Projet d’une loi portant défense d’apprendre à lire aux femmes
AUX CHEFS DE MAISON,
AUX PÈRES DE FAMILLE,
ET AUX MARIS.
Qui plus que vous doit sentir la nécessité et l’urgence de la Loi dont le Projet vous est adressé, et soumis à votre prudence ? Les bons ménages deviennent rares ; et c’est vous, les premiers, qui portez la peine des préjugés et des abus qui ont envahi l’éducation des femmes.
Vous tiendrez donc la main à ce Réglement ; il vous intéresse plus peut-être encore que les femmes qui en sont l’objet principal.
Les puissances mâles et femelles du Bas-Empire de la Littérature, vont s’agiter à la promulgation de la présente Loi. On prononcera malédiction sur le Législateur indiscret et téméraire. Déjà en butte aux prêtres, comment n’a-t-il pas craint de leur donner les femmes de lettres pour auxiliaires ? La coalition des femmes de lettres et des prêtres, est une rude chose ; mais que pourra-t-elle si les bons esprits, si les têtes saines opposent leur égide, et placent cette Loi sous le bouclier de la raison ?
Les bonnes mères de famille, les excellentes femmes de ménage, les épouses sensibles, les jeunes filles naïves et toutes naturelles, vengées enfin du méprisant abandon où on les reléguait, sauront peut-être quelque gré au Rédacteur de cette Loi, et rendront justice à la pureté de ses intentions.
Nous ne sommes point dupes (s’écrieront quelques flatteurs des femmes) des ménagemens qu’on prend ici pour faire entendre que les deux sexes ne doivent pas être rangés précisément sur la même ligne, dans la grande échelle des êtres, et qu’il faut placer un sexe au-dessous de l’autre.
Il faut répondre : ce n’est point là du tout la pensée du Législateur des femmes. Dans le plan qu’il s’est tracé de la nature, il n’y a pas un seul être inférieur à un autre. Toutes les productions sorties de ses mains sont autant de chef-d’œuvres ; et parmi une infinité de chef-d’œuvres, il seroit absurde d’établir ou de supposer des préférences.
Les deux sexes sont parfaitement égaux ; c’est-à-dire, aussi parfaits l’un que l’autre, dans ce qui les constitue. Rien dans la nature n’est comparable à un bel homme, qu’une belle femme.
Ajoutons pour finir : il n’y a rien de plus laid au monde qu’un homme singeant la femme, si ce n’est une femme singeant l’homme.
Ce Projet de Loi ne pouvait paraître plus à propos, qu’au moment où l’on s’occupe de l’organisation définitive des études.
Vous remarquerez que dans son rapport, si estimable, sur l’Instruction publique, Chaptal garde le plus profond silence touchant les femmes ; il ne leur suppose aucunement la nécessité d’apprendre à lire, à écrire, etc. Partagerait-il l’opinion que leur esprit naturel n’a pas besoin de culture ?
Nota. Celles d’entre les femmes qui prendront à cœur ce projet de Loi, pourront se permettre les réclamations, et sont invitées à les adresser au Rédacteur : il s’empressera d’y faire droit, autant que possible.
Mais il prévient qu’il ne répondra aux injures, que par son silence accoutumé : des injures ne sont point des raisons.
Si l’on vous interdit l’arbre de la science,
Conservez sans regret votre douce ignorance,
Gardienne des vertus, et mère des plaisirs ;
À des jeux innocens consacrez vos loisirs, etc.
D’UNE LOI,
Portant défense d’apprendre à lire aux Femmes.
MOTIFS DE LA LOI.
1o. Que l’amour honnête, le chaste hymen, la tendresse maternelle, la piété filiale, la reconnaissance des bienfaits… etc., sont antérieurs à l’invention de l’alphabet et de l’écriture, et à l’étude des langues ; ont subsisté, et peuvent encore subsister sans elles.
2o. Les inconvéniens graves qui résultent pour les deux sexes, de ce que les femmes sachent lire.
3o. Qu’apprendre à lire aux femmes est un hors-d’œuvre, nuisible à leur éducation naturelle : c’est un luxe dont l’effet fut presque toujours l’altération et la ruine des mœurs.
4o. Que cette fleur d’innocence qui caractérise une vierge, commence à perdre de son velouté, de sa fraîcheur, du moment que l’art et la science y touchent, du moment qu’un maître en approche. La première leçon que reçoit une jeune fille est le premier pas qu’on l’oblige à faire pour s’éloigner de la nature.
5o. Que l’intention de la bonne et sage nature a été que les femmes exclusivement occupées des soins domestiques, s’honoreraient de tenir dans leurs mains, non pas un livre ou une plume, mais bien une quenouille ou un fuseau.
6o. Combien une femme qui ne sait pas lire est réservée dans ses propos, pudibonde dans ses manières, parcimonieuse en paroles, timide et modeste hors de chez elle, égale et indulgente… Combien, au contraire, celle qui sait lire et écrire a de penchant à la médisance, à l’amour propre, au dédain de tous ceux et de toutes celles qui en savent un peu moins…
7o. Combien il est dangereux de cultiver l’esprit des femmes, d’après la Réflexion morale de la Rochefoucault qui les connaissait si bien : « L’esprit de la plupart des femmes sert plus à fortifier leur folie que leur raison. »
8o. Que la nature elle-même, en pourvoyant les femmes d’une prodigieuse aptitude à parler, semble avoir voulu leur épargner le soin d’apprendre à lire, à écrire.
9o. Que le joli babil des femmes dédommagera avec usure de l’absence de leur style.
10o. « Que chaque sexe a son rôle. Celui de l’homme étant d’instruire et de protéger, suppose une organisation forte dans toutes ses parties. Le rôle de la femme doit être bien moins prononcé. Douceur et sensibilité en sont les deux principaux caractères. Tous ses droits, tous ses devoirs, tous ses talens se bornent là, et ce lot vaut peut-être bien l’autre. »
(Galerie des Femmes célèbres, in-4o.)
11o. « Que la société civile, dans la distribution de ses rôles, n’en a donné qu’un passif aux femmes. Leur empire a pour limites le seuil de la maison paternelle ou maritale. C’est là qu’elles règnent véritablement. C’est là que, par leurs soins journaliers, elles dédommagent les hommes des travaux et des peines qu’ils endurent hors de leurs foyers. Compagnes tendres et soumises, les femmes ne doivent prendre d’autre ascendant que celui des graces et des vertus privées ; et ce plan de conduite, conforme à la nature, a constamment rendu heureuses celles qui ont eu le bon esprit de ne pas porter leurs vues plus haut. La félicité du genre humain repose, toute, sur les mœurs domestiques. »
(Galerie des Femmes célèbres, in-4.o)
12o. Que les hommages que le premier sexe s’est fait une douce habitude de rendre à l’autre, ne sont point adressés au savoir des femmes, mais seulement à leurs graces et à leurs vertus.
13o. Que les femmes qui se targuent de savoir lire et de bien écrire, ne sont pas celles qui savent aimer le mieux.
L’esprit et le talent refroidissent le cœur.
14o. Que la coquetterie d’esprit est dans les femmes un travers qui, comme l’autre coquetterie, mène au ridicule, et quelquefois au scandale.
15o. Que si la belle Aspasie n’eût point été à la hauteur des lumières acquises de Périclès ; Périclès ne voyant en elle qu’une femme aimable, destinée aux délassemens d’un homme d’état, Athènes n’aurait point achevé de perdre ses mœurs sous le gouvernement tacite d’une courtisane.
16o. Que si Louise Labè ou la belle Cordière de Lyon, n’avait point eu la manie des vers, la chronique du tems ne se serait point hasardée de signaler ainsi cette femme : « Elle avait une prédilection particulière pour les poëtes et les savans, les préférant aux grands seigneurs et leur faisant courtoisie plutôt gratis, qu’aux autres pour grand nombre d’écus ; aussi leur communiquait-elle privément les pièces les plus secrettes qu’elle eût. »
17o. Que Marguerite de Navarre, première femme de Henri IV, aurait été moins galante, si elle n’avait pas su écrire.
Une femme qui tient la plume pense être en droit de se permettre plus de choses que toute autre femme qui ne connaît que son aiguille.
18o. Que si Catherine de Médicis n’avait point su lire, il n’y aurait point eu en France de journée de la St.-Barthélemi.
19o. Que si la duchesse de Longueville n’eût été qu’une bonne ménagère, sans culture et sans lettres, elle n’eût point abusé de son ascendant sur le grand Turenne, au point de faire tourner la tête et les armes de ce général contre sa patrie.
20o. Que si l’on n’eût point appris à lire aux femmes, celles de l’hôtel de Rambouillet ne se seraient pas donné le ridicule ineffaçable de préférer Voiture à Corneille et Pradon à Racine. Ce qui prouve en même tems que les femmes qui savent lire ne sont pas, en fait de littérature, meilleurs juges que les autres.
21o. Que si madame Guyon s’était contentée d’être jolie, sans apprendre à lire, elle n’aurait point égaré le beau génie de Fénélon : le cœur seul du plus sensible de tous les prélats, se serait permis une tendre foiblesse.
22o. Les risques que court l’innocence d’une jeune fille livrée aux leçons d’un grammairien peu sage.
On ne trouve plus des Origène d’humeur à cesser d’être homme pour apprendre impunément à lire aux jeunes filles et aux jeunes femmes d’Alexandrie.
23o. Combien la seule conjugaison du verbe Amo, j’aime, a occasionné de chûtes.
24o. Combien une jeune fille qui sait lire a de peine à résister à la tentation de jeter les yeux sur les lettres d’amour d’un séducteur éloquent.
25o. Combien les romans et les ouvrages de dévotion font de ravage dans le tendre cerveau des femmes.
26o. Combien la lecture est contagieuse : sitôt qu’une femme ouvre un livre, elle se croit en état d’en faire ;
Et femme qui compose en sait plus qu’il ne faut.
27o. Que l’érudition de madame Dacier la fit changer de sexe ; elle oublia dans ses discussions savantes toute l’aménité du sien.
28o. Que la culture des lettres n’eût pas le pouvoir d’adoucir l’humeur violente, le caractère emporté et le brusque abord de mademoiselle de Gournay, la fille d’alliance de Michel Montaigne.
29o. Que si madame de Lasuze n’avait point été poëte, nous aurions quelques jolis vers de moins ; mais elle n’aurait point donné à ses contemporains et à la postérité le contagieux exemple d’un ménage en désordre, à force d’esprit.
30o. Que madame de Ville-Dieu, veuve de trois maris, et auteur de douze volumes, n’en fut pas moins galante : les Muses ne lui apprirent pas à mettre plus d’harmonie dans sa conduite.
31o. Que pour l’ordinaire, une femme perd de ses graces et même de ses mœurs, à mesure qu’elle gagne en savoir et en talens.
Pour peu qu’elle sache lire et écrire, une femme se croit émancipée, et hors de la tutelle où la nature et la société l’ont mise pour son propre intérêt.
32o. Que la cause supprimée, l’effet tombe de lui-même : ainsi, les femmes ne sachant plus lire, ne nous offriront plus le risible travers de ces diplomates femelles, qui du fond d’un boudoir, le Publiciste à la main, disposent des empires, font la part aux rois, aux républiques… etc.
33o. Que la qualité de femme qui sait lire, n’ajoute rien aux titres sublimes et touchans de bonne fille, bonne épouse et bonne mère, ni aux moyens d’en remplir les devoirs doux et sacrés.
34o. Que la place d’une femme n’est point sur les bancs d’une école, encore moins dans une chaire de théologie, de physique ou de droit, comme il s’est vu plus d’une fois à Bologne, en Italie.
35o. Que le cardinal Barbarigo ne voulut jamais permettre à la savante Hélène Lucrece-Piscopia Cornara de se faire recevoir membre de l’université de Padoue ; persuadé qu’il était qu’un chapeau de fleurs ou de plumes, sied beaucoup mieux sur la tête d’une femme qu’un bonnet de docteur.
36o. Que les femmes ayant reçu une organisation physique plus frêle et un caractère moral moins décidé que les hommes ; l’étude des lettres n’est pas un puissant moyen de donner de la force et de l’énergie. De l’aveu des philosophes eux-mêmes, les lettres énervent quand elles ne corrompent point.
Fénélon a dit :
« Les femmes ont, d’ordinaire, l’esprit encore plus foible que les hommes. »
Voyez son traité de l’éducation des filles.
37o. Que les femmes les mieux instruites, les plus savantes n’ont jamais enrichi les sciences et les arts d’aucune découverte. « Il n’y a jamais eu de femmes inventrices » dit Voltaire dans ses Questions Encyclop. L’invention de la gaze n’est pas même due à une femme.
38o. Que, quoiqu’on en ait dit, l’esprit et le cœur ont un sexe comme le corps dans la dépendance duquel ils sont tous deux, le moral et le physique étant unis d’une intimité si étroite qu’ils ne font qu’un.
40o. Que presque toujours quand les femmes tiennent la plume, c’est un homme qui la taille. Le mathématicien Clairaut rendit ce service à madame Duchatelet.
Colletet faisait les vers de sa servante, devenue sa femme.
41o. Que, les femmes n’étant assujéties à aucune charge publique, à aucune fonction administrative, n’ayant pas même droit aux fauteuils de l’Institut, elles n’ont nul besoin de savoir lire, écrire…
43o. Que les douces fonctions de la vie privée sont assez multipliées pour occuper toute entière une femme de mérite ; et que celle qui embrasse la profession d’écrire, n’est pas moins ridicule que ces soldats qui pendant les loisirs de la cazerne, prennent l’aiguille de la marchande de modes, ou le tambour de la brodeuse. »
(Galerie Univ. des Hommes illustres, in-4o. Art. Voltaire. Notes.)
44o. Qu’il y a scandale et discorde dans un ménage, quand une femme en sait autant ou plus que le mari.
45o. Combien doit être difficile le ménage d’une femme qui fait des livres, unie à un homme qui n’en sait pas faire.
46o. Combien la première éducation des enfans, nécessairement confiée à leur mère, souffre quand la mère est distraite de ses devoirs par la manie du bel esprit.
« La couvée est mal tenue, quand la poule veut chanter aussi haut que le coq, » dit un vieux proverbe.
47o. Que l’art de plaire et la science du ménage ne s’apprennent pas dans les livres.
L’art d’aimer d’Ovide n’a rien appris aux femmes.
48o. Combien il est ridicule et révoltant de voir une fille à marier, une femme en ménage ou une mère de famille enfiler des rimes, coudre des mots, et pâlir sur une brochure, tandis que la mal-propreté, le désordre ou le manque de tout se fait sentir dans l’intérieur de la maison.
49o. Qu’une femme, pour ne point savoir lire, n’en est pas moins estimable, moins digne d’être aimée, moins en état de remplir toutes ses obligations d’épouse, de mère, de parente et d’amie.
Au contraire, qu’un époux de bon sens trouve plus de véritables jouissances auprès d’une femme naturelle et sans lettre, qu’avec une autre remplie de prétentions au savoir et aux applaudissemens.
50o. Combien un maître de maison jaloux de remplir les devoirs de l’hospitalité, est confus, quand il a pour épouse et compagne une femme plus occupée de livres et de manuscrits que des détails du ménage : tout s’y fait mal, ou mal-à-propos ; la table est mal servie ; le lit est mal dressé ; et le voyageur, en partant, plie les épaules, et se dit tout bas : « Que les Dieux me préservent d’une maison dont la maîtresse sait lire ! »
52o. Combien les femmes deviennent négligentes, paresseuses, hautaines, exigeantes, acariâtres, peu soumises, pour peu qu’elles sachent lire et écrire ; combien est insoutenable celle qui vise à l’esprit ou au savoir, celle qui parle comme un livre.
53o. Que depuis qu’on rencontre dans toutes les professions, des femmes qui savent lire, la nourrice fait jeûner son nourrisson ; la marchande néglige son comptoir, et la cuisinière son service ; l’ouvrière commence plus tard et finit plus tôt sa journée ; la coëffeuse distraite brûle la blonde chevelure de sa dame ; la garde-malade et l’épicière-droguiste tuent leurs malades par des qui-pro-quo ; et la jeune fille devenue raisonneuse, dit que sa maman radote, et traite son papa de bon-homme.
54o. Que si jamais les femmes n’avaient su lire, ni écrire… Juvénal, Molière et Boileau ne se seraient point armés contre elles des verges de la satyre.
55o. Que si jamais les femmes n’avaient osé porter la main à l’arbre de la science, Salomon ou St.-Paul n’aurait jamais trouvé de motifs pour parler d’elles en ces termes :
Melior est iniquitas viri, quam mulier benefaciens.
56o. Que le sage Salomon qualifie de Femme forte, non pas la femme esprit fort, ou bel esprit, « mais celle qui employe avec intelligence le lin et la laine, tourne le fuseau, et donne par année deux paires d’habits à ses serviteurs des deux sexes. »
(Ce sont les propres termes de la Sainte Bible.)
57o. Que dire son chapelet est aussi méritoire devant Dieu que de lire son office du matin et de l’après-midi.
58o. Que dans les premiers tems, la lecture de la Bible, elle-même, était interdite aux Juives ; c’est pour cela qu’on ne leur apprenait point à lire.
La sage Noëmi et sa fille, la touchante Ruth ne savaient point lire ; Ruth dut la main de Booz à son aimable ignorance.
59o. Que la fille d’Œdipe, la sensible Antigone, n’eut pas besoin d’apprendre à lire, pour devenir le chef-d’œuvre de la piété filiale : à sa place, la savante Sapho n’eût probablement pas été la compagne aussi assidue, aussi imperturbable de son malheureux père.
60o. Que Sapho eût conservé sa réputation, si elle n’eût jamais su écrire : du moins on n’aurait jamais parlé d’elle, au grand scandale de son sexe.
61o. Que les femmes-beaux-esprits consentiraient difficilement à suivre l’exemple de la jeune Erinne : cette contemporaine de Sapho, mais plus sage, pour ne point fâcher sa mère, ne se permit de composer qu’un seul poëme dont le sujet était l’éloge de la Quenouille.
62o. Que chez les sages Égyptiens, sur les bords du Nil, on ne voyait pas, comme sur les rives de la Seine, les femmes sortir de leurs maisons et quitter le berceau de leurs enfans, pour aller apprendre à lire à l’école d’un pédant ex-moine.
63o. Que les Amazones (dont pourtant il faut blâmer et repousser l’institution martiale, si étrangère aux mœurs naturelles des femmes), les Amazones qui étonnèrent les héros de leur tems par une bravoure égale à la leur, ne savaient pas lire.
64o. Que les Vierges Lacédémoniennes, dans des ballets décens, savaient enflammer le courage des jeunes Spartiates, et ne savaient pas lire.
65o. Que parmi les occupations des femmes des héros de l’antiquité, on leur recommandait, avant tout, de faire de la toile.
Dans Homère, elles mettent leur vanité, non pas à savoir lire ou écrire, mais bien à filer.
Théocrite, pour donner une haute idée de la belle Hélène, dit qu’elle filait mieux que toutes ses femmes.66o. Que Pénélope si fidèle à son mari-voyageur, savait, en tissant, jour et nuit, repousser les amans qui l’assiégeaient, et ne savait pas lire.
67o. Qu’Andromaque, l’épouse du vaillant Hector, si touchante dans Homère, quand elle fait ses adieux au héros son époux, ne savait pas lire.
68o. Que la princesse Nasicaa, la fille du roi Alcinoüs, lavait, elle-même, les habits de son père, et ne savait pas lire.
Si elle avait su tenir la plume, peut-être que la princesse royale eût dédaigné de lever le battoir.
69o. Que les Sabines n’eurent pas besoin de savoir lire, pour réconcilier sur le champ de bataille, les deux peuples féroces auxquels elles appartenaient par le sang et par l’hyménée.
70o. Que la chaste Lucrèce, qui se poignarda pour ne point survivre au déshonneur du lit conjugal, ne savait pas lire.
Les fils de Tarquin la trouvèrent chez elle, et bien avant la nuit, occupée au milieu de ses femmes, à travailler, de ses mains, à des ouvrages de laine.
71o. Qu’Horace, pour ramener aux devoirs de leur sexe les dames de Rome, leur propose les Sabines, excellentes ménagères qui ne savaient pas lire.
72o. Que cette romaine qui allaita sa mère condamnée à mourir de faim dans un cachot, ne savait pas lire : « c’était une femme du peuple, humilis in plebe, » dit Pline le naturaliste.
Le sénat romain lui décerna une statue ; les mêmes honneurs ne furent point rendus à Sulpicie, faiseuse de satyres.
73o. Que, quand l’Ange Gabriel descendit du firmament, pour annoncer à Marie, (l’épouse de St.-Joseph) la conception d’un Dieu dans ses flancs virginaux, Gabriel ne surprit point la bonne vierge faisant une lecture ; elle réparait les chausses de son époux, car son ignorance avait trouvé grace devant le St.-Esprit.
74o. Que Mahomet, qui aimait tant les femmes, ne voulait point qu’elles sçussent lire ; plus sage en cela que son malheureux prédécesseur ; (voyez l’évangile des deux sœurs Marthe et Marie, selon St.-Luc, chap. X, verset 38.)
Les épouses de Mahomet, et la célèbre Fatime, sa fille, ne savaient pas lire.
Il n’est pas même bien prouvé que Mahomet lui-même sçut lire. Son ignorance n’empêcha pas qu’il ne devînt le fondateur d’une grande religion.
75o. Que la reine Zénobie, moins savante, eût été moins ambitieuse, et par conséquent n’eût jamais consenti qu’on assassinât son époux.
76o. Que nos Gauloises, toujours consultées utilement par nos bons ayeux dans les affaires les plus délicates, les plus épineuses, ne savaient pas lire.
77o. Que Charlemagne, qui le premier, en France, ouvrit des écoles, en législateur profond n’y apella point les femmes. Et cet Empereur-roi prêcha d’exemple : il ne donna à ses filles d’autre éducation que celle de coudre et de filer.
78o. Que dans les siècles brillans de la chevalerie, époque si honorable et si glorieuse pour les femmes, elles n’avaient pas besoin d’apprendre à lire pour inspirer les braves : il suffisait de leur beauté et de leur vertu.
79o. Que Jeanne d’Arc sçut bien délivrer la France, sans savoir lire.
80o. Qu’avant cette héroïne, la bergère de Nanterre qui sauva Paris en trouvant grace devant Attila, Geneviève ne savait pas lire ; quoiqu’un peintre niais l’ait représentée gardant ses moutons, l’évangile à la main.
81o. Que plusieurs d’entre les reines de France ne savaient pas lire ; et ce ne furent pas les plus intriguantes.
Madame de Maintenon qui avait des prétentions au savoir et à la politique, rapetissa, comme on sait, le génie de Louis le Grand, et compromit le salut de l’État.
82o. Que le cardinal de Retz, un jour, se désista d’une criminelle attaque, vaincu par les larmes d’une villageoise vertueuse ; le prélat n’eût peut-être pas même eu de combat à soutenir avec une fille lettrée.
83o. Que l’amour de la science n’a pas la vertu de refréner les passions ; témoin Christine, reine de Suéde qui fit assassiner son amant sous ses yeux dans la galerie de Fontainebleau.
84o. Combien la science mal digérée donne de bile.
Antoinette Bourignon, l’une des femmes qui fit le plus de livres, fut par cela même l’une des femmes les plus maussades, les plus difficiles à vivre.
85o. Combien les charmantes lettres de madame de Sévigné, et les poésies gracieuses de madame Deshoulières ont fait de mauvaises copies.
86o. Que la belle Laure, dont les chastes appas firent tant d’impression sur le cœur de Pétrarque, et qui nous valut tant de beaux vers de ce poëte sensible, ne savait pas les lire.
« C’était, disent les historiens du tems et du pays, une pastourelle naïve, qui ne savait que garder un troupeau. »
87o. Que la belle et riche Marguerite Sarrochia, dame de Naples, aurait pu vivre longuement et être honorée de ses compatriotes : quelques talens en littérature lui inspirèrent tant de vanité qu’elle mourut jeune, flétrie par le chagrin, et chargée du mépris public.
88o. Que si miladi Montaigue, l’épouse de l’ambassadeur anglais à Constantinople, n’eût sçu ni lire ni écrire, elle n’eût point dégradé les lettres en repoussant d’un style de corps-de-garde, l’imputation vraisemblable que lui fit Pope d’avoir reçu les honneurs du mouchoir dans la caserne des Janissaires.
Nous compterions un recueil de lettres curieuses de moins, et une femme estimable de plus.
89o. Que les Américaines du midi portent seules tout le poids du ménage, et accouchent sans douleur ; elles seraient moins robustes, moins saines, moins laborieuses, si elles savaient lire.
Il est prouvé que les Femmes-Auteurs sont moins fécondes que les autres.
L’exemple de Sainte-Brigitte, mère de douze enfans et auteur de douze volumes, ne prouve rien : l’exemple d’une sainte n’est qu’une exception.
90o. Combien il est choquant dans le langage ainsi qu’en morale, d’être obligé de donner aux femmes des qualifications masculines, telles que Mademoiselle est auteur, Madame est amateur, ou bien :
Les femmes Beaux Esprits, n’ont pas un bon esprit.
Cette dissonnance grammaticale tend à prouver que les femmes semblent abjurer leur sexe, quand elles exercent les professions que ces mots désignent.
91o. D’ailleurs, qu’empêcher les femmes d’apprendre à lire, c’est un grand pas de fait pour arrêter la multiplication des livres, et pour opérer une salutaire réforme dans la littérature tombée en quenouille.
92o. Ce que les auteurs de la Galerie universelle des Hommes Illustres placent dans la bouche de Voltaire :
« Du moment que le sexe, né pour plaire, eut la prétention de vouloir instruire, la morale et la littérature allèrent en décadence. »
93o. Combien l’esprit naturel des femmes qui ne demande point à être cultivé, baisse de son prix, pour peu que l’art en approche.
Qui ne préfère, aux airs factices du serin, au jargon étudié de la pie ou du perroquet, le chant libre et sans apprêt du rossignol ?
94o. Qu’il n’est pas très-nécessaire aux femmes d’apprendre l’A, B, C, pour se former le jugement ; puisque Molière se trouvait bien de consulter sa servante, laquelle ne savait pas lire.
Malherbe aussi prenait l’avis de sa ménagère.
95o. Que dans les campagnes, beaucoup de fermières intelligentes gouvernent elles-mêmes l’intérieur et le dehors de la ferme, sans savoir lire.
96o. Qu’une jardinière qui ne sait pas lire, mais qui dans chaque saison fait éclore les fleurs les plus brillantes, est préférable à ces dames occupées matin et soir de l’assortiment de leurs pensées.
97o. Que les femmes insisteraient en vain sur la nécessité d’apprendre à lire, puisque Duguesclin lui-même, connétable de France, et le plus grand homme de son siècle, ne savait ni lire, ni écrire.
98o. Que les femmes douées d’un bon esprit seront les premières à consentir la présente loi, quand elles en auront pesé les motifs dans leur sagesse, et dans l’intérêt qu’elles inspirent. Elles verront dans cette mesure urgente et nécessaire, non pas une extension du despotisme viril, mais bien plutôt un rappel à la raison.
99o. Ce proverbe hébreu :
« Toute l’habileté d’une femme est dans sa quenouille ; » — et ce proverbe français :
Reste à son ménage. »
100o. Ce qu’on lit dans Aristote :
« La femme ne doit penser qu’à la conservation de ce qui se trouve dans l’intérieur de la maison. »
101o. La solidité de ces paroles de Fénélon :
« Les filles qui ont de l’esprit s’érigent souvent en savantes et en précieuses ; elles lisent tous les livres qui peuvent nourrir leur vanité, et se remplissant l’esprit de je ne sais quelles idées chimériques, elles se gâtent même par là pour le monde. »
102o. Le grand sens renfermé dans ces paroles du P. Mallebranche :
« C’est aux femmes à décider des modes, à discerner le bon air et les belles manières ; elles ont plus de science, d’habileté et de finesse que les hommes sur ces choses. Tout ce qui dépend du goût est de leur ressort ; mais… etc. »
103o. Ce passage considérable de la première Encyclopédie :
« On pourrait douter si l’étude des lettres ne coûte point aux femmes un peu d’innocence. »
104o. Que Desmathis a dit, d’après les anciens :
« La gloire d’une femme est de vivre ignorée » — et de rester ignorante, aurait dû ajouter Desmathis, pour dire tout ce qu’il pensait.
105o. De quel poids est cette autre citation de Michel Montaigne :
« La plus utile, la plus honorable science d’une mère de famille est la science du ménage. »
« Si les bien nées (les dames) me croyent, elles se contenteront de faire valoir leurs propres et naturelles richesses… Que leur faut-il, que vivre aimées et honorées ? Elles n’ont et ne savent que trop pour cela. »
106o. Ce qu’a dit Balzac :
« J’aimerais mieux avoir une femme qui eût de la barbe, qu’une femme qui eût du savoir. »
107o. La valeur de ce mot de S.-Evremont :
« On se défend d’une savante, mais on ne se défend point d’une femme : on a quelqu’estime sèche et stérile pour la capacité de l’une ; mais le cœur s’allume pour les agrémens de l’autre. »
« … À Paris, il y a des femmes qui écrivent et qui font des livres ; les plus sages font des enfans. »
108o. En outre l’autorité de ce passage, tiré de la Bibliothèque des femmes :
« Par-tout les lois, en réservant aux hommes la plume et l’épée, ont semblé borner le sexe aux soins du ménage. »
109o. L’autorité plus grave encore de J. J. Rousseau, dans une Note (K) de sa lettre à Dalembert, qu’il serait par trop dur de reproduire ici. Il nous sera plus doux de rapporter la citation suivante du plus éloquent des philosophes :
« Est-il au monde un spectacle aussi touchant, aussi respectable que celui d’une mère de famille entourée de ses enfans, réglant les travaux de ses domestiques, procurant à son mari une vie heureuse et gouvernant sagement sa maison, etc. »
110o. La justesse de ce passage :
« La fluidité du sang et l’agilité des esprits animaux rendent les femmes incapables d’apporter une attention sérieuse à tout ce qui est un peu abstrait ; et le dégoût qu’elles sentent pour tout raisonnement suivi, prouve la délicatesse de leur imagination, qui n’a pas la force de soutenir cet effort. »
111o. Que quelqu’un a dit :
« L’étude et les livres ne servent qu’à rendre une femme insupportable. »
Un écrivain plus moderne encore a dit :
« Le défaut du siècle est d’avoir le cœur sec et de tout faire avec l’esprit, défaut particulier aux femmes. »
112o. Ce qu’Homère met dans la bouche de Jupiter s’adressant à Vénus :
« Contentez-vous des jeux, des ris et des appas. Présidez aux amours… »
pourrait-on ajouter, en généralisant la citation et en l’appliquant à toutes les femmes.
« Renoncez (dit le continuateur d’Homère) renoncez à un dessein dont l’exécution surpasse vos forces, et reprenez dans l’intérieur de vos maisons et les toiles, et les ouvrages propres à votre sexe. »
113o. Enfin la justesse et la convenance de ces bons vers :
<poem>Il n’est pas bien honnête, et pour beaucoup de causes, Qu’une femme étudie et sache plusieurs choses. Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfans, Faire aller son ménage, avoir l’œil sur ses gens, Et régler sa dépense avec économie, Doit être son étude et sa philosophie. Nos pères sur ce point étaient gens bien sensés Qui disaient qu’une femme en sait toujours assez… Les leurs ne lisaient point ; mais elles vivaient bien ; Leurs ménages étaient tout leur docte entretien, Et leurs livres un dé, du fil et des aiguilles, Dont elles travaillaient au trousseau de leurs filles ; Les femmes d’à présent sont bien loin de ces mœurs ; Elles veulent écrire, et devenir auteurs…
EN CONSÉQUENCE
La raison veut (dut-elle passer pour Vandale) que les femmes (filles, mariées ou veuves) ne mettent jamais le nez dans un livre, jamais la main à la plume.
La Raison veut :
À l’homme, — l’épée et la plume.
À la femme, — l’aiguille et le fuseau.
À l’homme, — la massue d’Hercule.
À la femme, — la quenouille d’Omphale.
À l’homme, — les productions du génie.
À la femme, — les sentimens du cœur.
La Raison veut que chaque sexe soit à sa place, et s’y tienne.
Les choses vont mal, quand les deux sexes empiettent l’un sur l’autre.
La lune et le soleil ne luisent point ensemble.
La Raison ne veut pas plus que la langue française, qu’une femme soit auteur : ce titre, sous toutes ses acceptions, est le propre de l’homme seul.
La Raison veut que les sexes diffèrent de talens comme d’habits.
Il est aussi révoltant et scandaleux de voir un homme coudre, que de voir une femme écrire ; de voir un homme tresser des cheveux, que de voir une femme tourner des phrases…
La Raison maintient ce vieux Proverbe :
« Les paroles sont des femelles, les écrits sont des mâles. »
En ce qu’il semble faire les parts et assigner à chacun des deux sexes le talent qui lui convient.
N. B. Toute la sagesse des nations est dans leurs proverbes.
La Raison veut que l’on dispense les
femmes d’apprendre — à lire,
— à écrire,
— à imprimer,
— à graver,
— à scander,
— à solfier,
— à peindre, etc.
Quand elles savent un peu de tout cela, c’est trop ordinairement aux dépens de la science du ménage.
La Raison veut donc que la plume à écrire et le pinceau, le crayon et le burin, soient interdits à la main des femmes ; l’aiguille à coudre et le fuseau, à la main des hommes.
La Raison veut que dans les arts du dessin, de la peinture et de la gravure, les femmes ne perdent pas le tems à porter leurs prétentions au-delà de celles de la sensible Dibutade.
Cette jeune beauté de Sycione traça sur la muraille, à la lueur d’une lampe, le pourtour de l’ombre de son jeune ami, obligé de faire un long voyage.
La Raison veut et la décence n’approuvent point du tout que de jeunes dessinatrices passent des journées entières à contempler et à copier les belles proportions de l’Apollon du Louvre, ou du Lantin, ou de l’Hercule Farnèse… etc.
Périssent tous les arts, plutôt que la pudeur !
La Raison veut que les femmes, dans leurs loisirs, apprennent naturellement à chanter, sans livres et sans maîtres ; mais qu’elles ignorent toute leur vie combien il y a de notes dans la musique, de lettres dans l’alphabet, de syllabes dans un vers alexandrin ou pentamètre.
Les femmes sont nées pour être aimables et vertueuses, et non pour devenir des virtuoses et des savantes.La Raison veut que les maris soient les seuls livres de leurs femmes ; livres vivans, où nuit et jour, elles doivent apprendre à lire leurs destinées.
« Il serait bienséant et honorable (dit un vieux livre) d’ouir une femme qui dirait à son mari : mon ami, tu es mon précepteur, mon maître de philosophie… etc. »
N. B. Une femme bel-esprit et auteur de cinq à six gros livres, vint rendre visite à une mère de trois filles et de trois garçons :
« Voici, dit la mère de famille, (en présentant ses enfans et leur père à la dame-auteur) voici mes productions et ma bibliothèque. »
La Raison veut que les femmes sachent leur langue maternelle, seulement :
« C’est une vanité aux femmes (a dit quelqu’un) de parler une langue étrangère. »
La Raison veut que l’on fasse grace aux femmes de l’étude aride et sèche de la grammaire ; les femmes étant destinées à des occupations plus agréables et moins stériles.
La Raison veut aussi que l’on dispense les femmes des élémens non moins ingrats de la géographie et de l’histoire ; leur mémoire fragile porte mal le fardeau des dates et d’une lourde nomenclature.
Quel inconvénient, d’ailleurs, à ce que les femmes fassent des anachronismes ?La Raison veut que les femmes n’apprennent point à lire aux astres : qu’elles comptent les œufs de la basse-cour, et non les étoiles du firmament !
La Raison veut que l’on interdise aux femmes la botanique par principes : qu’elles se bornent à la connaissance des plantes potagères et de quelques simples !
La Raison n’approuve pas les femmes qui assistent aux leçons de la chymie : les cuisinières qui ne savent pas lire, sont celles qui font la meilleure soupe.
N. B. Le législateur des femmes espère qu’on lui pardonnera ces menus détails. L’utile avant tout.
« Rien n’est vil dans l’intérieur du domestique, pour une femme sage, » dit un poëte de la Chine.
La Raison souffre de voir les femmes grossir le troupeau des gens de lettres ; elles ont assez déjà des infirmités attachées à leur sexe, sans s’exposer encore à celles de cette profession.
La Raison veut que le médecin d’une femme de lettres lui ordonne, avant tout, de poser la plume et de renoncer aux livres, à tout jamais.
La nièce de Descartes mourut de la pierre, causée par son obstination à l’étude.
Or, le plus beau livre ne vaut pas une femme saine de corps et d’âme.
La Raison veut que l’on dise toujours les trois Grâces, mais que l’on ne dise plus les neuf Muses ; mythologie injurieuse au sexe, puisqu’elle tend à faire croire que sur douze femmes, on en compte neuf de pédantes, sur trois seulement d’aimables.
« Le goût des lettres chez les femmes, (dit Thomas) a été regardé comme une sorte de pédantisme. »
La Raison déclare qu’une mère de famille n’a pas besoin de savoir lire, pour bien élever ses filles.
La Raison et la décence veulent qu’une fille reçoive des leçons de sa mère seulement.
L’éducation du sexe n’eut d’abord (dans le tems que Rome était vertueuse) pour objet, que l’économie intérieure de la maison, et les ouvrages que les mères apprenaient elles-mêmes à leurs filles.
La Raison n’approuve pas ces maisons d’éducation pour les jeunes demoiselles, où on leur apprend tout, excepté la seule chose qu’elles doivent connaître, la science du ménage.
La belle éducation donnée à S.-Cyr aux jeunes filles nobles et pauvres, en faisait des femmes pédantes et hautaines.
Les femmes artistes, virtuoses,… etc., ne feront plus d’élèves.
La Raison veut que lorsqu’on s’occupera d’une loi sur l’adoption, on se donne de garde d’en accorder l’usage aux femmes lettrées, virtuoses,… etc.
La Raison veut que toute fille de bonne maison, avant d’obtenir un mari, fasse preuve de talens utiles.
La Raison veut qu’une jeune vierge, instruite par sa mère aux seules vertus privées, aux seuls détails du ménage, et bien pénétrée de l’amour de ses devoirs et du travail, soit dispensée d’avoir une dot pour avoir un mari.
La Raison ne conseille à personne de choisir pour épouse et compagne la fille d’une femme lettrée.
La Raison veut que les épousées ne devant point savoir lire, et par conséquent ne pouvant signer leur contrat de mariage, on se contente de leur consentement verbal devant le magistrat et les témoins.
Une femme bien née ou bien élevée, doit être crue sur sa parole.
La Raison veut que l’on grave sur le frontispice des salles de mariage, l’apophtegme suivant :
Quel est l’homme le plus heureux ?
L’homme le plus heureux, c’est le mari d’une femme sage sans livres.
La Raison recommande aux époux ce proverbe Chinois :
« Cultiver la vertu est la science des hommes ; renoncer à la science est la vertu des femmes. »
La Raison veut que la sur-veille des nôces, le meilleur ami ou le plus proche parent d’un épouseur, lui répète par trois fois les paroles suivantes, qu’Euripide met dans la bouche du jeune Hyppolyte ; et que le trop galant Racine s’est bien gardé de nous transmettre :
« … Heureux l’époux qui ne voit en sa maison qu’une femme simple ! car le comble du malheur, c’est une femme bel-esprit. Me préservent les Dieux d’une épouse qui sait plus qu’elle ne doit savoir !… »
N. B. Phèdre se piquait de bel-esprit, voire même de philosophie ; Phèdre !…
La Raison veut que dans le cérémonial du mariage chez les modernes, on imagine quelqu’incident du genre de celui-ci pratiqué par les anciens :
En Béotie, les nouvelles mariées étaient conduites avec pompe à la maison de leur époux, montées sur un char dont on brûlait l’essieu à la porte, afin de leur faire entendre qu’elles n’en devaient plus sortir.
Dans Rome ancienne, quand une nouvelle mariée posait le pied sur le seuil de la maison maritale, on lui demandait :
Que savez-vous ?
Elle ne répondait pas : je sais lire, je sais écrire, je sais peindre, etc.
Elle disait simplement, Je sais filer.
La Raison veut que l’on renouvelle cet ancien usage.
Les bons usages ne devraient jamais passer de mode.
La Raison invite à compulser le greffe des tribunaux civils et criminels ; on y verra dans le nombre des épouses divorcées beaucoup plus de femmes de lettres, virtuoses,… etc., à proportion que d’autres.
Est-ce pour éviter ce scandale que les neuf Muses gardent le célibat ?
La Raison veut qu’une femme soit aussi réservée à montrer en public les trésors de son esprit, que les charmes secrets de sa beauté.
La Raison veut que, pour donner l’exemple, les épouses de nos premiers Magistrats, Sénateurs, Tribuns, Juges, Généraux, etc. aux thés, aux cercles, aux conversations et autres assemblées oiseuses, substituent chez elles des veillées laborieuses et utiles, où on les verrait avec édification, mettre elles-mêmes la main aux vêtemens de leurs augustes époux.
Andromaque et Pénélope, femmes de deux héros, ne dédaignaient pas de présider à tous les détails domestiques.
Les maîtresses de maison pourront coudre un vêtement, pour l’offrir à titre de reconnaissance ou de cadeau à l’homme de lettres, dont elles auront entendu, pendant leurs veillées, un ouvrage rempli de sentimens vertueux et de talent.
La bonne madame Geoffrin, l’amie de d’Alembert, en agissait ainsi ; elle faisait présent de hauts-de-chausses de velours aux auteurs qui l’avaient intéressée par leurs lectures.
La Raison veut que chaque bal soit précédé par quelques heures d’un travail à l’aiguille ou au fuseau.
La Raison interdit aux femmes les livres d’église : n’ont-elles pas le chapelet et le rosaire ?
La Raison veut que les femmes, absolument étrangères aux misérables disputes des prêtres, s’en tiennent à la religion du cœur, et ne confessent leurs fautes qu’aux auteurs de leurs jours, ou à leurs maris, seuls juges compétens.
La Raison invite ceux qui prennent quelqu’intérêt à la dignité des lettres, à dissuader les femmes d’envahir un champ qu’elles n’ont point la force de cultiver, comme il veut l’être.
La pensée est chose sainte ; et le feu sacré du génie s’éteindrait tout-à-fait, s’il était sous la garde même des Vestales.
C’est ce qui est arrivé au divin Homère, sous la plume de madame Dacier.
La Raison veut que les femmes se contentent d’inspirer les poëtes, sans chercher à le devenir elles-mêmes.
Le cheval Pegaze ne se laisse bien monter que par un homme.
Une femme poëte, est une petite monstruosité morale et littéraire ; de même qu’une femme souverain est une monstruosité politique.
La Raison défend aux versificateurs, prosateurs, orateurs, d’enivrer les femmes par un encens perfide qui fait qu’elles se croient nées pour toute autre chose que pour aimer et pour l’être.
Les poëtes coupables effaceront ces madrigaux avec leur langue, comme il se pratiquait jadis à Marseille et à Lyon.
Suivant Bayle : « les femmes sont faciles à gagner par les vers. »
La Raison veut que désormais il soit permis aux courtisannes, seulement, d’être femmes de lettres, beaux-esprits et virtuoses.
Les plus fameuses courtisannes de la Grèce l’étaient, les deux Aspasie, Rhodope, Phryné, Lays, Thaïs, Lamia ; Hypparchie était cynique de théorie et de pratique : Cléonice composait des livres avec ses amans.
(Aux premiers siècles de l’histoire moderne), « on ne tenait pas pour de véritables vierges les filles qui faisaient de grandes conversations, et qui montraient leur bel-esprit. »
La Raison veut que les femmes s’abstiennent non pas seulement de la science des livres, mais encore de la science des cartes à jouer, et de l’art de tirer les cartes : ces deux occupations ruineuses, ne supposent ni esprit ni jugement.
La Raison permettra aux femmes l’usage des livres, quand les anges seuls se mêleront d’en composer.
« Pourquoi, (dit une maxime chinoise) ne pas apprendre à lire aux femmes ? — Parce qu’il y a de mauvais livres. »
La Raison veut que les compagnies savantes et les corps littéraires se refusent au plaisir de compter des femmes au nombre de leurs membres.
Les matrones de Rome ne hantaient pas les Gymnases.
La décadence de l’empire romain date du moment où les femmes se permirent d’assister au cirque, aux amphithéâtres, etc.
Les femmes grecques ne se montraient point aux jeux olympiques.
« Les femmes (dit le bon Plutarque) ne doivent jamais sortir dehors… Leur office est de bien garder la maison. »
La Raison désapprouve ces listes d’académiciens, grossies par des noms de femmes.
Le nom d’une femme ne doit être gravé que dans le cœur de son père, de son mari, ou de ses enfans.
La Raison veut qu’en attendant l’entier accomplissement de la présente loi, les femmes s’abstiennent de lire, et même d’assister aux séances publiques ou particulières des Instituts, Académies, Cercles ou Sociétés littéraires, Portiques ou Veillées des Muses, Musées, Lycées, Prytanées, Athénées,… etc. ; comme aussi de suivre les cathéchismes et les cours, de hanter les bibliothèques,… etc. Ce n’est pas là leur place : les femmes ne sont bien que chez elles, ou dans une fête de famille.
« Ses spectacles (dit Thomas, en parlant d’une femme estimable) sont ses enfans. »
La Raison veut que les femmes ne soient point admises aux tribunes du corps législatif, ni aux séances du tribunat, ni dans le parquet des tribunaux, ni aux fenêtres des maisons avoisinant les places publiques destinées aux exécutions.
Leur présence y serait un contresens.
Une femme ne doit et ne peut paraître avec décence et solemnité qu’au tribunal de famille ou de paix.
La Raison veut qu’une femme puisse voter dans une assemblée de famille ; la Raison désapprouverait fort que les femmes aillent opiner à la tribune d’une assemblée nationale.
Le premier des deux sexes, représentant naturel de l’autre, discute et stipule pour les deux ensemble.
La voix d’une femme parmi les législateurs ferait nécessairement cacophonie.
Qu’elles aillent plutôt au marché !
La Raison veut que, sans avoir égard à la réclamation de Condorcet (qui ne fut pas toujours philosophe dans sa conduite et dans ses écrits), les femmes continuent à renoncer au droit de cité, dont elles ne sauraient remplir les devoirs.
Serait-il convenable et décent, par exemple, que les jeunes filles et les femmes montassent la garde, fissent des patrouilles ?… etc.
On retrouve Condorcet tout entier, quand il dit, dans la même dissertation :
« Les femmes sont supérieures aux hommes dans les vertus domestiques ; elles sont meilleures, plus sensibles, moins sujettes aux vices qui tiennent à l’égoïsme, à la dureté du cœur ; mais… »
La Raison veut que les femmes tiennent le sceptre de la politesse, sans aspirer à celui de la politique.
Une femme serait aussi déplacée sur un trône que dans la chaire d’un évêque.
Que de plaisanteries ne s’est-on pas permises sur la papesse Jeanne ?
« Mais Catherine II, en Russie, dira-t-on. »
Quelle est la femme honnête qui voulût ressembler à cette impératrice immorale ?
La reine Christine, elle-même, disait :
« Mon sentiment est que les femmes ne devraient jamais régner ».
La Raison veut que les femmes demeurent, à l’avenir comme par le passé, étrangères aux ambages de la diplomatie.
« Ce n’est pas dans les affaires d’état, (dit Théophraste) c’est dans sa famille qu’une femme doit montrer son esprit et sa prudence. »
La Raison veut que tout citoyen qui aura choisi pour épouse et compagne une femme lettrée ou une virtuose, soit par le fait, regardé comme inhabile à remplir une fonction publique de quelqu’importance.
Périclès, gouverné par une femme philosophe, ne gouverna point Athènes avec toute la sagesse qu’on attendait de lui. Son administration fut brillante, mais aux dépens de la liberté publique ; et cependant Périclès n’avait pas craint d’adresser aux dames d’Athènes le discours suivant, traduit mot-à-mot :
« Pour ce qui vous regarde, voici quel est mon avis en peu de paroles ; n’aspirez qu’à ces vertus qui sont particulières à votre sexe, suivez la modestie qui vous est naturelle ; et croyez que le plus grand éloge que vous puissiez obtenir, c’est qu’on ne dise rien de vous ni en bien ni en mal. »
La Raison… qui dispense les femmes d’apprendre à lire et à écrire, pour empêcher qu’elles n’éludent la présente loi, en dictant les produits de leur imagination à un copiste complaisant, défend à tout homme d’écrire sous la dictée des femmes, excepté une lettre à leurs pères ou à leurs maris absens, ainsi tout ce qui peut intéresser l’économie domestique.
La Raison veut que tous les bons livres (et ils ne sont pas en si grand nombre) soient lus aux femmes, mais non lus par elles.
La Raison veut que les chefs de maison, les pères et les maris se fassent un devoir de remplir les fonctions de lecteurs auprès des femmes. Est-il un tableau plus touchant que celui de Greuze, représentant un père de famille, lequel assis à une table, fait lecture de la bible à ses enfans rangés autour de lui ?
Chacun des chefs de maison transcrira, pour le lire à sa femme et à ses filles, à tout le moins une fois l’an, le premier livre des Économiques par Xénophon : c’est un chef-d’œuvre de raison et de sensibilité.
La Raison veut qu’un chef de maison réponde à sa femme et à ses filles tentées de lui reprocher le peu d’éducation littéraire qu’il leur donne, par ce passage d’un livre plein de sens, imprimé au commencement du siècle qui vient de finir :
« De toutes les sciences, celle qui convient le mieux aux femmes et à laquelle elles se devraient principalement appliquer, c’est la science des mœurs… Les autres sciences leur sont fort inutiles… L’expérience leur apprend que si elles veulent s’attirer de l’amour, du respect et de la considération, il ne faut pas pour cela qu’elles soient théologiennes, mathématiciennes, physiciennes, rhétoriciennes, historiennes… etc. Les plus instruites dans ces sciences, ne sont pas celles qui plaisent le plus. »
La Raison veut que le père, le mari, les frères et les enfans de chaque maison ne portent d’autres vêtemens que ceux filés et tissus de la main des filles et des sœurs, des épouses et des mères.
L’empereur César Auguste portait d’ordinaire des habits faits par sa femme, sa sœur et ses filles.
En ce temps-là, on ne voyait point les femmes armées d’une plume et d’une férule, composer des romans et des traités de théologie.
En ce temps-là, on ne voyait point un père et sa fille joûter l’un contre l’autre à qui fera les plus gros livres de finance et de littérature, de morale et de religion, tandis que la mère plus sage et mal imitée, fondait des hospices.
En Chine, la femme d’un Lettré ne peut pas employer des mains étrangères pour les habits de son époux ; il faut qu’elle en tire la matière de ses vers-à-soie, la mette en œuvre et les fasse elle-même.
La Raison propose cet exemple aux épouses et compagnes des membres de l’Institut et des autres Sociétés littéraires.
La Raison veut que les femmes qui s’obstineraient à faire des livres, ne soient point admises à faire des enfans.
Bayle ne conseille point aux beaux-esprits femelles de s’engager dans les liens du mariage.
Selon lui : c’est le sort ordinaire des femmes savantes d’essuyer plusieurs chagrins domestiques…
Bayle aurait pu ajouter : et d’en causer.
Les hommes ont consacré une fête à la découverte de l’alphabet et de l’imprimerie.
Les hommes et les femmes se réuniront pour célébrer une invention charmante, plus précieuse peut-être encore, et qui certainement est point susceptible des mêmes abus, l’invention de la gaze.
La Raison veut qu’on réalise cette ancienne loi proposée par le sage Pythagore au peuple de Crotone.
« Honore la charrue et la quenouille ; consacre leur une fête chaque année. »
On conserva, pendant plusieurs siècles, dans un temple, à Rome, la quenouille et le fuseau de Tanaquil, chargés de la laine que cette reine avait filée. Elle passait pour la plus habile fileuse de son tems.
Les filles romaines qui se mariaient étaient accompagnées pendant le cérémonial d’une personne portant une quenouille garnie.
En Chine, l’impératrice célèbre tous les ans la fête du fuseau.
Filer vaut mieux qu’ourdir des trames politiques ou des cabales littéraires.
La Raison veut que dans toutes les assemblées et fêtes publiques, les filles à talent et les femmes de lettres, (tant qu’il y en aura) cèdent le pas aux bonnes ménagères et aux mères de famille.
La Raison veut que le soin de brûler des parfums et de tresser les guirlandes de fleurs et les couronnes dans les fêtes publiques, soit réservé aux vierges pures et sans lettres.
Les épouses et les mères de famille gardent la maison.La Raison veut que les bonnes actions des filles sages, des épouses vertueuses et des mères de famille soient proclamées, en leur absence, dans les solemnités nationales.
On portera chez elles les couronnes qui leur auront été décernées. On leur répétera l’hymne chanté en leur honneur, et non imprimé ; on en confiera la tradition à la mémoire de leurs parens ou de leurs enfans.
La Raison veut qu’aux fêtes publiques dans toutes les communes, on proclame, non les femmes auteurs de beaux livres, mais les mères de beaux enfans.
La Raison veut qu’on grave sur la tombe des femmes recommandables par la science et la pratique du ménage, cette belle et antique épitaphe de la reine Amalasonthe, non pas la fille de Théodoric, roi des Goths, mais une autre Amalasonthe, beaucoup plus ancienne :
Casta vixit,
Lanam fecit,
Domum servavit.
Elle vécut chaste,
Travailla en laine,
Et garda la maison.
Les pères et les maris sont responsables de la stricte observance de la présente loi.
Ils seront, seuls, punis des contraventions de leurs filles et de leurs femmes.
La présente loi est commise à la garde des pères de famille et chefs de maison.
Chaque père de famille et chef de maison, se procurera un exemplaire de ladite loi, pour être placé à l’endroit le plus apparent du domicile.
Aussitôt que ce projet de loi aura obtenu sa sanction par la pluralité des suffrages, chacun des chefs de maison donnera une fête à sa famille, pour y proclamer ladite loi, dans l’intervalle du repas aux danses.
En même tems, il fera jeter au milieu d’un feu de joie tous les livres et instrumens à l’usage de l’éducation factice des femmes. Autour du bûcher, on chantera une ronde composée dans l’esprit des couplets suivans :
Sur l’air : Chantez, dansez,… etc.
Faut-il tous ces livres poudreux,
Pour être amante, épouse et mère
La nature en sait plus long qu’eux ;
Avec le cœur on sait tout faire.
Chantons, dansons, travaillons bien ;
Aimons-nous, le reste n’est rien.
Deux jeunes époux bien portant
Ont-ils besoin de savoir lire,
Pour être auteurs d’un bel enfant
Qui commence par leur sourire ?
Chantons, etc.
Le nouveau-né, certainement,
Peut se passer de la grammaire ;
Sans savoir lire au rudiment,
Il tête et caresse sa mère.
Chantons, etc.
En attendant que l’on prenne le même parti à l’égard de beaucoup d’autres livres, tous les ouvrages composés par les femmes ou pour elles, seront incessamment réunis en un seul dépôt.
Le flambeau de la critique fera, de la plupart de ces nombreux volumes, un sacrifice expiatoire au bon sens.
Cette mesure, peut-être un peu extrême, a pourtant cela de bon, que par elle cessera nécessairement la distinction des femmes lettrées et de celles qui ne le sont point.
Ce qui mettra fin à la petite guerre sourde qui existe entr’elles.
Pour donner un exemple de l’esprit dans lequel on doit procéder à la réforme des livres, on ne conservera de tous les volumes du Parnasse des Dames, que les lignes suivantes : « La vie sédentaire des Dames Romaines, uniquement occupées de l’intérieur de leur maison, le soin qu’on prit tout le tems que dura la République, de les élever dans l’ignorance, le profond respect même qu’on leur portait et les honneurs presque divins rendus à celles qui avaient vécu retirées, chastes et laborieuses, étaient autant d’obstacles pour les détourner de l’amour des lettres…
Les Dames Romaines n’ambitionnèrent le titre de bel esprit et de philosophes, que lorsqu’elles cessèrent de prétendre aux noms plus respectables de mères tendres et d’épouses fidèles… etc.
Les Dames Romaines ne commencèrent à cultiver les lettres que dans le tems de leur décadence. »
P. S. Les Chinoises sont aussi peu curieuses de Littérature et d’Histoire que les Européennes, de morale et l’algèbre : leur domestique est leur univers ; plus elles s’occupent à le bien gouverner, plus elles sont heureuses et estimées. On aimerait presqu’autant leur voir prendre un sabre qu’un pinceau (c’est-à-dire une plume) : pour leur en ôter l’envie, on ne leur apprend pas à lire.
(Mémoires Chinois, in 4o., t. I, p. 12.)
Encore une petite citation.
« … L’étude des langues et des connaissances relevées, loin de rendre une femme utile à sa famille, ne servirait qu’à la distraire et à l’enorgueillir jusqu’au point de négliger le soin des affaires domestiques, de mépriser toute subordination et de maudire la condition de son sexe… Les objets essentiels de l’éducation d’une femme sont… la science de tout ce qui inspire la douceur, la modestie, la propreté du corps… etc. «
N. B. On remplirait plusieurs volumes in-folio d’autorités graves, prouvant la nécessité et l’urgence d’une loi dans l’esprit de celle dont nous publions ici le programme.
Dédaigneuse et superbe, elle croit tout savoir ;
Son mari n’est qu’un sot, trop heureux de l’avoir.
Voulez-vous que la paix dans vos cœurs se conserve,
Belles, que le travail vous occupe toujours !
Souvent l’aiguille de Minerve
Repousse les traits des amours.
Au tems où nous vivons, deux têtes exaltées
Du sexe féminin outre-passant les droits,
La S**, la G**, deux chèvres Amalthées,
Ont singé les docteurs des peuples et des rois.
Sur les bancs poudreux de l’école,
Non, je n’aimerais pas te voir
Dans les volumes de Barthole
Puiser un pénible savoir.
Ne vante pas tant la science ;
Ève sait ce qu’elle a coûté :
Il est une aimable ignorance
Qui sied bien mieux à la beauté.
La beauté souvent n’est savante,
Hélas ! qu’aux dépens de son cœur :
Qu’une Agnès est intéressante !
On préfère à tout sa candeur.
De tous les arts, Pallas est mère ;
Pallas pourtant n’eut pas le prix :
Vénus qui ne savait que plaire,
Le reçut des mains de Pâris.
Les neuf sœurs sont encor pucelles,
Malgré leurs sublimes esprits ;
Moins savantes, nos immortelles
Auraient pu trouver des maris.
Hortense, une longue lunette
Qui fatiguerait tes beaux yeux,
T’irait plus mal qu’une navette
Entre tes doigts industrieux.
Ta bouche, notre idolâtrie,
Faite pour le propos badin,
Deviendrait-elle plus jolie,
Quand tu saurais parler latin ?
L’aigle altier porte le tonnerre ;
Dans les cieux il a son séjour :
La colombe rase la terre,
Et n’est faite que pour l’amour.
Pour ton Dieu, amour tu auras,
Et serviras honnêtement.
Amour en vain ne jureras
Ni par l’Hymen pareillement.
Foi conjugale garderas
À ton époux dévotement.
Infidèle point ne seras,
De fait ni volontairement.
Père et mère honoreras
Afin de vivre plaisamment.
Trop exigente ne seras
De corps, d’esprit, ni autrement.
D’autres science n’apprendra
Que ton ménage seulement.
Romans et vers ne feras,
Ni mentiras aucunement.
Tes enfans tu allaiteras,
Pour être mère absolument.
Vivant ainsi, droit tu iras
En paradis dès ce moment.
Académiciennes de l’hôtel Rambouillet. (les)
Amalasonthe.
Amazonnes. (les)
Américaines. (les)
Andromaque.
Antigone.
Aspasie.
Bourignon. (Madame)
Brigitte. (Sainte)
Catherine de Médicis.
Catherine II, de Russie.
Chambrière de Colletet. (la)
Christine.
Cléonice.
Cornara. (Piscopia)
Dacier. (Madame)
Deshoulières. (Madame)
Dibutade.
Duchatelet. (Madame)
Erinne.
Ève.
Fatime.
Gauloises. (les)
Géneviève. (Sainte)
Geoffrin. (Madame)
Gournay. (Mademoiselle de)
Guyon. (Madame)
Hélène.
Hypparchie.
Jeanne d’Arc.
Jeanne. (la Papesse)
Juives. (les femmes)
Labé Lyonaise. (Louise)
Lacédémoniennes. (les)
Lamia.
Lasuze. (Madame de)
Laure.
Lays.
Longueville. (Madame de)
Lucrèce.
Maintenon. (Madame de)
Marguerite de Navarre.
Marie.
Marthe.
Ménagère de Malherbe. (la)
Montaigue. (Milady)
Nasicaa.
Nièce de Descartes. (la)
Noëmi.
Pénélope.
Phriné.
Reines de France. (les)
Rhodope.
Romaines. (les Dames)
Ruth.
Sabines. (les)
Sapho.
Sarrochia. (Marguerite)
Servante de Molière. (la)
Sévigné. (Madame de)
Sulpicie.
Tanaquil. (la Reine)
Thaïs.
Vestales.
Vierge. (la Sainte)
Villedieu. (Madame de)
Zénobie.
Alcinoüs.
Alembert. (d’)
Aristote
Attila.
Auguste. (César)
Balzac.
Barbarigo. (le Cardinal)
Bayle.
Bibliothèque des Amans. (l’auteur de la)
Bibliothèque des Femmes. (les auteurs de la)
Boileau.
Booz.
Chaptal.
Charlemagne.
Clairaut.
Colletet.
Condorcet.
Corneille.
Desmathis.
Desportes. (Philippe)
Duguesclin.
Égyptiens. (les)
Encyclopédie. (les auteurs de l’)
Euripisde
Evremont (Saint)
Fénélon.
Fleury.
Gabriel. (l’Ange)
Galerie des Femmes célèbres. (les auteurs de la)
Galerie des Hommes illustres. (les auteurs de la)
Greuze.
Hector.
Henri IV.
Homère.
Horace.
Hyppolite.
Institut. (les membres de l’)
Juvénal.
Langue. (l’auteur de la)
Larochefoucault.
Le Brig…
Mahomet.
Malherbe.
Mallebranche.
Martinelli. (Vincent)
Molière.
Montaigne. (Michel)
Œdipe.
Origène.
Ovide.
Palaye. (Sainte)
Pannard.
Paul. (Saint)
Périclès.
Pline.
Plutarque.
Pope.
Pradon.
Pythagore.
Quintus de Smyrne.
Racine.
Retz. (le Cardinal de)
Rousseau. (J. J.)
Salomon.
Sylvain.
Théocrite.
Théodoric.
Théophraste.
Thomas. (l’Académicien)
Tourlet.
Turenne.
Voiture.
Voltaire.
Xénophon.
- ↑ N. B. Ceci est emprunté à la 984e. des loix de Pythagore.
« Ne permettez point à une femme de parler en public, d’ouvrir école, de fonder une secte ou un culte. Une femme en public est toujours déplacée. »(T. VI. des Voyages de Pythagore.)