Le Coran (Traduction de Montet)/Le Coran/Sourate 96

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Traduction par Édouard Montet.
Payot (p. 259-261).


Sourate 96[1].

SOURATE DU SANG COAGULÉ

La Mecque : 19 versets.

Au nom d’Allâh très miséricordieux et compatissant.

1. Lis[2], au nom de Ton Seigneur, qui a créé,

2. Qui a créé l’homme de sang coagulé[3].

3. Lis, car Ton Seigneur est le plus généreux.

4. C’est Lui qui a appris à l’homme à se servir du kalâm[4].

5. Il a appris à l’homme ce que l’homme ne savait pas.

6. Cependant, en vérité, l’homme devient insolent

7. Lorsqu’il se voit devenir riche[5].

8. En vérité, c’est au Seigneur qu’appartient le retour[6] !

9. As-tu porté ton attention sur celui qui empêche

10. Un serviteur (d’Allâh) de prier[7] ?

11. As-tu réfléchi s’il était dans la voie droite,

12. Ou s’il recommandait la piété ?

13. As-tu réfléchi s’il mentait et s’il tournait le dos ?

14. Ne sait-il pas qu’Allâh (le) voit ?

15. Assurément, s’il ne cesse pas, Nous le traînerons par les boucles du front[8],

16. Les boucles menteuses et pécheresses[9].

17. Qu’il appelle son conseil[10] !

18. Nous appellerons les gardes de l’enfer !

19. Certainement, ne lui obéis pas, mais adore et approche-toi (d’Allâh).




  1. La Sourate 96 est peut-être la plus célèbre de tout le Coran ; elle est écrite en vers très brefs, à rimes très diverses. Elle manque essentiellement d’unité. Les versets 1-5 paraissent très anciens ; ils forment à eux seuls la sourate la plus ancienne peut-être du Coran ; c’est ce qu’affirme en tout cas la tradition musulmane (voy. notre Introduction, p. 15). Quant à la seconde partie, il est difficile d’en déterminer l’âge ; il est douteux qu’elle appartienne, comme l’affirme Nöldeke, aux sourates de la première période de La Mecque. Le texte en est incertain ; l’ordre des versets paraît avoir été troublé.
  2. Il semble bien qu’au v. 1 le verbe Kara’a doit être traduit par lire (à cause du v. 4), bien que cette racine sémitique paraisse avoir pour sens primitif réciter, dire à haute voix (de là, en second lieu, le sens de lire). Le verbe hébreu correspondant et identique signifie crier, appeler, nommer. De même en araméen le radical verbal identique signifie appeler, en second lieu lire. Enfin le verbe syriaque correspondant et identique a pour sens primitif crier, appeler, et pour sens second lire. Dans le radical sémitique Kârâ’ (Kara’a), dans toutes les langues sémitiques, le sens de lire n’est donc pas la signification primitive, mais seulement la signification dérivée.
  3. Comp. S. 22, v. 5.
  4. Le roseau fendu (comme la plume d’oie qu’on a taillée), c’est-à-dire la plume pour écrire.
  5. Ces deux versets (6-7) feraient allusion, d’après les commentateurs musulmans, à un adversaire de Mahomet, Aboû Djahl, qui aurait menacé de mettre son pied sur la nuque du Prophète, s’il le surprenait dans l’attitude de l’adoration. Ces deux versets n’ont rien de commun avec les v. 1-5.
  6. Autre verset isolé et déplacé. Sens probable : « Les impies doivent revenir à Dieu. »
  7. Ce verset et les suivants semblent faire suite aux v. 6-7, c’est-à-dire se rapporter à Aboû Djahl. Le serviteur empêché de prier serait le Prophète.
  8. Les cheveux qui pendent sur le front.
  9. Les boucles du menteur et du pécheur.
  10. Pour le défendre.