Le Parnasse contemporain/1876/La Voie lactée
Apparence
V
LA VOIE LACTÉE
La poudre des astres brisés
Roule encor par les étendues :
Mais où vont le vent des baisers
Et l’âme des amours perdues ?
Comme des étoiles, nos cœurs
Sont faits de lumière immortelle ;
Ils se brisent aux chocs vainqueurs ;
Mais leur poussière où donc va-t-elle ?
Nous voyons couler notre sang
Au bord de la nue enflammée,
Dans le couchant éblouissant ;
Mais où fuit sa rouge fumée ?
Quelle brise, effleurant ces flots,
Recueille l’esprit de nos rêves,
Les délices de nos sanglots
Et l’ivresse des heures brèves ?
Ah ! dans les débris radieux
Qui font ta lumière argentée,
Sous les pas tranquilles des dieux,
Emporte-les, ô Mer lactée !