Les Mabinogion/Kulhwch et Olwen

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KULHWCH et OLWEN



Kilydd, fils du prince Kelyddon, voulut une femme pour partager sa vie, et son choix tomba sur Goleuddydd [1], fille du prince Anllawdd [2]. Quand ils furent sous le même toit, le pays se mit à prier pour qu’ils eussent un héritier, et, grâce à ses prières, un fils leur naquit.

Mais du moment où elle conçut, elle devint folle et fuit toute habitation. Quant arriva le temps de la délivrance, son bon sens lui revint. Or il arriva qu’à l’endroit où le porcher gardait un troupeau de porcs, par peur de ces animaux, elle accoucha. Le porcher prit l’enfant et le porta à la cour. On le baptisa et on lui donna le nom de Kulhwch [3] parce qu’on l’avait trouvé dans la bauge d’une truie. L’enfant cependant était de noble souche et cousin d’Arthur <ref> Arthur. Le nom d’Arthur n’est prononcé ni par Gildas, ni par Bède. Il figure pour la première fois chez Nennius. Suivant l’auteur de l’Historia Britonum, Arthur était chef des guerres contre les Saxons à la fin du Ve siècle ; il aurait remporté sur eux douze victoires. Dans un autre passage qui n’appartient peut-être pas à l’œuvre primitive, il est fait mention d’une chasse au monstre appelé porcum Troit, par lui et son chien Cavall. L’Historia, dans ses parties originales, date du IXe siècle (Voir Arthur de la Borderie, l’Historia Britonum, attribuée à Nennius. Paris, 1832 ; Heeger, Die Trojanersage der Britten. Munich, 1887 ; Zimmer, Nennius vindicatus). Les Annales Cambriae, dans la partie la plus ancienne, dont la rédaction parait être du Xe siècle (elles ont été rédigées entre 954 et 955, comme l’a montré Egerton Philimore, Y Cymmrodor, IX, p. 141-189 : le manuscrit le plus ancien, le Harblian, est de plus d’un siècle plus récent), disent qu’Arthur porta la croix trois jours et trois nuits sur ces épaules, à la bataille du mont Badon, dont il est aussi question dans Gildas, et qui paraît avoir été une défaite très grave pour les Saxons. D’après ces mêmes annales, Arthur aurait péri avec son neveu et adversaire Medraut, en 537, à la bataille de Camlann. Dans l’Historia regum Britanniae de Gaufrei de Monmouth, l’histoire d’Arthur parait singulièrement grossie : il est fils d’Uther, roi des Bretons, et d’Igerna, femme du duc de Cornouailles Gorlois ; il bat non seulement les Saxons, mais les Irlandais et les Romains ; il conquiert une bonne partie de l’Europe. Son neveu Modred s’empare, en son absence, de son trône et de sa femme. Arthur réussit à le battre malgré son alliance avec les Saxons ; mais il est mortellement blessé et se fait porter à l’île d’Avallon pour soigner ses blessures. C’est de là que les Bretons d’Angleterre et de France ont longtemps attendu sa venue. L’histoire de la naissance d’Arthur, des amours d’Igerna et d’Uter, inspirées peut-être d’Ovide, comme l’a fait remarquer M. Paulin Paris (Les Romans de la Table Ronde, I, p. 48), ne sont pas uniquement dues à l’imagination de Gaufrei ; sa querelle avec Medraut, sa blessure et sa retraite à Avallon appartiennent aux traditions bretonnes, Gaufrei, pour le faire fils d’Uther, a glosé peut-être le passage de Nennius, où il est dit que les Bretons l’avaient, à cause de sa passion pour la guerre, appelé Mab Uter id est filius horribilis ; gallois moyen uthr, surprenant, merveilleux. Dans les Traditions galloises, les poésies, c’est un personnage souvent surnaturel ; les propriétés de son épée, de son manteau, rappellent celles de certains héros de l’épopée irlandaise. Il faudrait un volume pour réunir tout ce qu’on trouve dans la littérature galloise seule sur ce héros de la race bretonne. S’il a réellement existé (ce doute eût coûté la vie, au moyen âge, en pays breton), la légende lui a, à coup sûr, attribué les traits de héros ou de demi-dieux plus anciens. (Pour plus de renseignements sur la légende d’Arthur, cf. Gaston Paris, Hist. litt., XXX, p. 3 et suiv. ; San-Marte, Die Arthursage, Quedlinburg, 1842 ; John Rhys, Arthurian Legend, 1891 ; Celtic Folklore, 2 vol. 1901, passim. ; sur les nombreuses localités qui ont porté le nom d’Arthur v. Stuart Glennie. Arthurian Localities, Edinburgh, 1869). On dit encore dans la Bretagne française : fort comme un Artu.</ref>.

On l’envoya à la nourrice. À la suite de l’événement, la mère de l’enfant, Goleuddydd, fille du prince Anllawdd, tomba malade. Elle fit venir son mari et lui dit : « Je mourrai de cette maladie, et tu voudras une autre femme. Or, les femmes sont maintenant les arbitres des largesses. Ce serait cependant mal à toi que de ruiner ton fils ; aussi je te demande de ne pas te remarier que tu n’aies vu une ronce à deux têtes sur ma tombe. » Il le lui promit. Elle appela alors son précepteur [4] et lui demanda de nettoyer complètement sa tombe tous les ans de façon que rien ne pût croître dessus.

La reine mourut. Le roi envoya chaque jour un serviteur pour voir s’il poussait quelque chose sur la tombe. Au bout de sept ans, le précepteur négligea ce qu’il avait promis de faire. Un jour de chasse, le roi se rendit au cimetière ; il voulait voir la tombe lui-même parce qu’il songeait à se remarier la ronce avait poussé dessus ! Aussitôt, il tint conseil pour savoir où il trouverait une femme. Un de ses conseillers lui dit :


[5] Athraw ou Athro. La coutume chez les anciens Gallois était d’avoir un athraw pour la famille : « Il y a trois choses qu’un Gallois, possesseur de terres, doit garder et entretenir : une femme légitime, un homme armé, s’il ne peut lui-même porter les armes et un professeur domestique » (Athraw leuluaidd. Ancient laws, II, p. 514, 31). Le bardd remplissait souvent ce rôle ; c’était lui, en particulier, qui tenait les généalogies. Athro désigne peut-être ici le confesseur, ou plutôt un de ces clercs familiers qui, en France au XIIIe, cumulaient, sous le nom de latiniers, les fonctions d’interprète, de rédacteur et de chapelain (V. Lecoy de la Marche, La Société au XIIIe siècle, p.191). « Je sais une femme qui te conviendrait bien : c’est celle du roi Doged [6]. » Ils décidèrent d’aller la prendre. Ils tuèrent le roi, enlevèrent sa femme et sa fille unique et s’emparèrent de ses Etats.

Un jour, la dame alla se promener. Elle se rendit à la ville chez une vieille sorcière [7] à qui il ne restait plus une dent dans la bouche : « Vieille, » lui dit-elle, « veux-tu me dire, au nom de Dieu, ce que je vais te demander ? Où sont les enfants de celui qui m’a enlevée par violence ? » ― « Il n’en a pas, » dit la vieille.

- »Que je suis malheureuse, » s’écria la reine, « d’être tombée entre les mains d’un homme sans enfants ! » ― « Inutile de gémir, » repartit la vieille : « il est prédit qu’il aura un héritier de toi, quand même il n’en aurait pas d’une autre. D’ailleurs, console-toi : il a un fils. » La princesse retourna joyeuse à la maison, et dit à son mari : « Pourquoi caches-tu tes enfants de moi ? » ― « Je ne le ferai pas plus longtemps, [8] » dit le roi. On envoya chercher le fils et on l’amena à la cour. Sa belle-mère lui dit : « Tu ferais bien de prendre une femme. J’ai justement une fille qui conviendrait à n’importe quel noble au monde. » [9] D’après Rees, Welsh Saints, p. 209 (voy. Lady Guest, Mab., II, p.320), il y aurait eu un roi Doged, fils de Cedig ab Ceredig ab Cunedda Wledig, frère de l’évêque Avan, fondateur de Llan-Avan en Breconshire. Il a été mis au nombre des saints, et a donné son nom à Llan-Ddoged, dans le Denbighshire. Il aurait vécu de 500 à 542.

― « Je n’ai pas encore l’âge de me marier [10], » répondit-il. Alors elle s’écria : « Je jure que tu auras cette destinée que ton flanc ne se choquera jamais à celui d’une femme que tu n’aies eu Olwen, la fille d’Yspaddaden Penkawr. » Le jeune homme rougit [11] et l’amour de la jeune fille le pénétra dans tous ses membres, quoiqu’il ne l’eût jamais vue. « Mon fils, » lui dit son père, « pourquoi changes-tu de couleur ? Qu’est-ce qui t’afflige ? » ― « Ma belle-mère m’a juré que je n’aurais de femme que si j’obtenais Olwen [12], la fille d’Yspaddaden Penkawr. » ― « C’est pour toi chose facile. Arthur est ton cousin. Va le trouver pour qu’il arrange ta chevelure [13] : demande-le lui comme présent. » [14] D’après la plus ancienne rédaction des lois galloises, celle de Gwynedd ou Nord-Galles, à douze ans on pouvait marier les filles (les donner à un mari : rody y wr). L’âge, pour le garçon, devait être quatorze ans révolus, car, à partir de cet âge, il est maître de ses actes, il possède en propre ; son père n’a plus sur lui droit de correction (Ancient laws, I, p. 202, 8 ; 204, 3). Il va sans dire que, dans la réponse de Kulhwch, il ne s’agit pas de l’âge fixé par la loi.

[15] Voir la note à honneur, à la page 127. [dans le mab. de ’Branwen, fille de Llyr’ note à wynebwarth ]

[16] Dafydd ab Gwilym, chantant une femme, l’appelle fain Olwen « mince, svelte Olwen » (p. 162) ; on trouve une comparaison semblable, Iolo mss., p. 239.

[17] D’après la Cyclopaedia de Rees, citée par lady Guest, au VIIIe siècle, c’était la coutume, dans les familles de marque, de faire couper, la première fois, les cheveux de leurs enfants par des personnes qu’elles avaient en estime particulière : ces personnes devenaient comme les pères spirituels ou parrains des enfants. Constantin envoie au pape les cheveux de son fils Héraclius, comme un gage qu’il désire faire de lui, pour Héraclius, un père adoptif. Guortigern ayant eu un fils de sa fille, la poussa à aller porter l’enfant à Germain, l’évêque, en disant qu’il était son père. Germain dit à l’enfant : « Pater tibi ero, nec le permittam nisi mihi novacula cum forcipe et pectine detur, et ad patrem tuum carnalem tibi dare liceat. » L’enfant va droit à Guortigern, et lui dit « Pater meus es tu, caput meum tonde, et comam capitis mei pecte. » (Hist., XXXIX ) Le mot diwyn (v. notes critiques) indique ici donc l’action de mettre en ordre, couper et peigner la chevelure. Ce même usage existait chez les Germains (V. Loth, Revue Celt., 1890, p. 495-496). Il semble aussi, d’après ce passage, que cette opération ne soit pas destinée à faire d’un enfant un fils spirituel, mais qu’elle soit réservée au père et aux parents.


Le jeune homme partit sur un coursier à la tête gris-pommelée, vieux de quatre hivers, aux cuisses puissamment articulées, au sabot brillant comme un coquillage, une bride aux chaînons d’or articulés à la bouche, avec une selle d’or d’un grand prix. Il portait deux javelots d’argent bien aiguisés, une lance à pointe saillante [18], d’une bonne coudée jusqu’à la pointe, en prenant pour mesure le coude d’un homme de forte corpulence, capable d’atteindre le vent et de lui tirer du sang : elle était plus prompte que la chute de la première goutte de rosée de la pointe du roseau sur le sol au moment où elle est la plus abondante, au mois de juin.

À sa hanche pendait une épée à poignée d’or, à lame d’or, à la garde formée d’une croix émaillée d’or et de la couleur de l’éclair du ciel ; dans la croix était une lanterne d’ivoire [19]. Devant lui s’ébattaient deux lévriers au poitrail blanc, à la peau tachetée, portant chacun au cou un collier de rubis allant de la jointure de l’épaule à l’oreille. Celui de gauche passait à droite, celui de droite à gauche, jouant ainsi autour de lui comme deux hirondelles de mer. Les quatre sabots de son coursier faisaient voler quatre mottes de gazon, comme quatre hirondelles en l’air, par dessus sa tête, tantôt plus haut, tantôt plus bas. Il avait autour de lui un manteau de pourpre à quatre angles, une pomme d’or à chaque extrémité de la valeur de cent vaches chacune [20]. Sur ses chausses et ses étriers, depuis le haut de la cuisse jusqu’au bout de son orteil, il y avait de l’or pour une valeur de trois cents vaches.


[21] Notes critiques. Le glaive au moyen âge, dans nos romans français, est une lance. Le gleif gallois, qui lui est emprunté, a le même sens. Dans le Brut Gr. ab Arthur (Myv. Arch., 532.2), Arthur se ceint de son épée Caletvwlch ; puis il prend en mains, un gleif du nom de Ron uwchel. Or dans les Nod. correspondantes, tirées d’un ms du XIIe-XIIIe siècle (Myv. arch., p. 589, n° 510), le mot gleif est remplacé par gwaew ; lance. De même dans le Brut Tysilio. (ibid., 463.1), la lance est appelée Rongymyniat : dans Kulhwch (texte, p. 105) c’est Rongomiant.

[22] Le texte gallois porte lugorn olifant yndi (et une lugorn d’ivoire en elle). On pourrait songer à traduire lugorn par corne de guerre mais c’est un sens très rare. Il s’agit peut-être d’une lanterne dans la croix ou le pommeau de l’épée. Lanterne désignait quelquefois, au moyen âge, un joyau renfermant des boules de senteur ; d’après Littré, on donne encore ce nom à la partie de la croix d’un évêque, ou du bâton d’un chantre, qui est à jour. Les pommeaux d’épée, au moyen âge, étaient souvent à jour ; souvent ils renfermaient, sous un chaton, des reliques sur lesquelles on jurait (Voy. Viollet-le-Duc, Dictionnaire du mobilier français, V, p. 378). Peniarth, IV (L. Blanc 483), a lloring au lieu de lugorn mais le sens est inconnu.

[23] Chez les anciens Bretons, comme chez les Irlandais, la valeur commerciale était appréciée en têtes de bétail. C’est encore la façon de compter, dans les lois d’Howel Da, rédigées au dixième siècle, mais dont le plus ancien manuscrit remonte au douzième siècle. C’est un souvenir de l’époque où la richesse consistait surtout en troupeaux.


Pas un brin d’herbe ne pliait sous lui, si léger était le trot du coursier, qui le portait à la cour d’Arthur.

Le jeune homme dit : « Y a-t-il un portier ? » ― « Oui : et toi, que ta langue ne reste pas silencieuse pourquoi salues-tu … [(lacune)] ? [24]. Moi, je fais le portier pour Arthur tous les premiers de l’an ; tout le reste de l’année, ce sont mes lieutenants : Huandaw [25], Gogigwc, Llaeskenym, et Pennpingyon qui marche sur la tête pour épargner ses pieds, non pas dans la direction du ciel ni de la terre, mais comme une pierre roulante sur le sol de la cour. » ― « Ouvre la porte ? » ― « Je ne l’ouvrirai pas. » ― « Pourquoi ? » ― « Le couteau est allé dans la viande, la boisson dans la corne [26]. On s’ébat dans la salle d’Arthur.


[27] Voir Notes Critiques à la page du texte 103, lignes 6 et 7.

[28] Huandaw, « qui entend bien ; » Gogigwc est probablement une faute du copiste pour Gogihwc, épithète qu’on trouve dans le Gododin d’Aneurin (Skene, Four ancient books of Wales, p. 90, vers 13), mais dont le sens n’est pas certain ; Llaesgenym est peut-être altéré aussi ; Pen. 4. Laes Kemyn peut-être pour Llaes Kevyn ; le premier terme, llaes, vient du latin laxus ; Owen Pughe donne à Pennpingion le sens de tête branchue, en rapprochant pingion de pingc.

[29] Le mot gallois indique que la corne à boire était faite primitivement et ordinairement aussi, sans doute, de corne de buffle ou bœuf sauvage. D’après les lois galloises, la corne à boire du roi, la corne qu’il portait dans ses expéditions, et la corne du chef des chasseurs, devaient être de bœuf sauvage (Ancient laws, II p. 991).


On ne laisse entrer que les fils de roi d’un royaume reconnu ou l’artiste qui apporte son art [30]. On donnera à manger à tes chiens et à tes chevaux ; à toi on offrira des tranches de viandes cuites et poivrées [31], du vin à pleins bords et une musique agréable. On t’apportera la nourriture de trente hommes au logis des hôtes, là où mangent les gens de pays lointains et ceux qui n’auront pas réussi à entrer dans la cour d’Arthur. Tu ne seras pas plus mal là qu’avec Arthur lui-même. On t’offrira une femme pour coucher avec toi, et les plaisirs de la musique. Demain, dans la matinée, lorsque le portail s’ouvrira devant la compagnie qui est venue ici aujourd’hui, c’est devant toi le premier qu’elle s’ouvrira et tu pourras choisir ta place où tu voudras dans la cour d’Arthur du haut en bas. » ― « Je n’en ferai rien, » dit le jeune homme ; « si tu ouvres la porte, c’est bien ;


[32] Le même trait de mœurs se retrouve chez les anciens Irlandais. Quand Lug, fils d’Eithlenn, sorte de Mercure irlandais, se présente au palais royal de Tara, le portier refuse de le laisser entrer à moins qu’il ne soit maître en quelque art ou profession (O’Curry, On the manners, III, p, 42).

[33] Le dystein ou intendant du roi devait fournir au cuisinier certaines herbes ; la seule qui soit spécifiée, c’est le poivre (Ancient laws, I, p. 48). Les viandes poivrées sont en honneur aussi dans nos romans de chevalerie : « poons rostis, et bons cisnes (cygnes) pevreis, » [viandes rôties et bons cygnes poivrés] vers 1560, dans Raoul de Cambrai, édition de la Société des anciens textes français.


si tu ne l’ouvres pas, je répandrai honte à ton maître, à toi déconsidération, et je pousserai trois cris [34] tels à cette porte qu’il n’y en aura jamais eu de plus de mortels depuis Pengwaedd [35], en Kernyw [36] (Cornouailles anglaise), jusqu’au fond de Din Sol, dans le Nord [37], et à Esgeir Oervel [38], en Iwerddon (Irlande) : tout ce qu’il y a de femmes enceintes dans cette île avortera ; les autres seront accablées d’un tel malaise que leur sein se retournera et qu’elles ne concevront jamais plus. » [39] Le cri perçant (diaspad) était un moyen légal de protestation d’après les lois. Il était encore en usage, d’après le code de Gwynedd, dans le cas où un descendant au neuvième degré venait réclamer une terre comme lui appartenant : on l’appelait diaspat uwch annwvyn ou cri plus haut que l’abîme (Ancient laws I, 173,174.2). D’après le code de Gwent, le diaspat egwan ou cri de détresse, était légal au Gallois à qui on refusait l’aide de la loi dans la cour du roi ou devant le juge, au sujet de son patrimoine, ou aux descendants au neuvième degré, pour protester contre une déchéance de propriété (Ancient laws, I, p. 774, 1). Sur la clameur chez les Français comme protestation contre un décret du souverain, v. Paulin, Paris, Romans de la Table Ronde, IV, notes.

[40] Dans les Lois, 1, p. 184, donnent un Penryn Penwaed y Kernyw. Ce serait, d’après l’éditeur, aujourd’hui Penwith en Cornwall, lieu de Pen Blathaon yn y Gogled. Les Lois portent Penryn Blathaon ym Prydyn, c’est-à-dire en Ecosse ; on suppose que c’est Caithness. D’après les Lois, Dyvynwal Moelmut aurait fait mesurer l’île de Bretagne et aurait trouvé, de Penryn Blathaon à Penryn Penwaed, 900 milles, et de Crygyll en Anglesey jusqu’à la Manche, 500 milles. Din Sol est l’ancien nom du Mont de St-Michel de Cornwall ; Esgeir Oervel est inconnu.

[41] Kernyw est le nom gallois de la Cornouailles anglaise, le même que celui de la Cornouailles armoricaine : Kernèo et Kerné. Le Kernyw est parfois confondu avec le Devonshire. Dyvneint (Devon) a désigné tout le territoire des anciens Domononii, la deuxième grande tribu émigrée en Armorique à la suite des invasions saxonnes. Ce n’est pas sans surprise que j’ai trouvé dans un poète gallois du douzième siècle, Llywarch ab Llywelyn à propos de Penwaedd, Dyvneint, nom gallois du Devon à la place de Kernyw : O Pennwaed Dyvneint hyd pentir Gafran (Myv. arch., p. 200, col. 1) ; de même dans un poème anonyme fort curieux, la table d’Arthur est mise en Dyvneint (Myv. arch., p. 130, col. 12). Egerton Phillimore (Owen’s Pembrokeshire II, p. 372, note de la page 371) veut assimiler Penwaedd à Penwith, c’est-à-dire la pointe de Land’s End en Cornwal, ce qui est phonétiquement impossible : aussi loin qu’on peut remonter, on a Penwith ou Penwiđ (Penwiđ, pointe en vue : cf. Gwiđ-va). Dans les Oxford Bruts, p. 292, il est dit qu’Henri Ier réunit des troupes de tout son royaume en 1111, depuis Penryn Pengwaedd en Irlande jusqu’à Penryn Blataon dans le Nord. Penryn Blataon est le Pen Blathaon qui dans le roman de Kulhwch (plus bas) est mis en Ecosse. Les Bruts, p. 73, mentionnent cependant un Penryn Kernyw, qui doit être Penryn près Falmouth. L’erreur pour Pengwaedd est manifeste. Il y a un Penwaed en Galles ; wng Penwaed barth a plorth Gemais (Myv. arch., 132.2).

[42] Dans les Mabinogion, le Nord est le pays des Bretons du nord de l’Angleterre, depuis le Cumberland jusqu’à la Clyde ; voir la note à Kymry, plus haut Mabin. de Branwen. D’après la vie de Saint Cadoc (Rees, Lifes of the Cambro-brit. saints, p. 65), Dinsol est le nom cornique du Mont Saint-Michel, de Cornwall dans la baie de Penzance (J. Loth, Revue Celt., 1899, p. 207).

[43] Comme l’a fait remarquer Kuno Meyer (Early relations between Gael and Brython, Society of Cymmrodorion, 1896, p. 35), c’est une déformation de Sescenn Uairbhéoil en Leinster, mentionné fréquemment comme séjour de héros.


Glewlwyt Gavaelvawr [44] lui répondit : « Tu auras beau crier contre les lois de la cour d’Arthur, on ne te laissera pas entrer que je n’aie tout d’abord été en parler à Arthur. » Glewlwyt se rendit à la salle : « Y a-t-il du nouveau à la porte ? » dit Arthur.

― « Les deux tiers de ma vie sont passés ainsi que les deux tiers de la tienne. J’ai été à Kaer Se et Asse, à Sach et Salach, à Lotor et Fotor ; j’ai été à la grande Inde et à la petite ; j’étais à la bataille des deux Ynyr [45] quand les douze otages furent amenés de Llychlyn (de Scandinavie) ; j’ai été en Europe (Egrop), en Afrique, dans les îles de la Corse (Corsica), à Kaer Brythwch, Brythach et Nerthach ; j’étais là lorsque tu tuas la famille de Cleis fils de Merin ; lorsque tu tuas Mil Du, fils de Ducum ; j’étais avec toi quand tu conquis la Grèce en Orient ; j’ai été à Kaer Oeth et Anoeth [46] ; j’ai été à Kaer Nevenhyr : nous avons vu là neuf rois puissants, de beaux hommes ; eh bien ! je n’ai jamais vu personne d’aussi noble que celui qui est à la porte d’entrée en ce moment ! » ― « Si tu es venu au pas, dit Arthur, retourne en courant. Que tous ceux qui voient la lumière, qui ouvrent les yeux et les ferment, soient ses esclaves ; que les uns le servent avec des cornes montées en or, que les autres lui présentent des tranches de viandes cuites et poivrées, en attendant que sa nourriture et sa boisson soient prêtes. C’est pitié de laisser sous la pluie et le vent un homme comme celui dont tu parles. »

[47] Glewlwyt à la forte étreinte. On le trouve déjà dans le Livre noir, remplissant ses fonctions de portier, mais non, à ce qu’il semble, celles de portier d’Arthur (Skene, II, p. 50, v. 24).
[48] La légende galloise distingue deux Ynyr : Ynyr Gwent et Ynyr Llydaw ou Ynyr d’Armorique. Ynyr Gwent serait, d’après le Liber Laudavensis, p. 111, le père d’un prince Idon, contemporain de saint Teliaw. L’Ynyr armoricain serait fils du roi Alan, et neveu de Cadwaladr (Gaufrei de Monmouth, éd. San-Marte, XII, 19, écrit Iny ; Brut Tysilio, p. 475, col. 2). Taliesin célèbre les exploits d’un Ynyr (Skene, II, p. 167, v. 25 ; p. 168, v.8 et suivants ; au vers 25 le poète parle des gwystlon ou otages d’Ynyr).

[49] Au lieu de Kaer Oeth ac Anoeth, on trouve généralement Carchar (prison) Oeth ac Anoeth. D’après les Iolo mss., p. 187, après la destruction complète des envahisseurs romains par les Bretons gouvernés par Caradawc ab Bran, Manawyddan, fils du roi Llyr, fit rassembler de toutes parts leurs ossements, et en mêlant la chaux aux os, il fit une immense prison destinée à enfermer les étrangers qui envahiraient l’île, et les traîtres à la cause de la patrie. La prison était ronde ; les os les plus gros étaient en dehors ; avec les plus petits, qui étaient en dedans, il ménagea différents cachots ; il y en eut aussi sous terre spécialement destinés aux traîtres. Le Livre noir fait mention de la famille d’Oeth et Anoeth (Skene, 31, 8). D’après les Triades du Livre rouge (Mab., p. 300, 1 ; 306, 9), Arthur aurait été trois nuits dans cette prison avec Llyr Lledyeith, Mabon, fils de Modron, et Geir, fils de Geiryoed ; il aurait été délivré par Goreu, fils de Kustennin, son cousin. Nous retrouvons plusieurs de ces personnages dans notre mabinogi. Les noms des prisonniers diffèrent, p. 306 (v. plus bas à propos de Modron). Le sens de oeth et anoeth ici n’est pas sûr. La terre oeth est une terre cultivée et boisée ; la terre anoeth est une terre inculte (Iolo mss., p. 189 ; cf. Silv. Evans, Welsh Dict.). Mais oeth a aussi le sens de richesses, joyaux, présents, ainsi qu’anoeth : (cf. -oeth dans cyf-oeth, richesse, puissance ; cf. irl., cumachte).



― « Par la main de mon ami, » s’écria Kei [50], « si on suivait mon conseil, on ne violerait pas les lois de la cour pour lui. » ― « Tu es dans le faux, cher Kei, dit Arthur ; nous sommes des hommes de marque à proportion qu’on a recours à nous ; plus grande sera notre générosité, plus grandes seront notre noblesse, notre gloire et notre considération.

Glewlwyt se rendit à l’entrée et ouvrit la porte au jeune homme. Quoique tout le monde descendît à l’entrée sur le montoir de pierre, Kulhwch, lui, ne mit pas pied à terre et entra à cheval. « Salut ! s’écria-t-il, chef suprême de cette île ; salut aussi bien en haut qu’en bas de cette maison, à tes nobles, à ta suite, à tes capitaines ; que chacun reçoive ce salut aussi complet que je l’ai adressé à toi-même [51]. Puissent ta prospérité, ta gloire et ta considération être au comble par toute cette île. » ― « Salut aussi à toi, dit Arthur ; assieds-toi entre deux de mes guerriers ; on t’offrira les distractions de la musique et tu seras traité comme un prince royal, futur héritier d’un trône, tant que tu seras ici. Quand je partagerai mes dons entre mes hôtes et les gens de loin, c’est par ta main que je commencerai, dans cette cour. » ― « Je ne suis pas venu ici, dit le jeune homme, pour gaspiller nourriture et boisson. Si j’obtiens le présent que je désire, je saurai le reconnaître et le célébrer ; sinon, je porterai ton déshonneur aussi loin qu’est allée ta renommée, aux quatre extrémités du monde. » ― « Puisque tu ne veux pas séjourner ici, dit alors Arthur, tu auras le présent qu’indiqueront ta tête et ta langue, aussi loin que sèche le vent, que mouille la pluie, que tourne le soleil, qu’étreint la mer, que s’étend la terre,



[52] Kei est un des personnages les plus connus des légendes galloises. Dans les mabinogion qui ont subi l’influence française et dans les romans français il est brave, mais bavard, gabeur, et il n’est pas toujours heureux dans ses luttes. Dans ce mabinogi il a ses véritables traits ; il commence déjà cependant à gaber. Le Livre noir le présente comme un compagnon d’Arthur, et un terrible guerrier « quand il buvait, il buvait contre quatre, quand il allait au combat, il se battait contre cent » (Skene, p. 50, XXXII ; 52, v. 5, v. 17 et suiv.). D’après les Triades (Mab., 303, 3), c’est un des trois taleithawc ou chefs portant sur le casque une large couronne d’or, avec Gweir, fils de Gwystyl, et Drystan, fils de Tallwch. Les poètes gallois du moyen âge (Gogynveirdd), du XIIe au XVe siècle, font de fréquentes allusions à Kei : Myv. arch., 978, col. 2 : Mae yn gyveill grymus val Kei gwynn (il est un ami fort comme Kei béni) ; ibid., p. 328, col. 2 : Wryd Cai (la vaillance de Kei) ; ibid., p. 329, col. 1 : Cai boneddigaidd (noble comme Kei) ; ibid., p. 332, col. 1 : Pwyll Cai (la raison, le sens de Kei) ; Davydd ab Gwilym, p. 323 (éd. de 1873), contre Rhys Meigen : Nid gwrol Gai hir, ce n’est pas un brave comme Cai le long ; Llewis Glyn Cothi, p. 309, 15, cite aussi Kai hir (Kai le long). Il est fils de Kynyr, mais il semble bien, d’après une phrase de notre mabinogi et un poème des plus singuliers de la Myv. arch., qu’il y ait eu des divergences d’opinion ou des doutes sur ce point. Dans ce poème, qui est un dialogue entre Gwenhwyvar et Arthur qu’elle n’a pas reconnu, il est appelé fils de Sevyn. Gwenhwyvar le vante comme un guerrier incomparable ; elle déclare à Arthur qu’à en juger par son apparence, il ne tiendrait pas Cai, lui centième ; à quoi Arthur répond que, quoiqu’il soit petit, il en tiendrait bien cent tout seul (Myv. arch., p. 130, col. 2). Pour les qualités merveilleuses de Kei, voir plus bas. Gaufrei de Monmouth le donne comme dapifer d’Arthur (IX, 11,.12, 13 ; X, 3, 6, 9. 13) ; il a, en effet, les fonctions propres au dystein dans le mabinogi d’Owen et Lunet. La forme de son nom, dans les romans français, Keu, est bien galloise (prononcez Keï). D’après notre mabinogi, il aurait été tué par Gwyddawc ab Menestyr (149).

[53] Une formule de salut aussi développée et analogue se retrouve dans un poème de la Myv. arch., p. 248, col. 2, attribué à Elidyr Sais (XII-XIIIes s.).


à l’exception de mon navire et de mon manteau, de Kaledvwlch [54], mon épée, de Rongomyant, ma lance ; de Gwyneb Gwrthucher, mon bouclier [55] ; de Karnwenhan [56], mon couteau, et de Gwenhwyvar [57], ma femme ;


[58] Caledvwlch, de calet « dur, » et de bwlch « entaille, brèche » : dur à entailler ? » ou « qui entaille durement. » Une épée célèbre dans l’épopée irlandaise, l’épée de Leité, qui lui venait d’une demeure de fées, porte un nom analogue, Calad-holg, qu’O’Curry traduit par « hard-bulging » (O’Curry, On the manners II, p. 320). – Rongomyant : ron signifie lance ; le second terme n’est pas clair. C’est Ron uwchel et Rongoruchel dans le Brut Gr. ab Arthur (Myv. arch., p. 32,2 et Nod. 500), Rongymynyat ou Lance qui taille, dans le Brut Tys. (ibid., p. 163-178.)

[59] Gwyneb Gwrthucher : gwyneb, « visage, » gwrthucher « soir » (Cf. cornique gwrthuher : Vocab. cornique, Zeuss, Gr. Celt. app.).

[60] Karnwenhan ; le premier terme, carn, signifie « manche ; » gwenana, dans les dictionnaires, le sens de ampoule ou pustule sous la peau ; il est plus probable qu’on ait affaire ici à un diminutif de gwen « blanche » : kyllell, « couteau, » est féminin : Karnwenhan « à manche blanc ou à peu près blanc. » [61] Gwenhwyvar, la Gvanhumara de Gaufrei de Monmouth, et la Genièvre des romans français. Suivant Gaufrei, IX, 9, elle serait de race romaine, et élevée par Cador, duc de Cornouailles. Les traditions galloises lui donnent toutes, comme père, Gogrvan ou Gogvran Gawr, même le Brut Tysilio, Myv., p. 464, col. 1 ; Triades du Livre rouge, Mabin., p. 302, 10 (cf. Myv. arch., p. 396, 16) : « Trois principales dames d’Arthur ; Gwenhwyvar, la fille de Gwryt Gwent, Gwenhwyvar, le fille de [Gwythyr], fils de Greidiawl, et Gwenhwyvar, la fille de Ocurvan Gawr » (Myv. : Ocurvran Gawr). Il y a un Caer Ogrvan à un mille au nord d’Oswestry, d’après les éditeurs de Llewis Glyn Cothi, p. 307, vers 28 : le poète (XVe s.) mentionne Kaer Ogyrvan. D’après les Triades, le soufflet que lui donne Gwenhwyvach est la cause de la bataille de Camlan, où périt Arthur ; elle aurait été également arrachée de sa chaise royale à Kelli Wic, en Kernyw, par Medrawt, neveu d’Arthur, et souffletée par lui (Triades Mab., 301, 18, 24, 25 ; Myv. arch., p. 398, col. 2) ; une triade ajoute qu’il aurait eu des rapports criminels avec elle (Myv., p. 406, col. 1). On sait que Gaufrei la fait enlever par Medrawt ; à l’arrivée d’Arthur elle entre dans un monastère. Les romans français en font l’amante de Lancelot du Lac. Un proverbe gallois a conservé le souvenir de Gwenhwyvar

Gwenhwyvar merch Ogyrvan Gawr

Drwg yn vechan, waeth yn vawr. « Gwenhwyvar, la fille de Gogyrvan Gawr, mauvaise étant petite, pire devenue grande (Myv. arch., p 863, col. 1l. » Gwenhwyvar (blanc fantôme ou blanche fée) est identique à l’irlandais Finnabair : les deux mots sont composés de vindo– (fém. vindā, vendā), blanc et de seimari ou seibari, fantôme, fée : cf. irl. mod. siabhra ; gaëlique siabhrach, a fairy ; irl. moyen Siabur = Seibaro.


j’en prends Dieu à témoin, je te le donnerai avec plaisir. Indique ce que tu voudras. » ― « Je veux que tu mettes en ordre ma chevelure. » ― « Je le ferai. » Arthur prit un peigne d’or, des ciseaux aux anneaux d’argent, et lui peigna la tête. Il lui demanda ensuite qui il était : « Je sens que mon cœur s’épanouit vis-à-vis de toi ; je sais que tu es de mon sang : dis-moi qui tu es. » ― « Je suis Kulhwch, répondit le jeune homme, le fils de Kilydd, fils du prince Kelyddon, par Goleuddydd, ma mère, fille du prince Anllawdd. » ― « C’est donc vrai, tu es mon cousin. Indique tout ce que tu voudras et tu l’auras ; tout ce qu’indiqueront ta tête et ta langue, sur la justice de Dieu et les droits de ton royaume, je te le donnerai volontiers. » ― « Je demande que tu me fasse avoir Olwen, la fille d’Yspaddaden Penkawr, et je la réclamerai aussi à tes guerriers. » Voici ceux à qui il réclama son présent : Kei ; Bedwyr [62] ; Greidawl Galltovydd [63] ; Gwythyr, fils de Greidawl [64] ; Greit, fils d’Eri [65] ; Kynddelic Kyvarwydd [66] ; Tathal Tywyll Goleu [67] ; Maelwys, fils de Baeddan [68] ; Knychwr, fils de Nes [69] ; Kuhert, fils de Daere [70] ;


[71] Voir plus bas.

[72] Un des trois Gallovydd ou maître ès machines, de l’île de Bretagne, avec Drystan, fils de Tallwch et Gwgon, fils de Gwron (Triades Mab., p. 304, 21). D’après d’autres triades, il est fils d’Envael Adran (Skene, II, app., p. 458 : au lieu de Gwgon Gwron, Gweir Gwrhyt vawr). Suivant les Iolo mss., p. 6, n° 29, il battit une population étrangère, les Corraniaid, dont une partie passa en Alban (Ecosse), et l’autre en Irlande. D’après une autre tradition, ce serait un possesseur de flottes, un roi de la mer (Iolo mss., p. 263, 13).

[73] V. Plus bas.

[74] V. plus bas.

[75] Dans le poèmes sur les tombes, Livre noir, éd. Skene, p. 32, la tombe d’un Kindilic, fils de Corknud, est mentionnée comme une tombe d’alltud ou étranger. C’est aussi le nom d’un fils de Llywarch Hen (Livre noir, p. 48, 34 ; 61. 25).

[76] Tywyll Goleu, « sombre clair » V. notes critiques.

[77] L’auteur a vu un rapport entre le second terme wys, dans Maetwys, et Baeddan : Gwys, cf. breton gwes, « truie » ; Baeddan, diminutif de baedd, porc ou sanglier mâle.

[78] C’est le nom du célèbre roi d’Ulster Conchobar mac Nessa (Kuno Meyer, Early relations between Gael and Brython, 1896, p. 35).

[79] Kubert est, sans doute, une faute du copiste ou de plusieurs copistes successifs. Il y a un fils de Daere bien connu, c’est Conroi ou Cúroi. Curoi, roi de West Munster, fut tué traîtreusement par le plus grand héros de l’épopée irlandaise, Cuchulain, qui emmena Blanait, la femme de Curoi, avec lui en Ulster. Le fidèle barde et harpiste de Curoi, Fercoirtne, se rendit à la cour de Cuchulain, un jour où les chefs étaient assemblés à Rinn Chin Bearraidhe, sur une colline à pic ; il se rapprocha de Blanait, en causant l’amena sur le bord du précipice, et, lui jetant les bras autour du corps, il se précipita avec elle du haut de la colline. On trouve, parmi les poèmes attribués à Taliesin, une élégie sur la mort de Conroi mab Dayry ; le nom de Cuchulain s’y trouve mentionné (Cocholyn). Le poème n’a pas été compris par Stephens, comme le fait remarquer Skene, qui ne l’a pas d’ailleurs bien traduit non plus. Sur Conroi, v. O’Curry, On the manners, II, p. 9, 10, 97, 199. 358 ; III, t5, 75, etc.


Percos, fils de Poch ; Lluher Beuthach ; Korvil Bervach ; Gwynn, fils d’Esni ; Gwynn, fils de Nwyvre [80] ; Gwynn, fils de Nudd [81] ; Edern, fils de Nudd [82] ; Garwy [83], fils de Gereint ; le prince Flewddur Flam [84] ; Ruawn Pebyr, fils de Dorath [85] ; Bratwen, fils du prince Moren Mynawc ;


[86] Nwyvre, firmament, empyrée.

[87] V. plus bas.

[88] Edern, qui joue un rôle important dans le mabinogi de Geraint ab Erbin, est devenu, comme beaucoup d’autres héros, un saint. Il a donné son nom à Bod-Edern, en Anglesey, et à Lann-Edern, arrond. de Châteaulin, Finistère (v. Myv. arch., p. 424, col. 1). Il est fait mention de lui chez les poètes. Edern llit, « la colère d’Edern, » Myv. arch., p. 282, col. 1 ; Ochain Edern « soupir comme celui d’Edern » (Myv. arch., p. 302, col XIII.– XIVe s.).

[89] Le ms. porte Adwy : c’est une faute pour Arvy, qui est lui-même pour Garwy. Garwy, fils de Geraint, est un des personnages les plus souvent cités : Myv. arch., p. 411, col. 1, c’est un des trois chevaliers amoureux et généreux de la cour d’Arthur, avec Gwalchmei et Cadeir, fils de Seithin Saidi ; un poète cite sa vaillance (Myv., p. 293, col. 2 ; 323. col. 1), un autre sa générosité (Myv., p. 328, col. 2), cf. Llew-Glyn Cothi, p. 161, v. 21 : Gwryd Garwy, « la vaillance de Garwy ; » Daf. ab Gwil., p. 191 ; c’est l’amant de Creirwy : le poète Hywel ab Einiawn Llygliw (1330-1370) compare une femme à Creirwy la belle, qui l’a ensorcelé comme Garwy (Myv. arch., p. 339, col. 1).

[90] Un des trois unbenn (prince, chef) de la cour d’Arthur, avec Goronwy, fils d’Echel, et Kadyrieith (Triades Mab., 303, 13 ; cf. Triades, Skene, II, p. 456) ; Pen-4 (L. Rh. 460) : Flewdwr Flam wledic : flam est emprunté au latin flamma.

[91] Un des trois Gwyndeyrn (beaux rois ou rois bénis) de l’île de Bretagne, avec Owein, fils d’Uryen, et Run, fils de Maelgwn. Le nom de son père est tantôt Dorarth, tantôt Deorath ; il faut probablement lire Deorarth ? (Triades Mab., 303, 8 ; cf. Triades, Skene, II, p. 456). Il y a un autre Ruvawn, fils de Gwyddno, plus connu. La forme préférable de ce nom paraît être Ruvawn – Rōmānus ; vieux gallois Rumaun (moyen bret. Rumon) ; on la trouve dans les généalogies du Harleian mss. 3.859 (v. tome II, p. 323).


Moren Mynawc lui-même ; Dalldav, fils de Kimin Cov[92] ; [Run ou Dyvyr], fils d’Alun Dyved [93] ; [Kas], fils de Saidi ; [Kadwri], fils de Gwryon ; Uchtrut Ardwyat Kat [94] ; Kynwas Kurvagyl ; Gwrhyr Gwarthegvras [95] ; Isperyr Ewingath [96] ; Gallcoyt Govynyat ; Duach, Grathach [97] et Nerthach, fils de Gwawrddur Kyrvach : ils étaient originaires des abords de l’enfer ;


[98] Avec Ryhawt, fils de Morgant, et Drystan, fils de March c’est un des trois pairs de la cour d’Arthur (Myv. arch., p. 393, 89.) Son cheval, Fer-las (cheville bleue), est un des trois Gordderch varch (cheval d’amoureux) de l’île (Triades Mab., 307, 3). Au lieu de Kimin, on trouve aussi Kunin.

[99] Le texte ne porte que : fils d’Alun Dyvet. Livre noir, 30 26, 27 : Bet Run mab Alun Diwed, « la tombe de Run, fils d’Alun Dyved ; » la tombe d’Alun est également mentionnée comme celle d’un vaillant guerrier. Il y a un Dyvyr, donné aussi comme fils d’Alun Dyved (Mab., 159, 30 ; 2-5, 17).

[100] Il est fait mention d’un Ychtryt vab Etwin dans le Brut y Tywysogyon, Myv. arch., p. 612, col. 2 ; un canton de Carmarthenshire portait le nom de Uchtryd ; le texte porte ardywat ; il faut probablement lire ardwyat cat, « directeur, régulateur du combat. » (Confirmé par Pen, 4 (L. Rh. 460) : ardwyat).

[101] Gwarthegvras, au gros bétail.

[102] Il est mentionné dans les Chwedlau y Doethion. (Propos des sages) : ( As-tu entendu ce que chante Ysperir s’entretenant avec Menw le Long : l’ami véritable se reconnaît dans le danger. » (Iolo mss., p. 254, 49.) Ewingath signifie ongle de chat.

[103] Pen. 4 (L. Blanc) a Brathach qui paraît préférable (Brath, piqûre, morsure).


Kilydd Kanhastyr ; Kanhastyr Kanllaw[104] ; Kors Kantewin [105] ; Esgeir Culhwch Govynkawn ; Drustwrn Hayarn ; Glewlwyd Gavaelvawr ; Loch Lawwynnyawc [106] ; Annwas Adeinawc [107] ; Sinnoch, fils de Seithvet [108] ; Gwennwynwyn, fils de Nav [109] ; Bedyw, fils de Seithvet ;


[110] Kanllaw, « aide, support ; » Kanhastyr ou Kanastr est traduit par Owen Pughe, par « cent liaisons, cent recours ; » le mot indique, en tout cas, quelque chose de fort embarrassé ; il forme opposition avec Kanllaw (cf. Tywyll Goleu et Rwydd Dyrys). Ce terme apparaît dans les Lois : Cyhyryn canhastyr se dit de « la viande volée qui arriverait à la centième main ; » y aurait-il eu cent hommes participant au vol, celui sur lequel on en saisit un morceau est passible d’une amende (Richards, Welsh Dict., d’après Wotton).

[111] On trouve aussi Kwrs ; Kors est préférable ; on trouve un Kors, fils d’Erbig, et un autre, fils de Gafran, dans le Liber Land., p. 466, 487. Kant ewin « aux cent ongles. » [112] Il est fait mention de Lloch Llawwynnawc« à la main blanche, » dans le Livre noir, 51, 14, parmi les compagnons d’Arthur (Lluch Llawynnauc). Lloch parait être le Loth ou Lot des Romans de la Table Ronde (sur Loth, cf. J. Loth, Rev. celt., 1897, p. 84.)

[113] Mentionné à côté de Llwch Llawwynnyawc dans le Livre noir (51, 15) ; adeinawc « l’ailé. » C’est probablement le même personnage donné sous le nom d’Edenawc (Pen. 4. L. Rh. 461 : Edeinawc), comme un des trois vaillants qui ne revenaient jamais du combat que sur une civière : Grudnei, Henpen et Edenawc, fils de Gleissiar du Nord (Triades, Skene, II, p. 458 ; Triades Mab., 304, 15 : Aedenawc).

[114] On trouve aussi Seitwet (Triades Mab., 302, 16), mais c’est peut-être un personnage différent ; seithvet signifie septième.

[115] Texte, Naw, mais le L. Rouge reproduit un manuscrit où le signe désignant w a aussi, parfois, la valeur v : Pen. 4 (L. Rh. 461) ajoute après Naw : mab Seithvet ; Gwennwynwyn est un des trois chefs de flotte de Bretagne, avec Geraint ab Erbin et March ab Meirchion ; chacun possédait cent vingt navires, montés chacun par cent vingt hommes (Myv. arch., p. 407, 68). Un des trois chefs d’œuvres de l’île est le navire de Nefydd Nef Neifion, qui porta un mâle et une femelle de chaque espèce d’animaux quand se rompit l’étang de Llion (Myv. arch., p. 409, col. 97). Neifion serait venu, en nageant, de Troie à l’île d’Anglesey, d’après un passage de Daf. ab Gwil, p. 73 : « Nofiad a wnaeth hen Neifion o Droia vawr draws i Fon. » – Il est fait allusion à un Naf Eidin par un poète du XIIIe et XIVe siècle, Myv. arch., p. 290, col. 2.


Gobrwy, fils de Echel Vorddwyt twll [116] ; Echel Vorddwyt twll lui-même ; Mael, fils de Roycol ; Dallweir Dallpenn [117] ; Garwyli, fils de Gwythawc Gwyr ; Gwythawc Gwyr lui-même ; Gormant, fils de Ricca [118] ; Menw, fils de Teirgwaedd [119] ; Digon, fils de Alar [120] ; Selyf, fils de Sinoit ; Gusc, fils d’Atheu ; Nerth, fils de Kadarn [121] ; Drutwas, fils de Tryffin [122] ;



[123] Echel est identifié par les poètes gallois avec le nom d’Achille. Morddwyt Twll (à la cuisse trouée).

[124] Le texte porte Datweir, mais la forme Dallweir se trouve plus loin et dans d’autres textes. Ce Dallweir Dallbenn avait pour porcher un des trois grands porchers de l’île, Coll, fils de Collfrewi. Voir la note sur Coll et les porcs de Dallweir à Twrch Trwyth, plus bas.

[125] Au lieu de Ricca, lire Rita : v. plus bas, et tome II, Triades. Ce nom est représenté aujourd’hui encore dans la toponomatique du Nord-Galles (J. Rhys, Celtic Folkl., II, pp. 477-80 ; 566-4.)

[126] Voir plus bas.

[127] Digon, assez, Alar dégoût, satiété.

[128] Nerth, force, Kadarn, fort.

[129] Drulwas ab Tryffin aurait reçu de sa femme trois oiseaux merveilleux connus sous le nom d’Adar Llwch Gwin ou oiseaux de Lwch Gwin ; ils faisaient tout ce que leur maître voulait. Il défie un jour Arthur. Il envoya avant lui ses oiseaux sur le lieu du rendez-vous avec ordre de tuer le premier qui se présenterait. Il ne se rendit au lieu du combat qu’assez tard après l’heure fixée, espérant bien trouver Arthur mort. Mais celui-ci avait été retenu à dessein par la sœur de Drutwas, qui l’aimait. Drutwas, arrivé le premier, fut mis en pièces par ses oiseaux (Iolo mess., p. 188). D’après une lettre écrite par Robert Vaugban à Meredith Llwyd, le 24 juillet 1655, publiée par le Cambrian Register, III, p. 311, et reproduite par lady Guest, on jouait encore de son temps, un air connu sous le nom de Caniad Adar Llwch Gwin, le chant des oiseaux de Llwch Gwin. Une Triade donne Drudwas ab Tryphin comme un des trois aurdafodogion ou hommes à la langue d’or, de la cour d’Arthur, avec Gwalchmai et Madawc ab Uthur (Myv., p. 410, 121).


Twrch, fils de Perif ; Twrch, fils d’Annwas ; Iona, roi de France ; Sel, fils de Selgi ; Teregut, fils de Iaen ; Sulyen, fils de Iaen ; Bratwen, fils de Iaen ; Morcn fils de Iaen ; Siawn, fils de Iaen ; Cradawc, fils de Iaen : c’étaient des hommes de Kaer Dathal [130], de la famille d’Arthur lui-même, du côté de son père ; Dirmyc, fils de Kaw [131] ; Iustic, fils de Kaw ; Etmyc, fils de Haw ; Angawd, fils de Kaw ; Ovan, fils de Kaw ; Kelin, fils de Kaw ; Konnyn, fils de Kaw ; Mabsant, fils de Kaw ; Gwyngat, fils de Kaw ; Llwybyr, fils de Kaw ; Koch, fils de Kaw : Meilic, fils de Kaw ; Kynwas, fils de Kaw ; Ardwyat, fils de Kaw ; Ergyryat, fils de Kaw ; Neb, fils de Kaw ; Gilda, fils de Kaw ;




[132] Kaer Dathl, voir p. 175, n° 4. [je recopie cette note tirée du mabinogi de Math : « [133]Caer Dathl, ou, avec une voyelle irrationnelle ou euphonique, Caer Dathyl et Dathal, est encore un nom de lieu du Carnarvonshire. Le caer ou fort se trouvait sur une éminence près de Llanrwst (Lady Guest, d’après le Cambro-Briton, II, p. 3). Il en est souvent question dans les Mab. et ailleurs (Myv. arch., p. 151 col. 1 ; Llewis Glyn Cothi, IV, 1, 7). » ]

[134] Kaw de Prydyn (Ecosse), seigneur de Cwm Cawlwyd, aurait été chassé de son pays par les Pictes et se serait réfugié en Galles, où Arthur et Maelgwn lui auraient donné des terres. Certaines généalogies lui donnent dix-sept enfants tous saints (Iolo mss, p. 109), d’autres vingt et un également saints (Iolo mss., p. 117). Il y a une intention satirique évidente dans Neb, fils de Kaw, mot à mot, quelqu’un, n’importe qui, fils de Kaw ! de même pour Dirmyc (mépris), Etmyc (respect). Mabsant (saint patron), Llwybyr (sentier). Le plus connu des fils est Gildas, auquel une généalogie attribue aussi quatre enfants, quatre saints. Les noms différent beaucoup dans les différentes généalogies. Au lieu de Dirmyc on trouve généralement Dirinic ; au lieu de Iustic on a Ustic ; Meilic est cité à côté de Nonn par Llewis Glyn Cothi, p. 108, vers 24.


Kalcas, fils de Kaw ; Hueil [135], fils de Kaw, qui ne prêta jamais hommage à aucun seigneur ; Samson Vinsych [136], Teleessin Pennbeirdd [137] ; Manawyddan, fils de Llyr [138] ; Llary [139], fils de Kasnar Wledic ; Ysperin, fils de Flergant [140], roi du Llydaw ; Saranhon, fils de Glythwyr ; Llawr, fils d’Erw [141] ;


[142] D’après une tradition mentionnée par Tegid (Llew. Glyn Cothi, p. 199, v. 21), Hueil aurait été décapité à Rhuthyn, dans le Denbighshire, sur l’ordre d’Arthur. Lady Guest la rapporte tout au long d’après Jones, Welsh Bards, p. 22. Hueil aurait eu l’imprudence de courtiser la même femme qu’Arthur, d’où un duel dans lequel Arthur fut grièvement blessé à la cuisse. Il guérit, mais resta très légèrement boiteux. Arthur avait fait promettre à Hueil de ne jamais en souffler mot sous peine de mort. Quelque temps après, Arthur devint amoureux d’une dame de Rhuthyn. Il se déguisa en femme pour l’aller voir. Un jour qu’il dansait avec elle et des amis, Hueil le surprit, le reconnut et s’écria :« La danse irait très bien, n’était la cuisse. » Arthur lui fit trancher la tête sur une pierre qui porte le nom de Maen Hueil. Son nom revient assez souvent chez les poètes (Myv. arch., p. 281, col. 2),

[143] Samson aux lèvres sèches.

[144] Taliessin pennbeird, ou chef des bardes. Voy. plus haut Branwen.

[145] Voir le mabinogi qui porte son nom.

[146] Llary, généreux.

[147] Voir p. 209, note. [aux trois familles déloyales dans le mabinogi de Math.]

[148] Llawr, « sol ; » Erw, « sillon ».


Annyannawc, <ref> 1</ref> fils de Menw fils de Teirgwaedd ; Gwynn, fils de Nwyvre ; Flam, fils de Nwyvre ; Gereint, fils d’Erbin [149] ; Ermit, fils d’Erbin ; Dyvel, fils d’Erbin ; Gwynn, fils d’Ermit ; Kyndrwyn, fils d’Ermit ; Hyveidd Unllenn [150] ; Eiddon Vawrvrydic [151] ; Reidwn Arwy ; Gormant, fils de Ricca, frère d’Arthur du côté de sa mère : Pennhynev Kernyw [152] était son père ; Llawnroddet Varvawc [153] ; Noddawl Varyv Twrch [154] ; Berth,fils de Kado [155] ;


[156] Annyannawc, bien doué, Menw, intelligence.

[157] Voir le mabinogi qui porte son nom.

[158] Hyveidd Unllen, « à un seul manteau. » Voir plus haut, p. 97, note 2. [Mabinogi de Pwyll, note à Heveidd Hen.]

[159] Mawrvrydic, « magnanime. » [160] Pennhynev, « le chef des vieillards. » Il manque un nom propre. Il s’agit, sans doute, de Kadwr, comte de Cornouailles. D’après des Triades (Skene, II, p.456), il y a un pennhyneif dans chacune des cours d’Arthur : à Mynyw, c’est Maelgwn Gwynedd ; à Kelliwic, en Kernyw, c’est Karadawc Vreichvras ; à Pen Rionydd, dans le Nord, c’est Gwrthmwl Wledic.

[161] Ce personnage se confond souvent avec un autre : Llawfrodedd, également surnommé Varvawc, « le barbu » (Myv. arch., 166, col. 2 ; 148, col. 1 ; 303, col. 1). D’après une Triade, c’est un des trois bergers de Bretagne ; il garde les bœufs de Nudd Hael (Myv. arch., p. 408, 85) ; il y avait, dans ce troupeau, 20 001 vaches à lait. Dans la liste des treize merveilles de Bretagne donnée par lady Guest, d’après un vieux manuscrit, dit-elle, son couteau est au sixième rang ; il servait à manger à vingt-quatre hommes à la même table (Mab., III, p. 354). (Allusions à Llawnroddet, Myv. arch., p. 297, col. 2 ; 299, col. 2, Llawrodded.) Dans le Songe de Rhonabwy, p. 159, on trouve un Llawroded Varyvawc.

[162] Baryv Twrch, « barbe de sanglier. » [163] Plus bas, il est donné comme un puissant chef d’Ecosse. D’après les Triades, Kado est un des trois qui eurent la sagesse d’Adam ; les autres sont Beda et Sibli doeth, « sage » (Mab. 297, 6). Il n’est pas difficile de reconnaître dans celui-ci Cato, « le vieux Caton. » On l’appelle même Cado hen, « le vieux. » Le saint Kado d’Armorique est différent même comme nom. On prononce, en vannetais, Kadaw ou Kadew (= [164] Catavos). Berth signifie riche.


Reidwn, fils de Beli ; Iscovan Hael ; Iscawin, fils de Panon ; Morvran [165], fils de Tegit (personne ne le frappa de son arme à la bataille de Kamlan [166], à cause de sa laideur : tous voyaient en lui un démon auxiliaire ; il était couvert de poils semblables à ceux d’un cerf) ;


[167] Morvran. « corbeau de mer. » D’après la vie de Taliesin, il serait fils de Tegid Voel, « le Chauve, » et de Ceridwen. C’est un des trois ysgymydd aereu ou esgemydd aereu (esgemydd, d’après E. Lhwyd, avait le sens de banc ; Cf. istomid dans le cart. de Redon, à corriger en iscomid = ysgymydd) ; les autres étaient Gilbert, fils de Catgyffro et Gwynn Cleddyfrudd (Skene, II, p. 458 ; Triades Mab., 304, 25) ; ils ne revenaient du combat que sur leurs civières, lorsqu’ils ne pouvaient remuer ni doigt ni langue (Myv. arch, p. 404, 33). Le troisième, échappé de Kamlan, est Glewlwyd Gavael Vawr. (Myv., p. 392. 85).

[168] Les Annales Cambriae portent, à l’année 537, la mention « Gueith Camlann, la bataille de Camlann, où Arthur et Medraut tombèrent ; il y eut grande mortalité en Bretagne et en Irlande. » D’après les Triades, ce serait un des trois overgad ou combats superflus, frivoles ; il aurait été causé par le soufflet que donna Gwenhwyach ou Gwenhwyvach à Gwenhwyvar, la femme d’Arthur (Triades Mab., p. 301, 18 ; Myv. arch., 391, col. 2). D’après Gaufrei de Monmouth, la bataille aurait été livrée par Arthur à Medrawt, son neveu, qui avait enlevé Gwenhwyvar et usurpé la couronne de Bretagne. Arthur aurait été vainqueur, mais grièvement blessé. Il fut transporté à l’île d’Avallach, d’où les Bretons attendent son retour. D’après une Triade du Livre Rouge, il y aurait été enterré (Mab., 299, 30). Llewis Gl. Cothi appelle cette bataille la bataille d’Avallach, p. 318, v. 3. Gaufrei appelle cette île Avallon. Voir, sur cette bataille, le Songe de Rhonabwy. Le nom de cette bataille revient souvent chez les poètes (Myv. arch., p. 269, col. 1 ; Daf. ab Gwil, p. 295). D’après les lois de Gwent (Ancient laws, I, p.678), quand la reine désirait un chant, le barde devait choisir le chant sur la bataille de Kamlan. Medrawt y aurait eu pour alliés les Saxons et les Irlandais. Les Triades donnent à Morvran et à Sandde le même rôle que le mabinogi de Kulhwch (Myv. arch., p. 393, col. 2). Camlann (vieux-celt. Cambo-glannà signifie rive courbe,) il y a aussi des Camlann en Bretagne comme en Galles. En Galles : hameau de Camlan en Mallwyd, Merionethshire ; Maes Camlan, Bron Camlan en Aberangell, Montgomeryshire (Jones Cymru I, p.99). D’après le Livre noir, le fils d’Osvran a été enterré à Camlan (F-a-B, t. I, p. 29, 22).



Sandde Bryd-angel [169] : (personne ne le frappa de son arme à la bataille de Kamlan, à cause de sa beauté : tous voyaient en lui un ange auxiliaire) ; Kynnwyl Sant (un des trois hommes qui s’échappèrent de la bataille de Camlan) : ce fut lui qui se sépara le dernier d’Arthur sur son cheval Hengroen [170] ; Uchtryt fils d’Erim [171] ; Eus fils d’Erim ; Henwas [172] Adeinawc fils d’Erim, Henbeddestyr [173] fils d’Erim, Sgilti Ysgawndroet fils d’Erim (ces trois hommes avaient chacun une qualité caractéristique : Henbedestyr ne rencontra jamais personne qui pût le suivre ni à cheval ni à pied ; Henwas Adeinawc, jamais quadrupède ne put l’accompagner la longueur d’un sillon et à plus forte raison plus loin ; Sgilti Ysgawndroet [174], quand il était bien en train de marcher pour une mission de son seigneur,


[175] Pryd-angell, « au visage d’ange. » [176] Hen-groen, « vieille peau ».

[177] Tire peut-être son nom de l’Irlandais érimm, course, coureur (Kuno Meyer, Gael and Brython, p. 35, note 5).

[178] Cf. plus haut Anwas adeinawc.

[179] Hen-beddestyr, « vieux piéton. » [180] Ysgavndroet,« au pied léger. »



ne s’inquiétait jamais de savoir par où aller : s’il était dans un bois, il marchait sur l’extrémité des branches des arbres [181] ; jamais, une fois dans sa vie, un brin d’herbe, je ne dis pas ne cassa, mais même ne plia sous son pied, tellement il était léger) ; Teithi Hen, le fils de Gwynhan dont les domaines furent submergés par la mer et qui, ayant échappé lui-même à grand peine, se rendit auprès d’Arthur : son couteau avait cette particularité depuis qu’il vint ici, qu’il ne supporta jamais aucun manche, ce qui fit naître chez Teithi Hen un malaise et une langueur qui ne le quittèrent plus et dont il mourut ; Karnedyr fils de Govynyon Hen ; Gwenwenwyn fils de Nav Gyssevin [182], champion d’Arthur ; Llygatrudd Emys [183] et Gwrbothu Men, oncles d’Arthur, frères de sa mère ; Kulvanawyd [184] fils de Gwryon ; Llenlleawc [185] le Gwyddel (le Gaël)


[186] Pen. 4 (L. Rh. 463) ajoute : tant qu’il était sur une montagne, c’est sur le bout des roseaux qu’il marchait.

[187] Nav Gyssevin, « Naf, le premier » ; on pourrait aussi faire porter gyssevin dans rysswr : le premier guerrier ou champion. Voir la note p. 264, à Gwenwynwyn [note 6 à Nav, en fait]. C’est le Noé gallois.

[188] Llygad-rudd, « œil rouge ; » emys,« étalon. » [189] Ce Kulvanawyd ou Kulvynawyd (mynawyd, arm. menaoued, « alène ; » cul, « étroit ») est le père des trois femmes impudiques de Bretagne : Essyllt Fynwen, l’amante de Trystan ; Penarwen, femme d’Owen ab Urien ; Bun, femme de Flamddwyn (Ida, porte brandon). Il est de Prydein (Myv. arch., p. 392, col. 1).

[190] Ce nom est aussi écrit Llenvleawc ; il parait altéré dans les deux cas.


du promontoire de Gamon [191] ; Dyvynwal Moel [192] ; Dunart [193] roi du Nord ; Teirnon Twryv Bliant [194] ; Tecvan Gloff [195] ; Tegyr Talgellawc ; Gwrdival fils d’Ebrei ; Morgant Hael [196] ; Gwystyl [197] fils de Run fils de Nwython ;


[198] Ganion est peut-être préférable. D’après le Dictionnaire de Richards, il y aurait eu un promontoire de ce nom en Irlande. John Rhys (Celtic Britain, p. 298) prétend que Ptolémée donne un promontoire des Gangani qu’il faudrait placer dans le Carnarvonshire : Ganion égalerait Gangnones. Or, la lecture adoptée par Müller dans la nouvelle édition de Ptolémée donnée par Didot est le promontoire des Ceangani (Ptol., III, § 2). Les variantes sont diverses sur ce nom dans les mss., mais la leçon Ceangani est certaine. On a trouvé à Chester et aux bouches de la Mersey des plombs portant, l’un Ceangi (s), le second Cea, le troisième Ceang (Hübner, Inscr. Brit. lat., 1204, 1205, 1206). La supposition de John Rhys n’est donc pas fondée. Tacite, Ann., 12, 31, mentionne des Cangos ; l’Anonyme de Ravenne, des Ceganges.

[199] Plus connu sous le nom de Dyvynwal Moelmut. D’après les Triades, c’est un des trois post-cenedl, « piliers de race », de l’île de Bretagne, et le grand législateur (Myv. arch., p 400, col. 2). Les lois donnent sur ce personnage plus ou moins légendaire et son oeuvre de curieux détails (Ancient laws, I, p. 183-184). Gaufrei de Monmouth l’appelle Dunvallo Molmutius et le fait fils de Cloten, roi de Cornouailles (II, p. 17), Dyvynwal ou Dyvnwal (arm. Dumnwal, et plus tard, Donwal) est souvent cité comme législateur (Iolo mss., p. 263, 9).

[200] Peut-être Dyvnarth.

[201] V. plus haut, p. 22 et 108. [p. 22 : remarques sur l’orthographe des Gallois ancien et moyen (celui des Mabinogion). p 108 : bliant est « le nom d’une sorte de toile fine ou de batiste. » ]

[202] Cloff, « le boiteux. » [203] Paraît le même que Morgan Mwynvawr. C’est un des trois Ruddvoawc (doublet ruddvaawc), qui font le sol rouge, avec Run, fils de Beli et Llew Llawgyffes ; rien ne poussait, ni herbe ni plante. là ou ils passaient, pendant une année ; Arthur était plus ruddvaawc qu’eux : rien ne poussait après lui pendant sept ans (Tr. Mab., p. 303, 5 ; cf. Myv. arch., p. 405, col. 1).

[204] Son fils Gweir est plus connu. C’est un des trois Taleithawc (porte-bandeaux) de la cour d’Arthur (Tr. Mab., 303, 4) ; les poètes en parlent : « Estimé comme Gweir, fils de Gwestyl » (Myv. arch, p. 233. col. 1 ; cf. ibid., 300, col. 2 ; 294, col. 1).

Llwydeu fils de Nwython ; Gwydre fils de Llwydeu par Gwenabwy fille de Kaw, sa mère : Hueil, son oncle, le frappa, et c’est à cause de cette blessure qu’il y eut inimitié entre Hueil et Arthur ; Drem [205] fils de Dremidyt, qui voyait de Kelliwic en Kernyw jusqu’à Pen Blathaon en Prydyn [206] (Ecosse) le moucheron se lever avec le soleil ;


[207] Drem, « vue, aspect » ; dremidydd, « celui qui voit. » Il en est question dans les Englynion y Clyweid et chez un poète du XVe siècle, Iolo Goch (Lady Guest, II, p. 341).

[208] Prydyn. C’est le nom donné à l’Ecosse par les Bretons. Il répond à Cruithni, nom qui désignait les Pictes (le p breton répond à un ancien q vieux-celtique). D’après un auteur irlandais, cité par Todd dans une note sur la version irlandaise de Nennius, le mot viendrait de cruth (gallois, pryd), « forme ». Cruithni indiquerait un peuple qui peint sur sa figure et sur son corps des formes de bêtes, d’oiseaux et de poissons (Rhys, Celt. Brit., p. 240). C’est fort douteux : cf. Whitley Stokes, Urkelt. Sprachschatz, p. 63. On trouve aussi Prydein au lieu de Prydyn ; Prydein est usité surtout pour désigner la partie de l’île représentant l’Angleterre actuelle, la Bretagne insulaire. D’ailleurs, au lieu de Britannia, on a, chez les géographes anciens, Pretania (sur Pretania, cf. d’Arbois de Jubainville : L’île Prétanique, les îles Prétaniques, les Brettones ou Britanni, Rev. Celt., XIII, p. 398, 519). Au témoignage de Stéphane de Byzance, c’était l’orthographe de Marcianus, d’Héraclée et de Ptolémée. Dindorf, dans une note aux Geographici minores de Didot, p. 517, a constaté que, d’après les meilleurs manuscrits, c’était la forme correcte et pour Ptolémée et pour Strabon. Les noms ethniques des Bretons sont, pour leur pays Brittia, d’où Breiz, vannetais, Breh ; pour le peuple Brittones, d’où le gallois Brython, et l’armoricain Brezonec, Brehonec ou la langue bretonne. Le Brut Gr. ab. Arthur (Myv. arch., 530. 2) donne : Penryn Bladon.


Eidyol [209], fils de Ner ; Glwyddyn Saer [210] qui fit Ehangwen [211] la salle d’Arthur ; Kynyr Keinvarvawc [212] (Kei passait pour son fils ; il avait dit à sa femme : « si ton fils, jeune femme, tient de moi, toujours son coeur sera froid ; jamais il n’y aura de chaleur dans ses mains ; il aura une autre particularité : si c’est mon fils, il sera têtu [213] ; autre trait particulier : lorsqu’il portera un fardeau, grand ou petit, on ne l’apercevra jamais ni par devant lui ni par derrière ; autre trait caractéristique : personne ne supportera l’eau et le feu aussi longtemps que lui ; autre chose encore : il n’y aura pas un serviteur ni un officier comme lui. » [214] Eidyol. Ce nom existe (V. Iolo mss., p. 161, le conte d’Eidiol et d’Eidwyl). Pen.4 donne Eidoet qu’il fait corriger en Eideol pour Eidiol ; cf. L. noir, éd. Evans [215]. Eidoel également pour Eideol, Eidiol comme le prouve la rime ; sur Eidoel, voir plus bas, p. 312 [il est le cousin germain de Mabon et le seul à pouvoir le retrouver]. Eidiol le fort tua, lors de la trahison de Caersallawg, six cent soixante Saxons avec une quenouille de cormier (Myv. arch., p. 407, 60).

[216] Saer, ouvrier, travaillant la pierre ou le bois, ici charpentier. Sur le saer, voir Trioedd Doethineb beirdd, Les Triades de la sagesse des bardes, Myv. arch., p. 927, col. 1 ; Brut Tysilio, ibid., p. 459, col. 2 ; Iolo mss., p. 95, le poète Daf. ab Gwilym est appelé saer cerddi, charpentier, artiste en chants. En irlandais, le saer est aussi charpentier, maçon, architecte (O’Curry. On the manners, III, p. 40-42 ; Vocabulaire cornique, sair).

[217] Ehangwen, « large et blanche. » [218] Voir la note à Kei. Un poète du XIVe siècle, Madawc Dwygraig, chantant Gruffudd ab Madawc, dit que les hommes de la terre de Kynyrle pleurent. Or, Madawc est de Ystrad Llechwedd, c’est-à-dire du pays entre Bangor et Conwy (Myv. arch., p. 21, col, 1). Certaines Triades donnent Kynyr Kynvarvawc (Skene, II, p. 458).

[219] Ce n’était pas cependant le plus têtu des Bretons. Les trois têtus dans les Triades sont : Eiddilic Gorr, Trystan ab Tallwch et Gweirwerydd Vawr. On ne pouvait jamais leur faire changer de résolution (Myv. arch., p. 408, 78).


Henwas, Henwyneb et Hen Gedymdeith [220] (serviteurs) d’Arthur ; Gwallgoyc, autre serviteur : (dans la ville où il allait, aurait-elle eu cent maisons, s’il venait à lui manquer quelque chose, il ne laissait pas, tant qu’il y était, le sommeil clore les paupières d’une seule personne) ; Berwyn fils de Cerenhir [221] ; Paris, roi de France, d’où le nom de Kaer Baris (la ville de Paris) ; Osla Gyllellvawr [222] qui portait un poignard court et large (quand Arthur et ses troupes arrivaient devant un torrent, on cherchait un endroit resserré ; on jetait par dessus le couteau dans sa gaine, et on avait ainsi un pont suffisant pour l’armée des trois îles de Bretagne, des trois îles adjacentes et leur butin) ; Gwyddawc, fils de Menestyr, qui tua Kei et qu’Arthur tua ainsi que ses frères pour venger Kei ; Garanwyn, fils de Kei ; Amren, fils de Bedwyr ;


[223] Henwas, « vieux serviteur » ; cf. Anwas ; Hen wyneb, « vieux visage » ; Hen gedymdeith, « vieux compagnon ».

[224] Le texte porte Gerenhir. D’après les Iolo mss., Berwyn serait le père de Ceraint Veddw, « l’ivrogne ». Ceraint est le premier qui ait fait la bière convenablement. Il venait de faire bouillir le malt avec des fleurs des champs et du miel quand survint un sanglier qui en but et y laissa tomber son écume, ce qui fit fermenter la bière. Geraint s’adonna à la boisson et en mourut.

[225] Osla, « au grand couteau ». Dans le Songe de Ronabwy, Arthur doit se battre avec lui à Kaer Vaddon. Son nom est aussi écrit une fois Ossa, ce qui mènerait sans difficulté à Offa, nom bien connu des Gallois. Dans le récit irlandais connu sous le nom de Bruighean Daderga, on voit figurer, à la cour de Daderg, trois princes saxons dont l’un porte le nom d’Osalt (O’Curry, On the manners, III, p. 146).


Ely ; Myr [226] ; Reu Rwydd Dyrys [227] ; Run Ruddwerri ; Ely et Trachmyr chefs chasseurs d’Arthur ; Llwydeu, fils de Kelcoet [228] ; Hunabwy, fils de Gwryon ; Gwynn Gotyvron [229] ; Gweir Dathar Wennidawc ; Gweir, fils de Kadellin Talaryant ; Gweir Gwrhyt Ennwir, et Gweir [230] Baladyr Hir, oncles d’Arthur, frères de sa mère, fils de Llwch Llawwynnyawc de l’autre côté de la mer Terwyn ; Llenlleawc le Gwyddel, prince de Prydein [231] ; Cas, fils de Saidi [232] ;


[233] Peut-être une faute du copiste pour Ely et Trachmyr dont il est question une ligne plus bas.

[234] Reu est probablement pour Rew, « gelée » ; rwydd, « facile, libre » ; dyrys, « embarrassé ».

[235] Ce fils de Kelcoet est appelé Llwyd par Dafydd ab Gwilym, p. 114.

[236] Gwynn Gotyvron apparaît dans le Livre noir, dans le dialogue entre Arthur et Glewlwyd Gavaelvawr. Il est donné comme serviteur d’Arthur, p. 51, vers 4 : Guin Godybrion ; il faut probablement lire Godybron.

[237] Gweir, fils de Gwestyl, est plus célèbre que ces Gweir. Voir la note sur ce personnage plus haut, p. 272. Il y a un autre Gweir, fils de Ruvawn, qui aurait composé un livre de lois (Ancient laws I, p. 218). Talaryant « front d’argent » ; paladyr hir,« à la longue lance ». Pour Llwch, voir plus haut, à Lloch. Pen. 4 (L. Rh. 466.) ; Gweir Gwrhyt Baladyr.

[238] Il est possible qu’Arderchawc Prydein ne se rapporte pas à Llenlleawc et désigne un autre personnage.

[239] Cas, « objet de haine, haïssable » ; c’est probablement Seithynin, fils de Seithyn Saidi, roi de Dyvet, un des trois ivrognes endurcis de l’île de Bretagne, qui, dans un jour d’ivresse, lâcha la mer sur le pays appelé Cantrev y Gwaelod (Myv. arch., p.104, col. 2 ; cf. Livre noir, p. 59). Llewei, fille de Seithwedd Saidi, est une des trois amazones (gwrvorwyn,« homme-femme » ) de Bretagne.

Gwrvan Gwallt Avwyn [240] ; Gwillennhin, roi de France ; Gwittard,fils d’Aedd [241], roi d’Iwerddon ; Garselit [242] le Gwyddel ; Panawr Penbagat ; Flendor fils de Nav ; Gwynnhyvar maire [243] de Kernyw et de Dyvneint, un des neuf qui tramèrent la bataille de Kamlan ; Keli et Kueli ; Gilla Goeshydd [244] (il sautait trois sillons d’un bond : c’était le chef des sauteurs d’Iwerddon) ; Sol, Gwadyn Ossol et Gwadyn Odyeith [245] (Sol pouvait se tenir tout un jour sur le même pied ; la montagne la plus haute du globe devenait sous les pieds de Gwadyn Ossol une vallée unie ; Gwadyn Odyeith faisait jaillir de la plante de ses pieds autant d’étincelles que le métal chauffé à blanc quand on le retire de la forge, lorsqu’il se heurtait à des corps durs ; c’est lui qui débarrassait la route de tout obstacle devant Arthur dans ses expéditions) ;


[246] Gwallt, « cheveux ; » avwgn, « rênes, » du latin abêna (habena).

[247] Le L. Rouge a Oed ; j’adopte la leçon de Pen. 4, Aedd, parce qu’il s’agit d’un roi d’Irlande.

[248] Garselit porte un nom irlandais signifiant (l’homme) au court espace de temps (Kuno Meyer, Guel and Brython p. 35, note 5 : irl. Gearr-selut).

[249] Le maer était un personnage important ; c’était lui qui avait la haute surveillance des tenures serviles et qui procédait au partage des terres qui en dépendaient. Maer vient du latin major. Il y avait aussi à la cour un maer (Voir Ancient laws, I, passim. Pour Kamlan, voir p. 269).

[250] Coes hydd, « à la jambe de cerf » : Gilla est l’irlandais gilla, ir. mod. giolla, compagnon, page, serviteur.

[251] Gwadyn ou gwadn, signifie « la plante du pied ». Odyeith a le sens de « rare, extraordinaire ». Pour sol, on attendrait plutôt sawdl, « talon » (breton-moyen, seuzl, auj. seul). Il est possible que le scribe ait eu sodl sous les yeux ou reproduise une forme orale de l’irl. sál. Sol du latin solum a en breton, parfois, le sens de semelle.


Hir Erwm et Hir Atrwm [252] (le jour où ils allaient loger quelque part, on faisait main-basse à leur intention sur trois cantrevs : ils mangeaient jusqu’à nones et buvaient jusqu’à la nuit, jusqu’au moment où ils allaient se coucher ; alors la faim les poussait à dévorer la tête de la vermine, comme s’ils n’avaient jamais rien mangé ; ils ne laissaient chez leurs hôtes rien après eux ; ni épais ni mince, ni froid ni chaud, ni aigre ni doux, ni frais ni salé, ni bouilli ni cru) ; Huarwar fils d’Avlawn [253] qui demanda à Arthur comme présent de lui donner son content (quand on le lui fournit, ce fut le troisième des fléaux intolérables de Kernyw [254] : jamais on ne pouvait obtenir de lui un sourire de satisfaction que quand il était plein) ; Gware Gwallt Euryn [255] ; les deux petits de Gast Rymi [256] ;



[257] Ces deux singuliers personnages sont mentionnés ensemble dans un poème de la Myv. arch., p. 129, col. 1 (Englynion y Klyweit. Le nom du premier est maltraité : Llucrum ; mais l’assonance montre qu’il faut corriger cruor en crwm.)

[258] Avlawn, « non plein » ; Huarwar, « facile à apaiser ».

[259] Pen.4 (L. Rh. 467) ajoute : et de Dyvneint (Devon).

[260] Probablement Gwri Wallt Euryn, « Gwri aux cheveux d’or », plus connu sous le nom de Pryderi. Voir le mabinogi de Pwyll, p. 110, 115, et celui de Math, fils de Mathonwy, p. 179. Dafydd ab Gwilym fait mention de Gwri Gwallt Euryn.

[261] Gast, « chienne ». Rymi : il y a un fleuve Rymni en Glamorgan, Iolo mss., p. 18. Rymi, écrit aussi Rymhi, est pour Rymni.



Gwyddawc et Gwydneu Astrus <ref> 1</ref> ; Sugyn, fils de Sucnedydd [262], qui pompait un estuaire à contenir trois cents navires au point de n’y laisser que du sable sec : il avait un estomac de pierre rouge ; Kacymwri, serviteur d’Arthur : on pouvait lui montrer la grange qu’on voulait, aurait-on pu y manoeuvrer trente charrues, il vous la battait si bien avec un fléau de fer que les poutres, les chevrons et les lattes n’étaient pas en meilleur état que les menus grains d’avoine au fond du tas de blé sur le sol ; Dygyvlwng ; Anoeth Veiddawc [263] ; Hir Eiddyl et Hir Amren [264], tous deux serviteurs d’Arthur ; Gwevyl [265] fils de Gwestat : quand il était triste, il laissait tomber une de ses lèvres jusqu’à son nombril et l’autre lui faisait comme un capuchon sur la tête ; Ychdryt Varyvdraws [266] qui projetait sa barbe rouge hérissée par dessus les quarante-huit poutres [267] de la salle d’Arthur ;


[268] Astrus, « enchevêtré ».

[269] Sugyn, « action de sucer » ; sugnedydd,« qui suce, qui pompe » (Cf. sugno,« sucer, téter ; » armor., suno, seuno ou cheuno).

[270] Beiddiawc, « hardi ».

[271] Hir, «.long », eiddil, « mince ».

[272] Gwevyt ou Gwevl, « lèvre ». Au lieu de Gwestat, Pen. 4 a. Gwastat.

[273] Baryvdraws, barbe de travers ou à la barbe rude ; traws a aussi le sens de dur, violent. La maison royale, qui était en bois, n’avait, d’après les Lois, que six colonnes. Il en était de même de celles des nobles et même de celles des vilains (Ancient laws, I, p. 292).

[274] Pen. 4 (L. Rh. 468) donne : cinquante poutres.


Elidyr Gyvarwydd [275] ; Yskyrdav et Yscudydd [276], serviteurs de Gwenhwyvar, aux pieds aussi rapides que leurs pensées dans l’accomplissement de leurs missions ; Brys, fils de Bryssethach, de Tal y Redynawc Du [277] de Prydein ; Gruddlwyn Corr [278] ; Bwlch, Kyvwlch [279], Sevwlch, petit-fils de Cleddyv Divwlch (d’une blancheur éclatante était le blanc de leurs boucliers ; c’étaient trois perceurs que les pointes de leurs trois lances ; trois trancheurs que les tranchants de leurs trois épées ;


[280] Kyvarwydd, « guide, celui qui renseigne et, aussi, habile ». Kyvarwyddon a quelquefois le sens d’enchantements, sortilèges (V. Campeu Charlymaen dans les Selections from Hengwrt mss., XVII ; cf. dorguid, Gloses d’Orléans, gallois moyen derwydd « devin, prophète » ).

[281] Yscudydd de ysgud,« rapide » ; ysgudo,« courir précipitamment » ; ysgyrdaf, peut-être pour ysgrydaf de ysgryd, frissonnement, tremblement.

[282] Tal, « le bout, le front ; » redynawc, de redyn, « fougère », = armor., radenec, « fougeraie », du « noir ».

(4) Corr, « nain ».

[283] Kyvwlch. Ce nom apparaît dans l’extrait du Codex Lichf., (Th. Rovk of Llandav, éd. Rhys-Evans XVI) : Arthan filius Cimulch. Or, dans le Livre noir, à propos de la tombe d’Eiddiwlch il semble qu’il y ait un jeu de mot sur ce nom : mab Arthan gywlavan gyvwlch. F. B. a. If, v. 22). Bwlch signifie entaille, brèche, Divwlch, sans entaille et métaphoriquement sans défaut et continu ; eyvwlch a le sens de complet, parfait ; Cleddyv, signifie épée.

Le texte porte : CledyvKyvwlch, mais d’après un autre passage (v. plus bas, page 317) il faut lire Divwlch. Kyvwlch dans Bwlch Kyvwlch, Sevwlch est évidemment incorrect. Je proposerais en conférant les deux passages : Bwlch, Hyvwlch (qui coupe, taille bien), Syvwlch, fils de Kilydd Kyvwlch, petit-fils de Cleddyv Divwlch.


Glas, Gleissic et Gleissat, étaient leurs trois chiens [284] ; KalI, Kuall et Kavall [285] leurs trois chevaux ; Hwyrdyddwc, Drwcdyddwc [286] et Llwyrdyddwc, leurs trois femmes ; Och, Garym et Diaspat [287] leurs trois petits-fils ; Lluchet, Nevet et Eissiwet [288], leurs trois filles ; Drwc, Gwaeth et Gwaethav Oll [289], leurs trois servantes ; Eheubryd, fille de Kyvwlch, Gorascwrn, fille de Nerth, et Gwaeddan, fille de Kynvelyn Keudawt [290]. ) Pwyll Hanner Dyn [291] ;


[292] Lorsque le dieu Lug se présente au palais royal de Tara, entre autres talents qu’il énumère afin d’y pénétrer, il indique celui de porte-coupe ; on lui répond qu’il y en a et on cite Glei, Glan, Gleisi, noms différents de ceux-ci, mais inventés d’après les mêmes procédés et probablement altérés (O’Curry, On the manners, III, p. 43). Glas signifie verdâtre ou blanchâtre ; gleissic, gleissat en sont des dérivés.

[293] Kall, « fin » ; Kuall,« cruel, sauvage » ; Kavall est le nom du chien d’Arthur, d’après Nennius et les Mab. (Nennius, éd. Petrie, Mon. Hist. brit., 79) ; pour Kavall, v. plus bas ; il manque quelque chose au texte. Cf. note 3.

[294] Dyddwc « qui porte » ; hwyr, « tard », llwyr, « complet » ; drwc, « mal, mauvais ». Il semble qu’il y ait interversion dans le texte ; Hwyrdyddwc, Drwcdyddwc ou Hwyrdyddwc seraient mieux appropriés comme noms de chevaux ; Och, Garym et Diaspat iraient bien comme noms de femme.

[295] Och, « exclamation de douleur, gémissement » ; garym ou garam, avec une voyelle euphonique ou irrationnelle pour garm, « cri » ; diaspat,« cri perçant ».

[296] Lluchet « éclair », Eisiwed, « indigence » : peut-être Luddet, Nychet et Eisiwet.

[297] Drwc,« mauvais », gwaeth, « pire » ; gwaethav oll, « le pire de tous ».

[298] Il est fort possible qu’il faille séparer Keudawt de Kynvelin. Le texte est altéré.

[299] Hanner dyn, « moitié d’homme » ; suivant Lady Guest, il existerait une fable galloise, d’après laquelle Arthur aurait vu, un jour, venir à lui une sorte de lutin qui, de loin, avait une forme indistincte, et en approchant paraissait se développer peu à peu ; arrivé près de lui, c’était un demi-homme. Le demi-homme le provoque. Arthur remet la lutte par mépris, si bien que le demi-homme grandit et qu’Arthur, en fin de compte, a besoin de toutes ses forces pour venir à bout de lui. Ce serait, d’après lady Guest, une allégorie destinée à montrer le pouvoir de l’exercice et de l’habitude. Les Iolo mss., p. 164. donnent cette fable ; mais il est aisé de voir qu’elle a été remaniée par un arrangeur maladroit.


Dwnn Diessic Unbenn [300] ; Eiladyr, fils de Pen Llorcan [301] ; Kyvedyr Wyllt [302], fils de Hettwn Talaryant ; Sawyl Bennuchel [303] ; Gwalchmei, fils de Gwyar [304] ; Gwalhavet, fils de Gwyar ; Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd [305] : il savait toutes les langues ; Kethtrwm Offeirat (le Prêtre) ; Klust, fils de Klustveinat [306] : l’enterrait-on cent coudées sous terre, il entendait à cinquante milles de là la fourmi quitter son nid le matin ;


[307] Unbenn, prince et même simplement seigneur, primitivement monarque.

[308] Le texte porte Harcan ; un autre passage donne un Pennlloran ; il faut prob. lire llorcan : pennllorcan, « à la tête de pivert ». Llorcan est aussi le nom d’un roi de Munster (O’Curry, On the manners, II, p. 98).

[309] Kyvedyr, ailleurs Kyledyr et même Kynedyr ; gwyllt, « sauvage, fou ».

[310] Samuel à la tête haute, un des trois orgueilleux de Bretagne (Triad. Mab., 304, 17 ; Triad., Skene, II, p. 458). Gaufrei de Monmouth parle d’un roi Samuil Pennissel, ou Samuel à la tête basse (Hist., III, 19).

[311] Voir p. 288. [six pages further on]

(G) Voir p. 287. [five …]

[312] Clust, « oreille » ; Clustveinad, « à l’oreille fine » ; d’après Owen Pughe, « qui dresse l’oreille, qui écoute attentivement ».


Medyr, fils de Methredydd, qui, de Kelliwic à Esgeir Oervel en Iwerddon, traversait, en un clin d’œil, les deux pattes du roitelet ; Gwiawn Llygat Cath [313], qui, d’un coup, enlevait.une tache de dessus l’exil du moucheron sans lui faire de mal ; Ol, fils d’Olwydd [314] (sept années avant sa naissance, on avait enlevé les cochons de son père ; devenu homme, il retrouva leur piste et les ramena en sept troupeaux) ; Bedwini [315], l’évèque qui bénissait la nourriture et la boisson d’Arthur.

[Kulhwch fit en outre sa demande] pour l’amour des femmes de cette île portant des colliers d’or : à Gwenhwyvar, la reine des dames de Bretagne ; Gwenhwyvach, sa sœur ; Rathtyeu, fille unique de Clememhill ; Relemon, fille de Kei ; Tannwen, fille de Gweir Dathar Wennidawc ; Gwennalarch [316], fille de Kynnwyl Kanhwch ;


[317] Llyyat cath, » à l’œil de chat ». Il y a un Gwiawn qui ne porte pas ce surnom et qui est plus connu ; il est qualifié de dewin, « devin », par Gwilym Ddu, poète du treizième-quatorzième siècle (Myv. arch., p.277, col. 1 ; cf. Taliesin chez Skene, II, p. 130, 9 153, 23). Medyr a ici le sens de habileté ou habile à viser ; Methredydd (medrydydd) en est un dérivé : cf. Drem fils de Dremhidydd.

[318] Ol, « trace, action de suivre » ; Olwydd, « qui suit les traces ».

[319] Dafydd ab Gwilym fait allusion au manteau de Bedwini, p. 122. Les Triades le font chef des évêques à la cour d’Arthur à Kelli Wic, en Kernyw (Triades, Skene, II, p. 455). Il est aussi question de lui dans le Songe de Ronabwy.

[320] Gwenn, « blanche » ; alarch, « cygne. »

Eurneid, fille de Clydno Eiddin [321] ; Enevawc, fille de Bedwyr [322] ; Enrydrec, fille de TuTúathar ; Gwennwledyr, fille de Gwaleddur Kyrvach [323] ; Erdutvul, fille de Tryffin ; Eurolwen, fille de Gwiddolwyn Gorr ; Teleri, fille de Peul ; Morvudd [324], fille d’Uryen Reget ; Gwenllian Dec [325], la majestueuse jeune fille ; Kreiddylat [326], fille de Lludd Llaw Ereint [327], la jeune fille la plus brillante qu’il y ait eu dans l’île des Forts, et les trois îles adjacentes : c’est à cause d’elle que Gwythyr, fils de Greidiawl et Gwynn, fils de Nudd, se battent et se battront, chaque premier jour de mai, jusqu’au jour du jugement ;


[328] Chef du Nord, probablement, d’après son surnom, du pays d’Edimbourg. D’après les Lois, il serait venu dans le pays de Galles avec Nudd Hael et d’autres pour venger la mort d’Elidyr le généreux, tué en Arvon ; les Gallois avaient pour chef Run, fils de Maelgwn (Ancient laws, 1, p. 104). La vaillance déployée par les hommes d’Arvon contre lui aurait été l’origine de leurs privilèges, que les Lois énumèrent à cet endroit. D’après les Triades sur la noblesse des Bretons du Nord, il serait fils de Kynnwyd Kynnwydyon et de la grande tribu de Coel (Triades, Skene, II, p. 454). Les poètes gallois parlent souvent de la gloire de Clydno, clot Clydno, épithète amenée par l’allitération et la ressemblance des formes (Myn. arch., p. 246, col. 2 ; 290, col. 1 ; 293, col. 2).

[329] Voir p. 286.

[330] Pen, 4 (L. Rh. 569) Gwaredur ; Il faut lire Gwawrddur.

[331] C’était une des trois femmes aimées par Arthur (Triades Mab., p. 302, 14). Son nom est synonyme de beauté chez les poètes (Daf. ab Gwil., p. 27 ; Iolo mss., p. 247).

[332] Tec, « belle ».

[333] On l’a identifiée avec la Cordelia de Gaufrei de Monmouth, II, 11 ; mais Cordelia est la fille du roi Llyr. Les Triades confondent Lludd et Llyr ; voir sur Lludd Llaw Ereint la note plus bas. Dans le Livre noir, 51,18, Gwyn ab Nudd se dit l’amant de Kreurdilad, fille de Lludd.

[334] Llaw Ereint, à la main d’argent.


Ellylw, fille de Neol Kynn Kroc, qui vécut trois âges d’homme ; Essyllt Vinwen et Essyllt Vingul [335] ; à elles toutes, Kulhwch réclama son présent.

Arthur lui dit alors : « Je n’ai jamais rien entendu au sujet de la jeune fille que tu dis, ni au sujet de ses parents. J’enverrai volontiers des messagers à sa recherche : donne-moi seulement du temps. » ― « Volontiers : tu as un an à partir de ce soir, jour pour jour. » Arthur envoya des messagers dans toutes les directions, dans les limites de son empire, à la recherche de la jeune fille. Au bout de l’année, les messagers revinrent sans plus de nouvelles, ni d’indications au sujet d’Olwen que le premier jour. « Chacun, » dit’ alors Kulhwch, « a obtenu son présent, et moi, j’attends le mien encore. Je m’en irai donc et j’emporterai ton honneur [336] avec moi. » ― « Prince, » s’écria Kei, « c’est trop de propos blessants pour Arthur !


[337] Essyllt est le nom qui est devenu Iseult dans les romans français. Min a le sens de lèvres. Essyllt Vinwen, fille de Kulvanawyt, est une des trois femmes impudiques de l’île ; c’est l’amante de Trystan (Myv. arch., p. 392, col. 1 ; là son nom est Fyngwen, « crinière blanche » ). Il est aussi curieux que Essyllt Vinwen soit devenue Iseult aux blanches mains. Y aurait-il eu une fausse interprétation de min ? Minwen, « lèvres blanches » ; mingul, « lèvres minces ». Caradawc Vreichvras, ou Caradawc « aux grands bras », est devenu de même, dans nos romans français, Brie-bras. Sur Essyllt, v. J. Loth, Contributions à l’étude des romans de la Table Ronde, p. 23 et suiv.

[338] Mot à mot, ton visage (dy wyneb). Voir p. 127, note 2.


Viens avec nous et, avant que tu ne reconnaisses toi-même que la jeune fille ne se trouve nulle part au monde, ou que nous ne l’ayons trouvée, nous ne nous séparerons pas de toi. » En disant ces mots, Kei se leva.

Kei avait cette vigueur caractéristique qu’il pouvait respirer neuf nuits et neuf jours sous l’eau ; il restait neuf nuits et neuf jours sans dormir ; un coup de l’épée de Kei, aucun médecin ne pouvait le guérir ; c’était un homme précieux que Kei : quand il plaisait à Kei, il devenait aussi grand que l’arbre le plus élevé de la forêt. Autre privilège : quand la pluie tombait le plus dru, tout ce qu’il tenait à la main était sec au-dessus et au-dessous, à la distance d’une palme, si grande était sa chaleur naturelle. Elle servait même de combustible à ses compagnons pour faire du feu, quand ils étaient le plus éprouvés par le froid. Arthur appela Bedwyr [339], qui n’hésita jamais à prendre part à une mission pour laquelle partait Kei. Personne ne l’égalait à la course dans cette île, à l’exception de Drych, fils de Kibddar [340] ; quoiqu’il n’eût qu’une main, trois combattants ne faisaient pas jaillir le sang plus vite que lui sur le champ de bataille ; autre vertu : sa lance produisait une blessure [en entrant], mais neuf en se retirant [341]. Arthur appela Kynddelic le guide : « Va », dit-il, « à cette entreprise avec le prince. » Kynddelic n’était pas plus mauvais guide dans un pays qu’il n’avait jamais vu que dans le sien propre. Arthur appela Gwrhyr Gwalstawt Ieithoed [342], parce qu’il savait toutes les langues.


[343] Une triade le met au-dessus des trois taleithiawc ou porte diadèmes de l’île, c’est-à-dire de Drystan, Hueil, fils de Kaw et Kei (Myv. arch., p. 389, col. 2 ; Triades Mab., p. 307, 16). Le Livre noir met sa tombe à Allt Tryvan, dans le Carnarvonshire (p. 51, 34) ; Arthur, dans le même livre, célèbre sa valeur (p. 51, v. 37 ; 52, 11). Llewis Glyn Cothi compare deux vaillants Gallois aux deux pouces de Bedwyr (Dwy vawd Vedwyr oeddynt, p. 396, v. 25 ; cf. ibid., p. 345, v. 22).

[344] Drych, « vue, regard » ; Cibddar est, dans les Triades, avec Coll, fils de Collvrewi, et Menw, un des trois prif Lledrithiawc ou premiers magiciens, habiles à se transformer ou à se métamorphoser (Myv. arch., p. 390,33) ; une autre tradition lui donne pour fils Elmur, qui est des trois tarw unbenn ou princes taureaux du combat (Myv. arch., 408, col. 1). Il est aussi question de Cibddar dans les Iolo mss., p. 253 (a glyweist tichwedl Cibddar.).

[345] Nous avons dû ici expliquer plutôt que traduire le texte ; le texte dit que la lance de Bedwyr avait un coup, une blessure, et neuf contre-coups (gwrth-wan ; gwan, « action de percer » ). Il semble qu’on soit ici en présence d’une arme dans le genre du gae bulga du héros irlandais Cuchulain. Le gae bulga ou javelot du ventre faisait la blessure d’un seul trait en entrant, et trente en se retirant ; il portait, échelonnées, une série de pointes disposées comme des hameçons. Pour le retirer, on était souvent obligé d’ouvrir le corps. Cuchulain visait avec lui ses ennemis au ventre (O’Curry, On the manners, II, p. 309). Des lances avec des pointes (généralement cinq) sont souvent mentionnées dans des épopées irlandaises, notamment dans le Táin Bó Cualgne.

[346] Gwrhyr, le maître ou plutôt l’interprète des langues.Il est fait mention de lui dans le Songe de Ronabwy et le roman de Gereint ab Erbin. C’est de lui probablement qu’il s’agit dans les Chwedlau des Iolo mss. : « As-tu entendu le propos de Gwrhyr, le serviteur de Teilaw le barde au langage véridique ? » (p. 255). Pour le sens de gwalstawd ou gwalystawd, mot emprunté à l’anglais, v. Iolo mss., p. 257, strophe 119.


Il appela Gwalchmei, fils de Gwyar [347] ; il ne revenait jamais d’une mission sans l’avoir remplie ; c’était le meilleur des piétons et le meilleur des cavaliers ; il était neveu d’Arthur, fils de sa soeur et son cousin. Arthur appela encore Menw, fils de Teirgwaedd : au cas où ils seraient allés dans un pays payen, il pouvait jeter sur eux charme et enchantement de façon à ce qu’ils ne fussent vus par personne, tout en voyant tout le monde.

Ils marchèrent jusqu’à une vaste plaine dans la quelle ils aperçurent un grand château fort, le plus : beau du monde. Ils marchèrent jusqu’au soir et lorsqu’ils s’en croyaient tout près, ils n’en étaient pas plus rapprochés que le matin. Ils marchèrent deux jours, ils marchèrent trois jours, et c’est à peine s’ils purent l’atteindre. Quand ils furent devant, ils aperçurent un troupeau de moutons, grand, sans bornes ni sans fin. Du sommet d’un tertre, un berger vêtu d’une casaque de peau les gardait ; à côté de lui était un dogue aux poils hérissés, plus grand qu’un étalon vieux de neuf hivers. Il avait cette habitude qu’il ne laissait jamais se perdre un agneau et, à plus forte raison, une bête plus grosse. Jamais compagnie ne passa à côté de lui sans blessure ou fâcheux accident ; tout ce qu’il y avait de bois sec et de buissons dans la plaine, son haleine le brûlait jusqu’au sol même. « Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd, » dit Kei, « va parler à cet homme là-bas ! » ― « Kei, » répondit-il, « je n’ai promis d’aller que jusqu’où tu iras toi-même. » ― « Allons-y ensemble, » dit Kei.

― « N’ayez aucune appréhension, » dit Menw [348], fils de Teirgwaedd ; « j’enverrai un charme sur le chien, de telle sorte qu’il ne fasse de mal à personne. » [349] Gwalchmei : le premier terme, gwalch, signifie faucon mâle, gwyar signifie sang. Il n’est pas inutile de remarquer que ce nom se retrouve très probablement dans le cartulaire de Redon ; le même personnage y est appelé Waltmoe et Walcmoel ; la forme qui explique le mieux l’erreur est Walc-Moei. C’est un des personnages les plus importants des Mabinogion, avec cette réserve qu’il n’apparaît pas dans les Mabinogion où il n’est pas question d’Arthur. Il a le même caractère dans les Triades que dans les Mabin. c’est un des trois eurdavodogion ou « gens à la langue dorée » ; c’est un des chevaliers de la cour d’Arthur les meilleurs pour les hôtes et les étrangers (Myv. arch., p. 393, col. 1, col. 2 ; ibid., p. 407, col. 2). Il y a un intéressant dialogue en vers, dans la Myv. arch., entre lui et Trystan ; il réussit, par sa courtoisie, à le ramener à la cour d’Arthur. Il remplit une mission analogue auprès de Peredur, dans le mabinogi de ce nom. Dans ce poème, il se dit neveu d’Arthur (Myv. arch„ p. 132, col. 1). Il n’y a pas de nom qui revienne plus souvent chez les poètes (Myv. arch., p. 278, col. 2 ; 286, col. 2, etc. ; Livre noir, Skene, p. 29, 10 ; 10, 12 : son cheval s’appelle Keincaled). C’est le Gauvain de nos Romans de la Table Ronde. Il est fils de Lloch Llawwynnyawc (le Loth ou Lot des romans français), et cousin d’Arthur. V. sur Gauvain, Gaston Paris, Hist. litt., XXX, 29-45. Un des Cymmwd de Rhos en Pembrokeshire tire son nom de lui : Walwyn’s Castle, en gallois Castell Gwalchmai (Eg. Phillimore, Owen’s Pembrok., II, p. 318, note 6).

[350] Menw, « esprit, intelligence ». La magie de Menw, qu’il avait apprise d’Uthur Penndragon, la magie de Math, fils de Mathonwy, qui l’enseigna à Gwydyon, fils de Don, et celle du Rudlwm Gorr qui l’enseigna à Koll, fils de Kollvrewi, sont les trois principales magies de Bretagne (Triades Mab., p. 302, 23 ; cf. Myv. arch., p. 390, col. 1). D’après un passage de Daf. ab. Gwilym, les trois magiciens seraient Menw, Eiddilic Corr et Maeth (sic), p. 143 (Eiddilic Corr, Wyddel call, « le Gaël subtil »). Ce Menw joue un grand rôle dans les rêveries de certains écrivains gallois contemporains. Un certain Einigan Gawr aurait aperçu, un jour, trois rayons de lumière sur lesquels était écrite toute science. Il prit trois baguettes de frêne sauvage, et y inscrivit ce qu’il avait vu. Les hommes ayant déifié ces baguettes, Einigan, irrité, les brisa et mourut. Menw vit trois baguettes poussant sur sa tombe ; elles sortaient de sa bouche. Il apprit ainsi toutes les sciences, et les enseigna, à l’exception du nom de Dieu (Lady Guest, d’après un travail publié par Tal. Williams, à Abergavenny, 1840, sur l’alphabet bardique). Sur ce personnage. de Menw, cf. Iolo mss., p. 252.


Ils se rendirent auprès du berger et lui dirent : « Es-tu riche, berger [351] ? » ― « À Dieu ne plaise, que vous soyez jamais plus riches que moi ! » ― « Par Dieu, puisque tu es le maître. » ― « Je n’ai d’autre défaut à me nuire que mon propre bien. » ― « À qui sont les brebis que tu gardes, et ce château là-bas ? » ― « Vous êtes vraiment sans intelligence : on sait dans tout l’univers que c’est le château d’Yspaddaden Penkawr [352]. » ― « Et toi, qui es-tu ? » ― « Kustennin, fils de Dyvnedic, et c’est à cause de me biens que m’a ainsi réduit mon frère Yspaddaden Penkawr. Et vous-mêmes, qui -êtes-vous ?"

― « Des messagers d’Arthur, venus ici pou demander Olwen, la fille d’Yspaddaden Penkawr. :

― « Oh ! hommes, Dieu vous protège ! Pour tout au monde, n’en faites rien : personne n’est vent faire cette demande qui s’en soit retourné en vie. » Comme le berger se levait pour partir, Kulhwch lui donna une bague d’or. Il essaya de la mettre mais, comme elle ne lui allait pas, il la plaça sur un doigt de son gant et s’en alla à la maison. Il donna le gant à sa femme à garder. Elle retira la bague du gant et lorsqu’elle l’eut mise de côté, elle lui dit : « Homme d’où te vient cette bague [353] ? Il ne t’arrive pas souvent d’avoir bonne aubaine. » ― « J’étais allé, » répondit-il, « chercher nourriture de mer ; lorsque tout d’un coup je vis un cadavre venir avec les flots ; jamais je n’en avais vu de plus beau : c’est sur son doigt que j’ai pris cette bague. » ― « Comme la mer ne souffre pas chez elle de joyau mort [354] montre-moi le cadavre. » [355] Tout ce dialogue est obscur. Il y a probablement un jeu de mots sur berth, et un autre sur priawt. Berth signifie beau, brillant. Il serait possible que ce fût une formule de salut comme en français : Es-tu gaillard ? Le berger prend le mot dans le sens de richesses, comme semble le prouver l’exclamation de son interlocuteur. Priawt signifie bien propre, et s’applique aussi à la femme légitime. Son beau-frère Yspaddaden, comme la suite du récit le montre, a tué tous ses enfants moins un, qui est caché, pour s’emparer de ses biens. Le don d’un anneau d’or semble bien montrer que les voyageurs ont l’intention d’acheter la complaisance du berger, et justifie le sens que nous avons donné à berth. Le texte semble ici encore avoir été remanié.

[356] Yspaddaden à la tête de géant.

[357] Pour la reconstitution du texte, v. Notes critiques. [J. Loth y explique, pour les experts en Gallois, comment il a reconstitué un texte à partir de deux version galloises.]

[358] Cf. Anc. Laws. II, p. 258 : Kanys pabeth bynac a vo yn varw yn y mor tri llanw a thri tray y brenyn biev (quelque chose que ce soit resté à l’état de mort dans la mer pendant trois flux et trois reflux, appartient au roi).

― « Femme, celui à qui appartient ce cadavre, tu le verras ici bientôt [359]. » ― « Qui est-ce ? » ― « Kulhwch, fils de Kilydd, fils du prince Anllawdd ; il est venu pour demander Olwen comme femme ». Elle fut partagée entre deux sentiments : elle était joyeuse à l’idée de l’arrivée de son neveu, le fils de sa soeur ; triste, en pensant qu’elle n’avait jamais vu revenir en vie un seul de ceux qui étaient allés faire pareille demande.

Pour eux, ils se dirigèrent vers la cour de Custennin le berger. Elle les entendit venir et courut de joie à leur rencontre. Kei arracha une pièce de bois au tas et, au moment où elle allait au-devant d’eux pour les embrasser, il lui mit la bûche entre les mains. Elle la pressa si bien qu’elle ressemblait à un rouleau de corde tordu [360]. « Ah ! femme, » s’écria Kei, « si tu m’avais serré ainsi, personne n’eût été tenté de placer sur moi son amour : dangereux amour que le tien ! » Ils entrèrent dans la maison et on les servit.

Au bout de quelque temps comme tout le monde sortait pour jouer, la femme ouvrit un coffre de pierre qui était auprès de la pierre de garde du feu [361], et un jeune homme aux cheveux blonds frisés en sortit. « C’est pitié, » dit Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd, « de cacher un pareil garçon ; je suis bien sûr que ce ne sont pas ses propres méfaits qu’on venge ainsi sur lui » ― « Celui-ci n’est qu’un rebut, » dit la femme : « Yspaddaden Penkawr m’a tué vingt-trois fils, et je n’ai pas plus d’espoir de conserver celui-ci que les autres. » ― « Qu’il me tienne compagnie, » dit Kei, « et on ne le tuera qu’en même temps que moi. » Ils se mirent à table. « Pour quelle affaire êtes-vous venus ? » dit la femme.

― « Afin de demander Olwen pour ce jeune homme. » ― « Pour Dieu, comme personne ne vous a encore aperçus du château, retournez sur vos pas. » ― « Dieu sait que nous ne nous en retournerons pas avant d’avoir vu la jeune fille. » ― « Vient-elle ici, » dit Kei, « de façon qu’on puisse la voir ? » ― « Elle vient ici tous les samedis pour se laver la tête. Elle laisse toutes ses bagues dans le vase où elle se lave, et elle ne vient jamais les reprendre pas plus qu’elle n’envoie à leur sujet. »


[362] Le récit a été ici délayé, sans doute, par un maladroit arrangeur. J’imagine que le dialogue primitif devait être à peu près ceci : « J’ai pris ce bijou sur un cadavre, le plus beau que j’aie vu. » – « Quel cadavre ? » – « Tu vas le voir. c’est Kulhwch ton neveu. » Le berger considère Kulhwch comme un homme mort. L’arrangeur ne l’aura pas compris, et aura essayé d’expliquer à sa façon les paroles de Kustennin : Cependant, il peut y avoir simplement un défaut dans l’expression ; le sens est évident.

[363] V. notes critiques.

[364] La pierre du foyer avait une importance particulière dans les lois galloises. Les maisons étant en bois, la pierre du foyer était la partie la plus difficile à faire disparaître. Le feu se trouvait sans doute au milieu de la maison, à peu près au niveau du sol. Il est, en effet, question dans les Lois du cas ou des porcs entrant dans une maison, éparpillent le feu et causent la destruction de la maison (Ancient laws I, p. 260 ; pour le pentan, v. ibid., p. 76, 452, 455, etc. ; II, p. 774). Pentan a aussi le sens de trépied (Ancient laws, II, p. 865).

― « Viendra-t-elle ici, si on la mande ? » ― « Dieu sait que je ne veux pas ma propre mort, que je ne tromperai pas qui se fie à moi ; seulement, si vous me donnez votre foi que vous ne lui ferez aucun mal, je la ferai venir. » ― « Nous la donnons, » répondirent-ils.

Elle la fit mander. La jeune fille vint. Elle était vêtue d’une chemise de soie rouge-flamme ; elle avait autour du cou un collier d’or rouge, rehaussé de pierres précieuses et de rubis. Plus blonds étaient ses cheveux que la fleur du genêt ; plus blanche sa peau que l’écume de la vague, plus éclatants ses mains et ses doigts que le rejeton du trèfle des eaux émergeant du petit bassin formé par une fontaine jaillissante [365] ; ni le regard du faucon après une mue, ni celui du tiercelet après trois mues [366] n’étaient plus clairs que le sien.

Son sein était plus blanc que celui du cygne, ses joues plus rouges que la plus rouge des roses. On ne pouvait la voir sans être entièrement pénétré de son amour. Quatre trèfles blancs naissaient sous ses pas partout où elle allait c’est pourquoi on l’avait appelée Olwen [367] (trace blanche).

Elle entra et alla s’asseoir sur le principal banc à côté de Kulhwch. En la voyant, il devina que c’était elle : « Jeune fille, » s’écria-il, » c’est bien toi que j’aimais. Tu viendras avec moi pour nous épargner un péché à moi et à toi. Il y a longtemps que je t’aime. » - » Je ne le puis en aucune façon, » répondit-elle : « mon père m’a fait donner ma foi, que je ne m’en irais pas sans son aveu, car il ne doit vivre que jusqu’au moment où je m’en irai avec un mari. Il y a cependant peut-être un conseil que je puis te donner, si tu veux t’y prêter. Va me demander à mon père ; tout ce qu’il te signifiera de lui procurer, promets qu’il l’aura, et tu m’auras moi-même. Si tu le contraries en quoi que ce soit, tu ne m’auras jamais et tu pourras t’estimer heureux, si tu t’échappes la vie sauve. » ― « Je lui promettrai tout et j’aurai tout. » Elle s’en alla vers sa demeure, et eux, ils se levèrent pour la suivre au château. Ils tuèrent les neuf portiers gardant les neuf portes sans qu’un seul fit entendre une plainte, les neuf dogues sans qu’aucun poussât un cri, et entrèrent tout droit dans la salle. « Salut, » dirent-ils, « Yspaddaden Penkawr [368], au nom de Dieu et des hommes. » ― « Et vous, pourquoi êtes-vous venus ? » ― « Nous sommes venus pour te demander Olwen, ta fille, pour Kulhwch, fils de Kilydd, fils du prince Kelyddon. » ― « Où sont mes serviteurs et mes vauriens de gens ? Elevez les fourches sous mes deux sourcils qui sont tombés sur mes yeux, pour que je voie mon futur gendre. » Cela fait, il leur dit : « Venez ici demain, et vous aurez une réponse. »

[369] La comparaison est aussi gracieuse que juste. La fleur du ményanthe trifolié, ou trèfle, aquatique, est une des plus charmantes de nos pays. Elle est d’une grande blancheur avec une très légère teinte purpurine ; elle aime les eaux de source. Au moment où les pédoncules sortent de l’eau, la fleur qu’ils portent n’est pas encore étalée ; elle ressemble à un calice à trois angles (v. notes critiques).

[370] D’après les lois galloises, le faucon qui a mué (qui a été levé de la mue, suivant l’expression propre de la fauconnerie) a une plus grande valeur qu’avant, surtout s’il devient blanc (Ancient laws, I, p 282). La comparaison avec l’œil du faucon est fréquente : Myv. arch., p. 252, col. 2. un guerrier est appelé trimud aer-walch ; cf. ibid., 221, col. 1 ; 257, col. 2). Le sens primitif de trimud est qui a trois mues ; mais à cause de sa ressemblance avec mut, « muet », son sens a évolué, et trimut, termut, a fini par signifier absolument muet, comme le prouve le passage suivant de Llywarch ab Llewelyn, poète du douzième et treizième siècle :

rei tra llwfyr tra llafar eu son

ac ereill taerlew termudion « les uns très lâches, très loquaces, les autres vaillants et fermes, tout à fait silencieux » (Myv. arch., p. 201, col. 2). Gwalch doit être traduit par tiercelet ou faucon mâle. Les lois (Ancient laws, II, p. 197) glosent (hebawc) wyedic ou faucon mâle par gwalch. Il est d’un prix moins élevé que le hebawc ou faucon sans épithète, c’est-à-dire le faucon femelle. Aneurin Owen, au t. I, p. 788 des Lois, se trompe donc en traduisant gwalch par buse. La mue profitait au faucon ; sa livrée n’était même complète qu’après trois mues. En parlant de la mue, François de Saint-Aulaire (Fauconnerie, Paris, 1819) dit que « le faucon en devient plus beau et plus agréable comme une personne estant vestue à neuf. » [371] L’auteur décompose le mot en ol, « trace », et aven, « blanche ».

[372] Yspaddaden à la tête de géant offre certains traits de ressemblance avec le Balór irlandais. Celui-ci sert même à expliquer certaines bizarreries du récit évidemment mutilé que nous avons sous les yeux. Balór, dieu des Fomore, population fabuleuse d’Irlande, a les paupières habituellement rabattues sur les yeux ; lorsqu’il les relève, d’un coup d’œil il tue son adversaire. Il est tué par son petit-fils Lug, dieu des Túatha Dé Danann. Yspaddaden, lui aussi, a les paupières baissées ; on ne voit pas qu’il ait le mauvais oeil, mais c’est sans doute une lacune du récit. Il est tué par son neveu Goreu. Lug tue Balor avec une pierre de fronde. Yspaddaden se sert aussi d’un javelot de pierre et en est frappé à son tour. Ce llechwaew ou javelot de pierre devient, une ligne après, une arme en fer ; mais ces contradictions ne montrent que mieux l’ancienneté de la légende : le mot llechwaew ne se comprenait plus.


Ils se levèrent pour sortir ; Yspaddaden Penkawr saisit un des trois javelots [373] empoisonnés qui étaient à portée de sa main et le lança après eux. Bedwyr le saisit au passage, lui renvoya le tout instantanément, et lui traversa la rotule du genou : « Maudit, barbare gendre ! Je m’en ressentirai toute ma vie en marchant sur une pente. Ce fer empoisonné m’a fait souffrir comme la morsure du taon. Maudit soit le forgeron qui l’a fabriqué et l’enclume sur laquelle il a été forgé. » Ils logèrent cette nuit-là chez Custennin le berger. Le jour suivant, en grand appareil, la chevelure soigneusement peignée [374], ils se rendirent au château, entrèrent dans la salle et parlèrent ainsi : – « Yspaddaden Penkawr, donne-nous ta fille. Nous te payerons ses agweddi et amobyr [375] à toi et à ses deux parentes. Si tu refuses, il t’en coûtera la vie. » ― « Ses quatre bisaïeules, » répondit-il, « et ses quatre bisaïeuls sont encore en vie ; il faut que je tienne conseil avec eux. » ― « Soit, allons manger. » Comme ils partaient, il saisit un des deux javelots qui étaient à portée de sa main et le lança après eux.

Menw, fils de Teirgwaedd le saisit au passage, le lui renvoya ; le trait l’atteignit au milieu de la poitrine et sortit à la chute des reins : « maudit, barbare gendre, » s’écria-t-il ! « cet acier est cuisant comme la morsure de la grosse sangsue. Maudite soit la fournaise où il a été fondu, et le forgeron qui l’a forgé ! Quand je voudrai gravir une colline, j’aurai désormais courte haleine, maux d’estomac et fréquentes nausées. » Ils allèrent manger. Le lendemain, troisième jour, ils revinrent à la cour. « Ne nous lance plus de trait, Yspaddaden Penkawr, dirent-ils, si tu ne veux ta propre mort. » ― « Où sont mes serviteurs, dit Yspaddaden Penkawr ? Elevez les fourches sous mes sourcils qui sont tombés sur les prunelles de mes yeux, pour que je voie mon futur gendre. » Ils se levèrent. À ce moment Yspaddaden Penkawr saisit le troisième javelot empoisonné et le lança après eux. Kulhwch le saisit, le lança de toutes ses forces, à souhait, si bien que le trait lui traversa la prunelle de l’œil, et lui sortit par derrière la tête. « Maudit, barbare gendre, » s’écria-t-il ! « tant que je resterai en vie, ma vue s’en ressentira ; quand j’irai contre le vent, mes yeux pleureront, j’aurai des maux de tête et des étourdissements à chaque nouvelle lune. Maudite soit la fournaise où il a été façonné ! La blessure de ce fer empoisonné a été aussi poignante pour moi que la morsure d’un chien enragé. » Ils allèrent manger. Le lendemain ils revinrent à la cour et dirent : « Ne nous lance plus de traits désormais ; il n’en est résulté pour toi que blessures, fâcheuses affaires, tortures ; il t’arrivera pis encore, si tu y tiens. Donne-nous ta fille, sinon tu mourras à cause d’elle. » ― « Où est-il celui qui demande ma fille ? Viens ici que je fasse ta connaissance. » On fit asseoir Kulhwch sur un siège face à face avec lui. « Est-ce toi, dit Yspaddaden Penkawr, qui demande ma fille ? » ― « C’est moi, répondit Kulhwch. » ― « Donne-moi ta parole que tu ne feras rien qui ne soit légal. Quand j’aurai eu tout ce que je t’indiquerai, tu auras ma fille. » ― « Volontiers ; indique ce que tu désires. » ― « C’est ce que je vais faire : vois-tu cette vaste colline là-bas ? » ― « Je la vois. » ― « Je veux que toutes les racines en soient arrachées et brûlées à la surface du sol de façon à servir d’engrais, qu’elle soit charruée et ensemencée en un jour, et qu’en un seul jour aussi le grain en soit mûr. Du froment, je veux avoir de la nourriture et une liqueur faite, pour le festin de tes noces avec ma fille. Que tout cela soit fait en un jour. » ― « J’y arriverai facilement quoique tu le croies difficile. » ― « Si tu y arrives, il y a une chose à laquelle tu n’arriveras pas. Il n’y a d’autre laboureur à pouvoir labourer et mettre en état cette terre qu’Amaethon <ref> Amaethon est le moins célèbre des enfants de Don. Ce qui l’a désigné pour être grand agriculteur, c’est son nom qu’on a dérivé d’amaeth, « laboureur » = ambactos. D’après les Iolo mss., Don serait un roi de Scandinavie et de Dublin qui aurait amené les Gaëls dans le nord du pays de Galles en 267 après Jésus-Christ. Ils y auraient séjourné cent vingt-neuf ans. Ils auraient été chassés par les Bretons du nord, sous la conduite de Cunedda et de ses enfants (Iolo mss., p.77, 78, 81). Dans la légende irlandaise, Don est l’aîné des fils de Milet et amène les ancêtres des Irlandais en Irlande (O’Curry, On the manners, p. 189). Les Iolo mss., dont l’autorité, quoi qu’on en ait dit, est mince en matière historique, ne concordent pas avec les Mabinogion qui ne présentent nullement Don et ses enfants comme des Gaëls. Amaethon est mentionné par Taliessin avec Math et Gwydyon (Skene, Four ancient books, II, p. 200, vers 2 ; cf., ibid., p. 158, 14, 26). Amaethon figure aussi à la bataille de Goddeu, une des trois frivoles batailles de l’île de Bretagne ; elle eut lieu à cause d’un chevreuil et d’un vanneau ; on y tua soixante et onze mille hommes (Myv. arch., p. 405. 50). Une note à un fragment poétique de la Myv. ajoute qu’Amaethon s’y battit avec Arawn, roi d’Annwn, et qu’il fut vainqueur grâce à son frère Gwydyon : il y avait sur le champ de bataille un homme et une femme dont on ne pouvait triompher, si on ne savait leurs noms. Gwydyon les devina. La femme s’appelait Achren ; aussi appelle-t-on la bataille cat Achren ou cat Goddeu (Myv arch., p. 127, note. 2). </ref>, fils de Don, tellement elle est embroussaillée.

[376] D’après les lois de Gwynedd ou Nord-Galles, c’était à celui qui livrait la jeune fille au mari, qu’il fût père ou tuteur, à payer l’amobyr (Ancient laws, 1, p. 88, 204). D’après d’autres textes, on payait l’amobyr au père de la jeune fille ou au seigneur. Agweddi indique la dot qu’apporte la jeune fille en se mariant, ou le don fait par le mari à sa femme après la consommation du mariage : v. pour agweddi dans ce dernier sens, Mab., p. 222, note 3. [c. à d. le ’songe de Maxen’, note au sujet du présent conjugal] Il semble bien ici que le prétendant veuille faire acte de générosité ; au lieu de demander amobyr et agweddi, il offre d’en donner la valeur à Yspaddaden (v. sur agweddi, Ancient laws, 1, p. 82, 88 et suiv. ; amobyr, ibid., p. 88, 204 et suiv.) La consultation que doit avoir Yspaddaden avec les ascendants de la jeune fille, s’il n’en est pas question dans les Lois, est bien cependant dans l’esprit de la législation galloise.


Il ne viendra jamais avec toi de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi, c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : que Gevannon <ref> Govannon, v. p. 192, note 2. [Mabinogi de Math, note à Govannon]. </ref>, fils de Don, vienne au bord des sillons pour débarrasser le fer. Il ne travaille jamais volontairement que pour un roi véritable ; le contraindre, tu ne le pourrais pas. » – « C’est pour moi chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : les deux bœufs de Gwlwlyd Wineu [377], comme compagnons [378], pour charruer ensemble vaillamment cette terre embroussaillée. Il ne les donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « C’est pour moi chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : je veux avoir, formant paire, le bœuf Melyn Gwanwyn et le bœuf Brych [379]. » ― « C’est pour moi chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendra pas : les deux bœufs cornus dont l’un est de l’autre côté de cette montagne pointue et l’autre de ce côté-ci ; il faut les amener sous le même joug de la même charrue : ce sont Nynnyaw et Peibaw <ref> Nynniaw et Pebiaw. Le Liber Landav., p. 75 et suiv., fait d’un Pepiau, roi d’Erchyng (Archenfield, dans le Herefordshire, au sud-ouest de la Wye), le père de saint Dyvric (Dubricius), saint du VIe siècle. Nynniaw, d’après certaines généalogies, serait un roi de Glamorgan et de Gwent, ancêtre de Marchell, mère de Brychan Brychelniawc, qui a laissé son nom au Breconshire, tige de la troisième grande tribu des saints (Iolo mss., p. 118). L’orgueil de Nynniaw et Pebiaw est le sujet d’un conte des Iolo mss. Les rois Nynniaw et Pebiaw se promenaient par une belle nuit étoilée : « Quelle belle campagne je possède, » dit Nynniaw. – « Laquelle ? » s’écria Pebiaw. – « Le ciel entier. » – « Regarde ce que j’ai de bétail et de brebis broutant tes champs ? » – « Où sont-ils ? » – » Les étoiles, avec la lune comme berger. » – « Elles ne resteront pas plus longtemps dans mes champs. » – « Elles resteront. » De là, guerre et carnage. Rhitta le Géant, roi de Galles, irrité, vint mettre la paix entre eux, les vainquit et leur arracha la barbe. Les rois des pays voisins s’unirent contre lui. Il les fit prisonniers et leur enleva la barbe en disant : « Voilà les animaux qui ont brouté mes pâturages ; je les en ai chassés, il n’y paîtront plus désormais. » Il se fit de leurs barbes une ample tunique qui lui descendait de la tête aux pieds (Iolo mss., p. 193). Les deux bœufs cornus (ychain bannawc) les plus célèbres dans les Triades sont ceux de Hu Gadarn, qui auraient traîné l’avanc de l’étang de Llion à la terre ; depuis ce temps, l’étang n’aurait plus rompu ses digues (L’avanc ou addanc est ici un monstre mystérieux). Ce serait une des trois grandes merveilles de l’île (Myv. arch., p. 409, 97). Avant l’arrivée des Kymry, il n’y avait d’autres habitants en Bretagne que des ours, des loups, des eveinc (plur. d’avanc) et des ychain bannoy ou bœufs cornus (Myv. arch., p. 400, 1). V. un très copieux article du Welsh Dict. de Silvan Evans, au mot afang. Mais l’auteur aurait dû comparer le gallois au breton avanc, irl. moy. abacc : le sens propre est castor. </ref>, que Dieu a transformés en bœufs pour leur péchés. »

― « C’est pour moi chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas. Vois-tu là-bas cette terre rouge cultivée ? » ― « Je la vois. » ― « Lorsque je me rencontrai pour la première fois avec la mère de cette jeune fille, on y sema neuf setiers de graine de lin, et rien n’est encore sorti, ni blanc, ni noir. J’ai encore la mesure. Cette graine de lin, je veux l’avoir pour la semer dans cette terre neuve là-bas, de façon que le lin serve de guimpe blanche autour de la tête de ma fille pour tes noces. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : du miel qui soit neuf fois plus doux que le miel du premier essaim [380], sans scories, ni abeilles dedans, pour brasser [381] la boisson du banquet. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : le vase de Llwyr fils de Llwyryon qui contient un penllad [382] ; il n’y a pas au monde d’autre vase à pouvoir contenir cette forte liqueur. Il ne te le donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : la corbeille de Gwyddneu Garanhir [383] ; le monde entier se présenterait par groupes de trois fois neuf hommes, que chacun y trouverait à manger suivant sa fantaisie ; je veux en manger la nuit où ma fille couchera avec toi. Il ne te la donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : la corrne de Gwlgawt Gogodin [384] pour nous verser à boire cette nuit-là. Il ne te la donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y aune chose que tu n’obtiendras pas : la harpe de Teirtu [385] pour nous charmer cette nuit-là. Désire-t-on qu’elle joue : elle joue toute seule ; qu’elle cesse ? elle se tait d’elle-même. Cette harpe, il ne te la donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. »

― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y aune chose que tu n’obtiendras pas : le bassin [386] de Diwrnach le Gwyddel (l’irlandais), l’intendant d’Odgar, fils d’Aedd, roi d’Iwerddon, pour bouillir les mets de ton festin de noces. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il faut que je me lave la tête et que je fasse ma barbe. C’est la défense d’Yskithyrwynn [387] Penbeidd qu’il me faut pour me raser, mais il ne me servira de rien de l’avoir, si on ne la lui arrache pendant qu’il est en vie. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il n’y a personne à pouvoir la lui arracher qu’Odgar, fils d’Aedd, roi d’Iwerddon. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : je ne me reposerai sur personne de la garde de la défense, si ce n’est sur Kado de Prydein, le maître de soixante cantrev [388] ; il ne vien­dra pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il faut que les poils de ma barbe soient étirés pour qu’on les rase ; or, ils ne céderont jamais sans le secours du sang de la sorcière Gorddu [389] [390] Gwidolwyn le nain a pour fille Eurolwen, mentionnée plus haut p. 284. </ref>, fille de la sorcière Gorwenn de Pennant Govut, aux abords de l’enfer. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : je ne veux pas de ce sang, si tu ne l’as chaud ; or, il n’y a pas de vase au monde à pouvoir conserver la chaleur de la liqueur qu’on y versera, à l’exception des bouteilles de Gwiddolwyn Gorr [391] : qu’on y verse de la boisson à l’orient, elles la conserveront avec sa chaleur jusqu’à l’occident. Il ne te les donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il y en a qui désirent du lait frais ; or, je n’ai pas la prétention d’en avoir pour chacun, si je n’ai les bouteilles de Rinnon Rin [392] Barnawt dans lesquelles aucune liqueur ne tourne. Il ne les donnera à personne de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile.

― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il n’y a pas au monde de peigne ni de ciseaux avec lesquels on puisse mettre en état ma chevelure, tellement-elle est rebelle, à l’exception du peigne et des ciseaux qui se trouvent entre les deux oreilles de Twrch Trwyth [393], fils du prince Taredd. Il ne les donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. »

― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : Drutwyn, le petit chien de Greit, fils d’Eri : on ne peut chasser le Twrch Trwyth sans lui. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendrais pas : la laisse de Kwrs Kant Ewin ; il n’y a pas au monde d’autre laisse à pouvoir le retenir. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : le collier de Kanhastyr Kanllaw : il n’y a pas d’autre collier au monde à pouvoir retenir la laisse. » ― « Si toi tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas. la chaîne de Kilydd Kanhastyr pour joindre le collier à la laisse. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : il n’y a d’autre chasseur à pouvoir chasser avec ce chien que Mabon, fils de Modron ; il a été enlevé à sa mère la troisième nuit [394] de sa naissance, et on ne sait ni où il est, ni s’il est mort ou vivant. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : Gwynn Mygdwnn [395], le cheval de Gweddw, aussi rapide que la vague, pour chasser le Twrch Trwyth sous Mabon. Il ne te le donnera pas de bon gré ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : on ne trouvera jamais Mabon puisqu’on ne sait de quel côté il peut être, si on ne trouve Eidoel [396], fils d’Aer, son principal parent. Autrement, toute recherche serait inutile. C’est son cousin germain. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : Garselit le Gwyddel [397], chef des chasseurs d’Iwerddon ; on ne pourra jamais chasser le Twrch Trwyth sans lui. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : une laisse faite de la barbe de Dillus Varvawc ; il n’y en a pas d’autre à pouvoir tenir les deux petits de [Gast Rymi], et on ne pourra en tirer parti que si on l’extrait poil par poil de sa barbe pendant qu’il est en vie. Il faut aussi l’arracher avec des pinces de bois. Jamais, tant qu’il vivra, il ne se laissera faire. Si on la lui arrache mort, la laisse ne sera d’aucune utilité : elle sera cassante.

― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. »

― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : on ne peut chasser le Twrch Trwyth sans Gwynn[398], ses gens, que le rouge signifiait chaleur brillante, et le bleu, froid, il l’aspergea d’eau bénite lui et ses gens, et tout disparut (lady Guest, d’après la collection du Greal, p. 337, Londres, 1805). Le dieu Gwynn, fils de Nudd, joue donc le même rôle en Galles que Núada et les Túatha Dé Danann en Irlande. Chez certains poètes, Gwynn n’a pas ce caractère diabolique ; c’est un héros comme beaucoup d’autres ; Gwynn est descendu au rang des hommes. Dans le Livre noir, 55, XXXIII, il se donne comme l’amant de Kreurdilat, fille de Lludd ; il a assisté à beaucoup de batailles, à la mort de beaucoup de héros. Notre Mabinogi concilie la légende chrétienne et païenne. Ne pouvant l’arracher de l’enfer, où saint Collen et ses amis l’ont irrévocablement installé, l’auteur explique que c’est pour mater les démons et les empêcher de nuire aux mortels. Le paradis des Celtes s’appelait chez les Gaëls Findmag et chez les Gallois Gwynva, « le champ blanc ou heureux », ou peut-être le champ de Gwynn (Gwynva = [399]Vindo-magos). </ref>. Il est plus sauvage neuf fois que la bête la plus sauvage de la montagne. Tu ne l’auras jamais, ni ma fille non plus. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : on ne peut chasser le Twrch Trwyth sans Gwynn [400], fils de Nudd, en qui Dieu a mis la force des démons d’Annwvyn pour les empêcher de détruire les gens de ce monde : il est trop indispensable pour qu’on le laisse partir. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. »

― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : il n’y a d’autre cheval à pouvoir porter Gwynn à la chasse du Twrch Trwyth que Du, le cheval de Moro Oerveddawc [401]. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : jusqu’à l’arrivée de Gwilennin, roi de France, on ne pourra chasser le Twrch Trwyth. Or, il ne serait pas convenable à lui d’abandonner son pays pour l’amour de toi. Jamais il ne viendra. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : on ne pourra chasser le Twrch Trwyth sans Alun, fils de Dyvet : il est habile à lancer les chiens. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : jamais on ne chassera le Twrch Trwyth sans Anet et Aethlem [402], aussi rapides que le vent : on ne les a jamais lancés sur une bête qu’ils ne l’aient tuée. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : Arthur et ses compagnons pour chasser le Twrch Trwyth. C’est un homme puissant. Jamais il ne viendra pour l’amour de toi [403] ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas. » ― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : on ne chassera jamais le Twrch Trwyth sans Bwlch, Kyvwlch et Syvwlch fils de Kilydd Kyvwlch, petit-fils de Cleddyv Divwlch, rien n’est plus blanc que le blanc de leurs trois boucliers, plus poignant que la pointe de leurs trois lances, plus tranchant que le tranchant de leurs trois épées ; Glas, Gleissic, Gleissyat, sont leurs trois chiens ; Kall, Kuall et Kavall, leurs trois chevaux ; Hwyrdyddwc, Drycdyddwc et Llwvrdyddwc, leurs trois femmes ; Och, Garam et Diaspat, leurs trois petits-fils ; Lluchet, Nyvet et Eissiwet, leurs trois filles ; Drwc, Gwaeth et Gwaethav Oll, leurs trois servantes [404] ; quand ces trois hommes sonnent de leurs trompes, tous les autres répondent : « On croirait que le ciel s’écroule sur la terre. » ― « Si toi tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « Si tu l’obtiens, voici que tu n’obtiendras pas : l’épée de Gwrnach Gawr [405]. Le Twrch Trwyth ne sera tué qu’avec cette épée. Il ne la donnera jamais de bon gré, ni à aucun prix, ni par générosité ; l’y contraindre, tu ne le pourrais pas.

― « Si toi, tu le crois difficile, pour moi c’est chose facile. » ― « En admettant que tu y réussisses, tu passeras dans ces recherches tes nuits sans dormir : non, jamais tu n’auras tout cela, ni ma fille non plus. » ― « J’aurai des chevaux, j’irai à cheval ; mon seigneur et parent Arthur me procurera tout cela, j’aurai ta fille, et toi tu perdras la vie. » ― « Eh bien, pars maintenant. Tu ne seras tenu de fournir ni nourriture ni boisson à ma fille tant que dureront tes recherches. Quand tu auras trouvé toutes ces merveilles, ma fille sera tienne. » Ce jour-là, ils marchèrent jusqu’au soir et finirent par apercevoir un grand château-fort, le plus grand du monde. Ils virent en sortir un homme noir plus gros que trois hommes de ce monde-ci à la fois. « D’où viens-tu, homme ? » lui dirent-ils.

― « Du château que vous voyez là-bas. » ― « Quel en est le maître ? » ― « Vous êtes vraiment sans intelligence : il n’y a personne au monde qui ne sache quel est le maître de ce château : c’est Gwrnach Gawr. » ― « Quel accueil fait-on aux hôtes et aux étrangers qui voudraient descendre dans ce château ? » ― « Prince, Dieu vous protège ! Jamais personne n’a logé dans ce château qui en soit sorti en vie. On n’y laisse entrer que l’artiste qui apporte avec lui son art. » Ils se dirigèrent vers le château. « Y a-t-il avec un portier ? » dit Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd.

― « Oui, et toi, que ta langue ne reste pas muette dans ta bouche ; pourquoi m’adresses-tu la parole ? » ― « Ouvre la porte. » ― « Je ne l’ouvrirai pas. » ― « Pourquoi n’ouvres-tu pas ? » ― « Le couteau est allé dans la viande, la boisson dans la corne, on s’ébat dans la salle de Gwrnach Gawr : ce n’est qu’à l’artiste qui apportera son art que l’on ouvrira la porte désormais cette nuit. » Alors Kei dit : « Portier, j’ai un art. » ― « Lequel ? » ― » Je suis le meilleur polisseur d’épées qu’il y ait au monde. » ― « Je vais le dire à Gwrnach Gawr et je te rapporterai sa réponse. » Le portier entra : « Il y a du nouveau à l’entrée ? » dit Gwrnach Gwar.

― « Oui, il y a à la porte une compagnie qui veut entrer. » ― « Leur as-tu demandé s’ils apportent un art ? » ― « Je l’ai fait, et l’un d’eux prétend qu’il est bon polisseur d’épées. Avons-nous besoin de lui ? » ― « Il y a pas mal de temps que je cherche en vain quelqu’un qui me nettoie mon épée. Laisse entrer celui-là puisqu’il apporte un art. » Le portier alla ouvrir la porte. Kei entra et salua Gwrnach Gawr. On l’assit en face de lui. « Est-ce vrai, homme, » dit Gwrnach Gawr, « ce que l’on dit de toi, que tu sais polir les épées ? » ― « Je le sais, et bien, » répondit Kei. On lui apporta l’épée de Gwrnach. Kei tira de dessous son aisselle une pierre à aiguiser en marbre, [406] et lui. demanda ce qu’il préférait : qu’il polît la garde en blanc ou en bleu [407]. « Fais comme tu voudras, » dit Gwrnach, « comme si l’épée t’appartenait. » Kei nettoya la moitié de l’épée et la lui mit dans la main en disant : « Cela te plaît-il ? » ― « Plus que n’importe quoi dans mes états, si elle était ainsi tout entière. C’est pitié qu’un homme comme toi soit sans compagnon. » ― « Seigneur, j’en ai un, quoiqu’il n’apporte pas cet art-ci ? » ― « Qui est-ce ? » ― « Que le portier sorte. Voici à quels signes il le reconnaîtra : la pointe de sa lance se détachera de la hampe, elle tirera du sang du vent et descendra de nouveau sur la hampe. » La porte fut ouverte et Bedwyr entra. « Bedwyr », dit Kei, « c’est un homme précieux, quoiqu’il ne sache pas cet art-ci. » Il y avait grande discussion parmi ceux qui étaient restés dehors, à cause de l’entrée de Kei et de Bedwyr. Un d’entre eux, un jeune homme, le fils unique de Kustennin le berger, réussit à entrer et, ses compagnons s’attachant à lui, il traversa les trois cours [408] et arriva à l’intérieur du château. Ses compagnons lui dirent alors : « Puisque tu as fait cela, tu es le meilleur (goreu) des hommes. » Depuis on l’appela Goreu, fils de Kustennin. Ils se dispersèrent pour aller dans les différents logis, afin de pouvoir tuer ceux qui les tenaient, sans que le géant le sût.


[409] Il faut peut-être lire aerveddawc. Les trois aer-veddawc sont Selyv ab Cynan Garwyn ; Avaon fils de Taliesin, et Gwallawc ab Lleenawc. On les appelait ainsi parce qu’ils vengeaient les torts qu’on avait envers eux, même de la tombe (Myv. arch., p. 408, 76).

[410] Aethlem (pour Aethlym ?) aigu, poignant.

[411] Pen. 4 (L. Rh. 495) ajoute la curieuse explication suivante « En voici la cause il est sous ma main. » [412] V. plus haut p. 280, et notes critiques.

[413] L’épée merveilleuse, parmi les treize joyaux de l’île, est celle de Rhydderch Hael. Si un autre que lui la tirait du fourreau, elle s’embrasait depuis la poignée jusqu’à la pointe. Il la donnait à tous ceux qui la lui demandaient, ce qui lui valut le nom de Rhydderch le généreux, mais tous la rejetaient à cause de cette particularité (Lady Guest,II, p. 354). Il y a un Urnach l’Irlandais qui aurait amené les Gaëls dans le nord pu pays de Galles. Son fils Serygi aurait été tué à la bataille de Cerric y Gwyddel par Caswallon Llawhir « à la main longue ». Son petit-fils Daronwy, encore enfant, aurait été recueilli par les vainqueurs. sur le champ de bataille. Elevé par Gallois, il s’unit plus tard aux Irlandais, et devint la cause des plus grands maux pour ses bienfaiteurs (Iolo mss., p. 81, 82). Le nom de Daronwy est conservé dans le nom d’une ferme de Llanfachreth près de Carnarwon (L. Rhys, Celt. Folklore, II, p. 567).

[414] V. notes critiques.

[415] Voir notes critiques.

[416] Le cadlys répond, sans doute, à l’air-lis Irlandais. Chaque lis, résidence d’un noble entourée d’une levée de terre, renfermait au moins une cour intérieure (air-lis) où les troupeaux se réfugiaient (O’Curry, On the manners, 1, p. 304). Cad ne signifie probablement pas ici combat, mais appartient à la même racine que cadw, garder. Le cadlys était protégé par des palissades ou d’autres moyens de défenses. Dans certains Brittish camps (camps de l’époque celtique dans l’île de Bretagne), l’enceinte circulaire, en général réservée au bétail, est parfaitement reconnaissable.


Quand l’épée fut remise en état, Kei la mit dans la main de Gwrnach Gawr, comme pour voir si le travail lui plaisait. « Le travail est bon », dit le géant, « il me plaît. » ― « C’est ta gaine, » dit Kei, « qui a gâté l’épée. Donne-la moi pour que je lui enlève ses garnitures de bois et que j’en remette de neuves. » Il prit la gaîne d’une main, l’épée de l’autre ; et, debout, au-dessus du géant comme s’il voulait remettre l’épée dans le fourreau, il la dirigea contre lui et lui fit voler la tête de dessus les épaules. Ils dévastèrent le château, enlevèrent ce qui leur convint des richesses et des bijoux [417], et, au bout d’un an, jour pour jour, ils arrivaient à la cour d’Arthur avec l’épée de Gwrnach Gawr. Ils racontèrent à Arthur leur aventure. Arthur leur demanda alors ce qu’il valait mieux chercher de toutes les merveilles. « Il vaut mieux, » répondirent-ils, « chercher d’abord Mabon, fils de Modron, mais on ne le trouvera pas avant d’avoir trouvé Eidoel, fils d’Aer, son parent. » Arthur partit avec les guerriers de l’île de Bretagne à la recherche d’Eidoel, et ils arrivèrent devant le château fort de Glini, où Eidoel était emprisonné. Glini, debout sur le haut de ses murs, s’écria : « Arthur, que me réclames-tu, du moment que tu ne me laisses pas eu paix sur ce pic rocailleux ! Je suis assez privé de biens, de plaisir, de froment, d’avoine, sans que tu cherches encore à me nuire. » ― « Ce n’est pas pour te faire du mal, » répondit Arthur, « que je suis venu ici, c’est pour chercher ton prisonnier. » ― « Je te le donnerai, bien que je ne fusse disposé à le donner à personne, et, en outre, tu auras ma force et mon appui. » Les hommes d’Arthur lui dirent alors : « Seigneur, retourne chez toi ; tu ne peux aller à la tête de ton armée, chercher des choses de si mince importance. » ― « Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd, » dit Arthur, « c’est à toi que revient cette mission : tu sais toutes les langues, tu sais même converser avec certains oiseaux et certains animaux. Eidoel, c’est à toi d’aller le chercher, lui qui est ton cousin, avec mes hommes. Kei et Bedwyr, j’ai bon espoir qu’une entreprise à laquelle vous prendrez part réussira : allez-y pour moi. » Ils marchèrent jusqu’à ce qu’ils rencontrèrent le merle de Cilgwri [418]. Gwrhyr lui demanda : « Au nom de Dieu, sais-tu quelque chose de Mabon, fils de Modron, qu’on a enlevé la troisième nuit de sa naissance d’entre sa mère et le mur ? » ― « Lorsque je vins ici pour la première fois, » dit le merle, « il y avait une enclume de forgeron, et je n’étais alors qu’un jeune oiseau ; il n’y a eu dessus d’autre travail que celui de mon bec chaque soir, et aujourd’hui elle est usée au point qu’il n’en reste pas la grosseur d’une noix : que Dieu me punisse si j’ai jamais rien entendu, au sujet de l’homme que vous demandez. Cependant ce que la justice commande et ce que je dois aux messagers d’Arthur, je le ferai. Il y a une race d’animaux que Dieu a formés avant moi : je vous guiderai jusqu’à eux. »

[419] Tlysseu, bijoux. Le sens primitif de tlws a été probablement celui de l’irlandais tlus, bétail ; de même alaf, richesses, irl. alam, troupeau. Dans le même ordre d’idées, le latin soldus (solidos) a donné au breton, saout (solt), vaches.

[420] Le récit qui suit a été reproduit modifié dans les Iolo mss., sous titre de Henaifion byd, « les anciens du monde » (p. 188). Dans cette version, l’aigle de Gwernabwy veut se remarier, mais à une veuve de son âge ; il songe à la chouette de Cwm Cawlwyd, mais il veut être fixé sur son âge. Il prend des renseignements auprès du cerf de Rhedynvre, en Gwent, du saumon de Llyn Llivon, du merle de Cilgwri, du crapaud de Cors Vochno, en Ceredigiawn (Cardiganshire), les créatures les plus vieilles du monde : la chouette était plus vieille qu’aucun d’eux. L’aigle put ainsi épouser la chouette sans se mésallier. Dafydd ab Gwilym fait allusion, dans un même passage, aux animaux de Gwernabwy, de Cilgwri et de Cwm Cawlwyd (p. 68 ; cf. Myv. arch., p. 340, col. 2). Il y a un endroit du nom de Cilgwri, dans le Flintshire (Lew. Glyn Cothi, p. 415, vers 20, note). Une traduction française du conte des Anciens du monde été publiée dans la Revue de Bretagne et de Vendée, année 1887, 1er semestre, p. 456-458, d’après la traduction anglaise. Ils allèrent jusqu’à l’endroit où se trouvait le cerf de Redynvre [421]. « Cerf de Redynvre, nous voici venus vers toi, nous messagers d’Arthur, parce que nous ne connaissons pas d’animal plus vieux que toi. Dis, sais-tu quelque chose au sujet de Mabon, fils de Modron, qui a été enlevé à sa mère la troisième nuit de sa naissance ? » ― « Lorsque je vins ici pour la première fois, » dit le cerf, « je n’avais qu’une dague [422] de chaque côté de la tête et il n’y avait ici d’autre arbre qu’un jeune plant de chêne ; il est devenu un chêne à cent branches ; le chêne est tombé et aujourd’hui ce n’est plus qu’une souche rougeâtre et pourrie : quoique je sois resté ici tout ce temps, je n’ai rien entendu au sujet de celui que vous demandez. Cependant, puisque vous êtes des messagers d’Arthur, je serai votre guide jusqu’auprès d’animaux que Dieu a formés avant moi. » Ils arrivèrent à l’endroit où était le hibou de Kwm Kawlwyt [423]. « Hibou de Kwm Kawlwyt, nous sommes des envoyés d’Arthur ; sais-tu quelque chose de Mabon, fils de Modron, qui a été enlevé à sa mère la troisième nuit de sa naissance ? » ― « Si je le savais, je le dirais. Quand je vins ici pour la première fois, la grande vallée que vous voyez était couverte de bois. Vint une race d’hommes qui le détruisit. Un second bois y poussa ; celui-ci est le troisième. Vous voyez mes ailes ? Ce ne sont plus que des moignons racornis : eh bien, depuis ce temps jusqu’aujourd’hui, je n’ai jamais entendu parler de l’homme que vous demandez. Je serai cependant votre guide, à vous, messagers d’Arthur, jusqu’auprès de l’animal le plus vieux de ce monde et celui qui circule le plus, l’aigle de Gwernabwy. » Gwrhyr dit : « Aigle de Gwernabwy, nous, messagers d’Arthur, nous sommes venus vers toi pour te demander si tu sais quelque chose au sujet de Mabon, fils de Modron qui a été enlevé à sa mère, la troisième nuit de sa naissance. » ― Il y a longtemps, » dit l’aigle, « que je suis venu ici ; à mon arrivée, il y avait une roche du sommet de laquelle je becquetais les astres chaque soir ; maintenant elle n’a plus qu’une palme de haut ; je suis ici depuis, et néanmoins je n’ai rien entendu au sujet de l’homme que vous demandez. Cependant, une fois j’allai chercher ma nourriture à Llynn Llyw ; arrivé à l’étang, j’enfonçai mes serres dans un saumon, pensant qu’en lui ma nourriture était assurée pour longtemps ; mais il m’entraîna dans les profondeurs, et ce ne fut qu’à grand’peine que je pus me débarrasser de lui. Moi et mes parents nous nous mimes en campagne avec ardeur pour tâcher de le mettre en pièces, mais il m’envoya des messagers pour s’arranger avec moi, et il vint en personne me livrer de son dos cinquante harponnées de chair. Si lui ne sait rien de ce que vous cherchez, je ne connais personne qui puisse le savoir. Je vous guiderai en tout cas jusqu’auprès de lui. » Quand ils furent arrivés à l’étang, l’aigle dit : « Saumon de Llynn Llyw, je suis venu vers toi avec les messagers d’Arthur pour te demander si tu sais quelque chose au sujet de Mabon, fils de Modron, qui a été enlevé à sa mère la troisième nuit de sa naissance. » ― « Tout ce que je sais, je vais vous le dire. Je remonte la rivière avec chaque marée jusqu’à l’angle des murs de Kaer Loyw [424], et c’est là que j’ai éprouvé le plus grand mal de ma vie. Pour vous en convaincre, que deux d’entre vous montent sur moi, un sur chaque épaule. »

[425] Gloucester. Gloyw (Glevum) devient, en composition avec le nom féminin Kaer, Loyw, suivant une règle commune à tous les dialectes brittoniques.


[426] Redyn, « fougère » ; bre « colline. » [427] La deuxième année, il pousse sur la tête du cerf deux petites pointes qu’on nomme dagues, mot qui répond exactement au gallois reidd, du latin radius (Vénerie, par Jacques du Foulloux, réimprimé à Angers, en 1844). L’écriture reit pour reid = reidd, vient d’une copie ou le t avait la valeur d’une spirante dentale sonore, comme c’est la règle dans le Livre noir ; cf. y byt = y hydd, Mab., p. 237, 1, 27.

[428] D’après lady Guest, il y a un lieu de ce nom dans le Carnarvonshire, et un autre dans le Carmarthenshire.



Kei et Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd montèrent sur les épaules du saumon ; ils arrivèrent auprès de la muraille du prisonnier, et ils entendirent de l’autre côté

des plaintes et des lamentations. « Quelle créature, » dit Gwrhyr, « se lamente dans cette demeure de pierre ? » ― « Hélas, homme, il a lieu de se lamenter celui qui est ici : c’est Mabon, fils de Modron [429]. Personne n’a été plus cruellement traité comme prisonnier que moi, pas même Lludd Llaw Ereint [430], ni Greit, fils d’Eri [431]. » ― « As-tu espoir d’être relâché pour or, pour argent, pour des richesses de ce monde, ou seulement par combat et bataille ? » ― « On ne peut s’attendre à m’avoir que par combat. » Ils s’en allèrent et retournèrent près d’Arthur auquel ils apprirent où Mabon, fils de Modron, était en prison. Arthur convoqua les guerriers de cette île et s’avança jusqu’à Kaer Loyw ou Mabon était emprisonné.

Kei et Bedwyr montèrent sur les épaules du poisson et, pendant que les soldats d’Arthur attaquaient le château, Kei fit une brèche aux parois de la prison et enleva le prisonnier sur son dos. Les hommes continuèrent à se battre et Arthur revint chez lui avec Mabon délivré.

Arthur dit : « Laquelle des autres merveilles vaut-il mieux maintenant chercher la première ? » ― « Il vaut mieux chercher d’abord les deux petits de Gast Rymhi. » ― « Sait-on de quel côté elle est ? » ― « Elle est, » dit quelqu’un, « à Aber Deugleddyv [432]. » Arthur se rendit à Aber Deugleddyv, chez Tringat, et lui demanda s’il avait entendu parler d’elle et comment elle était faite. « Elle est sous la forme d’une louve, » dit-il, « et ses deux petits voyagent avec elle. Elle a souvent tué de mon bétail. Elle est là-bas à Aber Cleddyv, dans une caverne. » Arthur envoya une partie de ses troupes par mer sur Prytwenn [433], son navire, et les autres par terre pourchasser la chienne.


[434] Mabon est un des trois prisonniers de très haut rang de l’île avec Llyr Lledyeith, et Gweir, fils de Geiryoedd. Il y en avait un plus illustre encore : Arthur, qui fut trois nuits en prison dans Kaer Oeth et Anoeth, trois nuits en prison par Gwenn Benndragon, trois nuits dans une prison enchantée sous Llech Echymeint. Ce fut Goreu qui les délivra (Triades Mab., p. 308, 9). Mabon est appelé dans le Livre noir le serviteur d’Uthir Pendragon (Skene, 51, 1). Dans les assemblées des bardes, on comprenait sous le nom de Cofanon darempryd Mabon ab Modron (les souvenirs voyageurs de Mabon ab Modron) les noms des bardes, poètes, savants de l’île et tout ce qui les concernait (Iolo mss. ; p. 206).

[435] Il y a eu confusion entre ce personnage et Llyr, comme je l’ai déjà dit. Je serais fort tenté de corriger Ludd en Nudd Llaw Ereint ou Nudd à la main d’argent, et de l’identifier avec le Núada à la main d’argent, roi des Túatha Dé Danann. Ce Núada avait perdu une main qui avait été remplacée par une main d’argent. Il fut tenu avec son peuple dans l’oppression par le Fomore Breas, qu’ils avaient pris pour champion, mais il finit par être délivré et remis sur le trône. Le sens d’Ereint est rendu certain par un passage de notre mabinogi sur le porc Grugyn Gwrych Ereint (Ereint = Argantios).

[436] « Ardent comme Greit, fils d’Eri », dit Kynddelw, poète du douzième siècle (Myv. arch., p. 165, col. 2) ; graid, actuellement a le sens d’ardent ; cf. vannetais greu, ardeur, gredus, ardent, zélé.

[437] Aber Deu Cleddyv, aujourd’hui, en anglais, Milford Haven, dans le comté de Pembroke ; Penvro en gallois). Il y avait un cantrev de Dangleddeu comprenant les cwmwd de Amgoed, Pennant et Evelvre (Powell, History of Wales, p. 18). Aber, comme en breton-armoricain signifie embouchure, flux. Le nom de Deu Gleddyv vient de deux rivières de cette région, portant toutes les deux le nom de Cleddyv.

[438] Pritwenn, « visage blanc, forme blanche ». Gaufrey de Monmouth et, naturellement, le Brut Tysilio, font de Prytwenn le bouclier d’Arthur (Gaufrei, IX, 4 ; Brut Tysilio, Myv. arch, p. 462). Taliesin (Skene, II,181, 15) y fait allusion : « Trois fois plein Prytwen nous y allâmes : nous ne revînmes que sept de Caer Sidi. » Le Liber Landav. mentionne un lieu appelé Messur Prytguen, p. 198 (La mesure de Prytguen).


Ils la cernèrent ainsi, elle et ses deux petits. Dieu, en faveur d’Arthur, les rendit à leur forme naturelle. Alors les soldats d’Arthur se dispersèrent un à un, deux à deux.

Un jour que Gwythyr, fils de Greidiawl franchissait une montagne, il entendit des lamentations et des cris qui faisaient peine. Il se précipita de ce côté. Arrivé sur les lieux, il dégaina son épée et coupa la butte aux fourmis au niveau du sol, délivrant ainsi les fourmis du feu : « Emporte avec toi, » dirent-elles, « la bénédiction de Dieu et la nôtre. Un service que pas un homme ne pourrait te rendre, nous, nous te le rendrons. » Elles ne tardèrent pas à arriver avec les neuf setiers de graine de lin qu’avait réclamés Yspaddaden Penkawr à Kulhwch, parfaitement mesurés, sans qu’il y manquât autre chose qu’un seul grain, et encore avant la nuit, fut-il apporté par la fourmi boiteuse.

Un jour que Kei et Bedwyr étaient assis au sommet du Pumlummon [439] sur Karn Gwylathyr, au milieu du plus grand vent du monde, en regardant autour d’eux, ils aperçurent au loin, sur la droite, une grande fumée que le vent ne faisait pas le moins du monde dévier. « Par la main de mon ami, » dit Kei, « voilà là-bas le feu d’un aventurier [440]. » Ils se dirigèrent en toute hâte du côté de la fumée et s’en approchèrent avec beaucoup de précaution, de loin, jusqu’à ce qu’ils aperçurent Dillus Varvawc en train de cuire un sanglier. « Voilà le plus grand des aventuriers, » dit Kei, « il a toujours échappé à Arthur. » ― « Le connais-tu ? » dit Bedwyr.

― « Je le connais : c’est Dillus Varvawc. Il n’y a pas au monde de laisse à pouvoir tenir Drutwyn, le petit chien de Greit, fils d’Eri, si ce n’est une laisse faite de la barbe de l’homme que tu vois là-bas ; et elle ne servira de rien, si on ne l’extrait poil par poil de sa barbe avec des pinces de bois pendant qu’il sera en vie ; s’il était mort, le poil serait cassant. » ― « Qu’allons-nous faire alors ? » ― « Laissons-le manger tout son saoûl de cette viande ; il dormira après. » Pendant qu’il mangeait, ils firent des pinces de bois. Quand Kei fut sûr qu’il dormait, il creusa sous ses pieds un trou le plus grand du monde, lui donna un coup d’une force inimaginable et le pressa dans le trou jusqu’à ce qu’ils eurent achevé de lui enlever toute sa barbe avec les pinces de bois.

Puis ils le tuèrent net et s’en allèrent tous deux jusqu’à Kelli Wic en Kernyw avec la laisse faite de la barbe de Dillus Varvawc qu’ils mirent dans la main d’Arthur. Arthur chanta alors cet englyn

Kei a fait une laisse

de la barbe de Dillus, fils d’Eurei :

s’il avait été bien, c’eût été ta mort.

Kei en fut tellement irrité que les guerriers de cette île eurent grand peine à mettre la paix entre lui et Arthur. Jamais, dans la suite, qu’Arthur eut besoin de secours ou qu’on tuât ses hommes, Kei ne se jeta dans le danger avec lui.

Arthur dit alors : « Laquelle des autres merveilles vaut-il mieux chercher d’abord ? » ― « Il vaut mieux chercher Drutwyn le petit chien de Greit, fils d’Eri. » Peu de temps avant, Kreiddylat, la fille de Lludd Llaw Ereint, s’en était allée comme femme avec Gwythyr, fils de Greidiawl. Avant qu’il ne couchât avec elle, survint Gwynn, fils de Nudd qui l’enleva de force. Gwythyr, fils de Greidiawl, rassembla une armée et vint se battre avec Gwynn fils de Nudd. Celui-ci fut victorieux et s’empara de Greit, fils d’Eri, de Glinneu, fils de Taran [441], de Gwrgwst Letlwm [442], de Dyvnarth, son fils.


[443] Pumlummon, aujourd’hui appelé le Plimlimmon, montagne du comté de Cardigan, sur les confins du comté de Montgomery, où prennent leur source la Severn, la Wye et la Rheidol, appelées pour ce motif les trois sœurs.

[444] Un proverbe gallois dit : arwydd drwc mwc yn diffeith, « signe de mal que la fumée dans la solitude » (Y Cymmrodor, VII, p. 139, l. 1).

[445] Taran, « tonnerre ».

[446] Llet-lwm, « à moitié nu ».


Il prit aussi Penn, fils de Nethawe, Nwython <ref> 1</ref> et Kyledyr Wyllt, son fils. Il tua Nwython, mit son cœur à nu et força Kyledyr à manger le cœur de son père [447] : c’est à la suite de cela que Kyledyr devint fou. Arthur, à ces nouvelles, se rendit au Nord, fit venir Gwynn, fils de Nudd, lui fit relâcher les nobles captifs et rétablit la paix entre lui et Gwythyr, fils de Greidiawl, à cette condition que la jeune fille resterait dans la maison de son père sans qu’aucun des deux rivaux usât d’elle : chaque premier jour de mai, jusqu’au jour du jugement, il y aurait bataille entre Gwynn et Gwythyr, et celui qui serait vainqueur le jour du jugement prendrait la jeune fille. À la suite de l’accord qui intervint entre ces princes, Arthur obtint Gwynn Mygdwnn, le cheval de Gweddw, et la laisse de Kwrs Kant Ewin.

Arthur se rendit ensuite au Llydaw (Armorique) avec Mabon, fils de Mellt et Gware Gwallt Euryn pour chercher les deux chiens de Glythmyr Lledewic (l’Armoricain).

Après les avoir pris, Arthur alla jusque dans l’ouest d’Iwerddon pour chercher Gwrgi Severi, en compagnie d’Odgar, fils d’Aedd, roi d’Iverddon. Puis, il se rendit au nord où il s’empara de Kyledyr Wyllt. Celui-ci alla à la recherche d’Yskithyrwynn Pennbeidd, ainsi que Mabon, fils de Mellt [448] tenant en main les deux chiens de Glythvyr Lledewic [449] et Drutwynn le petit chien de Greit, fils d’Eri. Arthur prit part en personne à la poursuite, tenant son chien Kavall. Kaw de Prydein monta sur Lamrei la jument d’Arthur, arriva le premier sur la bête aux abois [450] et, s’armant d’une forte cognée, vaillamment, sans hésiter, il fondit sur le sanglier, lui fendit la tête en deux et s’empara de sa défense. Ce ne furent pas les chiens qu’avait indiqués Yspaddaden Penkawr à Kulhwch qui mirent en pièces le sanglier, mais bien Kavall lui-même, le chien d’Arthur.

Après avoir tué Yskithyrwynn Pennbeidd, Arthur et ses troupes se rendirent à Kelli Wic en Kernyw.


[451] Dans le Gwarchan Maelderw attribué à Aneurin (Four ancient books of Wales, II, p. 103, vers 29, 31), il est question d’un fils de Nwython appelé Neim ? Nwython est peut-être le même nom que le nom picte Naiton, nom d’un roi vivant au commencement du huitième siècle (Bède, Hist. eccl., V, 21). Ce Naiton est le même personnage que le Nechtan des annales irlandaises (V. Connor, Rerum hibernicarum script., IV, p. 236). Naithon serait-il la forme picte de Nechtan, et Nwython la forme brittonne ?

[452] L’histoire, si importante pour les mœurs galloises du onzième siècle, de Gruffudd ab Cynan, cite un fait d’anthropophagie à la charge d’un Irlandais. Le compétiteur de Gruffudd au trône de Gwynedd ou Nord-Galles, fut tué à a bataille de Carno, et un des auxiliaires de Gruffudd, l’Irlandais Gwrcharis ou Gwrcharci en usa avec lui comme avec un porc, en fit du bacwn (porc salé et desséché) (Myv. arch., p. 727, col. 2).

[453] Mabon ab Mellt. Ce personnage apparaît à côté d’Arthur dans le Livre noir (Skene, 31, 11) : Mabon am Mellt.

[454] Lledewic, « l’Armoricain, » dérivé de Llydaw, plus anciennement Litaw, nom gallois de l’Armorique gauloise, et qui, comme le mot Armorique, ne désigne plus que la péninsule armoricaine (v. J. Loth, De Vocis Aremoricae forma atque significatione. Paris, Picard, 1883). Glythvyr : Glythmyr, avec m intact, représente une graphie du vieux-gallois.

[455] V. p 159, note 1. Taliesin mentionne Llamrei (Skene, II, p. 176, 27).


De là, il envoya Menw, fils de Teirgwaedd, pour voir si les bijoux étaient entre les deux oreilles du Twrch Trwyth, car il était inutile qu’il allât se battre avec lui s’il n’avait plus sur lui les bijoux. Il était sur en tout cas que lui était là : il venait de dévaster le tiers d’Iwerddon. Menw alla à sa recherche et l’aperçut à Esgeir Oervel en Iwerddon. Menw se transforma en oiseau, descendit au-dessus de sa bauge et chercha à enlever un des bijoux, mais il n’eut qu’un de ses crins. Le sanglier se leva vigoureusement, résolument, et se démena si bien qu’un peu de son venin atteignit Menw : à partir de là, celui-ci ne fut jamais bien.

Arthur envoya alors un messager à Odgar, fils d’Aedd, roi d’Iwerddon, pour lui demander le chaudron de Diwrnach le Gwyddel, son intendant. Odgar pria Diwrnach de le donner : « Dieu sait, » répondit Diwrnach, « que, quand même il se trouverait bien de jeter un seul regard sur le chaudron, il ne l’obtiendrait pas. » Le messager d’Arthur revint d’Iwerddon avec ce refus. Arthur partit avec une troupe légère sur Prytwenn, son navire. Aussitôt arrivés en Iwerddon, ils se rendirent chez Diwrnach le Gwyddel. Les gens d’Odgar purent se rendre compte de leur nombre. Quand ils eurent suffisamment bu et mangé, Arthur demanda le chaudron. Diwrnach répondit que s’il l’avait donné à quelqu’un, c’eût été sur l’invitation d’Odgar, roi d’Iwerddon. Sur ce refus, Bedwyr se leva, saisit le chaudron et le mit sur les épaules de Hygwydd [456], serviteur d’Arthur, frère par sa mère de Kachamwri, serviteur d’Arthur également : sa fonction en tout temps était de porter le chaudron d’Arthur et d’allumer le feu dessous. Llenlleawc le Gwyddel saisit Kaletvwlch, la fit tournoyer et tua Diwrnach et tous ses gens. Les armées d’Iwerddon accoururent pour leur livrer bataille. Après les avoir mises en complète déroute, Arthur et ses gens partirent aussitôt, à leur vue, sur leur navire, emportant le chaudron plein de monnaie d’Iwerddon. Ils descendirent chez Llwydeu, fils de Kelcoet,à Porth Kerddin [457] en Dyvet. C’est là qu’est la mesure du chaudron.

Arthur réunit alors tout ce qu’il y avait de combattants dans les trois îles de Bretagne, les trois îles adjacentes [458], en France, en Llydaw, en Normandie, et dans le pays de l’Eté [459], tout ce qu’il y avait de fantassins d’élite et de cavaliers en renom. Il partit avec toutes ces troupes pour l’Iwerddon. Il y eut grande crainte et tremblement à son approche. Lorsqu’il fut descendu à terre, les saints d’Iwerddon vinrent lui demander sa protection. Il la leur donna, et eux lui donnèrent leur bénédiction. Les hommes d’Iwerddon se rendirent auprès de lui et lui présentèrent un tribut de vivres. Il s’avança jusqu’à Esgeir Oervel [460], où se trouvait le Twrch Trwyth avec ses sept pourceaux. On lança sur eux les chiens de toutes parts. Les Gwyddyl (les Irlandais) se battirent avec lui ce jour-là jusqu’au soir, et il n’en dévasta pas moins la cinquième partie d’Iwerddon. Le lendemain, la famille d’Arthur se battit avec lui ; mais ils n’en eurent que des coups et ne remportèrent aucun avantage. Le troisième jour, Arthur, en personne, engagea contre lui un combat qui dura neuf nuits et neuf jours ; mais il ne réussit qu’à tuer un de ses pourceaux. Les hommes d’Arthur lui demandèrent alors ce qu’était cette laie. Il leur dit que c’était un roi que Dieu avait ainsi métamorphosé pour ses péchés.

Arthur envoya Gwrhyr Gwalstawt Ieithoedd pour chercher à s’entretenir avec l’animal. Gwrhyr s’en alla sous la forme d’un oiseau et descendit au-dessus de la bauge où il se trouvait avec ses sept pourceaux.


[461] Hygwydd, signifie « qui tombe facilement, » mais c’est une graphie pour Hywydd (qui sait bien) : Chwedlau y Doelhion, Iolo mss., p. 255.

[462] Porth Kerddin, peut-être Porthmawr, près Saint-David’s Head, dans le comté de Pembroke, d’après lady Guest. D’après Wade-Evans (Arch. Cambrensis, 1904), ce serait Moylgrove en Pembroke.

[463] Voir page 223, note 1.

[464] Gwlad yr hav, « le pays de l’été. » Une triade fait venir les Kymry ou Bretons du pays de l’été ou Deffrobani, « c’est-à-dire là où est Constantinople » (Myv. arch., 400, 4). Deffrobani est probablement pour Teffrobani, et semble être l’île plus ou moins fabuleuse de Taprobane, dont parlent les géographes anciens. Le pays de l’été désigne aussi tout simplement le Somersetshire (Iolo mss, p. 86).

[465] V. plus haut, p. 254, note 2. « Par celui qui t’a mis sous cette forme, » lui dit-il, « si toi et les tiens pouvez parler, je demande qu’un de vous vienne s’entretenir avec Arthur. » Grugyn Gwrych Ereint [466], dont les soies étaient comme des fils d’argent, à tel point qu’on le suivait à leur scintillement à travers bois ou champs, lui fit cette réponse : « Par celui qui nous a mis sous cette forme, nous n’en ferons rien ; nous ne parlerons pas à Arthur. Dieu nous a fait déjà assez de mal en nous donnant cette forme, sans que vous veniez vous battre avec nous. » ― « Apprenez qu’Arthur se bat avec vous pour le peigne, le rasoir et les ciseaux qui se trouvent entre les deux oreilles de Twrch Trwyth. » -.« On n’aura ces joyaux, » répondit Grugyn, « qu’avec sa vie. Demain matin, nous partirons d’ici ; nous irons au pays d’Arthur et nous lui ferons le plus de mal que nous pourrons. » Les pourceaux partirent par mer dans la direction de Kymry. Arthur s’embarqua sur son navire Prytwen avec ses soldats, ses chevaux et ses chiens et, en un clin d’œil, ils furent en vue. Le Twrch Trwyth aborda à Porth Kleis [467] en Dyvet. Arthur, lui, cette nuit-là, s’avança jusqu’à Mynyw [468]. On lui apprit le lendemain qu’ils étaient passés. Il les atteignit en train de tuer les bêtes à cornes de Kynnwas Kwrr y [469] Vagyl, après avoir déjà détruit tout ce qu’il y avait d’hommes et d’animaux à Deu Gleddyv.


[470] Gwrych Ereint, « aux crins d’argent ».

[471] Porth Cleis, petit port du comté de Pembroke, à l’estuaire de l’Alun.

[472] Miynyw ou Saint-David’s (Pembrokeskire).

[473] À la crosse anguleuse (anguleux son bâton).


À l’arrivée d’Arthur, le Twrch Trwyth s’enfuit jusqu’à Presseleu [474]. Arthur s’y rendit avec ses troupes. Il envoya ses gens à leur poursuite : Eli et Trachmyr, lui-même tenant en main Drutwyn, le petit chien de Greit fils d’Eri ; Gwarthegyt [475], fils de Kaw, dans un autre coin, tenait les deux chiens de Glythmyr Lledewïc ; Bedwyr, lui, tenait en laisse Kavall, le chien d’Arthur. Arthur rangea toutes ses troupes autour de Glynn Nyver [476]. Vinrent aussi les trois fils de Kleddyv Divwlch, qui s’étaient acquis beaucoup de gloire [477] en tuant Ysgithyrwynn Penbeidd. Le porc partit de Glynn Nyver et s’arrêta à Kwm Kerwyn [478] ; il y tua quatre des champions d’Arthur : Gwarthegyt, fils de Kaw ; Tarawc d’Allt Clwyt [479] ; Reidwn, fils d’Eri Adver ; Iscovan Hael.


[480] Presseleu, v. p. 105, note.

[481] Gwarthegyt, de gwarthec, « vaches ».

[482] Glynn Nyver. À l’extrémité des Presseley-Mountains naît la Nyver auj. Nevern. Le Glynn est une vallée étroite garnie de bois. On entend aussi souvent par là une vallée étroite et profonde traversée par un cours d’eau. Glen, en breton arm. moyen, a la sens de pays, terre, monde (cf. vallée de larmes) par opposition au ciel.

[483] Ils ne paraissent pas dans cette chasse. Il y a là, comme en divers endroits, une lacune.

[484] Cwm Kerwyn, « la combe de la cuve » (Cwm, « vallon de forme concave » ) ; contre le pic le plus élevé des monts de Preselly, Preselly Top, est le vallon de Cwm Cerwyn ; à deux milles de là se dresse le sommet de Carn Arthur (lady Guest).

[485] Allt-Clwyt ; allt, « colline, roche ». On a confondu la Clwyd, rivière du nord du pays de Galles, et la Clut, à l’époque latine Clota, qui a donné son nom au royaume des Bretons du nord ou de Strat-Clut, « vallée de la Clut », anglais Clyde. L’Al-Clut ou Petra Clotae de Bède, est, probablement, pour Alt-Clut, « la colline rocheuse de la Clut » (Dumbarton). Cependant, cf. irl all, falaise, roc escarpé.


Puis il rendit les abois, et tua Gwydre, fils d’Arthur ; Garselit le Gwyddel ; Glew, fils d’Yscawt, et Iscawyn, fils de Panon ; mais il fut lui-même blessé.

Le lendemain matin, vers le jour, quelques-uns des hommes d’Arthur l’atteignirent. C’est alors qu’il tua Huandaw, Gogigwc, Pennpingon, les trois serviteurs de Glewlwyt Gavaelvawr, si bien que celui-ci n’avait plus au monde aucun serviteur, à l’exception du seul Llaesgenym, dont personne n’eut jamais à se louer. Il tua, en outre, beaucoup d’hommes du pays, entre autres Gwlydyn Saer (le charpentier), le chef des charpentiers d’Arthur. Arthur lui-même l’atteignit à Pelumyawc [486]. Après y avoir tué Madawc, fils de Teithyon ; Gwynn, fils de Tringat fils de Nevet, et Eiryawn Pennlloran, le porc alla à Aber Tywi [487]. Là, il rendit les abois et tua Kynlas [488], fils de Kynan, et Gwilenhin, roi de France.

Il poussa ensuite jusqu’à Glynn Ystu [489]. Là, hommes et chiens perdirent sa trace. Arthur fit venir Gwynn, fils de Nudd, et lui demanda s’il savait quelque chose au sujet du Twrch Trwyth. Il répondit qu’il ne savait rien.

Tous les chasseurs se mirent alors à la poursuite du porc jusqu’à Dyffrynn Llychwr [490]. Grugyn Gwallt Ereint et Llwyddawc Govynnyat leur tinrent tête et les tuèrent tous, à l’exception d’un seul qui leur échappa. Arthur et ses troupes arrivèrent à l’endroit où étaient Grugyn et Llwyddawc, et lancèrent sur eux absolument tous les chiens qui avaient été désignés. Aussitôt que les sangliers rendirent les abois, le Twrch Trwyth accourut à leur secours : depuis qu’ils avaient passé la mer d’Iwerddon, il ne s’étaient pas trouvé avec eux. Hommes et chiens tombèrent avec lui. Il se mit en marche et parvint à Mynydd Amanw [491]. Là, une de ses truies fut tuée.


[492] Pelunyawc (The Bruts, p. 335) ; pour Peuliniawc ? Ce district devait comprendre une partie des paroisses actuelles de Whitland et de Landysilio (J. Rhys, Celt. Folkl., II, p. 512, 513).

[493] Aber Tywi, l’embouchure de la Tywi ou Towy, dans le comté de Carmarthen, le Tobios de Ptolémée. C’est le nom d’un lieu anciennement habité aujourd’hui disparu dans le voisinage de l’embouchure entre les rivières Tywi ou Towy et la Gwendraeth.

[494] Kynlas = Cunoglassos, nom d’un roi breton dans l’Epistola Gildae (éd. Petrie, Mon. Hist. brit., 17), armor. Cunglas (Cart. de Redon) ; Kynan, en breton arm. Conan.

[495] Peut-être pour Clyn ystun ; Clyn ystyn est le nom d’une ferme entre Carmarthen et le confluent de l’Amman et du Llychwr (Celt. Folkl., II, p. 513).

[496] Dyffrynn Llychwr, écrit aujourd’hui Loughor, sur les confins des comtés de Carmarthen et de Glamorgan. Dyffrynn est une vallée arrosée par une rivière.

[497] Mynydd Amanw ou la montagne d’Amanw, désigne les hauteurs formant barrière naturelle entre les comtés de Brecon et de Carmarthen. L’Amman est un affluent du Llychwr. On trouve sur ces monts un Gwely Arthur, ou lit d’Arthur. Près de l’endroit où la rivière Amman prend sa source est une butte appelée Twyn y Moch, et au pied se trouve Llwyn y Moch, « le buisson aux porcs. » La rivière Twrch (porc) est tout près. Elle se jette dans la Tawy, au-dessous d’Ystradgynlais (lady Guest).


On lui rendit vie pour vie. Twrch Lawin succomba également, ainsi qu’un autre des sangliers du nom de Gwys [498]. Il s’avança jusqu’à Dyffynn Amanw [499], où furent tués Banw et Benwic [500]. Il n’y eut à s’échapper de là vivants, de tous ses pourceaux que Grugyn Gwallt Ereint et Llwyddawc Govynnyat. Ils s’enfuirent de là jusqu’à Lwch Ewin [501], où Arthur atteignit le sanglier. Il rendit les abois et tua Echel Vorddwyt Twll, Garwyli, fils de Gwyddawc Gwyr [502], et beaucoup d’hommes et de chiens. Ils poursuivirent leur course jusqu’à Llwch Tawy [503], où Grugyn Gwallt Ereint se sépara d’eux. Il se rendit d’abord à Din Tywi [504], puis en Keredigyawn [505],


[506] Gwys signifie truie (bret. gwes).

[507] Auj. Dyffryn Amman ou vallée de l’Amman.

[508] Banw, « truie » ; Bennwic est un diminutif.

[509] Auj. Llwch, ferme de la paroisse de Bettws (Celt. Folk., t. I, p. 515).

[510] Gwyddawc Gwyr, peut-être Gwyddawc de Gwyr, en anglais, Gower, partie occidentale du comté de Gamorgan

[511] Llwch Tawy, l’étang de la Tawy, rivière de Glamorgan. À l’embouchure est la ville d’Abertawy, en anglais, Swansea. La position est précisée par le nom actuel de Ynys Pen Llwch, Ville du bout de l’étang (ibid.).

[512] Din Tywi ; din, « citadelle, lieu fortifié ». Comme il y a plusieurs lieux appelés Dinas sur le cours du Tywi, il est difficile d’identifier ce nom.

[513] Keredigiawn, le comté de Cardigan. D’après la légende galloise, ce nom vient de Ceretic, un des fils du célèbre Cunedda.

suivi d’Eli et Trachmyr et de beaucoup d’autres, puis à Garth Grugyn [514], où il fut tué. Llwyddawc Govynniat se précipita au milieu d’eux, tua Ruddvyw Rys et beaucoup d’autres et s’enfuit jusqu’à Ystrad Yw [515], où les hommes du Llydaw se rencontrèrent avec lui. Il tua Hirpeissawc, roi du Llydaw, Llygatrudd Emys et Gwrbothw, oncles d’Arthur, frères de sa mère, et il fut tué lui-même.

Le Twrch Trwyth, lui, passa entre Tawy et Euyas [516]. Arthur convoqua les hommes de Kernyw et de Dyvneint contre lui. à l’embouchure de la Havren [517], et dit aux guerriers de cette île : « Twrch Trwyth a tué bon nombre de mes gens. J’en jure par la vaillance de mes hommes, il n’ira pas en Kernyw, moi vivant. Pour moi, je ne le poursuivrai pas plus longtemps, je lui opposerai vie pour vie. Vous, voyez ce que vous avez à faire. » Son plan fut d’envoyer un parti de cavaliers avec des chiens de cette île jusqu’à Euyas pour le rabattre jusqu’à la Havren ; là, il lui barrerait le passage avec tout ce qu’il y avait de guerriers éprouvés dans l’île, et on le pousserait irrésistiblement dans le fleuve. Mabon, fils de Modron, le suivit, jusqu’à la Havren sur Gwynn Mygdwnn [518], le cheval de Gweddw, ainsi que Goreu, fils de Kustennin, Menw, fils de Teirgwaedd, entre Llynn Lliwan [519] et Aber Gwy [520]. Arthur tomba sur lui avec les champions de l’île de Bretagne. Osla Gyllellvawr, Manawyddan, fils de Llyr, Kachmwri, serviteur d’Arthur, Gwyngelli, se jetèrent tous sur lui, le saisirent d’abord par les pieds et le plongèrent dans la Havren, au point qu’il avait de l’eau par dessus la tête. Mabon, fils de Modron, d’un côté, éperonna son étalon et enleva le rasoir. De l’autre côté, Kyledyr Wyllt, monté sur un autre étalon, entra dans la Havren et s’empara des ciseaux. Mais avant qu’on eût pu enlever le peigne, les pieds du porc touchèrent terre et dès lors ni chien, ni homme, ni cheval ne purent le suivre avant qu’il ne fut arrivé en Kernyw.

Ils eurent plus de mal à tirer les deux guerriers de l’eau et à les empêcher de se noyer qu’ils n’en avaient eu en essayant de lui enlever les joyaux. Kachmwri, au moment où on le tirait de l’eau, était entraîné dans l’abîme par deux meules de moulin. Osla Gytlellvawr, en courant après le porc, avait laissé tomber son couteau de sa gaine et l’avait, perdu ; la gaine s’était remplie d’eau, et, comme on le tirait dehors, elle l’entraînait au fond.

Arthur et ses troupes finirent par atteindre le sanglier en Kernyw. Ce n’était qu’un jeu ce qu’on avait eu de mal jusque-là en comparaison de ce qu’il en fallut pour lui enlever le peigne. Enfin, à force de sacrifices, on le lui enleva. Puis on le chassa de Kernyw et on le poussa tout droit à la mer. On ne sut jamais où il était allé avec Anet et Aethlem. Quant à Arthur il retourna à Kelliwic en Kernyw pour se baigner et se reposer de ses fatigues. « Reste-t-il encore, » dit Arthur, « une des merveilles à nous procurer ? » ― « Oui, » dit un des hommes, « le sang de la sorcière Gorddu, fille de la sorcière Gorwenn, de Penn Nant Govut, sur les confins de l’enfer. » Arthur partit pour le Nord et arriva à la caverne de la sorcière. Gwynn, fils de Nudd, et Gwythyr, fils de Greidiawl, lui conseillèrent d’envoyer Kachmwri et son frère Hygwydd se battre avec elle. Comme ils entraient dans la caverne, la sorcière les prévint, saisit Hygwydd par les cheveux, et le jeta sous elle sur le sol. Kachmwri, à son tour, l’empoigna par les cheveux et la tira de dessus Hygwydd. Elle se retourna contre Kachmwri, les accabla de coups et les jeta dehors à coups de pieds et à coups de poings. Arthur devint furieux en voyant ses serviteurs presque tués, et voulut pénétrer dans la caverne. « Il ne serait ni convenable, ni agréable pour nous, » lui dirent Gwynn et Gwythyr, » de te voir te prendre aux cheveux avec la sorcière. Envoie Hir Amren et Hir Eiddyl dans la caverne. » Ils y allèrent. Si les deux premiers avaient eu du mal, ces deux-ci en eurent encore bien plus, au point qu’on ne savait si aucun des quatre aurait pu sortir, s’ils ne s’étaient jetés tous quatre sur Lamrei, la jument d’Arthur. Arthur, alors, se précipita sur la porte de la caverne et, du seuil, frappa la sorcière avec son couteau Karnwennan ; il l’atteignit au milieu du corps et en fit deux tronçons [521]. Kaw de Prydein recueillit le sang de la sorcière et le garda.

Alors Kulhwch, accompagné de Goreu, fils de Kustennin, et de tous ceux qui voulaient du mal à Yspaddaden Penkawr, retournèrent à sa cour avec les objets merveilleux. Kaw de Prydein vint le raser et lui enleva chair et peau jusqu’à l’os, d’une oreille à l’autre entièrement. « Es-tu rasé, homme ? » lui dit Kulhwch.

― « Je le suis, » dit-il.

― « Ta fille est-elle à moi maintenant ? » ― « Elle est à toi, et tu n’as pas besoin de m’en remercier ; remercie Arthur qui te l’a procurée. De mon plein gré, tu ne l’aurais jamais eue. Le moment est venu pour moi de perdre la vie. » Alors Goreu, fils de Kustennin, le saisit par les cheveux, le traîna après lui jusqu’au donjon, lui coupa la tête et la plaça sur un poteau dans la cour. Puis il prit possession du château et de ses domaines. Cette nuit-là, Kulhwch coucha avec Olwen, et il n’eut pas d’autre femme pendant toute sa vie. Les autres se dispersèrent pour rentrer chacun dans son pays. C’est ainsi que Kulhwch eut Olwen, la fille d’Yspaddaden Pennkawr.




  1. Goleuddydd, « jour brillant ; » cf. breton gouloudeiz. Elle a été mise, par les hagiographes gallois, au nombre des saintes, et il y avait une église sous son nom à Llanysgin, en Gwent (Iolo mss., p. 120).
  2. Dans les Achau saint ynys Prydain (Myv., p. 431, col. 2) ou Généalogies des saints de l’île de Bretagne, Amlawdd Wledic est donné comme le père de Tywanwedd ou Dwywanwedd, qui fut mère de plusieurs saints, notamment de Tyvrydoc, honoré à Llandyvrydocen Mon (Anglesey). Tyvrydoc a donné son nom, en Armorique, à Saint-Evarzec, arrondissement de Quimper, au XIIe siècle, Sent-Defridec, au XIVe Saint-Teffredeuc et Saint-Effredeuc. Le Brut Tysilio a fait de Eigr, l’Igerna de Gaufrei de Montmouth, et d’après lui, la mère d’Arthur, une fille d’Amlawd Wledic (Myv. arch., 2ème éd. p, 481, col. 1). Ce détail ne se trouve point dans Gaufrei ; il est reproduit par un manuscrit que la Myv., déclare vieux de cinq cents ans, p. 587, et qui est une version galloise de Gaufrei (Eigyr verch Amlawd wledic ; ce manuscrit donne aussi Gorloes, forme plus correcte et plus cornique que Gwrlais).
  3. Kulhwch. C’est une de ces étymologies fantaisistes, comme on en rencontre de temps en temps dans les Mabinogion, et, en général, au moyen âge. L’auteur, décomposant le mot en kul et en hwch, a vu dans kul le mot cil, « cachette, retraite, coin, ou cul étroit, » et dans hwch le mot hwch, aujourd’hui truie, mais autrefois porc en général (cf. arm., houch, « porc »). Le nom du Kulhwch est conservé dans Tref Culhwch, près de Pencaer en Pembrokeshire (Eg. Phillimore, Owen’s Pembrok., 72. b. 322, note).
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  7. Vieille sorcière dans le sens figuré du mot (cf. vieille fée). Le mot breton groac’h a tous les sens du gallois gwrach.
  8. Tout ce passage se trouve dans la version galloise des Sept Sages de Rome des Selections from Hengwrt mss. II, p. 301, v. J. Loth, Revue Celtique, XXIII, p. 349.
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  373. Le mot propre est llechwaew, qui est répété à trois reprises. Il est difficile de supposer une erreur du scribe pour lluchwaew, « lance de jet, javelot. » Llech signifie pierre plate. Or, tout justement, il existait en Irlande une arme de ce genre, et portant à peu près le même nom : lia laimhe ou pierre plate de main. Elle est décrite dans un poème irlandais avec la plus grande précision : c’était une pierre qui allait en se rétrécissant, plate et très aiguë ; elle se cachait souvent dans le creux du bouclier (O’Curry, On the manners, II, p. 287, 263, 261 ; I, p. 338, §456). Le souvenir de cette arme préhistorique est conservé peut-être dans des noms propres armoricains, en Maen, « pierre » : Maen-uuethen, « qui combat avec la pierre ; Maen-finit, « qui lance la pierre ; » Maen-uuoret, « qui défend avec la pierre » ; Maen-uuolou, « pierre brillante », etc., (Cart. de Redon). Quant aux armes empoisonnées, il en est souvent fait mention dans les poèmes irlandais (O’Curry, On the manners, III, p. 131). Le mot llechwaew se retrouve une seule fois en dehors de Kulhwch et Olwen dans les Mabinogion, dans le roman de Peredur ab Evrawc.
  374. Mot à mot : après avoir fait passer un peigne de valeur dans leurs cheveux. Le peigne, au moyen âge, était un objet noble, souvent une véritable œuvre d’art. Dans Les Romans de la Table Ronde, on voit une dame envoyer à son amant un riche peigne garni de ses cheveux (Paulin Paris, Les Romans de la Table Ronde, IV, notes) ; v. nos notes critiques. [où Loth justifie sa traduction en critiquant celle de Lady Guest].
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  377. Les trois principaux bœufs de l’île étaient : Melyn Gwanwyn (var. Gwaynhwyn), Gwyneu, le bœuf de Gwlwlyd, et le grand bœuf Brych « tacheté » (Myv. arch., p. 394, 10). Le texte ici est altéré. Gwineu, « brun, » est dans le Mab. une épithète à Gwlwlyd, et, dans la Triade, le nom d’un des bœufs.
  378. Compagnons dans le sens étymologique, plus transparent dans le sg. compain. Cyd-preiniawc signifie proprement qui mange avec (preiniawc est dérivé de prein, du latin prandium : v, notes critiques).
  379. Melyn, « jaune, blond ; » gwanwyn, « printemps ; » melyn y gwanwyn est aussi le nom d’une plante : V. la note 2. Le bœuf Brych était sans doute bien connu dans la mythologie galloise d’après ce passage de Taliesin : « ils ne connaissent pas, eux, le bœuf Brych qui a cent vingt nœuds ( ?) dans son collier » (Skene, Four anc. books, 182. vers 13).
  380. Le premier essaim, qui est en effet le plus vigoureux, est tarifé à un plus haut prix dans les Lois (Ancient laws, 1, p. 284). L’expression sans abeilles est très juste ; si on tolère en effet la ponte et le séjour des abeilles dans les rayons, une fois le premier miel fait, le miel perd en qualité.
  381. Bragodi est pris ici dans un sens général. Il ne s’agit probablement pas spécialement de la boisson appelée bragawd, dont les Anglais ont fait bragget, boisson faite de malt, d’eau, de miel et de quelques épices. Les autres boissons des Bretons étaient le cwrv (cwryv et cwrwv avec une voyelle irrationnelle, auj. cwrw = curmen), c’est-à-dire de la bière, et le medd, moyen breton mez « hydromel » (d’où l’armoricain mezo, gall. meddw, « ivre » ). Dans un passage des Lois qui traite de la quantité de liqueur due à certains officiers de la cour, il est dit qu’ils ont droit à une mesure pleine de bière, à une mesure remplie à moitié de bragawd, et à une mesure remplie au tiers de medd (Ancient laws, I, p. 44).
  382. Le penllad, qui a aussi le sens de souverain bien, source de bénédictions, parait avoir ici un sens plus matériel ; d’après Davies. c’est une mesure de deux llad, mesure équivalant à douze boisseaux d’avoine. Le penllad vaudrait donc vingt-quatre boisseaux (v. notes critiques). Le mot Kib (du latin cupa), vase, coupe, a dans les Lois le sens propre de demi-boisseau ou mesure de quatre gallons (le gallon vaut 4 litres 54 ).
  383. D’après un manuscrit déjà cité sur les treize joyaux de l’île de Bretagne, le panier de Gwyddno avait cette propriété que si on y mettait a nourriture d’un homme, lorsqu’on le rouvrait, il présentait la nourriture de cent (lady Guest, Mab.,II, p.354). Gwyddno est un personnage célèbre. Seithynin l’ivrogne, roi de Dyvet, dans un jour d’ivresse, lâcha la mer sur les Etats de Gwyddno Garanhir, c’est-à-dire sur Cantrev y Gwaelod (gwaelod, « le bas, le fond » ) (Myv. arch., p. 409, 37). Le Livre noir donne un curieux dialogue entre lui et le dieu Gwynn ab Nudd (Skene, Four anc. books, II, p. 54, XXXIII ; cf. Myv. arch., p. 299, col. 1, allusions à Gwyddneu ; sur l’inondation de ses Etats, v. Livre noir, p. 59, XXXVIII) ; Cf. J. Loth, La légende de Maes Gwyddneu, Revue celt., XXIV, 349). On met les Etats de Gwyddno sur l’emplacement de la baie actuelle de Cardigan.
  384. D’après une autre tradition, la corne magique serait celle de Bran Galed : elle versait la liqueur que l’on désirait (Lady Guest, Mab., H, p. 351). – Le ms., Yen. 4, L. Rh. 481 a l’intéressante variante : Gododin.
  385. Un poète du milieu du XVe siècle, Davydd ab Edmwnt, fait allusion à cette harpe qu’il appelle la harpe de Teirtud. Suivant lady Guest, à qui j’emprunte cette citation, il existerait sur cette harpe un conte de nourrice gallois : un nain, appelé Dewryn Vyehan, aurait enlevé à un géant sa harpe, mais cette harpe s’étant mise à jouer, le géant se précipita à la poursuite du voleur. Il y a aussi dans l’épopée irlandaise une harpe magique, celle de Dagdé. Le Liber Land., mentionne un Castell Teirtud, en Buellt, dans le Breconshire (p. 374).
  386. On ne parle pas de ses propriétés. Il devait sans doute ressembler au chaudron de Dagdé dont il est question dans le Leabhar Gabala ou Livre des conquêtes, qu’on ne quittait pas sans être rassasié. Le chaudron de Tyrnog était plus intelligent ; si on y mettait de la viande à bouillir pour un lâche, il ne bouillait pas ; pour un brave, c’était fait à l’instant (lady Guest, Mab., II, p. 354). Plus haut, p. 130, il est question d’un autre chaudron merveilleux ; cf. note à Pwyll, p. 81.
  387. Ysgithyr signifie « défense, crocs ; » penbeidd, « chef des sangliers ». Pen. 4 (L. Rh. 482) a ce passage intéressant qui manque dans L. Rouge : si tu l’obtiens, il y a une chose que tu n’obtiendras pas : les oiseaux de Rianhon, qui réveillent les morts et endorment les vivants, je les veux pour me récréer cette nuit-là, Cf. plus haut, p. 145. [Le Mabinogi de Branwen contient une allusion à ces oiseaux. « À Hardlech vous resterez sept ans à table, pendant que les oiseaux de Rhiannon chanteront pour vous. » ]
  388. Cantrev, v. p. 82. [Mab. de Pwyll.] Il y a un jeu de mots sur Kadw, garder et Kado : Pen. 4 (L. RII.482) a même Kadw pour Kado. Prydein indique la Bretagne proprement dite (Prydyn est l’Ecosse) : c’est une forme correctement évoluée de Pretania ou Pritania ; Britannia est une forme refaite d’après Brittones. Prydain, et l’Irlandais Cruithne (plus précisément pays des Pictes) remontent à un vieux celtique Qritonia.
  389. Gorddu, « très noire ; » gorwen, « très blanche. » Pennant signifie le bout du ravin ou du ruisseau (armor. ant pour nant par an nant, la rigole entre deux sillons), patois français, un nant Govud, « affliction. »
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  392. Rin, « secret, vertu mystérieuse. » Pen. 4 (L. Rh. 488) : Rin Barvawt.
  393. La première mention du Twrch Trwyth ou porc Trwyth se trouve dans Nennius LXXIX : en chassant le porc Troit (porcum Terit, var. Troit), le chien d’Arthur, Cabal aurait imprimé la marque de son pied sur une pierre ; Arthur avait fait dresser à cet endroit un carn (amas de pierres) qui porte le nom de CarnCabal ; on peut enlever cette pierre et la transporter à une journée et une nuit de marche, elle retourne toujours au même lieu ; ce carn serait en Buellt, Breconshire. Il n’est pas inutile d’ajou­ter que ce passage n’appartient probablement pas à l’œuvre primitive de Nennius (Cf. A. de La Borderie, Nennius ; Georges. Heeger, Die Trojanersage der Britten, Munich, 1896, p. 21 et suiv.). D’après lady Guest, Carncavall est une montagne du district de Builh, au sud de Rhayader Gwy, Brecon. Il existerait encore sur le sommet de cette montagne une pierre portant une empreinte ressemblant à celle de la patte d’un chien. Elle en donne un dessin (Mab., II, p. 359). Le livre d’Aneurin contient probablement une allusion au Twrch Trwyth (Skene, Four anc. books, II, p. 94). L’histoire du Twrch Trwyth ressemble singulièrement à celle de la truie de Dallweir Dallbenn, Henwen. Henwen était pleine ; or, il était prédit que l’île aurait à souffrir de sa portée. Arthur rassemble ses troupes pour la détruire. Le gardien de la truie, Coll, fils de Collvrewi, a toujours la main dans ses crins partout où elle va. La laie accouche ici d’un grain de froment, là d’un grain d’orge, ailleurs d’un louveteau, et enfin d’un chat que Coll lance dans le détroit de Menei. Les enfants de Paluc recueillirent et élevèrent ce chat qui devint une des trois plaies de Mon (Anglesey) (V. Triades Mab., p. 307, 18 ; Skene, II, p. 458). Twrch est le nom de deux rivières du pays de Galles et d’une commune du Finistère, près Quimper. Tourch, en breton armoricain, a le sens de pourceau mâle. Sur la chasse du Twrch Trwyth, cf. John Rhys, Transactions of the Cymmrod society, 1891-1895, p. 100. Le Twrch Trwyth est l’Orc Treith du Glossaire de Cormac (nom pour un fils de roi, dit Cormac, Triath (nominatif) enim rex vocatur). Pour une chasse semblable, en Irlande, cf. The Rennes Dindshenchas, Revue celtique, XV, p. 474-475. Ferd Lot a rapproché le Twrch Tr. du Blanc Porc de Guingamor et aussi fait remarquer que Henwen signifie Vieille-Blanche (Romania, XXX, p. 14, 590). La forme Trwyth a été influencée par la forme irlandaise ou est due plus probablement à une erreur de scribe. La forme sincère est Trwyt (ou Trwyd) : c’est celle qui se trouve dans Nennius et aussi dans le Livre d’Aneurin (F. a. B., II, p. 94, vers 23). Silvan Evans (ibid., p. 392,393) cite également une forme Trwyd chez Cynddelw, poète de la seconde moitié du XIIe siècle, et une autre chez Llewis Glyn Cothi, poète du XVe siècle.
  394. On remarquera que dans ce roman les Gallois comptent par nuits, ce qui était aussi l’habitude chez les Gaulois d’après César. La semaine s’appelle d’ailleurs, en gallois, wythnos, « huit nuits. » Le cornique et le breton ont emprunté le mot latin septimana.
  395. Gwynn, « blanc ; » mygdwnn pour myngdwnn, « à la crinière sombre ».
  396. V. plus haut, p. 271 note 1.
  397. Cité dans les Englynion y Klyweit, recueil de proverbes ou conseils mis chacun dans la bouche d’un personnage plus ou moins connu ; ce sont des épigrammes de trois vers et commençant toutes par a glywaist ti, « as-tu entendu ? » (Myv. arch., p. 429, col. 2). V. plus haut sur Garselit, p. 277.
  398. Rien ne montre mieux l’évolution des personnages mythologiques que l’histoire de Gwynn. Nudd est la forme galloise régulière, au nominatif, du nom de dieu qu’on trouve au datif dans les inscriptions latines de Bretagne : Nodenti deo (Inscript. Brit. lat. Hübner, p. 42, XIV). On a trouvé des traces d’un temple consacré à ce dieu à Lydney, Gloucestershire. La forme irlandaise de ce nom est, au nominatif, Núada. Núada à la main d’argent est un roi des Túatha Dé Danann. Gwynn a été envoyé par les prêtres chrétiens en enfer. Son nom est synonyme de diable. Dafydd ab Gwilym, au lieu de dire : Que le diable m’emporte ! dit : que Gwynn, fils de Nudd, m’emporte ! (p. 170 ; cf. ibid., p. 260 : le hibou est appelé l’oiseau de Gwynn, fils de Nudd). La légende de saint Collen, qui a donné son nom à Llan-gollen, dans le Denbigshire et à Lan-golen, près Quimper, montre que ce n’est pas sans peine que les prêtres chrétiens ont réussi à noircir cet ancien dieu dans l’esprit des Gallois. Après une vie brillante et vaillante à l’étranger, Collen était devenu abbé de Glastonbury. Il voulut fuir les honneurs et se retira dans une cellule sur une montagne. Un jour, il entendit deux hommes célébrer le pouvoir et les richesses de Gwynn, fils de Nudd, roi d’Annwvn. Collen ne put se contenir, mit la tête hors de la cellule et leur dit : « Gwynn et ses sujets ne sont que des diables ! » ― « Tais-toi, » répondirent-ils, « crains sa colère. » En effet, le lendemain, il recevait de Gwynn une invitation à un rendez-vous sur une montagne. Collen n’y alla pas. Le jour suivant, même invitation. même résultat. La troisième fois, effrayé des menaces de Gwynn, et prudemment muni d’un flacon d’eau bénite, il obéit. Il fut introduit dans un château éblouissant ; Gwynn était assis sur un siège d’or, entouré de jeunes gens et de jeunes filles richement parés. Les habits des gens de Gwynn étaient rouges et bleus. Gwynn reçut parfaitement Collen et mit tout à sa disposition. Après une courte conversation, après avoir dit au roi qui lui demandait son impression sur la livrée de
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  514. Garth Grugyn ; garth, « colline, promontoire ». L’auteur tire, sans doute, ce nom de Grugyn. Le texte porte Gregyn, mais Grugyn est sûr (Celt. Folkl., p. 515, notes 1 et 2). Le nom est rappelé par Hafod Grugyn, près Brechfa (en Carmarthenshire, mais autrefois du Cardiganshire).
  515. Ystrad Yw, « la vallée d’Yw », un ancien district de la partie sud du Breconshire (Hundred de Crickhowel).
  516. Tawy et Euyas. Evyas est le nom d’un ancien canton du Herefordshire, du côté de Long Town. Ce district a laissé son nom à la paroisse d’Ewyas Harold : pour plus de détails, v. Egerton Phillimore, Owen’s Pensbroheshire I, p. 199, note 5. Ivyas est aussi le nom d’une paroisse de notre pays de Léon.
  517. Havren, la Severn, d’une forme vieille-celtique, Sabrina.
  518. Gwynn, blanc ; Mygdwnn, à la crinière brune.
  519. Llynn Lliwan. C’est le lac merveilleux dont parle Nennius LXXIII (Operlin Livan, l’embouchure de l’étang de Liwan) ; ce lac était en communication avec la Severn. Sur les formes de ce nom, v. J. Rhys, Arthur. Legend, p. 360, note 3.
  520. Aber Gwy, l’embouchure de la Gwy. La Gwy, que les Anglais appellent Wye, va se jeter dans le bras de mer de la Severn que les Gallois appellent Mor Havren, la mer de la Severn, à Chepstow.
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