Les Marguerites françaises/Le-Q

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Lettres.

Ces lettres n’ont point d’autre secret dessein, sinon de vous induire à faire que vous entendiez de ma bouche, ce que vous voyez ici de ma main.

Recevez ceste lettre, laquelle vous representera fidellement, ce que ma voix ne vous peut faire entendre.

Asseurez mes foibles esperances par un arrest favorable, escrit de vostre belle main, et me donnez quelque tesmoignage, que ne me jugez indigne d’une reciproque affection.

Ma vie se rendra à la mercy des cruelles mains de la Parque, si vostre souvenance ne me donne par quelqu’un de vos escrits, une faveur qui rendra vains tous les plus mortels accidents du monde.

Je ne demande point tant d’estre escrit sur le papier, comme en vostre cœur.

Ce n’est pas presomption que ceste lettre, forcée de necessité et vaincue de mes affectionnées prieres, si librement se hazarde.

Tout mon heur depend de vous, ces lettres en sont des tesmoins irreprochables, escrites par mon martyre, qui en estant le sujet et l’autheur, s’est servy de mes larmes, pour encre, et pour papier de la simple candeur de mon ame.

S’il vous plaist que je vive, faites que vostre belle main m’escrive, non une lettre, mais l’arrest favorable qui me conservera.

S’il est vray (comme l’on tient) que ce qui est rare fort precieux, vos lettres me doyvent estre merveilleusement precieuses, puis que si rarement j’en reçois.

Ceste lettre vous representera mon intention, et ce que ma parole ne vous peut faire entendre.

Acceptez en mon lieu ceste lettre, et y remarquez en la lisant l’image de mes affections.

Recevez celle ci, pour perpetuelle obligation de mon service, et comme un gage bien asseuré de l’affection que je vous porte, et du jugement que je fay de vos merites.

Tous les escrits que vous avez de moy, sont enfans de fantaisie, et non de volonté.

Le papier, messager du silence, nous fera entrevoir.

C’est le seul bien que la fortune m’a laissé, pour me contenter, que de commettre en vostre absence au seul papier, ce dont je veux estre l’unique et plus fidelle secretaire.

Liberalité.

Ce n’est pas parfaite liberalité, si tu donnes plus pour occasion de vaine gloire, que de misericorde.

D’autant plus que les hommes sont plus liberaux, d’autant plus ils semblent imiter les Dieux.

Les benefices reçeus par importunitez et requestes, perdent leur merite, et ne valent rien.

La vraye liberalité consiste à l’endroit des parens et amis.

Ce n’est point benefice de donner à celuy qui n’a point de necessité.

J’estime d’avantage ce don partant de vos mains que de la liberalité d’une autre.

Je n’accepte point ce present, pour mon merite, mais bien pour le respect de la belle main qui me le presente.

Toutes les vertus sont obscurcies en une grande ame, si la liberalité ne les esclaire.

Liberté.

Il vaut mieux vivre libre, sans peur, avec peu de chose, que d’estre en servitude, avec beaucoup de moyens.

La liberté d’une belle ame comme la vostre, ne peut estre captivée dans les cachots de l’inconstance.

Vostre liberté peut bastir sa demeure sur la baze de la plus parfaite beauté qui donne sur l’empire de la mort.

La vraye partie est tousjours là où est la liberte.

Vostre liberté n’est obligee qu’à vous-mesme, qui pouvez disposer de celle des autres.

La vraye liberté, c’est de servir à la raison.

Lors que nous pensons estre en liberté, nous sommes en servage.

Je renonce maintenant à ma liberté, et sacrifie mes volontez aux pieds de vostre amour.

Recevez ce que m’avez donné de vostre liberté, pour vous en servir en d’autres amours que les nostres, vous trouverez quelque sujet plus digne que moy.

La liberté ne se doit point perdre, sinon avec le sang.

Mon dueil m’a ravy la liberté, que vous croyez que j’ay recouverte.

Vous estes le Ciel, qui tenez ma liberté pour ostage de ma foy.

J’ay l’ame si genereuse, que je ne sçaurois voir ma liberté asservie, que sous le plus beau sujet du monde.

Lovanges.

Je ne pourrois, sans me rendre capable d’irreverence, parler autrement à vous qu’avec vos louanges.

Vous possedez tant de louables vertus, ou des parties il vertueuses, que vostre memoire servira de phare et de methode à ceux qui vivent durant la course de vostre vie.

La vraye louange doit prendre son origine de la Justice, de l’ame, et pureté de mœurs.

Vous excellez ceux qui dans nostre siecle semblent avoir cogneu le trophée des plus signalées gloires du monde.

Il falloit apres luy avoir presté l’oreille, pour l’entendre, luy donner la voix pour le louer.

Il n’est pas au pouvoir de l’envie, ni de la mesdisance, d’estouffer ni d’esteindre la clarté d’une belle et genereuse action.

La nature vous a rendue l’exemple de ses liberalitez.

Pour les louanges qu’il vous plaist m’attribuer, ce sont les actions ordinaires d’une ame parfaite, d’estimer qu’il n’y a rien imparfait.

Si je vous loue peu, pensez que c’est pour peu sçavoir.

Je suis plus obligé de ces louanges à vostre courtoisie, qu’à la verité.

La vertu a tellement guidé les actions de vostre vie, que les louanges en sont sacrées à l’eternité.

Ces louanges sont plustost filles de vostre eloquence, que de la raison.

Elles naissent plustost de mon devoir, et de mon affection, que de mon bien dire.

Vous vous rendez admirable aux qualitez de l’ame, qui sont mesmes desirées des plus grands, pour se faire cognoistre plus digne de dignitez que les autres.

La vertu n’est qu’un portraict, duquel vous portez le vray patron au cœur, et un image dont le naturel n’est autre chose que vous mesme.

Vos graces ne se peuvent comprendre qu’avec la mesme admiration, dont nostre esprit void les plus signalees merveilles du monde.

Ceux là sont ingrats et ignorans, qui en vous louant n’admirent ce qui ne se peut voir sans admiration, ni ouïr dire sans merveille.

Vostre pieté vous fait louer, vostre prudence obeir, vostre gravité respecter, vostre douceur aymer, vostre vaillance admirer.

Jamais vous ne vous estes esloigné des lieux où l’on fait exercice de l’honneur.

Le Ciel liberal de ses graces envers vous, ne vous a pas tant fait naistre pour vous mesme, que pour servir d’escole de vertu et de sagesse aux ames, qui s’y voudront instruire.

Il a surmonté l’esperance qu’on avoit de luy, encores qu’elle fut bien grande.

Vivre avec vous, c’est vivre en la compagnie de toutes les graces.

Vous faites hommage de vos vertus à la prudence et à l’eloquence.

C’est une faute aussi lourde, de taire des vrayes louanges, que d’en recercher de vaines et mensongeres.

Le sçavoir sert de richesses aux pauvres, d’ornement aux riches, et de soulagement aux odieux.

Ce ne sont pas mes opinions qui vous gratifient, mais c’est la verité qui m’oblige de croire de vous ce qu’un chacun admire.

Voyez perfection, merites, vertu.

Mal.

Je ne ressens point de mal que le vostre, car le mien se pert dans ma constance.

On ne se soucie ordinairement du mal qui est loin, et l’aprehension ne s’en esmeut qu’à mesure qu’il est proche.

Il n’y a jamais serrure ni verroil, qui puisse empescher le mal public d’entrer dans les maisons privées.

Le mal est heureux, quand il se guerist avec plaisir.

Les meschans n’amendent jamais de voyager, car ils se portent tousjours avec eux.

Il n’y a point de mal, qui ne soit accompagné de quelque bien.

Les paroles ne sont pas suffisantes de pouvoir exprimer un mal infiny.

De deux maux, quand la necessité nous presse, nous devons faire choix de celuy qui avec soy traine moins de dommage.

Pren pour signe de ton bien le mal que tu endures.

Ceux qui se plaisent en leur mal, n’ont point besoin de medecine.

Jamais le mal n’a faute de couverture.

Mal revient à l’homme de faire mal, en se laissant porter au vice et à sa passion.

Quiconque ne pourra concevoir mes maux, s’imagine le pourtrait racourcy de tous les tourmens de l’univers, à quoy ma vie semble estre destinee.

Les maux sont si familiers et essentiels à l’homme, que lors qu’ils arrivent, il les doit tenir chez soy, pour compagnons de ses jours.

Nous ne sommes jamais si sages dans nos plaisirs, qu’au milieu de nos maux.

Malhevr.

Je suis si peu favorisé de fortune, que quand elle plouveroit des graces, et des faveurs aussi espoisses que les brouillats de l’hyver, il n’en tomberoit une seule goutte sur moy.

Les plus beaux desseins, qui mesmes prennent leurs fondemens sur les regles de l’honneur, sont ordinairement ceux qui servent de butte aux malheurs.

L’entendement s’en va quand les malheurs arrivent.

Il vaudroit beaucoup mieux n’estre point né, que d’estre conté entre ceux qui sont nés pour la ruine publique.

Nous ne pouvons eviter les malheurs, mais nous les pouvons bien mespriser.

Les malheurs n’arrivent pas pour estre prophetisez, mais ils sont prophetisez, pource qu’ils doyvent estre.

Je prie Dieu que mon malheur ne vous soit jamais manifeste, afin qu’il ne vous avançast le reste des ans, que vous avez encore à vivre.

La fortune ne m’a rien laissé, que l’ame et l’esperance.

L’ombre de mes malheurs en tout lieu m’accompagne.

Le Ciel fait naistre tous les jours nouvelles inventions, pour traverser mon contentement, et croistre ma calamité.

Le gouffre de mes malheurs est un cercle d’affliction qui n’a fin qu’en son commencement.

La resolution avec les plus fermes effets de la constance se verroit abbatue par l’effort de tant de malheurs et de disgraces, qui m’environnent.

Il n’y a rien plus asseuré en ce monde, sinon que toutes choses y sont mal asseurées.

Quand Dieu lasche la bride à nos malheurs, et permet qu’ils nous attaquent, la prevoyance humaine est inutile aux humaines.

Je suis abandonné de tout le monde, fors de mes malheurs, qui ne me peuvent laisser.

Au desespoir où je suis j’estimeray mon ennemy tout homme qui me pensera consoler.

Si le visage estoit un portrait du cœur, on verroit en moy la parfaite image de la douleur et du desespoir.

Le malheur et l’envie m’ont esleu, pour servir de retraite à tout ce qu’ils produisent.

Il semble que la fortune ne travaille à rien d’avantage qu’à desvancer les hommes vertueux, et favoriser les ignorans.

On ne pourroit descrire un accident si pitoyable que le papier n’en fut offencé par une moite humeur, que la pitié tireroit des yeux.

De tous malheurs celuy est le plus miserable, qui ne se peut oublier.

Les hommes commencent d’interpreter mes actions à mon desavantage.

Ou tourneray-je le vol de ceste premiere esperance, qui me promettoit une vie sie heureuse, et si asseuree, au lie de tant de morts rigoureuses, que me donnent maintenant vostre refus.

Les ennuis sont plus communs aux ames qui ont de la resistance, pour quelque sujet, qu’à celle qui se laisse vaincre au premier traict de la fortune.

Voguons vers les champs Elysées, comme au port des bien-heureux, mes larmes seront mon Ocean, la constance sera ma nacelle, mes desirs les rames, mes vœux les voiles, le Ciel sera ma clarté, et ce poignard courage de la douleur, sera le gouvernail que ceste main meurtriere conduira.

Mariage.

La benediction du mariage procede de l’amitié, laquelle manquant, c’est plustost une division d’armes, qu’une union de personnes.

Jaçoit que son ame la dispensast du mariage, son esprit, sa beauté, et ses merites, ne la dispensoient pas de l’amour.

Si je suis contrainte de l’espouser, vous me ferez apporter en douaire ma vie à la mort, et sortant des ceremonies nuptialles, j’entreray à mes honneurs funebres.

La force peut violenter mon corps, mais l’esprit sera exempt de ses violences.

Estre gouverné de la femme, est tres grande injure au mary.

Voyez union.

Memoire.

Ne faites pas ce tort à vostre fidelle, de le laisser couler de vostre memoire, et en appelleroit de vostre jugement à vostre bonté.

Je n’ay point de memoire, pour me souvenir de vous.

N’oubliez pas celuy, qui vous a continuellement en sa memoire.

Conservez moy vivant en vos pensees, comme je vous tiens au plus sensible lieu de mon ame.

Vous n’este pas moins vivante en ma memoire, que vos beautez et perfections le sont en mon cœur.

Voyez Souvenance.

Merites.

Il suffit seulement d’exposer vostre nom pour faire reverer vostre merite.

L’honneur que vous avez merité, par tant de belles actions, se partage entre beaucoup de differentes vertus.

Ceste belle louange, que vous m’attribuez, procede de vostre volonté, et non de mon merite.

Là où est la peine, là est le merite.

Je ne sçaurois faire si grande chose, que ce ne soit trop peu pour vos merites, et pour mon desir.

Vostre merite me pousse à vous aymer, mon humeur me le promet, et mon contentement que j’employe ma bonne volonté pour vous servir.

C’est avoir beaucoup de merites, que d’estimer ceux qui en ont.

Vos merites ont si imperieusement commandé en ma souvenance, que vous avez eu part à toutes mes conceptions.

Vostre merite a autant d’aisles pour voler, que de qualitez pour estre reveré.

Vos merites, qui sont sans comparaison, peuvent asservir plus glorieusement, qu’ils ne peuvent estre dignement servis.

Ainsi que vous pouvez faire estat de meriter plus que personne du monde, j’ay assez d’ententement pour recognoistre ce merite, et assez de courage pour une si belle et louable ambition.

Mesdisances, voyez rapports.

Miseres.

La bonne reputation est la premiere chose, qui laisse les miserables.

On n’est jamais si miserable, que quand on ne le pense plus estre.

Pensant encrer au havre de salut, j’ay rencontré le miserable escueil, contre lequel s’est brisée la nef de mes esperances.

Vous obligez les miserables, vous exerçant au bien qu’ils ne vous peuvent rendre, pour faire reluire en la terre les graces que vous tenez du Ciel.

Il a perdu l’honneur, qui est le plus precieux heritage des pauvres.

Je m’asservois bien, sans dire une seule parole que mes miseres me faisoyent assez entendre au milieu de mon silence.

L’amour autheur de leur ruine, languissoit desja sous la foiblesse de leurs esperances, espouventées de leurs miseres.

Ainsi comme des orphelins miserables, ils souspiroyent leur condition, et prioyent la mort de cacher leurs vies, et leurs miseres, dans le sein de la terre.

On est bien accablé d’une extremité trop extréme, lors qu’on ne peut rien esperer.

Ces pauvres infortunez, à demy vivans, et à demy logez sous la sepulture crioyent au Dieu de la compassion, de se laisser vaincre à la pitié de leurs miseres.

Lors que le jugement faisoit faire place aux inquietudes trop violentes, je me plaignois dolentement de ma miserable fortune.

Mort.

La mort nous suit pas à pas, et par mer, et par terre, elle s’embarque avec nous, monte en croupe derriere nous, et ne nous laisse non plus que nostre ombre.

C’est la mort qui tranche en un moment le fil de nos desirs, et rafle à l’impourveu ce que nous avons tant de peine d’amasser.

Nous n’avons vestu ceste vie caduque et mortelle que pour payer le tribut et acquiter le peage à l’entree de la vie immortelle.

Son ame qui humoit desja le doux air des Cieux, attendoit que son dernier souspir luy ouvrist la porte.

Nous attendons tous les jours la venue de la mort, il y a une grande partie de son chemin fait, car tout ce qui s’est passé de nostre vie, la mort le possede.

Les Monarches, qui sont les Dieux de la terre, contribuent aussi bien à la tombe, que leurs sujets.

La mort et les honneurs font tous mescognoistre.

Il nous est allé attendre devant, au sejour preparé pour les belles et pures ames.

Je suis sommé de mon destin, en la fleur de mes ans, d’effectuer ce que mon premier jour a promis de payer en mon acquit à la nature.

La mort nous acquite de toutes nos obligations.

La mort n’est point un mal, mais la fin de tous maux à qui elle arrive.

Craindre la mort, c’est l’appeller, car la crainte de la mort, c’est une mort perpetuelle.

Nous mourons tous, et à mesure que nous croissons nostre vie decroist.

La mort n’est redoutable, sinon à ceux que le peché tyrannise sous son joug.

C’est un arrest signifié au genre humain, qu’il faut mourir et rendre la vie à celuy qui nous l’a presté.

La mort les a fait jouer en l’Avril de leurs ans le dernier acte de leur vie.

Il a passé par les portes de la mort, avant que d’avoir fait la moitié du chemin de sa vie.

Le jour mesme que nous passons, nous le divisons avec la mort.

La mort a cueilly en elle la plus belle fleur, qui fut jamais plantee au jardin de l’univers.

Pour ne craindre point la mort, il y faut tousjours penser.

Nous ne sçavons ou la mort nous attend, C’est pourquoy il la faut attendre par tout.

Le continuel ouvrage de nostre vie, c’est bastir la mort.

Les esperances du Ciel sont certaines, et celles de la terre sont flatteuses.

Tous les joursde nostre vie tendent à la mort, mais le dernier y arrive.

La longueur de la vie est liee à la condition des mœurs, et non à la quantité des annees.

La parque les invita generallement au festin mortuaire de ses funebres nopces.

Toute mort est heureuse, qui nous met en repos.

Nous sommes naiz pour mourir, et n’avons rien en nous qui puisse vaincre ceste necessité.

Començant à naistre, nous commençons à mourir.

Personne n’est relevé devant la mort, pour estre mineur.

La mort est douce quand c’est la fin, et non pas la punition de la vie.

Nostre vie ayant parfait son cours terrestre, se disparoist de l’horison des hommes, pour se monstrer en celuy des Anges, où estant entrée en un Orient eternel, sa clarté ne se cache jamais.

Celuy ne meurt pas, qui ne meurt que du corps, et qui dans les murs et ruines de sa vie, eternise, rebastit, et renouvelle son nom, son honneur, et sa memoire.

Le vray usage de la mort, est de mettre fin à nos miseres.

La mort n’a rien d’effroyable de soy, non plus que la naissance.

La principale partie de la mort, consiste en ce que nous avons vescu.

La mort conduist bientost les uns à l’ombre en repos, et laisse aller les autres en chemin au travail.

Proposons nous, quand la mort nous sera fascheuse qu’elle n’est point mort, ains plustost commencement de vie.

Bien heureux sont ceux là, qui cognoissent le Ciel premier que le monde.

La mort nous ravit à nous mesmes, et nous desrobe au monde.

Le plus grand bien de l’homme, c’est de bien mourir.

La mort n’arrive jamais trop tost, si elle vient avec l’honneur.

Je n’attens plus que l’heure, que j’entende battre aux champs afin de trousser bagage.

Je n’ay herité que de la douleur de sa mort.

La mort frappant à la porte de sa vie, son esprit se sousleve, et leve ses divines aisles, pour prendre son vol vers sa patrie.

Le trespas ne nous sert que de planche pour passer à l’Eternité des bien heureux.

Nous sommes comme la fueille d’Automne, ores pendue en l’arbre, et tantost couchée par terre.

Nostre vie attachée à un foible filet, pend au bord de nos levres.

Naistre.

Je ne venois que d’estre mis sur le mestier, à peine estoit ourdie la trame de ma vie, et l’ouvrier met le cizeau dedans.

Ce qui naist çà bas soit és sujets animez, ou autres, retoume à son origine.

C’est le Ciel, qui est le vray et commun pays, d’où nous avons tiré nostre origine.

Cest faire tort à l’homme, qui est né pour tout voir, et tout cognoistre, de l’attacher en un endroit de la terre.

Je benis le Ciel d’avoir à nostre naissance marié nos destinées, et fatalement touché nous cœurs d’un mesme desir.

Le Ciel m’a fait naistre sous une constellation, contraire à mon bien, et favorable à mon malheur.

Les choses imparfaites ne naissent jamais, ou fort rarement, des choses accomplies.

Mes cendres ne rougiront jamais, pour avoir commis en ma vie acte indigne de ma naissance.

Natvre.

Apprenons à cercher sans passion, ce que la nature desire, et nous trouverons que la fortune ne nous en seroit priver.

La nature à mis le magazin du bien en nostre esprit, portons y la main de nostre volonté, et nous en prendrons telle part que nous voudrons.

Le long usage se convertist en nature, et ce qui nous est naturel, ne se peut pas aisément changer.

Il y a bien de la difficulté de contrefaire ce qui est divers au naturel.

C’est une chose naturelle que d’aymer, et l’amitié est louable ou blasme, selon l’intention de celuy qui ayme.

Il n’y a plus de remede au mal, quand ce qui estoit vice est passé en nature.

La nature ne permet jamais que les grands maux seroyent durables.

En quelque part où nous allions, nous portons quand et nous nos dispositions, et nos habitudes.

Necessité.

La necessité est la plus forte de toutes les choses du monde, car elle surmonte tout.

Il n’y a point de necessité à une chose, qui n’est point forcée.

Nulle loy ne peut punir la necessité, d’autant qu’elle n’en a point.

C’est une grande peine de vivre en necessité, mais il n’y a nulle necessité d’y vivre.

Tout ce qui est fait par necessité est servitude.

La necessité est la plus importune de toutes les maladies.

Nous trouverions les choses necessaires, si nous recerchons les superflues.

Heureuse est la necessité, qui nous contraint à choses bonnes.

Il n’y a rien plus insupportable, que la delicatesse à un homme necessiteux.

Les loix de necessité sont plus puissantes que celles des hommes.

J’ay passé plusieurs jours en des necessitez plus aisees à plaindre qu’à supporter.

Nous ne sçaurions fuir les necessitez, mais bien les surmonter.

La neccessité est le grand de l’infirmité des hommes.

Noblesse.

La vraye noblesse despend de vertu, et toutes les autres choses sont de fortune.

Il y a mesme difference entre la vertu et la Noblesse, qu’entre la lumiere et la splendeur, l’un esclaire de soy, et l’autre par emprunt.

La noblesse du sang d’autruy, ne te fait point noble, si tu ne l’acquiers de toy-mesme.

Le noble cœur a ceste proprieté, qu’il se meut à choses honnestes, et ne void on jamais aucun de haut esprit, qui se plaise à choses basses et deshonnestes.

Je ne recognois point de plus parfaite noblesse que la vertu, et repute toutes autres choses vanitez, et sœurs de la fortune.

L’esprit seul qui nous guide à entreprendre quelque chose, pour nostre avancement, nous acquiert une noblesse dignement meritee.

Novvelles.

Je recognoy bien par ces tristes nouvelles, que ce que nous cerchons à coup de rame, s’enfuit devant nous à voile desployée.

Ceste nouvelle travaille mes conceptions, et estouffe ma parole.

La plus douce nourriture de mon esprit est, de pouvoir entendre de vos nouvelles.

J’ouvre volontiers mon cœur aux nouvelles de ma fin, puisque ce sont celles de ma felicité.

Les Amants sont ordinairement de telle nature, qu’ils adjoustent plustost foy aux mauvaises nouvelles, qu’aux bonnes.

Nvict.

Les ombres de la nuict commençoient à cercher les beautez de la terre, et par l’esloignement des rayons du Soleil, les astres moins luisans faisoyent desja remarquer leurs clartez empruntées.

Les noirs rideaux de la nuict tirez, avoient tiré tous les hommes au sommeil.

Le Soleil desja foible de lumiere, se couchant sous la terre, nous ostoit la derniere partie du jour, pour nous rendre la premiere de la nuict.

La nuict avoit desja bien avec son voile obscurci, couvert la terre de tenebres.

La nuict jouyssant de ses privileges, avoit retiré les humains de leur travail, et imposé silence à toutes les creatures.

La nuict commençoit peu à peu à s’espandre sur la terre, et couvroit avec un seul voile de ses tenebres tous les differens visages, et les dissemblables apparences d’icy bas.

Toutes choses rendoyent au repos coustumier, permis en ses licences nocturnes.

L’air calme et serain, pour jouyr d’une paix agreable, avoit par tout reçeu le silence paisible, pere du repos.

Le somme oublieux tenoit encor mes paupieres charmées de la douceur de son pavot.

Chacun se retiroit, pour prendre le repos, que les tenebres presentent pour le soulagement de nature.

La moiteur se preparoit, pour s’amasser sur les fueilles, les oyseaux s’accommodoyent avec le silence, ayant pris le couvert aux bois prochains.

Nvire.

Le propre de la vie est de chasser ce qui luy nuist.

C’est le fait d’un homme sage, de ne nuire à personne, encores qu’il en eust bien le pouvoir.

L’homme qui obeist à nature, ne nuist à personne.

La mort mettra fin à tout ce que vous sçauriez inventer pour me nuire.

Obeir.

Le temps vous apprendra mieux mon obeissance, que mes paroles ne le vous peuvent persuader.

Je ne puis, ni ne dois commander à celuy auquel je suis tenu d’obeir.

Souvenez vous de vos merites, et vous n’oublierez pas mon obeissance.

Nul n’est capable de commander autruy, qui ne sçait obeir à la raison.

Si la resolution de vos vœux est aussi naifve que vos paroles sont honorables : mon obeissance proteste dés à ceste heure suivre les loix de vos desirs sous la guide de l’honneur.

La fin de l’obeissance est le periode du commandement.

Si je ne vous ay obey par effet, je ne vous ay jamais desobey avec l’intention et la volonté.

Voulez vous plustost obeyr à vostre courtoisie, qu’à vostre jugement ?

Obeir volontairement, c’est oster ce qu’il y a de cruel en la servitude.

Donnez moy vos commandemens pour exercer mon obeissance.

Je n’auray durant mes jours aucune volonté, qui n’obeisse à la vostre.

Celuy obeist à regret aux loix d’autruy, qui ne peut obeir aux siennes.

J’essayeray par toutes sortes d’obeissance, à me rendre digne d’un bien, que je ne puis meriter autrement.

Vous sçavez la puissance, que vous avez sur moy, et que je suis autant vostre, que vous le pourriez souhaiter.

Je desire en ce sujet, et en tout autre, vous faire paroistre toute l’humble obeissance, qui se peut imaginer pour vous rendre content.

N’estant né que pour vous obeir, je reçoy un extréme gloire, que mon obeissance vous apporte le contentement que vous desirez.

Obligation.

Où il n’y a point d’obligation, il n’y a point de devoir.

Aucune dame ne tient mon ame obligée, outre le devoir universel, que vous seule, que je desire servir.

Celuy qui s’acquite de son devoir, ne s’oblige à personne.

Je vous offre de garder la souvenance de ceste obligation eternellement vive en ma memoire.

Manquer à ce que je vous doy, ce seroit faillir à ce que j’ay promis à ma constance.

Cela m’oblige à le recognoistre, et fait naistre des desirs, pour m’en acquiter.

Les hommes ne sont obligez à donner, ni demander plus que le possible.

Ceste obligation est trop grande pour ma puissance.

Je vous serois plus obligé, si au lieu de louer le merite, que vous feignez en moy, vous vouliez croire l’affection que j’ay pour vous.

Occasion.

Rien ne peut tant à faire bien reussir ce que nous entreprenons, que l’occasion.

C’est une grande perte és grandes affaires que le temps : car les plus beaux sujets dependent des occasions.

Vous aurez chere l’occasion qui s’offre aux souhaits de nos reciproques desirs.

Si à l’occasion bien prise, vous adjoustez encor la diligence, rarement manquerez vous de bon succez.

Nostre nonchalance fait demeurer derriere nous : les plus belles occasions, avec nos plus douces annees.

Il est bien seant faire voir et demonstrer la vertu qu’on a en soy-mesme, toutesfois que l’occasion se presente.

Tant plus vous mettez la main promptement en une affaire, d’autant moins dependez vous d’une chose incertaine, qui est le lendemain.

Souvenez vous que les occasions sont emplumées, et qu’elles disparoissent, presque en se monstrant, ne laissant bien souvent que le desespoir à ceux qui ne les ont sçeu prendre, quand elles se sont presentees.

Offences.

Celuy reçoit plus de honte, qui se veut excuser aux despens de l’honneur d’autruy, que s’il confessoit franchement son offence.

L’offence qui est plus grande que le service, change l’obligation de la recompense en punition.

Les dignitez aggravent l’offence sur celuy qui est plus obligé de n’offencer.

La foy qui rend mes paroles justes, ne peut offencer celle que j’ay promise à vos merites.

Personne ne trouve les offences petites qui luy sont faites.

Les advertissemens trop libres, ne sont pas corrections, mais offences.

Lors qu’un sujet cherist une seconde personne, il offence la premiere.

Vous avez interessé ma personne, et non ma reputation.

Vostre reputation ne peut estre offencée par les effets de mes pretensions, lesquelles n’ont jamais eu pour phare que la vertu, et pour guide que l’honneur.

Qui offence à tort, donne occasion d’estre offencé avec raison.

Offrir et presenter service.

Tout ce qui est mien n’est moins vostre que sont vos pensées et vos paroles.

Vous estes la premiere à qui mes affection sont offertes, et serez, s’il vous plaist la derniere, qui en aurez la possession.

Vos merites immortels se sont acquis sur mon ame une possession pareille.

Ayez ma devotion agreable, et la reglant par telles loix qu’il vous plaira, retirez en quand et quand toutes les preuves que je vous en pourrois donner.

Mon obeissance prosternee aux rayons de vos parfaites beautez, jure vivre parmy la vie immortelle, pour rendre ses devotions semblables à vostre merite.

Tout l’honneur et l’ambition où j’aspire n’est que de me voir employé à vostre service.

Permettez que vous serve, et sans avoir merité cest honneur ayez pour agreable le tourment de celuy, qui ne vit que de vostre seul souvenir.

Vostre beauté toute seule, vous peut tesmoigner l’affection que je vous porte.

Toutes les puissances de mon ame ne sont guidées que du respect de vostre service.

Le plus favorable don que me puissiez offrir, c’est vostre amitié, laquelle je prefere à tous autres thresors.

Recevez autant agreable ma devotion et fidelité, pour service, que j’observeray vos commandemens pour faveur.

Il faut croire qu’il n’y a rien de plus durable au monde, que les heureuses loix du destin, qui veut que je vous ayme et respecte sur toute autre.

Accordez vous avec le destin, qui veut que je sois eternellement vostre.

Soyez aussi desireuse de mon contentement, que je le suis de vostre service.

Je vous presente l’humilité de mes vœux, le respect de mon amour, la fidelité de mon cœur, mes affections, mon service, avec le desir que vous me nommiez eternellement vostre.

Tenez pour entier, le sacrifice d’un cœur sans fard, que j’immole aux pieds de vos commandemens.

Mes affections et ma vie ne tiennent pour souverain bon heur, que la resolution de mon ame, à ne recevoir jamais autre object que le vostre.

Cela se loge mieux en l’ame, qu’il ne se peut descouvrir et exprimer au papier.

Je ne suis point si volontaire, à vous offrir mon service, que je ne sois encor plus disposé à le vous rendre.

Recevez s’il vous plaist, belle et divine beauté, toutes ces asseurances de mon amour, afin que le Ciel les guide en un port de contentement et de bon heur.

Je me tiendray tousjours bien heureux de pouvoir faire quelque chose, qui donne du repos à vostre esprit.

Honorez moy tant qu’avec vostre consentement, je me puisse dire vostre tres humble serviteur.

Disposez vos commandemens au but de mes souhaits, qui sont de m’eterniser le plus fidelle organe de vos volontez.

Si ce qui est en ma puissance, et sous la charge de mon honneur, se peut convertir en la recognoissance de vostre courtoisie, disposez en, afin que l’ingratitude, ne gaigne le devant en ma bonne volonté.

Je suis tellement dedié à vostre service, que la verité manquera plustost aux ordonnances du Ciel, qu’en ceste mienne resolution.

Opinion.

Vous avez conçeu une nouvelle opinion en vostre esprit, au prejudice de ma fidelité, et au regard de mon esperance.

Vous m’accusez plus par opinion, que par tesmoignage.

Nous sommes ordinairement plus malades par opinion que par effets : Car il y a plus de choses qui nous estonnent, que qui nous offencent.

Mes opinions ont pris la loy des apparences de vostre infidelité.

L’utilité mesure les choses necessaires, et l’opinion les superflues.

Si vous vivez selon la nature, vous ne serez jamais pauvre, mais si vous vivez selon l’opinion, vous ne serez jamais riche.

Quiconque s’estime heureux, et qui n’a que l’opinion de ce bon heur pour objet, se trompe.

La pluspart des biens et des maux que nous avons, depend plus de l’opinion, que de la chose mesme.

Les opinions que nous prenons à la premiere veue s’impriment de là en avant si fort en nostre entendement, qu’il est bien malaisé de les effacer.

L’opinion augmente nostre mal, et nostre apprehension le rend plus vehement.

Celuy qui ayme la louange et l’ostentation, quitte l’obeissance de la raison, pour suivre celle de l’opinion.

Comme les chemins sont finis, et les destours infinis, ainsi les appetits de la nature sont limitez, mais ceux de la nature n’ont point de bornes.

Vous ne pouvez frauder mon opinion, qu’à son prejudice, et à mon dommage.

Mes opinions n’offenceront vostre espoir, tant qu’il me restera quelque souvenir de l’obligation que je vous ay.

Oublier.

Mon naturel ne me peut permettre d’oublier ce que j’ay tenu plus cher et plus precieux que ma propre vie.

Je vous prie de n’oublier celuy qui ne respire par ses souspirs, que dans l’air de vos desirs plus fidelles.

Vous avez laissé tomber la fleur de nostre amitié, dans l’espine de l’oubly.

Jamais ma memoire ne recevra d’autre impression, au prejudice de mon amour.

Les caracteres de vostre souvenance, sont si profondesment burinez en mon ame, qu’ils ne se peuvent effacer, sans oster la piece.

J’ay tousjours eu une secrette peur que vous m’oublieriez, et que tant plus le temps avantageroit vostre jugement, d’autant plus recuilleriez vous mon esperance.

Il faut ensevelir dans une eternelle oubliance, les choses, dont la memoire ne peut faire que des nouvelles blessures à l’ame.

Ce seroit un erreur de croire que toutes les grandeurs du monde ne sçeussent bannir le souvenir d’un cœur que j’ayme tant que le vostre.

Je ne sus pas si tost esloigné de vous, que je ne fusse aussi bien hors de vostre souvenance, que de vostre veue.

Paix.

Desja la France prenoit halene sous le relasche des armes, et ce grand Roy qui y preside, avoit accordé la paix à ses voisins, pour la procurer à son peuple.

La felicité d’un estat, si mesuré par les années de la paix, plus de temps il demeure paisible, plus de temps il est heureux.

La nourriciere Ceres caressee et asseuree en nos campagnes, nous monstroit desja sa perruque blonde, et ne redoutoit plus d’estre foulee des enfans de Bellonne.

La chaste Diane reposoit en liberté sur les ombrages des bois.

Maintenant les effets de la paix nous halenent des aisles de leurs doux Zephirs.

Il n’y a rien qui tant maintienne les grands Princes en paix, que leur puissance et egalité de forces.

L’union des Citoyens est plus necessaire à la cité, que la magnificence des edifices.

Pardonner.

Mon honneur vous pardonne l’offence de vos fragilitez, en faveur de vostre repentir.

Si les grandes fautes, commises par inimitié, sont dignes de pardon, que doit-il estre de celles qui sont causées par trop d’abondance d’amour ?

Vos merites meriteront d’avantage, tant plus vous acquerrez de triomphes à vostre clemence.

Le Prince qui veut beaucoup sçavoir, il faut qu’il pardonne beaucoup.

C’est une plus gracieuse façon de pardonner, que de vouloir ignorer les offences.

Ce qui se commet par ignorance, est pardonnable, et le regret en doit estre oublié.

Ceux là pechent envers tout le monde, qui ne sçavent pardonner qu’à eux mesmes.

C’est aux grands courages d’excuser les grandes fautes.

Faites, je vous supplie ceste force à vostre volonte, et m’accordez une grace, que je vous demande à genoux, comme à celuy qui tient en ses mains, ma mort et ma vie.

L’offence et le pardon ne peuvent partir d’un mesme lieu.

Ne faites point que les tenebres me viennent, d’où j’attens la lumiere.

Il est bon de pardonner à ceux qui ont conjuré vostre mort, pource qu’estans descouvers, ils ne peuvent plus nuire à vostre vie, et qu’estans sauvez, ils peuvent servir à vostre reputation.

La plus belle partie de la vengeance, est de pouvoir pardonner.

Il n’y a rien certainement si honorable en ce monde, (mesme à l’opinion des Payens) que de sçavoir pardonner.

Que vous serviroit vostre douceur et humanité, si jamais il ne s’offroit occasion d’en faire preuve ?

Je ne veux point que la malignité de vostre ame empire la bonté de la mienne.

Les braves vainqueurs reçoyvent plus de louange en se monstrans pitoyables apres la victoire, qu’en la victoire mesmes.

Les hommes prins à mercy, sont assiduels spectacles de la vertu d’autruy.

Ce que la passion trop violente fait executer, est pardonnable.

C’est un beau trophée que de se vaincre soy mesme, et pardonner plustost que de se venger.

Voyez repentir, parler, voir silence.

Passions.

Vivez sans passion, vous qui n’en avez jamais esté attaints, et desquels la douleur d’autruy, comme peinture vaine, n’esmeut point la pensee.

Les passions suscitées par les objets exterieurs, sont plus violentes que celles qui naissent au dedans.

C’est foiblesse d’esprit, que d’avoir des mouvemens trop violens, comme s’est foiblesse aux enfans et aux vieillards, de ce que quand ils veulent cheminer ils courent.

Nos sens humains ont cela que tout aussi tost que quelque passion les occupe, la raison est esclave de la fantasie.

La cause de mes passions amoureuses, vous est manifeste, par vostre beaute.

Les cœurs qui ayment avec passion, sont sujets à beaucoup d’evenemens.

Il n’y a point de prise sur les volontez des hommes, que leurs passions.

La seule passion qui possede vostre ame aveuglant vostre cognoissance, vous interdit le bien que ce change peut apporter.

Comme les aisles ne servent de rien aux oyseaux, estans pris par les pieds, ainsi nostre raison est inutile, quand nos passions nous commandent.

Il est impossible que nous ne soyons possedez de quelque passion durant la fureur de nostre jeunesse.

Mon cœur n’a pour toutes ses pensées rien que vos beautez, dont le seul souvenir parmy tant de tristesses, qui me rongent de tous costez, donne la vie à la cruelle mort qui m’accompagne.

J’ay esté forcé d’une telle violence, de vous declarer mes passions, que l’effet ni l’effort, ne s’en peut si bien dire, que sentir : sinon de ceux qui sont en pareille recerche.

Ceux qui prennent leurs passions pour compagnes, les ont quelquefois pour maistresses.

N’avoir point de passions, c’est le propre d’une beste, et ne les regir pas, c’est n’estre point homme.

Pavvreté.

Celuy ne se peut douloir d’aucune perte, qui n’a rien sujet au naufrage.

Une pauvreté volontaire est une espece de grandeur à l’ame.

Estre pauvre par nature, ne fait point de honte, mais l’on a en haine de voir aucun pauvre par meschante occasion.

Il n’y a aucun accident en nostre vie plus miserable que la pauvreté, car pour bon et juste que soit un homme, estant pauvre on ne fait aucun estat de luy.

Nous louons celuy qui supporte l’indigence, avec patience, et la maladie, avec constance.

La pauvreté a cela de louable, c’est qu’elle vous fait recognoistre ceux qui nous ont aymez.

Si tu ne desires pas beaucoup, le peu te semblera tousjours assez.

Je ne laisseray pour toute richesse à mes parens, que la memoire de mon nom.

La pauvrete n’est point excuse recevable, pour nous faire faire chose meschante.

Le meilleur employ que nous puissions faire de nos biens, c’est de les mettre à la banque de Dieu.

La pauvreté a pour le moins ce bon heur, qu’elle n’a point de peur de tomber d’un haut estat à un bas.

C’est une grand’ misere de naistre pauvre, mais encor elle est plus grande d’y envieillir, comme font plusieurs.

La main du pauvre, est la bourse de Dieu, si nous avons à acheter quelque chose de luy, il faut mettre là nostre argent.

Celuy n’est pas pauvre, qui possede peu de bien, mais qui beaucoup en desire.

Ceux que la pauvreté rend supportable, ce sont serpens engourdis de froid, que l’on peut manier sans danger : mais aussi tost que les moyens eschauffent leur ambition, ils sont pires que les autres.

Peché, voyez faute.

Pensee.

Rien n’entre en ma pensée, que vostre seule image, unique et ordinaire, hostesse de mon cœur, qui ne respire, ni ne souspire que pour vous.

Je porteray tousjours vostre image gravée au cœur, ainsi qu’en la pensee.

Pour trop penser en vous, je m’oublie moy-mesme, et n’ay point de memoire de moy, sinon quand la douleur m’en fait souvenir.

Mon imagination costoyoit un heureux rivage, et les flots de mon incertitude l’agitoyent de tous costez.

Ce n’est point estre seul, que de vous mettre et consigner en la compagnie de mes plus belles pensées.

Mes pensees sont en vous attachées, au service, à l’honneur, et à la contemplation des divines vertus de vostre ame.

En toutes choses faut voir et penser, plustost que s’y embarquer, quelle en sera la fin.

Tournons nos pensées vers le Ciel, où nostre principal interest repose, et le conjurons de nous ouvrir ses portes.

Mes pensées ne recevront doresnavant autre loy que de vos yeux.

Peril, voyez hazard.

Perfections.

Vostre perfection se peut plustost imaginer que croire, desirer, qu’esperer, envier, qu’aquerir.

Le superflu de vos perfections, repare le defaut des miennes.

Si l’on vit jamais une perfection parfaitement belle, on ne peut dire voir en vous seule l’unité de tout ce qui est de plus parfait au monde.

Ce seroit aspirer à l’impossible, de penser naifvement representer une perfection telle que la vostre, avec la grandeur de son merite, par l’effet de l’art ou de la parole.

Je prie le Ciel qu’il vous rende autant de perfections de bien, que vous estes parfaite en toutes vos actions.

Si l’art m’avoit appris à bien representer les perfections de la nature, je tascherois de donner aux mortels le portraict de vos vertus.

On void en vous toutes sortes de perfections, qui se peuvent acquerir par art et par industrie.

Plus les choses parfaites se cognoissent, et plus elles sont aymées.

Où la perfection se trouve, il n’est besoin de l’aide des choses.

Il est hors du pouvoir du monde de faire voir dans la rondeur de ses bornes des perfections plus parfaitement belles que les vostres.

La nature vous a formée pour sujet accomply de ses merveilles, ou plustost la merveille des sujets accomplis.

Vostre perfection est si haute, que vous estes hors de toute envie.

Si son apparence estoit belle, son esprit estoit encor plus excellent, la surpassant autant que l’immortel est plus que le caduque.

Ses perfections maistrisoyent les cœurs des plus grands de son siecle, et partageoyent égallement leurs vœux, à l’amour et à la crainte.

Je croy que le Ciel pour rendre son pouvoir manifeste, à fait un amas du plus digne de ses richesses pour en orner vos actions, afin que paré de si riches despouilles, vous puissiez glorieusement triompher du nom d’unique parmy les plus accomplis.

Le violent esclat de tant de grandeurs, la grandeur de tant de merveilles, et la merveille de tant de beautez qui sont en vous, à tellement arresté mon dessein, que je n’ay jamais rien desiré d’avantage que vous honorer et servir.

La raison me l’apprend, mes yeux, et mes pensees le cognoissent, et toutes vos actions le tesmoignent.

Voyez vertu.

Perte de temps et Paresse.

Le temps est donné à l’homme, pour l’offrir en continuel sacrifice à la vertu.

Tout ainsi que l’esprit s’affoiblit et se rend stupide par l’oysiveté, aussi par l’exercice, il se resveille et fortifie.

Il y a trois choses inutiles, la vie sans labeur, le labeur sans effet, et l’effet indigne du labeur.

La plus honteuse perte qui nous puisse arriver, c’est le temps mal employé par nostre negligence.

C’est faire assez de mal, qui ne fait point de bien.

Le travail est pere de la gloire, et de la renommée.

On doit consommer sa vie en travail, pour faire une mort honorable.

Aux hommes paresseux les labeurs sont des supplices.

Nostre nonchalance fait demeurer derriere nous les plus belles occasions, avec nos plus douces annees.

Conseil, diligence et prudence sont inutiles, quand l’execution en est imprudente et paresseuse.

Je ne seray paresseux doresnavant, à vous rendre toute l’obeissance, où mon devoir me peut obliger.

Nous sentons plus d’obligation de tous les autres biens que du temps, et toutesfois, c’est celuy que nous pouvons le moins rendre.

Faire gloire de l’oysiveté, c’est une ambition poltronne.

Pitié et compassion.

Jettez les yeux de vostre pitié, sur les travaux qui m’environnent, et je suis asseuré qu’il vous prendra envie de finir mon martire.

C’est une chose plus humaine, voire divine, de plaindre le mal que de s’en mocquer.

Je pense avoir eu de vous toute l’honneste pitié, que j’en dois avoir.

Je m’estimerois la plus ingrate du monde, pour le seul respect de vostre amitié, si je n’avois pitié de vostre misere.

Qui veut alleger la douleur de quelqu’un, doit monstrer qu’il y a part, et qu’il s’en ressent.

Mon regard mouillé de pleurs, et ma voix souspirante, ne souspirent, ni ne recerchent que vostre pitié.

La pitié est insuffisante de rendre la vie à un qui ne la possede plus : mais sa puissance peut assez pour revoquer un arrest injustement prononcé.

L’ame du monde, la plus barbare, auroit esté touchée de pitié et compassion, par le recit de ses pitoyables afflictions.

La pitié paternelle ne feroit elle point plorer vostre misericorde, si les sanglots de mes plaintes montoyent jusques a vous ?

Cependant ces prieres parloyent à Dieu, de qui la misericorde carressoit son salut.

En nourissant ainsi mes peines, j’allumeray la pitié aux cœurs des pitoyables.

Je ne peux vous voir ainsi gesné, sans estre esmeu, ni lire tant de tourment sur vostre face, sans ouvrir mon cœur à la pitié.

Sauvez et secourez celuy qui par fatale ordonnance, s’est destiné n’avoir ni bien, ni mal en ce monde, que celuy qu’il recevra de vostre part.

Plaisirs et voluptez.

Le plus souvent pour un moment de plaisirs, il faut souffrir une eternité de martires.

Ce sont de pauvres richesses que les voluptez, nous serions à nous si elles n’estoient point nostres.

Les grands font les grandes desbauches, et en la fin ils goustent des fruits qu’ils ont semé.

Tant plus les voluptez sont entretenues et fortifiees, tant plus le corps est affoibli et indispos.

Les voluptez ne sont que songes, qui nous contentent quelque heure de la nuict, et au resveil bien souvent nous laissent veufs de contentement et de vie.

Celuy qui veut parvenir à la vertu, comme à son pays, doit fuir les voluptez, comme le chant des Syrenes.

Chacun de nous a deux fols conseillers, la douleur, et la volupté.

Faut il qu’une fumée de fresles plaisirs nous semble des faveurs d’une glorieuse fortune.

Il n’y a volupté en ce monde si grande que le contentement, que nous recevons en nostre conscience d’une belle et louable action.

La vie sans voluptez, c’est un long chemin sans hostellerie.

Le passage est bien difficile des nuicts de la volupté, aux veilles de la vaillance.

Le jour qui esleve le corps sur la volupté, le mettra au dessous de la douleur.

Mes persuasions, pour m’engager à leur party, faisoyent vivre les plaisirs de mon humeur, et mourir ceux de ma conscience.

Les fausses joyes des voluptez mondaines, produisent à la fin des douleurs veritables.

Il vaut mieux avoir ce contentement en l’ame, d’avoir vaincu le plaisir, que d’en avoir jouy.

C’est ce monstrer trop lasche et effeminé, de vouloir preferer un voluptueux contentement à son honneur, et à l’abord de ses desirs au port de son salut.

Les plaisirs qui ont esté, sont les plus certains : car on ne peut douter qu’on ne les ait eus.

Toutes les choses qui plaisent, ne servent pas comme au contraire on trouve que bien souvent nuit ce qui est doux, et que l’amertume est profitable.

Plaintes et courroux.

Si vous avez creu trop facilement, accusez en vostre legereté, plustost que ma faute, ou mon inconstance.

Si vous demandez le sujet de ma plainte, cerchez le en vous mesme.

La plainte, ne peut jamais ressusciter les morts.

Les plaintes sont libres entre tous, mais elles sont plus affectionnees entre voisins.

La peine naturelle des plaintes, pour justes ou injustes qu’elles soient, est de se plaindre sans satisfaction.

Je me puis bien justement plaindre de la nouvelle opinion, que vous avez conçeue, car c’est sans doute, qu’au cœur ou ceste deffiance à peu entrer la foy en est entierement sortie.

Si je ne merite jamais vos bonnes graces par mes services, aussi n’ay je point merité vos courroux, par mes desobeissances.

Infortuné que je suis, je n’ay plus une seule occasion d’esperer, mais j’en ay infinies de craindre et de me tourmenter.

Vostre peu d’affection est cause de vostre incredulité, car où regne l’amour, regne la foy.

J’ay tousjours ouy dire, que lors que la deffiance entre dans une ame, l’amour en sorte par la mesme porte.

Povvoir et pvissance.

La nuict de ma puissance n’a point de pouvoir, ou le jour de la vostre respand ses rayons.

Il est en vostre pouvoir de me rendre vaincu, ou vainqueur, heureux ou malheureux.

S’il vous advient de vous adonner à ce qui est hors de vostre puissance, afin de complaire, sçachez que vous avez perdu vostre rang.

Approuver, entreprendre, desirer, et fuir, et pour dire en un mot, ce qui ne despend que de nous seuls, est en nostre puissance.

Prier et sovhaiter.

Ce que les commandemens vous peuvent acquerir, vous ne le devez pas cercher par prieres.

Dieu vous rende la plus heureuse qui vive, tout ainsi qu’il vous a fait la plus belle et la plus accomplie.

Je prie à Dieu qu’il vous donne autant de contentement, que vous m’en ostez.

Je prie Dieu qu’il vous donne la felicité que vous meritez, et que je vous desire.

Faites que ma douleur soit aussi briefve, comme ma foy vous sera durable.

Priant Dieu que les vertus qui sont en vous, ne demeurent pas long temps, sans vous accompagner de quelque heureuse fortune.

Le Ciel qui exauce les vœux fidelles, benisse et contente vos desirs.

Je fay des vœux pour vostre salut, je prie Dieu, à qui je les adresse, les rendre aussi heureux qui sont sinceres.

Je vous rendray envers Dieu de bons offices, si mes prieres peuvent esmouvoir sa clemence.

Face le Ciel que vous me soyez aussi fidelle, que vous m’estes chere.

Priant Dieu qu’en donnant fin à vostre mal, il donne commencement à mon bien.

Prier d’escrire, voyez lettres.

Printemps.

Le Printemps commençoit à nous monstrer sa verdoyante face, et à se parer de sa robbe parsemée de fleurs, quand ceste douce saison conviant un chacun aux promenades, faisoit deserter les villes pour peupler les champs.

Au temps que la Deesse Flore embellit la terre de ses fleurs plus souefves, et que le chant des oyseaux par une melodieuse harmonie resveille les esprits de ceux que le Ciel à rendus capables d’amour, pour les faire accourir à ce qui peut apporter quelque remede à leurs passions.

La belle Flore revenoit en nos rives Françoises, et restablissant son diapré Empire, nous faisoit voir sa face esmaillee.

Lors que la temperature de l’air, l’odeur et suavité des herbes, et semblables autres amorces semblent renouueller la chaleur des humains, à peu pres assoupie, par la vehemence d’une hyvernale froidure.

C’estoit en la saison du mois de May, que le Ciel et la terre d’une face riante, carressent amoureusement les creatures, et en leur vie inspirent quelque tristesse, et font respandre des larmes aux Amants, qui sont privez de la veue de ce qu’ils aiment.

Promettre.

Tant que la vie me laissera jouyr des clartez du Soleil, jamais autre que vous n’aura droit sur mon cœur.

Faites moy ce bien qu’en vous donnant ces nouvelles asseurances de ma fidelité, il vous plaise me donner des promesses veritables de la vostre.

Vos promesses surpassent mes desirs, tant s’en faut qu’elles ne respondent à mes esperances.

Le Ciel sera plustost la terre, avant que rien me puisse divertir de l’envie que j’ay de me faire toujours paroistre avec combien d’affection j’embrasse le service, que j’ay voué à l’amour que je vous porte.

Je proteste ne recognoistre jamais que vostre unique lumiere, comme la terre ne recognoist que celle du Soleil.

Ce ne sont point de fausses promesses que celles que je vous ay données, ce sont des asseurances veritables, tirées de mon cœur, avec la force de ma passion.

Ceux qui font profession d’estre louables en leurs actions, sont veritables en leurs promesses.

Toutes les choses d’icy bas changeront leurs inclinations naturelles en d’autres proprietez toutes contraires, auparavant qu’on puisse voir quelque mutation, en la resolution que j’ay prise de vous aimer.

Le Ciel sera tesmoin (s’il luy plaist) de ce que je vous dy pour avoir esté present à toutes mes actions.

Si vous m’aimez encor, asseurez vos pensées d’vne esgalle promesse.

Nul n’est capable de conceuoir tant de devotion, pour vostre service, que moy, qui tiendray ma vie glorieusement perdue, pour confirmation de mon dire.

Je me promets que vous ne voudriez pas tromper mon esperance, ni manquer à vos promesses, comme je ne manqueray jamais à la fidelité que je vous ay promise.

Je vous asseure que pour pleger ma parole, je vous donneray tant d’effets de sa loyauté, que vous n’en pourrez douter.

Si vous doutez de mes affections, je vous donneray pour ostage mon ame, et pour sacrifice mon cœur.

Voyez resolution.

Prvdence.

Il n’y a rien si sujet à estre trompé, que la prudence humaine.

Je me veux munir de vostre belle prudence, pour l’opposer aux fausses calomnies des mesdisans.

La prudence à deux usages, l’un de nous avancer au bien, et l’autre de rejetter le mal de nous.

La prudence est fille aisnée de la raison, qui ne s’exerce qu’aux choses certaines et honorables.

Tel aura reçeu quelque faveur de hazard, qui l’auroit peu acquerir par prudence.

La prudence est en nos esprits, comme les vaines d’or en la terre, qui se trouvent en peu d’endroits.

Tout ce que nous pouvons faire, est d’entreprendre avec prudence, poursuyvre avec esperance, et supporter ce qui en arrive avec patience.

La prudence ne s’employe seulement, pour nous faire avoir le bien, mais aussi pour nous faire éviter le mal.

La vertu et prudence d’un hommme, ne se peut cognoistre, sinon au temps que la tribulation luy vient.

La prudence est l’œil de toutes les vertus, et sans laquelle il seroit malaisé qu’elles peussent conduire en asseurance, parmi les embusches et perils de ceste vie.

Punir, voyez correction et pardon.

Qverelles.

Comme le Soleil paroist plus clair apres les nuages, aussi fait l’amour apres les querelles.

La raison ne nous sert non plus entre les passions, et querelles, que les aisles font aux oiseaux engluez par les pieds.

Un bon et fidelle ami nous doit estre si cher, que nous devons proposer toutes choses pour sa querelle.

Comme il n’y a sorte d’herbe veneneuse quelle que soit, laquelle temperee et apliquee à propos, n’ait quelque salutaire usage, ainsi en est-il des querelles et injures.

Quiter, voyez desdain et mespris, et refuser.



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