur différents sujets, et pourront aussi parler, à mots couverts, de choses qui seraient considérées comme peu séantes en société. Ils pourront chanter, avec ou sans gesticulations, jouer des instruments de musique, causer de beaux arts, et s’exciter l’un l’autre à boire. Enfin, lorsque la femme n’en pourra plus d’amour et de désir, le citoyen renverra le monde qui sera autour de lui, donnant à chacun des fleurs, des onguents, des feuilles de bétel ; et lorsqu’ils seront enfin seuls tous les deux, ils procéderont comme il a été écrit dans les précédents chapitres.

Tel est le commencement de l’union sexuelle. À la fin du congrès, les amants, avec modestie et sans se regarder l’un l’autre, iront séparément au cabinet de toilette. Ensuite, assis à leurs mêmes places, ils mangeront quelques feuilles de bétel, et le citoyen appliquera de sa propre main sur le corps de la femme un onguent de pur santal ou de quelque autre essence. Il l’embrassera alors de son bras Gauche et, avec des paroles aimables, la fera boire dans une coupe qu’il tiendra dans sa propre main, où il lui donnera de l’eau à boire. Ils pourront manger des sucreries ou autres choses, à leur fantaisie, et boire des jus frais, du potage, du gruau, des extraits de viande, des sorbets, du jus de manguier, de l’extrait de jus de citron mêlé de sucre, ou toute autre chose qui soit au goût du pays et connue pour être douce, agréable et pure. Les amants peuvent aussi s’asseoir sur la terrasse du palais ou de la maison, pour y jouir du clair de lune et se livrer à une agréable conversation. À ce moment aussi, la femme étant couchée sur ses genoux, le visage tourné vers la lune, le citoyen lui montrera les différentes planètes, l’étoile du matin, l’étoile Polaire, et les sept Rishis ou la Grande Ourse.

Ainsi finit l’union sexuelle.

Le congrès est de différentes sortes, comme suit :

Congrès d’amour.

Lorsqu’un homme et une femme qui s’aiment depuis un certain temps se trouvent enfin réunis après de Grandes difficultés ; ou lorsque l’un d’eux revient de voyage ; ou lorsqu ils se réconcilient après s’être séparés à la suite d’une querelle, leur congrès s’appelle le congrès d’amour. Il se pratique suivant la fantaisie des amants, et aussi longuement qu’il leur plaît.

Congrès d’amour subséquent.

Lorsque deux personnes se réunissent, leur amour mutuel étant encore dans l’enfance, leur congrès s’appelle le congrès d’amour subséquent.

Congrès d’amour artificiel.

Lorsqu’un homme pratique le congrès en s’excitant lui même au moyen des soixante-quatre manières, telles que le baiser, etc. ; ou lorsqu’un homme et une femme ont commerce ensemble, quoique chacun d’eux aime une personne différente, leur congrès s’appelle congrès d’amour artificiel. En pareil cas, il faut employer tous les procédés et moyens indiqués par les Kama Shastra.

Congrès d’amour transféré.

Lorsqu’un homme, du commencement à la fin du congrès, tout en opérant sur la femme, ne cesse de penser qu’il jouit d’une autre qui a son affection, cela s’appelle le congrès d’amour transféré.

Congrès à l’instar des eunuques.

Le congrès entre un homme et une porteuse d’eau ou une servante de caste inférieure à la sienne, qui dure seulement jusqu’à ce que le désir soit satisfait, s’appelle congrès à l’instar des eunuques. On doit s’abstenir, dans ce cas, des attouchements extérieurs, des baisers et des diverses manipulations.

Congrès décevant.

Le congrès entre une courtisane et un paysan, celui entre citoyens et villageoises ou femmes de banlieue s’appellent congrès décevant.

Congrès d’amour spontané.

Le congrès entre deux personnes attachées l’une à l’autre, et qui s’effectue au gré de leur fantaisie, s’appelle congrès d’amour spontané.

Ainsi finissent les sortes de congrès.

Nous allons parler maintenant les querelles d’amour.

Une femme qui aime passionnément un homme ne peut souffrir d’entendre prononcer le nom de sa rivale, ni d’avoir aucune conversation à son sujet, ni d’être appelée de son nom par inadvertance. Si pareille chose arrive, alors commence une grande querelle : la femme pleure, se met en colère, agite sa chevelure, frappe son amant, tombe de son lit ou de son siège, et jetant à droite et à gauche guirlandes et ornements, s’étend de son long par terre.

L’amant, alors, doit essayer de l’apaiser par des paroles conciliantes, et en même temps, il la relèvera avec précaution et la mettra sur son lit. Mais elle, sans répondre à ses questions, avec une colère toujours croissante, courbera la tête de son amant en tirant ses cheveux, et, après l’avoir frappé une fois, deux fois, trois fois sur les bras, la tête, la poitrine ou le dos, se dirigera vers la porte de la chambre.

Suivant Dattaka, elle doit alors s’asseoir, l’air courroucé, près de la porte, et verser des larmes ; mais elle ne doit pas sortir, pour éviter de se mettre dans son tort. Au bout d’un certain temps, lorsqu’elle juge que son amant a dit et fait tout ce qu’il pouvait pour se réconcilier, elle doit l’embrasser en lui faisant d’amers reproches, mais aussi en lui laissant voir un vif désir du congrès.

Lorsque la femme est dans sa Propre maison et qu’elle s’est querellée avec son amant, elle doit aller à lui et lui témoigner toute sa colère, puis le quitter. Mais ensuite, le citoyen lui ayant envoyé le Vita, le Vidushaka ou le Pithamardal pour l’apaiser, elle doit revenir avec eux à la maison et passer la nuit avec son amant. Ainsi finissent les querelles d’amour.

En résumé :

Un homme qui emploie les soixante quatre moyens indiqués par Babhravya atteint son but et s’assure la jouissance d’une femme de la plus haute qualité. Il aura beau disserter savamment sur d’autres sujets, s’il ne connaît pas les soixante-quatre divisions, il n’obtiendra que peu d’estime dans l’assemblée des lettrés. Un homme, dépourvu d’autre savoir, mais bien au courant des soixante-quatre divisions, aura la prééminence dans toute société d’hommes et des femmes. Comment ne pas respecter les soixante-quatre parties, si l’on considère qu’elles ont le respect des lettrés, des savants et des courtisanes ? C’est à raison de ce respect attaché aux soixante-quatre parties, du charme qu’elles possèdent et des mérites qu’elles ajoutent aux attraits naturels des femmes, que les Acharyas les appellent chères aux femmes. Un homme versé dans les soixante-quatre parties est chéri de sa propre femme, des femmes des autres et des courtisanes.