à [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes A#Auxerre|Auxerre]], dans les monuments de l’ouest ou du centre, ce sont des
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peuplades d’animaux bizarres, rendus toujours avec une grande énergie.
peuplades d’animaux bizarres, rendus toujours avec une grande énergie.
Au sommet des deux tours de la façade de la cathédrale de Laon, les
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sculpteurs du XIII<sup>e</sup> siècle ont placé, dans les pinacles à jour, des animaux
sculpteurs du XIII<sup>e</sup> siècle ont placé, dans les pinacles à jour, des animaux
s. m. Saint Jean (apocalypse, chap. IV et V) voit dans le ciel
entr’ouvert le trône de Dieu entouré de vingt-quatre vieillards vêtus de
robes blanches, avec des couronnes d’or sur leurs têtes, des harpes et des
vases d’or entre leurs mains; aux quatre angles du trône, sont quatre animaux
ayant chacun six ailes et couverts d’yeux devant et derrière: le
premier animal est semblable à un lion, le second à un veau, le troisième à
un homme, le quatrième à un aigle. Cette vision mystérieuse fut bien des
fois reproduite par la sculpture et la peinture pendant les XIIe, XIIIe, XIVe et
XVe siècles. Cependant, elle ne le fut qu’avec des modifications importantes.
On fit, dès les premiers siècles du christianisme, des quatre animaux, la
personnification des quatre évangélistes: le lion à saint Marc, le veau à saint
Luc, l’ange (l’homme ailé) à saint Matthieu, l’aigle à saint Jean; cependant
saint Jean, en écrivant son Apocalypse, ne pouvait songer à cette personnification
puisque alors les quatre évangiles n’étaient pas écrits. Toutefois,
l’ Apocalypse étant considérée comme une prophétie, ces quatre animaux
sont devenus, vers le VIIe siècle, la personnification ou le signe des évangélistes. Pendant le XIIe siècle, la sculpture, déjà fort avancée comme art, est
encore toute symbolique; le texte de saint Jean est assez exactement rendu.
Au portail occidental de l’église de Moissac, on voit représenté sur le
tympan de la porte le Christ sur un trône, entouré des quatre animaux
nimbés, tenant des phylactères, mais ne possédant chacun que deux ailes,
et dépourvus de ces yeux innombrables; au-dessous du Christ, dans le
linteau, sont sculptés les vingt-quatre vieillards. Au portail royal de la
cathédrale de Chartres (1), on voit aussi le
Christ entouré des quatre animaux seulement.
Les vingt-quatre vieillards sont disposés dans
les voussures de la porte. Au portail extérieur
de l’église de Vézelay, on retrouve, dans le
tympan de la porte centrale, les traces du Christ
sur son trône, entouré des quatre animaux et
des vingt-quatre vieillards placés en deux groupes
de chaque côté du trône. Plus tard, au
XIIIe siècle, les quatre animaux n’occupent plus
que des places très-secondaires. Ils sont placés
comme au portail principal de Notre-Dame de
Paris, par exemple, sous les apôtres, aux quatre
angles saillants et rentrants des deux ébrasements
de la porte. L’ordre observé dans la
vision de saint Jean se perd, et les quatre animaux
ne sont plus là que comme la personnification
admise par tous, des quatre évangélistes.
On les retrouve aux angles des tours,
comme à la tour Saint-Jacques-la-Boucherie de
Paris, XVIe siècle; dans les angles laissés par
les encadrements qui circonscrivent les roses,
dans les tympans des pignons, sur les contre-forts des façades, dans les
clefs de voûtes, et même dans les chapiteaux des piliers de chœurs.
Avant le XIIIe siècle, les quatre animaux sont ordinairement seuls; mais,
plus tard, ils accompagnent souvent les évangélistes qu’ils sont alors
destinés à faire reconnaître. Cependant, nous citerons un exemple curieux
de statues d’évangélistes de la fin du XIIe siècle, qui portent entre leurs
bras les animaux symboliques. Ces quatre statues sont adossées à un pilier
du cloître de Saint-Bertrand de Comminges (2).
La décoration des édifices religieux et civils présente une variété infinie
d’animaux fantastiques pendant la période du moyen âge. Les bestiaires
des XIIe et XIIIe siècles attribuaient aux animaux réels ou fabuleux des
qualités symboliques dont la tradition s’est longtemps conservée dans
l’esprit des populations, grâce aux
innombrables sculptures et peintures
qui couvrent nos anciens monuments;
les fabliaux venaient encore
ajouter leur contingent à cette série
de représentations bestiales. Le lion,
symbole de la vigilance, de la force
et du courage; l’antula, de la cruauté;
l’oiseau caladre, de la pureté; la
sirène; le pélican, symbole de la
charité; l’aspic, qui garde les baumes
précieux et résiste au sommeil; la
chouette, la guivre, le phénix; le
basilic, personnification du diable;
le dragon, auquel on prêtait des
vertus si merveilleuses (voy. les
Mélang. archéol. des RR. PP. Martin
et Cahier), tous ces animaux
se rencontrent dans les chapiteaux
des XIIe et XIIIe siècles, dans les
frises, accrochés aux angles des monuments,
sur les couronnements des contre-forts, des balustrades. À
Chartres, à Reims, à Notre-Dame de Paris, à Amiens, à Rouen, à Vézelay,
à Auxerre, dans les monuments de l’ouest ou du centre, ce sont des
peuplades d’animaux bizarres, rendus toujours avec une grande énergie.
Au sommet des deux tours de la façade de la cathédrale de Laon, les
sculpteurs du XIIIe siècle ont placé, dans les pinacles à jour, des animaux
d’une dimension colossale (3).
Aux angles des contre-forts du portail de Notre-Dame de Paris, on voit aussi sculptées d’énormes bêtes, qui, en se découpant
sur le ciel, donnent la vie à ces masses de pierre (4). Les balustrades
de la cathédrale de Reims sont surmontées d’oiseaux bizarres, drapés, capuchonnés.
Dans des édifices plus anciens, au XIIe siècle, ce sont des frises d’animaux
qui s’entrelacent, s’entre-dévorent (5); des chapiteaux sur
lesquels sont figurés des êtres étranges, quelquefois moitié hommes, moitié bêtes;
possédant deux corps pour une tête, ou deux têtes pour un corps; les églises
du Poitou, de la Saintonge, de la Guyenne, les monuments romans de la
Bourgogne et des bords de la Loire, présentent une quantité prodigieuse
de ces animaux, qui, tout en sortant de la nature, ont cependant une
physionomie à eux, quelque chose de réel qui frappe l’imagination; c’est
une histoire naturelle à part, dont tous les
individus pourraient être classés par espèces.
Chaque province possède ses types particuliers,
qu’on retrouve dans les édifices de
la même époque; mais ces types ont un
caractère commun de puissance sauvage;
ils sont tous empreints d’un sentiment d’observation
de la nature très-remarquable.
Les membres de ces créatures bizarres sont
toujours bien attachés, rendus avec vérité;
leurs contours sont simples et rappellent la
grâce que l’on ne peut se lasser d’admirer
dans les animaux de la race féline, dans les
oiseaux de proie, chez certains reptiles.
Nous donnons ici un de ces animaux, sculpté
sur un des vantaux de porte de la cathédrale
du Puy-en-Vélay (6). Ce tigre, ce lion, si l’on veut, est en
bois; sa langue, suspendue
sur un axe, se meut au moyen d’un petit
contre-poids quand on ouvre les vantaux de
la porte; il était peint en rouge et en vert.
Il existe, sur quelques chapiteaux et corbeaux
de l’église Saint-Sernin de Toulouse,
une certaine quantité de ces singuliers quadrupèdes
qui semblent s’accrocher à l’architecture
avec une sorte de frénésie; ils sont
sculptés de main de maître (7). Au XIVe siècle,
la sculpture, en devenant plus pauvre, plus maigre, et se bornant
presque à l’imitation de la flore du nord, supprime en grande partie les
animaux dans l’ornementation sculptée ou peinte; mais, pendant le XVe siècle et au
commencement
du XVIe, on les voit
reparaître, imités alors plus
scrupuleusement sur la
nature, et ne remplissant
qu’un rôle très-secondaire
par leur dimension. Ce
sont des singes, des chiens,
des ours, des lapins, des rats, des renards, des limaçons, des larves, des
lézards, des salamandres; parfois aussi, cependant, des animaux fantastiques,
contournés (8), exagérés dans leurs mouvements; tels sont ceux que l’on
voyait autrefois sculptés sur les accolades de l’hôtel de La Trémoille, à Paris.
Les représentations des fabliaux deviennent plus fréquentes, et, quoique fort
peu décentes parfois, se retrouvent dans des
chapiteaux, des frises, des boiseries, des stalles,
des jubés. La satire remplace les traditions
et les croyances populaires. Les artistes abusent
de ces détails, en couvrent leurs édifices
sans motif ni raison, jusqu’au moment où
la Renaissance vient balayer tous ces jeux
d’esprit usés, pour y substituer ses propres
égarements.