L’Encyclopédie/1re édition/MECQUE, la
MECQUE, la, (Géog.) ancienne ville d’Asie dans l’Arabie heureule, & dans la province d’Hygiaz. Les Mahométans l’appellent Omm-alcora, la mere des villes. Selon M. Thevenot, elle est à-peu-près grande comme Marseille, mais pas le quart aussi peuplée ; cependant elle est non-seulement fameuse pour avoir donné la naissance à Mahomet, & à cause que les sectateurs de ce faux prophete y vont en grand pelerinage, comme nous le verrons dans la suite, mais encore parce qu’elle avoit un temple qui dans l’ancien paganisme n’étoit pas moins revéré des Arabes que celui de Delphes l’étoit des Grecs.
Ceux qui avoient la présidence de ce temple étoient d’autant plus considérés, qu’ils possédoient, comme aujourd’hui, le gouvernement de la ville. Aussi Mahomet eut la politique, dans une trève qu’il avoit conclue avec les Mecquois ses ennemis, d’ordonner à ses adhérens le pélerinage de la Mecque. En conservant cette coutume religieuse, qui faisoit subsister le peuple de cette ville, dont le terroir est des plus ingrats, il parvint à leur imposer sans peine le joug de sa domination.
La Mecque est la métropole du Mahométisme, à cause de son temple ou kiabé, maison sacrée, qu’ils disent avoir été bâtie dans cette ville par Abraham ; & ils en sont si persuadés, qu’ils feroient empaler quiconque oseroit nier qu’il n’y avoit point de ville de la Mecque du tems d’Abraham. Ce kiabé, que tant de voyageurs ont décrit, est au milieu de la mosquée appellée haram par les Turcs ; le puits de zemzem, si respecté des Arabes, est aussi dans l’enceinte du haram.
La ville, le temple, la mosquée & le puits, sont sous la domination d’un sériph, ou, comme nous écrivons, shérif, prince souverain comme celui de Médine, & tous deux descendans de la famille de Mahomet ; le grand-seigneur, tout puissant qu’il est, ne peut les déposer qu’en mettant à leur place un prince de leur sang.
La Mecque est située dans une vallée ingrate, entre des montagnes stériles, à 90 lieues S. O. de Médine, & 40 milles de la mer Rouge, où est Gidda ou Jodda, qu’on appelle le port de la Mecque. Long. selon de Lisle, 60. 10. lat. 21. 40.