L’Encyclopédie/1re édition/SERONGE
SERONGE, s. f. (Commerce.) espece de toiles peintes qui se fabriquent dans la ville de l’Indostan de ce nom. Pendant la saison des pluies qui durent quatre mois, les ouvriers impriment leurs toiles ; quand la pluie a cessé & qu’elle a troublé l’eau de la riviere qui passe à Seronge, ils y lavent les toiles qu’ils ont imprimées ; cette eau trouble a la vertu de faire tenir les couleurs, & de leur donner plus de vivacité ; de sorte que plus on les lave dans la suite, plus elles deviennent belles, au-lieu que les couleurs des autres toiles peintes des Indes ne sont pas si vives, & qu’elles s’effacent en les lavant plusieurs fois. On fait à Seronge une sorte de toile peinte qui est si fine, que l’on voit la chair au-travers quand elle est sur le corps : il n’en vient point en Europe, elles sont toutes retenues pour le serrail & la cour du mogol ; les sultanes & les femmes de condition en font faire des chemises & des robes d’été pour leur usage, & la volupté des hommes y trouve leur compte.
Seronge, (Géog. mod.) ville des Indes dans les états du mogol, sur la route de Surate à Agra. Elle est grande & peuplée. Il s’y fabrique des toiles qu’on appelle chitses, dont tout le même peuple de Perse & de Turquie est habillé ; mais on fait aussi dans cette ville une sorte de toile si fine, que quand elle est sur le corps, on le voit comme s’il étoit à nud. Il n’est pas permis aux marchands de transporter cette fine toile hors de la ville. Elle est destinée pour le serrail du grand-mogol & pour les principaux de sa cour. (D. J.)