Les Évangiles (Renan)/X. L’Évangile grec se corrige et se complète. - Matthieu

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CHAPITRE X.


L’ÉVANGILE GREC SE CORRIGE ET SE COMPLÈTE (MATTHIEU).


Les défauts et les lacunes de l’Évangile de Marc devenaient chaque jour plus choquants. Ceux qui connaissaient les beaux discours de Jésus tels que les rapportaient les écritures syro-chaldaïques, regrettaient la sécheresse du récit sorti de la tradition de Pierre. Non-seulement les plus belles prédications y figuraient écourtées, mais des parties de la vie de Jésus qu’on était arrivé à regarder comme essentielles ne s’y trouvaient pas représentées. Pierre, fidèle aux vieilles idées du premier âge chrétien, attachait peu d’importance aux récits de l’enfance, aux généalogies. Or c’était surtout dans ce sens que travaillait l’imagination chrétienne. Une foule de récits nouveaux s’étaient formés ; on voulait un Évangile complet qui, à tout ce que renfermait Marc, ajoutât ce que savaient ou croyaient savoir les meilleurs traditionistes de l’Orient.

Ce fut l’origine de notre texte dit « selon Matthieu »[1]. L’auteur de cet écrit a pris pour base de son travail l’Évangile de Marc. Il le suit dans l’ordre, dans le plan général, dans les expressions caractéristiques, d’une façon qui ne permet pas de douter qu’il n’eût sous les yeux ou dans la mémoire l’ouvrage de son devancier. Les coïncidences dans les moindres détails durant des pages entières sont si littérales, qu’on est par moments tenté d’affirmer que l’auteur possédait un manuscrit de Marc[2]. D’un autre côté, certains changements de mots, de nombreuses transpositions, certaines omissions dont il est impossible d’expliquer le motif, feraient plutôt croire à un travail fait de souvenir[3]. Cela est de peu de conséquence. Ce qui est capital, c’est que le texte dit de Matthieu suppose celui de Marc comme préexistant et ne fait guère que le compléter. Il le complète de deux manières, d’abord en y insérant ces longs discours qui faisaient le prix des Évangiles hébreux, puis en y ajoutant des traditions de formation plus moderne, fruits des développements successifs de la légende, et auxquelles la conscience chrétienne attachait déjà infiniment de prix. La rédaction dernière a du reste beaucoup d’unité de style ; une même main s’est étendue sur les morceaux fort divers qui sont entrés dans la composition[4]. Cette unité porte à croire que, pour les parties étrangères à Marc, le rédacteur travaillait sur l’hébreu ; s’il avait utilisé une traduction, on sentirait des différences de style entre le fond et les parties intercalées. D’ailleurs, le goût du temps était plutôt aux remaniements qu’aux traductions proprement dites[5]. Les citations bibliques de pseudo-Matthieu supposent à la fois l’usage du texte hébreu (ou d’un targum araméen) et de la version des Septante[6] ; une partie de son exégèse n’a de sens qu’en hébreu[7].

La façon dont l’auteur opère l’intercalation des grands discours de Jésus est singulière. Soit qu’il les prenne dans les recueils de sentences qui peuvent avoir existé à un certain moment de la tradition évangélique, soit qu’il les tire tout faits de l’Évangile hébreu, ces discours sont insérés par lui comme de grandes parenthèses dans la narration de Marc[8], à laquelle il pratique pour cela des espèces d’entailles. Le principal de ces discours, le Discours sur la montagne, est évidemment composé de parties qui n’offrent entre elles aucun lien et qui ont été artificiellement rapprochées. Le chapitre xxiii contient tout ce que la tradition avait conservé des reproches que Jésus, à diverses occasions, adressa aux pharisiens. Les sept paraboles du chapitre xiii n’ont sûrement pas été proposées par Jésus le même jour et de suite[9]. Qu’on nous permette une comparaison familière, qui seule rend notre pensée. Il y avait, avant la rédaction du premier Évangile, des paquets de discours et de paraboles, où les paroles de Jésus étaient classées d’après des raisons purement extérieures[10]. L’auteur du premier Évangile trouva ces paquets déjà faits, et les inséra dans le texte de Marc, qui lui servait de canevas, tout ficelés, sans briser le fil léger qui les reliait. Quelquefois le texte de Marc, tout abrégé qu’il est en fait de discours, contenait quelques parties des sermons que le nouveau rédacteur prenait en bloc dans le recueil des logia. Il en résultait des répétitions. Le plus souvent, le nouveau rédacteur se soucie peu de ces répétitions[11] ; d’autres fois, il les évite au moyen de retranchements, de transpositions et de certaines petites habiletés de style.

L’insertion des traditions inconnues au vieux Marc se fait dans le pseudo-Matthieu par des procédés plus violents encore. En possession de quelques récits de miracles ou de guérisons dont il ne voit pas l’identité avec ceux qui sont déjà racontés dans Marc, l’auteur aime mieux s’exposer à des doubles emplois que d’omettre des faits auxquels il tient. Il veut avant tout être complet et ne s’inquiète pas de tomber, en agençant ainsi des traits de provenances diverses, dans des contradictions et des embarras de narration. De là ces circonstances, obscures au moment où elles sont introduites, qui ne s’expliquent que par la suite de l’ouvrage[12] ; ces allusions à des événements dont il n’est rien dit dans la partie historique[13]. De là ces singuliers doublets qui caractérisent le premier Évangile : deux guérisons de deux aveugles[14] ; deux guérisons d’un démoniaque muet[15] ; deux multiplications des pains[16] ; deux demandes d’un signe miraculeux[17] ; deux invectives contre le scandale[18] ; deux sentences sur le divorce[19]. De là aussi peut-être cette façon de procéder par couples, qui produit l’effet d’une sorte de diplopie narrative : deux aveugles de Jéricho et deux autres aveugles[20] ; deux démoniaques de Gergésa[21] ; deux disciples de Jean[22] ; deux disciples de Jésus[23] ; deux frères[24]. L’exégèse harmonistique produisait dès lors ses résultats ordinaires, la redondance, la pesanteur. D’autres fois, on remarque l’incision toute fraîche, l’opération de greffe par laquelle s’est faite l’addition. Ainsi le miracle de Pierre (Matth., xiv, 28-31), récit que Marc ne possède pas, est intercalé entre Marc, vi, 50 et 51, de telle façon que les bords de la plaie sont restés béants. Il en est de même pour le miracle du statère[25], pour Judas se désignant lui-même et interrogé par Jésus[26], pour Jésus blâmant le coup d’épée de Pierre, pour le suicide de Judas, pour le songe de la femme de Pilate, etc. Qu’on retranche tous ces traits, fruits d’un développement postérieur de la légende de Jésus, il restera le texte même de Marc.

Ainsi entrèrent dans le texte évangélique une foule de légendes qui manquaient dans Marc : la généalogie (i, 1-17), la naissance surnaturelle (i, 18-25), la visite des mages (ii, 1-12), la fuite en Égypte (ii, 13-15), le massacre de Bethléhem (ii, 16-18), Pierre marchant sur les eaux (xiv, 28-31), les prérogatives de Pierre (xvi, 17-19), le miracle de la monnaie trouvée dans la bouche d’un poisson (xvii, 24-27), les eunuques du royaume de Dieu (xix, 11-12), l’émotion de Jérusalem à l’entrée de Jésus (xxi, 10-11), les miracles hiérosolymites et le triomphe enfantin (xxi, 14-16), divers traits légendaires sur Judas, en particulier son suicide (xxvi, 25-50 ; xxvii, 3-10), l’ordre de remettre l’épée au fourreau (xxvi, 52-53), l’intervention de la femme de Pilate (xxvii, 19), Pilate se lavant les mains et le peuple juif prenant toute la responsabilité de la mort de Jésus (xxvii, 25), le grand rideau du temple déchiré, le tremblement de terre et les saints qui ressuscitent au moment de la mort de Jésus (xxvii, 51-53), la garde mise au tombeau et la corruption des soldats (xxvii, 62-66 ; xxviii, 11-15). Dans toutes ces parties, les citations sont faites selon les Septante[27]. Le rédacteur, pour son usage personnel, ne se servait que de la version grecque ; mais, quand il traduisait l’Évangile hébreu, il se conformait à l’exégèse de cet original, qui souvent aurait manqué de base dans les Septante.

Une sorte de surenchère dans l’emploi du merveilleux, le goût pour des miracles de plus en plus éclatants, une tendance à présenter l’Église comme déjà organisée et disciplinée dès les jours de Jésus, une répulsion toujours croissante pour les juifs, dictèrent la plupart de ces additions au récit primitif. Nous l’avons déjà dit, il y a des moments dans la croissance d’un dogme où les jours valent des siècles. Une semaine après sa mort, Jésus avait une vaste légende ; de son vivant, la plupart des traits que nous venons d’indiquer étaient déjà écrits d’avance[28].

Un des grands facteurs de la création de l’agada juive, ce sont les analogies tirées des textes bibliques. Ce procédé servit à combler une foule de lacunes dans les souvenirs. Les bruits les plus contradictoires, par exemple, couraient sur la mort de Judas[29]. Une version domina bientôt ; Achitophel, le traître à David, y servit de prototype[30]. Il fut reçu que Judas se pendit comme lui. Un passage de Zacharie[31] fournit les trente deniers, le fait de les avoir jetés dans le temple, ainsi que le champ du potier, et rien ne manqua plus au récit.

L’intention apologétique fut une autre source féconde d’anecdotes et d’intercalations. Déjà les objections contre la messianité de Jésus se produisaient et exigeaient des réponses. Jean-Baptiste, disaient les mécréants, n’avait pas cru en lui ou avait cessé d’y croire ; les villes où l’on prétendait qu’il fit des miracles ne s’étaient pas converties ; les savants et les sages de la nation se sont moqués de lui ; s’il a chassé des démons, c’est par Béelzeboub ; il promettait des signes au ciel qu’il n’a point donnés. — On avait réponse à tout cela[32]. On flattait les instincts démocratiques de la foule. Ce n’est pas la nation qui a repoussé Jésus, disaient les chrétiens ; ce sont les classes supérieures, toujours égoïstes, qui n’ont pas voulu de lui. Les simples gens auraient été pour lui ; alors les chefs ont usé de ruse pour le prendre ; car ils craignaient le peuple[33]. « C’est la faute du gouvernement », voilà une explication qui en tout temps est facilement acceptée.

La naissance de Jésus et sa résurrection étaient la cause d’objections sans fin de la part des âmes basses et des cœurs mal préparés. La résurrection, nul ne l’avait vue ; les juifs soutenaient que les amis de Jésus avaient emporté le cadavre en Galilée. On répondit à cela par la fable des gardiens, auxquels les juifs auraient donné de l’argent pour dire que les disciples avaient enlevé le corps[34]. — Quant à la naissance, deux courants d’opinion contradictoires se dessinaient ; mais, comme tous les deux répondaient à des besoins de la conscience chrétienne, on les conciliait tant bien que mal. D’une part, il fallait que Jésus fût descendant de David[35] ; de l’autre, on ne voulait pas que Jésus eût été conçu dans les conditions ordinaires de l’humanité. Il n’était pas naturel que celui qui n’avait pas vécu comme les autres hommes fût né comme les autres hommes. La descendance de David s’établissait par une généalogie où Joseph était rattaché à la souche davidique. Joseph était père de Jésus[36] ; pour rattacher Jésus à David, il s’agissait donc simplement d’y rattacher Joseph. Cela n’était guère satisfaisant dans l’hypothèse de la conception surnaturelle, Joseph et ses ascendants supposés n’ayant dans une telle hypothèse contribué en rien à la naissance de Jésus. C’est Marie qu’il aurait fallu rattacher à la famille royale ; or aucune tentative ne fut faite au ier siècle pour cela[37], sans doute parce que les généalogies étaient fixées avant que l’on prêtât d’une manière sérieuse à Jésus une naissance en dehors de l’union régulière des deux sexes, et qu’on ne contestât à Joseph ses droits à une réelle paternité. L’Évangile hébreu, au moins à la date où nous sommes, laissait toujours Jésus fils de Joseph et de Marie[38] ; l’Esprit-Saint, dans la conception de cet Évangile était pour Jésus-Messie (personnage distinct de l’homme-Jésus[39]) une mère, non un père[40]. L’Évangile selon Matthieu, au contraire, s’arrête à une combinaison tout à fait contradictoire. Jésus chez lui est fils de David par Joseph, qui n’est pas son père. L’auteur sort de cet embarras avec une naïveté extrême[41]. Un ange vient lever les peines d’esprit que Joseph, en un cas si étrange, avait le droit de concevoir.

La généalogie que nous lisons dans l’Évangile dit selon saint Matthieu n’est sûrement pas l’ouvrage de l’auteur de cet Évangile. Il l’a prise dans un document antérieur. Était-ce dans l’Évangile hébreu lui-même ? On en peut douter[42]. Une grande fraction des chrétiens hébreux de Syrie garda toujours un texte où de telles généalogies ne figuraient pas ; mais, très-anciennement aussi, certains manuscrits nazaréens présentèrent, en guise de préface, un sépher toledoth[43]. Le tour de la généalogie de Matthieu est hébraïque ; les transcriptions des noms propres ne sont pas celles des Septante[44]. Nous avons vu d’ailleurs[45] que les généalogies furent probablement l’œuvre des parents de Jésus, retirés en Batanée et parlant hébreu. Ce qu’il y a de sûr, c’est que ce travail des généalogies ne fut pas exécuté avec beaucoup d’unité ni d’autorité ; car deux systèmes tout à fait discordants pour rattacher Joseph aux derniers personnages connus de la lignée davidique sont parvenus jusqu’à nous. Il n’est pas impossible que le nom du père et du grand-père de Joseph fussent connus[46]. À cela près, de Zorobabel à Joseph, tout a été fabriqué. Comme, depuis la captivité, les écrits bibliques ne fournissaient plus de chronologie, l’auteur croit l’espace plus court qu’il n’est en réalité, et y met trop peu d’échelons[47]. De Zorobabel à David, on s’est servi des Paralipomènes, non sans diverses inexactitudes ou bizarreries mnémoniques[48]. La Genèse, le livre de Ruth, les Paralipomènes ont fourni la tige jusqu’à David. Une singulière préoccupation de l’auteur de la généalogie contenue dans Matthieu a été de nommer par privilège exceptionnel ou même d’introduire de force[49] dans la ligne ascendante de Jésus quatre femmes pécheresses, infidèles ou d’une conduite qu’un pharisien aurait pu critiquer, Thamar, Rahab, Ruth et Bethsabé[50]. C’était une invitation aux pécheurs à ne jamais désespérer d’entrer dans la famille élue. La généalogie de Matthieu donne encore à Jésus pour ancêtres les rois de Juda, descendants de David, à commencer par Salomon ; mais bientôt on ne voudra plus de cette généalogie trop empreinte de gloire profane, et on rattachera Jésus à David par un fils peu connu, Nathan, et par une ligne parallèle à celle des rois de Juda.

Du reste, la conception surnaturelle prenait chaque jour une telle importance, que la question du père et des ancêtres charnels de Jésus devenait en quelque sorte secondaire. On croyait pouvoir conclure d’un passage d’Isaïe, mal rendu par les Septante[51], que le Messie naîtrait d’une vierge. Le Saint-Esprit, l’Esprit de Dieu avait tout fait[52]. Joseph, en réalité, paraît avoir été assez âgé quand Jésus naquit[53] ; Marie, qui semble avoir été sa seconde femme, pouvait être fort jeune[54]. Ce contraste rendait l’idée du miracle facile. Certes, la légende se serait créée sans cela ; cependant, comme le mythe s’élaborait dans un milieu de gens qui avaient connu la famille de Jésus, une telle circonstance d’un vieux mari et d’une jeune femme n’était pas indifférente. Un trait fréquent dans les histoires hébraïques était de relever la puissance divine par la faiblesse même des instruments qu’elle employait. On se plaisait ainsi à faire naître les grands hommes de parents vieux ou longtemps stériles. La légende de Samuel engendra celle de Jean-Baptiste[55], celle de Jésus, celle de Marie elle-même[56]. Tout cela, d’un autre côté, provoquait l’objection des malveillants. La fable grossière inventée par les adversaires du christianisme, qui faisait naître Jésus d’une aventure scandaleuse avec le soldat Panthère[57], sortit sans trop d’effort du récit chrétien, récit qui présentait à l’imagination le tableau choquant d’une naissance où le père n’avait qu’un rôle apparent. Cette fable ne se montre clairement qu’au iie siècle ; dès le ier, cependant, les juifs paraissent avoir malignement présenté la naissance de Jésus comme illégitime. Peut-être argumentaient-ils pour cela de l’espèce d’ostentation avec laquelle, en tête du livre des toledoth de Jésus, on étalait les noms de Thamar, de Rahab, de Bethsabé, en omettant ceux de Sara, de Rebecca, de Lia.

Les récits de l’enfance, nuls dans Marc, se bornent dans Matthieu à l’épisode des mages, lié à la persécution d’Hérode et au massacre des innocents. Tout ce développement paraît d’origine syrienne ; le rôle odieux qu’y joue Hérode fut sans doute une invention des parents de Jésus, réfugiés en Batanée. Ce petit groupe semble, en effet, avoir été une source de calomnies haineuses contre Hérode. La fable sur l’origine infâme de son père, contredite par Josèphe et Nicolas de Damas[58], paraît être venue de là[59]. Hérode était devenu le bouc émissaire de tous les griefs chrétiens. Quant aux dangers dont on supposait que fut entourée l’enfance de Jésus, c’était là une imitation de l’enfance de Moïse, qu’un roi aussi voulut faire mourir, et qui fut obligé de se sauver à l’étranger. Il arriva pour Jésus comme pour tous les grands hommes. On ne sait rien de leur enfance, par la raison fort simple qu’on ne prévoit jamais la célébrité future d’un enfant ; on y supplée par des anecdotes conçues après coup. L’imagination, d’ailleurs, aime à se figurer que les hommes providentiels ont grandi au travers des périls, par l’effet d’une protection particulière du Ciel[60]. Un conte populaire relatif à la naissance d’Auguste[61] et divers traits de cruauté d’Hérode[62] purent donner origine à la légende du massacre des enfants de Bethléhem.

Marc, dans sa rédaction singulièrement naïve, a des bizarreries, des rudesses, des passages qui s’expliquent mal et prêtent à l’objection. Matthieu procède par retouches et atténuations de détail. Comparez, par exemple, Marc, iii, 31-35, à Matthieu, xii, 46-50. Le second rédacteur efface l’idée que les parents de Jésus le crurent fou et voulurent le lier. L’étonnante naïveté de Marc, vi, 5 : « Il ne put faire là (à Nazareth) aucun miracle, etc., » est adoucie dans Matthieu, xiii, 58 : « Il ne fit pas là beaucoup de miracles[63]. » L’étrange paradoxe de Marc[64] : « Amen, je vous le dis, il n’est personne qui, ayant abandonné maison, frères, sœurs, mère, père, enfants, champs, à cause de moi et à cause de l’Évangile, ne doive recevoir au centuple, dès maintenant, maisons, frères, sœurs, mères, enfants, champs, dans le temps présent avec des persécutions de la part des hommes, et dans le monde à venir la vie éternelle », devient dans Matthieu[65] : « Quiconque abandonne maisons, frères, sœurs, père, mère, enfants, champs, à cause de mon nom, le recevra multiplié bien des fois et héritera de la vie éternelle. » Le motif assigné à la visite des femmes au tombeau[66], impliquant nettement qu’elles ne s’attendaient pas à la résurrection, est remplacé dans Matthieu[67] par une expression insignifiante. Le scribe qui interroge Jésus sur le grand commandement le fait, dans Marc, à bonne intention. Dans les deux autres évangélistes, il le fait pour tenter Jésus. Les temps ont marché ; on ne peut plus admettre qu’un scribe ait agi sans malice. L’épisode où le jeune riche appelle Jésus « bon maître », et où Jésus le reprend par ces mots : « Dieu seul est bon », parut plus tard scandaleux. Matthieu arrange cela d’une manière moins choquante. La façon dont les disciples sont sacrifiés dans Marc[68] est également atténuée dans Matthieu. Enfin ce dernier commet quelques contre-sens pour obtenir des effets pathétiques : ainsi le vin des condamnés, dont l’institution était humaine et bienveillante[69], devient chez lui un raffinement de cruauté pour amener l’accomplissement d’une prophétie.

Les saillies trop vives de Marc sont ainsi effacées ; les lignes du nouvel Évangile sont plus larges, plus correctes, plus idéales. Les traits merveilleux se multiplient[70] ; mais on dirait que le merveilleux cherche à devenir plus acceptable. Les miracles sont moins pesamment racontés[71] ; certaines prolixités sont omises[72]. Le matérialisme thaumaturgique, l’emploi des moyens naturels pour produire les miracles, signes caractéristiques de Marc, ont disparu ou à peu près dans Matthieu. Comparé à l’Évangile de Marc, l’Évangile attribué à Matthieu offre des corrections de goût et de tact[73]. Diverses inexactitudes sont rectifiées[74] ; des particularités esthétiquement faibles ou inexplicables sont supprimées ou éclaircies[75]. On a souvent considéré Marc comme un abréviateur de Matthieu. C’est le contraire qui est vrai ; seulement l’addition des discours fait que l’étendue de l’abrégé est plus considérable que celle de l’original. Que l’on compare les récits du démoniaque de Gergésa, du paralytique de Capharnahum, de la fille de Jaïre, de l’hémorrhoïsse, de l’enfant épileptique[76], on se convaincra de ce que nous disons. Souvent aussi Matthieu réunit en un seul acte des circonstances qui, dans Marc, constituent deux épisodes[77]. Quelques récits qui, au premier coup d’œil, paraissent lui appartenir en propre, ne sont en réalité que des calques dénudés et appauvris des longues narrations de Marc[78].

C’est surtout à l’égard du paupérisme qu’on découvre dans le texte de Matthieu des précautions et des inquiétudes. En tête des célestes béatitudes, Jésus avait hardiment placé la pauvreté. « Heureux les pauvres » fut probablement le premier mot qui sortit de sa bouche divine quand il commença de parler avec autorité. La plupart des sentences de Jésus (comme il arrive toutes les fois qu’on veut donner à la pensée une forme vive) prêtaient au malentendu ; les ébionim purs tiraient de celle-là des conséquences subversives. Le rédacteur de notre Évangile ajoute un mot pour prévenir certains excès. Les « pauvres » dans le sens ordinaire deviennent les « pauvres en esprit »[79], c’est-à-dire les pieux Israélites, jouant dans le monde un rôle humble et qui contraste avec l’air orgueilleux des puissants du jour. Dans une autre béatitude, « ceux qui ont faim » deviennent « les affamés de justice »[80].

Le progrès de la réflexion est donc sensible dans Matthieu ; on entrevoit chez lui une foule d’arrière-pensées, l’intention de parer à certaines objections, une exagération dans les prétentions symboliques[81]. Le récit de la tentation au désert s’est développé et a changé de physionomie[82] ; la Passion s’est enrichie de quelques beaux traits[83]. Jésus parle de « son Église » comme d’un corps déjà constitué et fondé sur la primauté de Pierre[84]. La formule du baptême s’est élargie et comprend sous une forme assez syncrétique les trois mots sacramentels de la théologie du temps, le Père, le Fils, le Saint-Esprit[85]. Le germe du dogme de la Trinité est ainsi déposé dans un coin de la page sacrée, et deviendra fécond. Le discours apocalyptique prêté à Jésus sur la guerre de Judée en rapport avec la fin des temps est plutôt renforcé et précisé qu’affaibli[86]. Nous verrons bientôt Luc employer tout son art pour atténuer ce qu’avaient d’embarrassant ces assertions téméraires sur une fin qui ne venait pas.

  1. La date approximative résulte : 1o du verset xvi, 28, qui devait être vrai encore à l’époque de la rédaction ; 2o de l’εὐθέως (xxiv, 29-30), qui empêche de trop s’éloigner de la guerre de Judée (comparez Luc, xxi, 24). La circonstance de l’Évangile prêché partout (xxiv, 14) ne donne rien de précis.
  2. Ainsi, dans les citations de l’Ancien Testament, l’accord est remarquable. Comp. Matth., xv, 8, et Marc, vii, 6 ; Matth., xix, 5, et Marc, x, 7 ; Matth., xxi, 13, et Marc, xi, 17 ; Matth., xxii, 32, et Marc, xii, 26 ; Matth., xxii, 44, et Marc, xii, 36 ; Matth., xxi, 42, et Marc, xxii, 10-11 ; Matth., xxvi, 31, et Marc, xiv, 27 ; Matth., xxiv, 15, et Marc, xiii, 14. Pour comprendre ce que ces coïncidences ont de frappant, se rappeler que Jésus parlait araméen et non grec.
  3. Bizarres consonnances de mots employés en des circonstances plus ou moins parallèles, mais bouleversés : ἀπήγγειλαν, Marc, vi, 30 et Matth., xiv, 12 ; ἐξέστη et ἐξίσταντο, Marc, iii, 21 ; Matth., xii, 23.
  4. Voir les tableaux dressés par M. Réville, Études crit. sur l’Évang. selon saint Matthieu, p. 2 et suiv.
  5. Que le Matthieu actuel ne soit pas une simple traduction d’un original hébreu, c’est ce que prouvent, outre l’emploi des Septante dans les citations de la Bible, beaucoup d’autres particularités ; par exemple, le rôle de père attribué au Saint-Esprit, contrairement au genre de l’hébreu rouah (cf. Évang. des Hébr., Hilg., p. 16, 23-24 ; voir ci-après, p. 185). D’un autre côté, la fidélité de l’interprétation quant au sens général résulte des contradictions que le rédacteur n’a pas effacées. Le plus souvent, il subordonne Marc aux λόγια ; ceux-ci constituent son objet principal. Mais Papias atteste qu’il y avait des traductions fort diverses des λόγια (dans Eus., H. E., III, xxxix, 16). Le λόγιον Matth., v, 37, paraît avoir été mal traduit par l’auteur du premier Évangile. Cf. Jac., v, 12 ; Justin, Apol. I, 16 ; Homél. pseudoclém., iii, 55 ; Clém. d’Alex., Strom., VII, 11.
  6. Matth., i, 21, 23 (hébr. et Sept.) ; ii, 6 (hébr. et Sept.) ; ii, 15 (hébr.) ; ii, 18 (hébr. et Sept.) ; ii, 23 (hébr.) ; iv, 15-16 (hébr. et Sept.) ; viii, 17 (hébr.) ; xii, 17-21 (hébr. et Sept.) ; xiii, 35 (hébr. et Sept.) ; xxi, 5 (hébr.) ; xxiii, 35 (Sept.) ; xxvii, 9-10 (hébr. et Sept.) ; xxvii, 43 (hébr. et Sept.). Dans les récits historiques, quand l’auteur copie Marc, il lui emprunte aussi ses citations.
  7. Ναζωραῖος κληθήσεται (ii, 23), tiré de Isaïe, xi, 1 ; lx, 21.
  8. Comp. Marc, i, 21-22, à Matth., v, 2 ; vii, 28 ; Marc, x, 31-32, à Matth., xix, 30 ; xx, 17 ; Marc, xi, 33 ; xii, 1, à Matth., xxi, 28-33 (cf. Luc, xx, 7-9). L’intercalation des instructions apostoliques dans Marc, iii (comp. Matth., à partir de ix, 37), n’est pas moins sensible.
  9. Notez la formule du v. 52.
  10. Ch. xiii, d’après la forme parabolique ; ch. xxiii, d’après l’analogie du sujet (pharisiens) ; ch. xviii, init., idée d’enfance.
  11. Comp. Matth., x, 38-39, et xvi, 24-25, avec Marc, viii, 34-35 ; Matth., v, 29-30, et xviii, 8-9, avec Marc, ix, 43-47 ; Matth., v, 31-32, et xix, 8-9, avec Marc, x, 11 ; Matth., xxiii, 11, et xx, 16, avec Marc, x, 43 ; Matth., x, 22, et xxiv, 9-13, avec Marc, xiii, 13.
  12. Ainsi Matth., x, 1, est peu naturel, avant qu’il ait été question des apôtres ; au contraire, Marc, iii, 14 ; vi, 7, est logique. Comp. de même Matth., x, 25 ; xii, 24 et suiv.
  13. Matth., x, 25 ; xi, 21 ; xxiii, 37.
  14. Matth., ix, 27-30 ; xx, 29-34.
  15. Matth., ix, 32-34 ; xii, 22-24.
  16. Matth., xiv, 13-21 ; xv, 32-39.
  17. Matth., xii, 38-42 ; xvi, 1-4.
  18. Matth., v, 29-30 ; xviii, 8-9.
  19. Matth., v, 32 ; xix, 9.
  20. Matth., ix, 27 ; xx, 30 ; cf. Marc, x, 46-53 ; Luc, xviii, 35-43.
  21. Matth., viii, 28 ; cf. Marc, v, 1-10.
  22. Matth., xi, 2.
  23. Matth., xxi, 1.
  24. Matth., iv, 18. Cf. δύο πλούσιοι, Évang. des Naz., Hilg., p. 16, lignes 30-31. Comparez la même chose dans le Schah nameh, épisode de Siawusch. Mohl, II, préf., p. vii-viii (nouv. édit.).
  25. Matth., xvii, 24, 27, inséré dans Marc, ix, 33.
  26. Comp. Matth., xxvi, 24-26, 49-50, à Marc, xiv, 21-22, 45-46.
  27. Voir surtout Matth., iv, 4, 6, 7, 10 ; xviii, 16 ; xxi, 16.
  28. Vie de Jésus, p. 250 et suiv.
  29. Voir Vie de Jésus, p. 453 et suiv.
  30. Comp. II Sam., xvii, 23 (trad. grecque), et Matth., xxvii, 5.
  31. Zach., xi, 12-13.
  32. Matth., xi, 7-30 ; xii, 25-37, 39-45.
  33. Matth., ix, 34 ; xii, 14-15 ; xiv, 35-xv, 1 ; xv, 30-xvi, 1 ; xix, 2-3 ; xxi, 14-15 ; xxvi, 1 ; xxvii, 20.
  34. Matth., xxvii, 62-66 ; xxviii, 11-15.
  35. Rom., i, 3 ; Apoc., v, 5 ; Act., ii, 30. Cf. Talm. de Jér., Sanhédrin, 43 a.
  36. Luc (iii, 23) atténue la difficulté par son ὡς ἐνομίζετο. Cérinthe et Carpocrate étaient ici parfaitement logiques. Épiph., hær. xxx, 14. Peut-être la rédaction du v. 16 du premier chapitre de Matthieu était-elle plus précise dans l’Évangile nazaréen dont se servaient Cérinthe et Carpocrate. Voir Hilgenfeld, p. 15, 19.
  37. Les passages Luc, i, 27, et ii, 4, impliquent même l’opinion contraire. La logique reprit ses droits au iie siècle ; on crée alors, ou du moins l’on suppose à Marie une descendance davidique. Protévangile de Jacques, c. 10 (p. 19, Tisch.) ; Évang. de la Nat. de Marie, c. 1 (p. 106) ; Évang. de pseudo-Matth., c. 12 (p. 73) ; saint Justin, Dial., 23, 43, 45, 100, 101, 120 ; Apol. I, 32 ; Irénée, III, xxi, 5 ; Tertullien, Adv. Marc., III, 17, 20 ; IV, 1, 7, 19 ; V, 8 ; Adv. jud., 9 ; De carne Christi, 22. (Hilgenfeld, Krit. Untersuch. über die Evang. Justin’s, etc., p. 100, 101, 140 et suiv., 153 et suiv., 156 et suiv.)
  38. Épiph., hær. xxx, 14. Toutes les sectes ébionites adoptèrent cet Évangile ; or une partie au moins de ces sectes niait la naissance surnaturelle de Jésus.
  39. Voir ci-dessus, p. 50, 103, note 2 ; 106, note 2 ; 176, note.
  40. Ἡ μήτηρ μου τὸ ἅγιον πνεῦμα. Hilgenfeld, p. 15 (ligne 22), 16 (ligne 15 et suiv.), 20, 23.
  41. Matth., i, 16, 18, 25.
  42. Voir ci-dessus, p. 105. Épiph., hær. xxviii, 5 ; xxix, 9 ; xxx, 3, 6, 14.
  43. Βίϐλος γενέσεως.
  44. Βοές, et non Βοόζ.
  45. Ci-dessus, p. 60-61. Jules Africain, dans Eus., H. E., I, 7.
  46. Cela est peu probable, cependant ; car, dans Luc, la divergence commence au père même de Joseph.
  47. Luc en met davantage. En général, la généalogie de Luc est la plus étudiée. Il semble qu’on y cherche à corriger celle de Matthieu d’après des vues réfléchies. Eusèbe donne de ces divergences voulues une explication qui montre bien ce que ces généalogies eurent d’artificiel. Quæst. ad Steph., 3.
  48. Les séries de quatorze (Matth., i, 17) ne sont obtenues qu’en faisant violence à l’histoire des rois de Juda. La correction que présente ici le texte syriaque curetonien est tout apologétique.
  49. C’est ce qui a lieu pour Rahab.
  50. La synagogue cherchait, au contraire, à supprimer autant que possible de la Bible le souvenir de ces femmes et en particulier les traces de mariages avec des étrangères. Geiger, Urschrift und Uebersetzungen der Bibel, p. 361 et suiv. Voir Mischna, Megilla, 4 et la tosifta sur ce passage.
  51. Isaïe, vii, 14.
  52. Sur les générations ἐξ οὐδενὸς θνητοῦ, voir Philon, De cherubim, § 12 et suiv.
  53. V. Vie de Jésus, p. 74, et l’appendice à la fin de ce volume.
  54. Les mariages disproportionnés quant à l’âge des conjoints ne sont nullement appréciés en Orient comme chez nous.
  55. Luc, i.
  56. Évang. de la nativité de Marie, dans Tischendorf. p. 106 et suiv. Au moyen âge, on remonta plus haut encore. Voir Hist. litt. de la Fr., t. XVIII, p. 834 et suiv.
  57. Acta Pilati, a, 2 ; Celse, dans Origène, Contre Celse, I, 28, 32 ; Talm. de Jér. Schabbath, xiv, 4 ; Aboda zara, ii, 2 ; Midrasch Koh., x, 5 ; Épiphane, hær., lxxviii, 7 ; saint Jean Damascène, De fide orthod., IV, 15.
  58. Jos., Ant., XIV, i, 3 ; B. J., I, vi, 2. Cf. Ecclésiaste, x, 16. Ce livre peut être du temps d’Hérode.
  59. Jules Africain, dans Eus., H. E., I, vi, 2, 3 ; vii, 11, 12. Cf. Macarius Magnes, ch. xi, p. 77, Paris, 1876 (emprunte-t-il à Eusèbe ou à l’Africain, ou à une source indépendante de l’Africain ?), et Justin, Dial., 52.
  60. Voir la Vie de Zoroastre, traduite par Anquetil-Duperron ; se rappeler Cyrus, Romulus, etc.
  61. Suétone, Aug., 94, d’après Julius Marathus.
  62. Vie de Jésus, p. 252, note 2.
  63. Comparez encore Marc, xiii, 12, à Matth., xvi, 4 (cf. xii, 40) ; Marc, ix, 12-13, à Matth., xvii, 11-12 ; Marc, xiii, 32, à Matth., xxiv, 36 (omission de οὐδὲ ὁ υἱός, remis plus tard) ; Marc, xiv, 11, à Matth., xxvi, 15 (promesse devenant une réalité) ; Marc, xiv, 41, à Matth., xxvi, 41 (suppression de l’obscur ἀπέχει) ; Marc, xv, 34, à Matth., xxvii, 46 (correction destinée à mieux expliquer le malentendu) ; Marc, xiii, 14, à Matth., xxiv, 15 ; Marc, xiv, 49, à Matth., xxvi, 56.
  64. Marc, x, 29-30.
  65. Matth., xix, 29.
  66. Ἵνα ἐλθοῦσαι ἀλείψωσιν αὐτόν. Marc, xvi, 1.
  67. Θεωρῆσαι τὸν τάφον.
  68. Marc, iv, 13, 40 ; vi, 52 ; viii, 17 et suiv. ; ix, 6, 32 ; x, 32 ; xiv, 40.
  69. Comp. Marc, xv, 23, à Matth., xxvii, 34. Luc, xxiii, 36-37, commet la même erreur.
  70. Dans Marc (iii, 10), Jésus guérit « beaucoup de malades » ; dans Matthieu (xii, 15), il guérit « tous les malades ».
  71. Comp. Matth., viii, 18-27, à Marc, iv, 35-40 ; Matth., viii, 28-34, à Marc, v, 1-20 ; Matth., ix, 2 et suiv., à Marc, ii, 3-4 ; Matth., ix, 20 et suiv., à Marc, v, 25-26 ; Matth., ix, 23 et suiv., à Marc, v, 40-43 ; Matth., ix, 27-31, à Marc, viii, 22-26 ; Matth., ix, 32-33, à Marc, vii, 32-37 (cf. Matth., xii, 22) ; Matth., xv, 28, à Marc, vii, 30 ; Matth., xvii, 14-18, à Marc, ix, 16-29 ; Matth., xx, 29 et suiv., à Marc, x, 46.
  72. Matth., xxvi, 18, comparé à Marc, xiv, 13-15.
  73. Comp. Matth., xix, 16-24, et l’endroit parallèle dans Marc, x, 17, dans Luc, xviii, 18, et dans l’Évangile des Hébreux (Hilg., p. 16-17). La préoccupation du manger (Marc, iii, 20 ; v, 43 ; vi, 31) a disparu. Le foulon (Marc, ix, 21) disparaît aussi.
  74. Comp. Marc, ii, 26, et Matth., xii, 4.
  75. Marc, xi, 13 et suiv. ; Matth., xxi, 19 et suiv. Luc (xiii, 6 et suiv.) va plus loin ; il moralise toute l’histoire du figuier et en fait une charmante parabole. — La façon particulière de chasser le démon muet (Marc, ix, 29) est généralisée (Matth., xvii, 20).
  76. Comp, aussi Matth., xii, 15-16, et Marc, iii, 7-12 ; Matth., xv, 34, et Marc, viii, 57 ; Matth., xiii, 58, et Marc, vi, 5.
  77. Comp. Matth., ix, 18, à Marc, v, 23, 35 ; Matth., xii, 46, à Marc, iii, 21, 31 ; Matth., xviii, 1, à Marc, ix, 33-34 ; Matth., xxi, 18-19, à Marc, xi, 12-14 et 20.
  78. Comp. Matth., ix, 27-31, à Marc, viii, 22-26 ; Matth., ix, 32-33, à Marc, vii, 32-37.
  79. Matth., v, 3. Comp. Luc (vi, 20), resté ici fidèle au texte primitif des λόγια. À vrai dire, πτωχός rend médiocrement la nuance d’ébion, ce dernier mot impliquant une idée religieuse, une acception pieuse et presque mystique.
  80. Matth., v, 6. Comp. Luc, vi, 21. Εἰκῇ, Matth., v, 22, est une autre atténuation, mais postérieure et due à certains copistes.
  81. Comparez le récit du baptême de Jésus, simple et nu dans Marc, i, 11-12, plus riche et plus accentué dans Matth., iii, 14-15, et dans l’Évangile ébionite (Épiph., hær. xxx, 13).
  82. Marc, i, 12-13.
  83. Matth., xxvi, 50, 52.
  84. Matth., xvi, 18 ; xviii, 17. Les autres évangélistes ne mettent jamais le mot ἐκκλησία dans la bouche de Jésus.
  85. Matth., xxviii, 19.
  86. Matth., xxiv, 14, 29 (εὐθέως), 30. Comp. Luc, xxi, 9, 21.