Les Baisers (Dorat)/La Convention

La bibliothèque libre.
Pour les autres utilisations de ce mot ou de ce titre, voir La Convention.
Les BaisersLambert, imprimeur rue de la Harpe, Delalain, rue de la Comédie Françoise Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 94-97).
◄  Le Casque
La Morsure  ►


LA CONVENTION


 
Oui ; de ta bouche enfantine
Donne-moi dans ces vergers
Autant de furtifs baisers
Qu’Ovide en prit à Corine ;

Autant (je n’en veux pas plus)
Qu’il naît d’amours sur tes traces,
Qu’on voit jouer de Vénus
Et de beautés et de graces,
Sur ton sein, entre tes bras,
Dans ton délicat sourire,
Dans tout ce que tu sais dire,…
Et ce que tu ne dis pas ;
Autant que ton œil de flamme,
Armé de séductions,
Lance d’aimables rayons,
Et de traits qui vont à l’ame,
De voluptueux desirs,
De rapides espérances,
Et d’amoureuses vengeances,
Signal de nouveaux plaisirs ;
Autant que nos tourterelles
Roucoulent de tendres feux,
Quand le printemps de ses aîles

Semble caresser ces lieux.
Alors, si trop de foiblesse
Me fait toucher à ma fin,
Je dirai ? Viens, ma maîtresse,
Recueille-moi dans ton sein.
Que le vent de ton haleine
Mêle mon ame à la tienne ;
Sa chaleur va m’embrâser :
À cette ame évanouie
Rends et souffle encor la vie
Dans un long et doux baiser…
De la rapide jeunesse
Saisissons tous les instans :
Bientôt la froide vieillesse
Vient conduite par le temps,
Hélas ! Et par la sagesse.

Ô ma Thaïs ! Le plaisir
A l’éclat des fleurs nouvelles,

L’inconstance du zéphir ;
Comme lui prompt à nous fuir,
Il se fane aussi-tôt qu’elles.