Le Communisme jugé par l’histoire/Du communisme sous l'influence des idées chrétiennes

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CHAPITRE III

Du communisme sous l’influence des idées chrétiennes:opposition radicale du communisme et du christianisme ; communautés ascétiques et hérétiques ; frères moraves, anabaptistes. quakers, etc.

Des écrivains éminents de l’école socialiste ne se lassent pas de répéter que le communisme est sorti du christianisme; qu’il est le christianisme même dans toute sa pureté et l’application la plus complète, l’expression la plus vraie du principe évangélique de la fraternité humaine:rien n’est plus contraire à la vérité. L’Évangile ne contient pas un mot qu’on puisse tourner contre la propriété ; il ne s’élève pas une fois contre les prétendues injustices de l’ordre social, il ne représente pas les riches comme des opprimés; il se place au-dessus de ces distinctions sans les attaquer, en conseillant aux uns la résignation, aux autres le sacrifice, à tous l’abnégation d’eux-mêmes, la charité et l’amour. L’amour, voilà le principe sur lequel repose toute la morale de Jésus-Christ, et ce principe ne contredit pas celui de la justice et du droit, comme aussi il ne saurait le remplacer. Que je m’efforce, comme l’Évangile le prescrit, d’imiter la bonté de Dieu, qui fait luire son soleil sur les bons et les méchants : Ut silis filii Patris vestri qui in cœlis est, qui solem suum oriri facit super bonos et malos[1] ; cela ne fera pas disparaître la différence du bien et du mal ; cela n’ôtera rien à l’homme vertueux de son mérite et n’empêchera pas le méchant d’être coupable. Que j’aime ceux qui me haïssent, que je pardonne à ceux qui m’ont offensé, que je prie pour mes persécuteurs, cela pourra-t-il faire que la haine ne soit pas un mauvais sentiment, l’offense que j’ai reçue, une méchante action, et la persécution de l’innocent un crime ? De même, quand je partage mes biens entre les pauvres, il n’en faut pas conclure que je n’aurais pas eu le droit de les conserver et que les pauvres à qui j’en fais don n’ont fait que recouvrer ce qui leur a toujours appartenu. S’il fallait interpréter ainsi le précepte évangélique, où donc serait l’amour ? où serait le sacrifice ? On ne peut sacrifier ce qu’on n’a pas, on n’est pas généreux en payant ses dettes. Mais faisons un pas de plus ; supposons cette idée traduite en fait ; figurons-nous une société où c’est la loi qui donne en se substituant à ma place, et pour parler plus exactement, où personne n’ait rien à donner ni rien à recevoir, où tous soient courbés sous le même niveau, attachés au même joug, et sacrifiés corps et âme, intelligence et force, à l’État, reconnaîtrons-nous sous un tel régime ce libre élan du cœur qu’on appelle la charité ? La charité toute seule ne peut pas servir de base à un gouvernement, à un ordre social, et là où elle est forcée, elle se change en servitude. Le christianisme et le communisme, loin de se confondre, sont donc complètement opposés l’un à l’autre. Le premier se fonde sur l’amour et par conséquent sur la liberté, le second sur la contrainte ; le premier commande la résignation, le sacrifice ; le second, la spoliation. Il n’y a, en effet, aucun ménagement à garder au point de vue de ce dernier système. Si la propriété individuelle est illégitime, ou, comme on l’a dit plus crûment dans ces derniers temps, si la propriété est un vol, il ne faut pas hésiter à la détruire ; il faut que les victimes de cette antique iniquité obtiennent une prompte réparation ; et c’est cette œuvre de confiscation et de violence qui serait le fruit le plus accompli de la charité chrétienne !

Il y a dans le christianisme un autre point de vue auquel nous sommes obligés de nous arrêter. La morale de l’Évangile ne se renferme pas toujours dans les conditions de l’humanité. Fondée, comme je l’ai dit plus haut, sur le seul principe de l’amour et ne voyant que Dieu qui soit digne d’être aimé, elle semble oublier quelquefois ce qu’il y a de divin dans les créatures, elle respire le mépris le plus profond pour la vie, pour la société, pour ce monde, et s’emporte jusqu’au mysticisme. Tel est certainement le caractère qu’elle présente quand elle nous défend de prendre aucun souci de notre nourriture, de notre vêtement, et du toit qui doit nous couvrir ; quand elle ne veut pas que la pensée et le travail du jour s’étendent aux besoins du lendemain ; quand, nous montrant les oiseaux du ciel toujours assurés de leur subsistance et les lis des champs, quoiqu’ils ne travaillent pas et ne filent pas, vêtus avec plus de splendeur que Salomon dans sa gloire[2], elle nous conseille d’imiter leur imprévoyance et de nous confier tout entiers à la bonté divine. C’est dans le même esprit qu’elle nous dit de vendre ce que nous possédons et d’en partager le prix entre les pauvres, afin de nous amasser dans le ciel un trésor qui ne nous manque pas au jour du besoin, dont les voleurs ne puissent pas approcher et qui soit à l’abri des vers[3]. C’est dans le même esprit qu’elle nous exhorte à livrer notre joue aux insultes, à faire l’abandon de notre bien, non-seulement aux pauvres, mais aux voleurs ; à donner notre manteau à qui nous a pris notre tunique[4]. C’est dans cet esprit, enfin, qu’elle nous engage à abandonner, au nom de Dieu, nos frères et nos sœurs, nos pères et nos mères, nos femmes et nos enfants, afin de mériter la vie éternelle[5]. Ainsi, ce n'est pas seulement la fortune qui nous empêche d’arriver au royaume du ciel, la famille elle-même devient un obstacle au salut, et bienheureux est celui qui en fait le sacrifice. A cet abandon complet des biens et des liens de la vie, des plus saintes affections du cœur, viendront bientôt se joindre le mépris de la vie elle-même et l'attente impatiente de la mort. « O homme infortuné que je suis, s'écrie saint Paul, qui me délivrera de ce corps de mort ? » Ces idées, qui ont existé avant le christianisme, mais qui se sont développées plus particulièrement dans son sein, n’ont pas manqué de porter leur fruit ; elles ont donné naissance à la vie monastique, elles ont provoqué les communautés religieuses. Mais quelle est la nature, quel est le but de ces associations, depuis les esséniens et les thérapeutes, véritables moines de deux ou trois siècles plus vieux que l'Evangile, jusqu’aux couvents du moyen âge et des temps modernes ? Ni les esséniens, ni les thérapeutes, ni les ordres religieux plus récents, n'ont la prétention de réformer le monde, ou de le faire à leur image eu fondant sur la communauté des biens un nouvel ordre social. Comment donc auraient-ils pu admettre une telle pensée en s’interdisant le mariage, en s’imposant pour première loi une chasteté absolue ? Loin de vouloir réformer la société, ils ne songeaient qu’à la fuir pour se réformer eux-mêmes, pour se préparer au ciel par la contemplation et la prière, pour chercher un abri contre les passions, un refuge contre les séductions du monde, et se décharger avant le temps du fardeau de la vie.

Il est évident que ce but ascétique et, si l'on me permet cette expression, extra-social, ils ne pouvaient l’atteindre que par la société même à laquelle ils cherchaient à se dérober ; car puisque le mariage était proscrit de leur sein, il fallait qu'il fût maintenu et pratiqué au dehors pour leur donner de la durée ; puisque la communauté telle qu'elle était, ou du moins telle qu’elle devait être pratiquée par eux, était fondée, non sur le partage, mais sur le renoncement ; non sur la possession, mais sur la pauvreté collective, il fallait au dehors assez de superflu pour les nourrir : enfin puisque leur existence toute spéculative se passait dans la prière, le jeûne et la méditation, il fallait qu’il y eût ailleurs des bras pour les nourrir et les défendre.

Ces considérations s’appliquent en grande partie à l’institution des herrnhuters ou frères moraves. Cette association fameuse, d’abord composée des débris de l'ancienne secte des hussites, puis réformée et constituée sur d’autres bases par le comte de Zinzendorf, nous offre sans contredit l'application la plus heureuse qui ait jamais été faite du régime de la communauté. Elle n’a rien qui rappelle la discipline ascétique ni les sombres austérités des cénobites du moyen âge. Elle fait de la religion une affaire de sentiment plutôt que d’imagination. Elle néglige le côté mystique et spéculatif du christianisme, pour s’attacher avec d’autant plus de force à son côté moral et pratique. Admettant dans son sein le mariage, par conséquent les femmes et les enfants, les devoirs et les occupations que la famille impose, elle forme une association civile et industrielle, aussi bien qu’une communauté religieuse. Sous ce dernier point de vue même, elle n’exclut pas une certaine diversité. Elle se divise en trois tropes, qui sont véritablement, dans le sens du protestantisme, autant de confessions différentes. L’un est la croyance des premiers moraves ou frères bohêmes, héritiers de la doctrine de Jean. Huss ; l’autre est la confession d’Augsbourg, et le troisième le culte réformé. Les enfants sont obligés de rester dans la communion de leur père ; mais il est juste d’ajouter que l’éducation, les mœurs, la vie en commun, et par dessus tout cette charité évangélique qui est comme l'âme de la secte, paralysent les effets de cette diversité de croyance. Quant à la constitution civile de la société, elle est fondée, autant que le permettent le respect des mœurs et les liens de la famille, sur l’égalité et la communauté. Pas d’autres catégories que celles qui indiquent la différence des âges, des sexes et des rapports naturels : les enfants, les jeunes garçons, les jeunes filles, les frères et les sœurs non mariés, les époux, les veufs et les veuves, telles sont les seules classes ou, pour parler leur langue, les chœurs qu’on distingue chez les frères moraves. Pas d’autres dignités que celles qui s’obtiennent par l’élection et par l’âge, que celles que réclament la direction morale, l’instruction religieuse et l’administration matérielle de l’association. La communauté se compose de plusieurs maisons, dont une seule contient quelquefois trois mille personnes. Une maison se divise en plusieurs chœurs, dont chacun a deux chefs : un assistant à qui sont confiés les intérêts spirituels, et un serviteur qui répond de ses intérêts matériels. Les chœurs d’hommes sont conduits par des hommes, et les chœurs de femmes par des femmes. Les chefs de ces chœurs, réunis au prédicateur et à l’assistant général, forment, sous la présidence de ce dernier, le conseil des anciens, et au-dessus de ce conseil vient se placer celui de la communauté. Les enfants reçoivent tous la même éducation, et, arrivés à l’âge où leurs forces le permettent, ils apprennent un art ou un métier qu’ils exercent toute leur vie. Les célibataires, divisés par sexes, habitent la maison commune. Les personnes mariées, divisées par familles, ont des demeures particulières. Mais tous sont astreints à des repas, à des exercices de piété, à des prières en commun, et même à des récréations communes. Tous restent placés pendant toute leur vie sous la direction, ou, pour mieux dire, sous la tutelle de l'autorité supérieure, et ne sont libres de choisir ni leurs lectures, ni leurs plaisirs, ni leurs occupations. Il ne leur est même pas permis de se marier sans l'autorisation des anciens, et l'on dit que, dans les premiers temps, le sort décidait seul des unions matrimoniales. La communauté des biens n’est cependant pas aussi complète qu’on pourrait le croire et qu’on l'a affirmé souvent. Chaque membre de la société peut disposer du fruit de son travail après avoir contribué, dans certaines proportions définies par les statuts, à l’entretien d’un fonds commun.

Voilà certainement une association digne de notre respect, une association habilement organisée, et de plus assez florissante ; car on évalue à plus de 18,000 le nombre de ses membres ; elle a des ramifications multipliées en Allemagne, en Hollande, en Angleterre, en Écosse, dans l’Empire rosse, dans les États-Unis d’Amérique ; elle a des missionnaires et des colons sur les point les plus éloignés du globe. Eh bien ! quelle conclusion en peut-on tirer en faveur du communisme ? Une constitution semblable pourrait-elle être adoptée, je ne dis pas pour la société humaine en général, mais pour une nation de quelque importance ? Avant tout, et malgré la liberté qu'ils admettent sur certains points de dogme, les frères moraves forment une secte religieuse dont l'esprit jaloux, étroit, ne peut se concilier en aucune manière avec l'indépendance de l’esprit moderne et le développement de la civilisation. Toute culture élevée ou délicate, toute science ou tout art qui ne leur paraissent point immédiatement utiles, sont proscrits parmi eux. A l'exception de quelques chefs plus éclairés, ils vivent complètement étrangers au reste du monde et à tout ce qui sort du cercle borné de leurs occupations et de leurs croyances. Cependant ils ne peuvent se passer de cette société extérieure qu’ils méprisent ou qu’ils ignorent. C’est elle qui pourvoit d’abord à leur défense matérielle, et qui leur permet d’exister, en contenant par la justice et par la force, en développant et en éclairant par ses institutions ceux que la charité toute seule ne suffit pas à gouverner. C’est elle qui, laissant à l'intelligence toute sa liberté, fait les expériences et les découvertes dont ils profitent, invente ou perfectionne les industries qu’ils appliquent à leur usage. C’est elle qui ouvre des marchés à leur commerce ; car le commerce est au nombre de leurs occupations, et fait une des principales sources de leur prospérité. Enfin, si leur simplicité patriarcale devenait la règle du monde entier, que deviendraient un grand nombre de leurs maisons, qui ne subsistent que par la fabrication d’objets de luxe ? Leur communauté, comme celle des ordres monastiques, ne pent donc se maintenir que parce qu’il y a à côté d’elle et au-dessus d’elle une organisation sociale toute différente. Cela est plus vrai encore des quakers, des shakers, des mennonites, et de tous ces sectaires moitié politiques, moitié religieux, qu'on peut appeler les moines du protestantisme.

Il y en a qui ont compris la perfection évangélique d’une tout autre manière, et qui, au lieu de la placer réellement dans l’abnégation de soi-même, dans la mort des passions, dans le mépris des richesses, ont demandé en son nom le partage des biens et l’émancipation des sens. Tels furent, du deuxième au troisième siècle de notre ère, les disciples de Carpocrate et quelques autres hérétiques attachés aux principes du gnosticisme, qui, regardant la vie comme une œuvre du mauvais génie, les actions comme indifférentes, les plaisirs du corps comme une dette qu’il faut payer au mal, déclarèrent toutes les passions légitimes, et donnèrent l’exemple de la plus honteuse promiscuité. Tels furent, du treizième au seizième siècle, les frères du Libre-Esprit qui, avec quelques différences dans les dogmes, arrivèrent en morale aux mêmes conséquences ; les dulciniens ou apostoliques, qui demandaient à la fois la communauté des biens et des femmes ; les fratricelles ou frérots, les béguards, les lollards, les turlupins, et enfin la plus hardie, la plus conséquente, la plus célèbre de toutes ces sectes, ancêtres méconnus du socialisme, les terribles anabaptistes. Muncer, leur chef, n’a rien laissé à dire aux communistes ses successeurs. « Nous sommes tous frères, répétait-il souvent à la foule qui l'écoutait, et nous n’avons qu’un commun père dans Adam ; d’où vient donc cette différence de rangs et de biens que la tyrannie a introduite entre nous et les grands du monde ? Pourquoi gémirons-nous dans la pauvreté et serons-nous accablés de maux, tandis qu’ils nagent dans les délices ? N’avons-nous pas droit à l’égalité des biens qui, de leur nature, sont faits pour être partagés sans distinction entre tous les hommes ? Rendez-nous, riches du siècle, avares usurpateurs, rendez-nous les biens que vous retenez dans l’injustice ; ce n’est pas seulement comme hommes que nous avons droit à une égale distribution des avantages de la fortune, c’est aussi comme chrétiens[6]. » On sait qu’il ne se borna pas à la prédication, et que, sous le titre biblique de juge du peuple, il mit ses idées en pratique dans la ville de Mulhausen ; qu’à la tête de trente mille hommes il tenta de les imposer par la force des armes à toute l’Allemagne. Sa défaite et sa fin tragique ne l’empêchèrent pas de trouver des successeurs. Parmi eux, Jean de Leyde, soutenu par un parti plus nombreux encore, établit à Munster un royaume d’Israël, dont il était le chef absolu ; et pour mériter son titre d’une manière plus complète, ajouta à la communauté la polygamie. Un autre fanatique, David George, après avoir été reconnu évéque anabaptiste dans le prétendu royaume de Munster, se mit à prophétiser pour son propre compte, et devint le chef d’une église séparée où la communauté des femmes était exigée aussi impérieusement que celle des biens. Toutes ces doctrines, quoique produites au nom de l'Evangile, peuvent être regardées comme une première tentative pour réhabiliter la chair, comme une véritable réaction du matérialisme contre la spiritualité chrétienne. Et pourquoi s’en étonner ? est-ce que les passions ne sont pas les mêmes dans tous les temps ? On ne considère pas assez que les idées seules se développent à travers l’histoire ; que l’empire seul de l'esprit, de la raison, de nos facultés morales, peut se fortifier et s’étendre ; mais que les besoins et les appétits des sens, les passions, en un mot, ne changent pas. C’est par cette raison qu’on les trouve partout, tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, ici sous le voile de la religion, là sous le manteau de la philosophie, cherchant à se justifier et à briser leurs chaînes. En effet, ces mêmes aberrations que nous rencontrons ici sous le couvert du christianisme se sont présentées ailleurs au nom d’une croyance toute différente. Dans la Perse, à la fin du cinquième siècle de notre ère, sous le règne de Kobad, le père de Chosrou ou Chosroës, un enthousiaste appelé Mazdek, prêcha avec un grand succès la communauté des biens et des femmes. « Toutes choses, disait-il, tant animées qu’inanimées, appartenant à Dieu, il est impie à un homme de vouloir s’approprier ce qui est à son Créateur et ce qui, en cette qualité, doit rester à l’usage de tous. » Ces doctrines trouvèrent un grand nombre de partisans, parmi lesquels il faut compter le roi lui-même. On assure que le réformateur osa lui demander, comme gage de sa conversion, de lui abandonner la reine, et que ce sacrifice aurait été consommé sans les larmes et les prières de Chosroës. Quoi qu’il en soit de cette particularité, les disciples de Mazdek, mettant en pratfque les principes de leur maître, et ne reculant ni devant le rapt ni devant le pillage, jetèrent le pays dans la désolation. Il ne fallut rien moins qu’une révolution pour rétablir l'ordre. L'élite de la nation se souleva, chassa le roi et son favori et éleva sur le trône le frère de Kobad. Quelques années plus tard, sous le règne et par les ordres de Chosrou, Mazdek périt dans les supplices avec ses principaux adhérents, et son influence disparut avec lui. Il reçut de la postérité le surnom de Zendik, c’est-à-dire l’Impie[7].

C’est donc aux époques les plus délaissées par la civilisation, et dans des sectes méprisées dont aucune n’a pu se maintenir devant la réprobation universelle, qu’il faut aller chercher ces idées qu’on nous montre aujourd’hui comme la plus grande découverte et la seule espérance de notre temps. Il est vrai que, chemin faisant, elles se sont quelque peu rajeunies dans la forme. Le communisme, dans l’antiquité, a une organisation théocratique et guerrière ; sous l’influence du christianisme ou des idées qui l’annoncent, et dans tout le cours du moyen âge, il à un caractère inspiré et religieux ; enfin, nous allons le voir essayant de se justifier au nom de la raison, et prenant, autant que sa nature le permet, un caractère philosophique. Mais il ne gagnera rien à ce changement ; car en quelque temps et sous quelque forme qu’il se présente, il porte avec lui sa condamnation.



  1. Saint Mathieu, V. v, 45.
  2. Saint Mathieu, chap. VI. v. 25-36 ; saint Luc, chap. XII. V. 22-30.
  3. Saint Luc. chap. XII. v. 33.
  4. Saint Mathieu, v. 39 et 40.
  5. Saint Mathieu, chap. XIX, v. 29.
  6. Catrou, Histoire des anabaptistes. — Michelet, Mémoires de Luther.
  7. Malcolm, Histoire de Perse, t. I, chap. 6 — Herbelot, Bibliothèque oiientale.