La Grande Encyclopédie, inventaire raisonné des sciences, des lettres, et des arts/Manteuffel

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MANTEUFFEL. Famille de la noblesse poméranienne, originaire du pays des Kassubes, répandue en Brandebourg, Mecklembourg, Saxe, Prusse, Suède et Russie (provinces baltiques). La ligne comtale de Livonie (1756) et la ligne baronale de Prusse existent encore. La dernière remonte à Christoph— Friedrich de Muhlendorf (17271803), fils adoptit d’Ernst— Christoph de Manteuffel (1676-1749), ambassadeur de Saxe à Derlin (1711-16), ministre de l’électeur (1716-30). Christoph prit en 1742 le nom et le titre de baron de Manteuffel. Son second fils, Georg-August-Ernst, né à Altluernilz le 26 oct. 1765, mort à Dresde le 8 janv. 1842, fut un des principaux personnages du royaume de Saxe qu’il représenta à la Diète fédérale de 1830 à 1840. Ses deux frères, Friedrich-Otto-Gottlob (1777-1812) et Hans-Karl-Erdmann (f 4844), furent également fonctionnaires saxons. Du premier est né le ministre Otto-Theodor, du second le général Edwin-Hans-Karl de Manteuffel.

Otto-Theodor, baron de Manteuffel, né à Liibben le .3 févr. 1805, mort à Krossen le 26nov. 1882, fut élevé par son oncle Hans-Karl-Erdmann, entra dans l’administration prussienne, devint conseiller du prince de Prusse, alors président du ministère d’Etat (1844), puis directeur au ministère de l’intérieur (1845), défendit énergiquement la bureaucratie contre les libéraux, fut ministre de l’intérieur dans le cabinet lirandenburg (nov. 1848), eut une grande part à la constitution du 5 déc. 1848 et aux modifications qu’y fit le message du 7 janv. 1850, fut chargé après la mort du comte Brandenburg du ministère des affaires étrangères, conclut avec Schwarzenberg la convention d’Olmutz (nov. 1850), assista au congrès de Paris (1856), se retira avec tout le ministère lors de l’institution de la régence (oct. 1858), reparut en 1864 à la Chambre des seigneurs où il continua de soutenir la politique réactionnaire. — Son frère Karl-Otto (1806-7 ! » ) fut de 1834 à 1858 ministre de l’agriculture. — Son fils, Otto-Karl-Gottlob, né à Berlin le 29 nov. 1844, fut un des chefs du mouvement agrarien et du parti conservateur.

Edwin-H’ans-Karl, baron de Manteuffel, né à Dresde le 24 févr. 1809, mort à Karlsbad le 17 juin 1885, fut élevé avec ses cousins Otto et Karl, entra en 1827 dans l’armée prussienne (dragons de la garde) ; devint lieutenant (1828), élève de l’école de guerre (1834-36), aide de camp du gouverneur de Berlin (1838), du prince Albert (1839), du roi (1848) qui l’employa à une série de missions diplomatiques où Manteuffel se distingua ; il fut promu major (1848), lieutenant-colonel (1853), colonel (18S4), attaché au cabinel militaire (1855) et enfin préposé à celui-ci (1857) parle roi qui avait personnellement en lui la plus grande confiance. Il la justifia par ses efforls pour réorganiser l’année et rajeunir les cadres ; vivement combattu, il provoqua en duel et blessa le publiciste Twesten (1861). Il était major général depuis 1858, lieutenant général depuis 1861. Il obtint le commandement des troupes prussiennes du Slesvig-Holstein (29 juin 1863) et le gouvernement de Slesvig (22 août) qu’il exerça avec uno extrême raideur vis-a-vis de la population et du prince d’Augustenbourg. Ses affectations maladroites de franchise militaire lui firent du tort. Après la rupture avec l’Autriche, il commença la guerre en passant l’Eider (7 juin 1866) et en chassa Gablenz du Holstein, envahit le Hanovre (15 juin), fit signer la capitulation de Langensalza (29 juin), combattit les Bavarois à Hausen et Aschach (10 juil.), remplaça Falckenstein à la tête de l’armée du Main (19 juil.), marcha sur Wurzbourg et termina la campagne par les succès de Tauberbischofsheim, Helmstadt et Rossbrunn. Il fut envoyé à Saint-Pétersbourg afin de convaincre le tsar de la nécessité du remaniement de l’Allemagne (août 1866), promu général de cavalerie (20 sept.) et commandant du 9e corps’d'armée ; un conflit avec le gouverneur civil Scheel-Plessen le fit mettre en disponibilité (janv. 1867). Il remplaça Falckenstein à la tête du Ier corps avec lequel il fit la guerre de 1870 (V. Franco-allemande), se distinguant à Colomhey-Nouilly (14 août) et Noisseville. On lui confia le 27 oct. la première armée, opposée à l’armée française du Nord, qu’il combattit à Amiens (27 nov.) et sur l’Haïlue (23 déc), puis il fut préposé à l’armée du Sud (IIe, VIIe, XIVe corps), opposée à Bourbaki. Par une marche audacieuse à travers le plateau de Langres, il se porta sur les derrières de l’armée française de l’Est qui dut se réfugier en Suisse. Manteuffel fut ensuite chargé de commander l’armée d’occupation (20 juin 1871) et promu feld-maréchal (19 sept. 1873). Le 1er oct. 1879, il fut nommé administrateur d’Alsace-Lorraine, tenta de vains efforts pour rallier la société indigène et en témoigna brutalement sa mauvaise humeur. Son échec fut complet vis-à-vis des fonctionnaires allemands et de la population conquise. A.-M. B.

Bibl. : Keck, Das Leben des General-feldmarschalls Edwin von Manteuffel ; Bielefeld, 1890.