Mémoires de la ville de Dourdan/Donation de Dourdan au Duc d’Anjou

La bibliothèque libre.

Donation de Dourdan au Duc d’Anjou.

A tous ceux qui ces preſentes lettres verront, Audoyn Chauberon Docteur en loix, Conſeiller du Roy noſtre Seigneur, & garde de la Preuoſté de Paris, ſalut. Sçauoir faiſons que pardeuant Iean Fourquant & Iean de Cointecourt, Clercs Notaires dudit Seigneur en ſon Chaſtelet de Paris, fut preſent noble & puiſſant Prince, Monſieur Louys Comte d’Eſtampes, lequel ſans force, contrainte, fraude, deception, ſeduction ou malengin aucun, mais de ſa pure & liberale volonté, ſi comme il diſoit, recognut & confeſſa que il conſiderant la grand prochaineté de lignage en quoy il eſt conioinct à tres-excellent Prince Monſieur Louys fils de Roy de France, Duc d’Anjou & de Touraine, & Comte du Mayne, à tres-noble Princeſſe Madame la Ducheſſe ſa femme, & à Louys & Charles leurs enfans, & les grands biens, graces, faueurs & plaiſirs que par ledit monſieur le Duc d’Anjou luy ont eſté faits ou temps de la ieuneſſe d’eux deux, & depuis ouquel temps ledit monſieur Comte d’Eſtampes fut nourry auecques luy, tant en le tenir en l’amour & grace du Roy noſtre Seigneur de bonne memoire dernier treſpaſſé que Dieu abſoille, de noſſeigneurs les Ducs de Berry & de Bourgongne ſes freres, & d’autres du ſang Royal, comme en luy ayder & à garder & ſouſtenir ſon honneur & eſtat, & outre que ledit monſieur le Duc le a retenu pour eſtre & demeurer auecques luy toutesfois qu’il luy plaira, à cent ſols pariſis par chacun iour qu’il ſera deuers luy, ou deuers madame la Ducheſſe ſa femme, & à deux mil liures tournois de penſion par chacun an d’ores en auant ſa vie durant, ſoit ou non deuers ledit monſieur le Duc & deuers madame la Ducheſſe deſſuſdite : eſperant auecques ce les biens & honneurs dudit monſieur le Duc pour le temps auenir : conſiderant auſſi la grand honneur & ſigne de grant amour & affection que ledit monſieur le Duc a monſtrée de faict à luy & à monſieur le Comte d’Alençon & du Perche ſon frere, & à tout leur lignage, en voulant & conſentant le mariage dudit Loys ſon ainſné fils & de l’ainſnée fille dudit monſieur le Comte d’Alençon ſa niepce, & pour la grant amour & ſinguliere affection que ledit monſieur le Comte d’Eſtampes a eu de tout temps, & encores a pour les cauſes deſſuſdites, & pour pluſieurs autres, qui à ce le mouuent auſdits monſieur le Duc, madame la Ducheſſe ſa femme, & à leurs enfans deſſuſdits, voulant & deſirant de tout ſon cuer faire auſſi de la partie ſeruice & plaiſir audit monſieur le Duc, afin qu’il ne ſoit ou puiſſe eſtre repris ou accuſé de vice d’ingratitude, auoit donné, cedé, quitté, delaiſſié & tranſporté, & en la preſence deſdits Notaires donna, cedda, quitta, tranſporta & delaiſſia à touſiours perpetuellement par don perpetuel irreuocable fait entre vifs, auſdits monſieur le Duc d’Anjou & madame la Ducheſſe, pour eux, leurs hoirs, ſucceſſeurs & ayans cauſe d’eux ou temps à venir, les Comtez, Chaſteaux, ville & Chaſtellenie d’Eſtampes & de Gien ſur Loire, les Chaſteaux, ville & Chaſtellenie de Dourdan & d’Aubigny ſur Nierre, & deux mil liures tournois de rente, demourant de quatre mil liures tournois de rente qu’il prenoit, deuoit & auoit accouſtumé de prendre & auoir ſur le threſor du Roy noſtre Seigneur à Paris, de la ſucceſſion de ſon pere, deſquelles quatre mil liures tournois de rente, ledit monſieur Comte d’Eſtampes auparauant la datte de ces lettres, a vendu & tranſporté les autres deux mil audit monſieur le Duc, ſi comme par les lettres ſur ce faictes puet apparoir, auecques tous les droicts, nobleſſes, fiefs, reliefs, hommages, iuſtices, ſeigneuries, manoirs, maiſons, terres, eauës, bois, prez, fours, moulins, eſtangs, peſcheries, cens, rentes, reuenus, peages, trauers, redeuances, & autres quelſconques appartenances & dependances deſdits Comtez, Chaſteaux, villes & Chaſtellenies telles qu’elles ſoient, & conuient qu’elles ſoient dittes, appellées & nommées, & qu’en icelle luy competent, peuuent & doiuent appartenir comment que ce ſoit, ſauf reſerué & retenu pour ledit monſieur le Comte, l’vſufruict deſdites Comtez, Chaſteaux, villes & Chaſtellenie ſa vie durant tant ſeulement, & le doüaire de madame la Comteſſe d’Eſtampes ſa femme, & cent liures tournois de rente à prendre par ledit monſieur le Comte ſur les terres deſſuſdites, ou aucunes d’icelles, pour donner & tranſporter, ou en ordonner tant en ſa vie comme en ſon teſtament ou derniere voulenté, à perſonnes d’Egliſe, ou autres quelles qui luy plaira : & auſſi que ſe il auenoit que ledit monſieur le Comte fuſt prins & empriſonné en ſa perſonne par aucuns ennemis du Royaume, ou que par aduerſe fortune d’ennemis du Royaume ledit monſieur le Comte fuſt tellement opprimé, qu’il n’euſt dequoy bonnement tenir ſon Eſtat, iceluy monſieur le Comte en ces deux cas, & non autrement, pourroit vendre de ſes heritages deſſuſdits, auſquels acheter ledit monſieur le Duc ſeroit premierement & auant tous autres appellé & receu, & les auroit auant tous autres pour le prix que ils ſeroient vendus, & en outre reſerué & retenu par ledit monſieur le Comte, que s’il plaiſoit à Dieu que ou temps auenir il euſt aucuns hoirs naturels & legitimes procreez de ſon corps, ceſte preſente donation ſeroit de nulle valleur, mais pourroient iceux hoirs ſucceder à luy, ainſi comme ſe ladite donation n’euſt oncques eſté faicte. Leſquelles retenues, ledit monſieur le Duc volt & conſenty & les ot agreables, & promit par la foy de ſon corps pour ce corporellement baillée és mains deſdits Notaires, & iura aux ſaincts Euangiles de Dieu, tenir ferme & ſtables, & non venir encontre en aucune maniere ou temps aduenir. Leſquelles choſes deſſuſdites, & chacunes d’icelles ainſi cõme deſſus ſont diuiſées, ledit monſieur le Comte d’Eſtampes, pour luy, ſes hoirs & ayans cauſe de luy, promit par la foy de ſon corps, pour ce corporellement baillée és mains deſdits Notaires, & iura aux ſaincts Euangiles de Dieu par luy touchez, auoir & tenir fermes & agreables à touſiours, ſans iamais dire, faire, ne venir ou faire uenir par luy ne par autres, par paroles ne par effect occultement ou en appert à l’encontre, en quelque maniere que ce ſoit, ſur peine de deux cens mil francs d’or à encourir par ſes hoirs, ou ceux ou celuy d’iceux qui y mettroient empeſchement, à appliquer audit monſieur le Duc, à madite Dame la Ducheſſe, leurs hoirs, ſucceſſeurs ou ayans cauſe d’eux, & pour tenir, entretenir & accomplir toutes les choſes deſſuſdites, & chacunes d’icelles ſans enfraindre, ledit monſieur le Comte obligea luy & ſeſdits hoirs, les Comtez, Chaſteaux & Chaſtellenies, villes & terres cy deſſus declarées, & tous ſes autres biens & les biens de ſes hoirs, meubles, non meubles, preſens & aduenir, quels ou qu’ils ſoient, qu’il ſoubmit pour ce du tout à la iuriſdiction, coherection & contrainte de nous & de nos ſucceſſeurs Preuoſts de Paris, & de toutes autres Iuſtices & Iuriſdictions où ils ſeront & pourront eſtre trouuez, renonçant en ce faict expreſſément ledit monſieur le Comte par ſeſdits ſermens & foy à toutes manieres de exeptions de mal, de fraude, d’erreur, leſion, circonuention & deceuance en faict, à conuention de lieu & de Iuge, à condicion, ſans cauſe ou de non iuſte & induë cauſe, à la diſpenſatiõ & abſolution de ſon Prelat, & de tous autres ſur le faict de ſon ſerment, à toutes lettres données & à donner, empetrées ou à empetrer de quelconque Prelat ou Prince quels qu’ils ſoient, & ſoubs quelconque forme de parole qu’elles ſoient, à ce qu’il puiſſe dire, alleguer, maintenir ou propoſer ou temps aduenir, autre choſe par luy auoir eſtié paſſé & accordé, qui eſcrit ou non eſcrit, que paſſé & accordé, à tous Vz, Couſtumes, Ordonnances, Conſtitutions & eſtabliſſement de lieux, villes, & de pays quels qu’ils ſoient, au benefice de la croix prinſe ou à prendre, tant pour le ſainct voyage d’outre-mer, comme autrement, à toutes cautelles, cauillations & allegations quelſconques, à tout Droict eſcript & non eſcript, Canon & Ciuil, & generalement à tout ce qui tant de faict comme de droict, de Vz de Couſtumes, & autrement aydier & valoir pourroit, à dire ou propoſer contre la teneur de ces lettres, & contre aucunes des choſes deſſuſdites, meſmement au droict diſant renonciation general non valoir, en laquelle general renonciation, ledit monſieur le Comte voult & accorda, que toutes expeciaux renoncemens y ſoient entenduës, tout ainſi comme ſe de mot à mot elles y eſtoient ſpecifiées, nommées & declarées, nonobſtant les vz & couſtumes à ce contraires. A laquelle donation à toutes les autres choſes deſſus nommées faire, ordonner & diuiſer, fu preſente tres-excellente & puiſſante Princeſſe madame Blanche, fille de Roy de France & de Nauarre, Ducheſſe d’Orleans, & heritiere pour partie dudit monſieur le Comte, laquelle de ſon bon gré & de ſa bonne volenté, ſans force, contrainte ou malengin, ſi comme elle diſoit, voult, conſenty, agrea, ratifia, emologa & approuua la donation, tranſport, & autres choſes deſſuſdites, en tant comme à luy puet de preſent & pourroit au temps aduenir touchier & appartenir apres la mort dudit monſieur le Comte, ſe il aduenoit qu’il allaſt de vie à treſpaſſement deuant elle, & promiſt par la foy de ſon corps, pour ce corporellement baillée és mains deſdits Notaires, non venir ou faire venir encontre. En teſmoing de ce, nous à la relation d’iceux Notaires auons mis à ces lettres doubles le ſcel de ladite Preuoſté de Paris. Ce fut fait & paſſé le Samedy, neuf iours du mois de Nouembre, l’an de grace mil trois cens quatre-vingts & vn. Et au bas ſigné de Coitecovrt, & Fovrqvant.