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Théagès (trad. Cousin)/Argument philosophique

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Œuvres de Platon,
traduites par Victor Cousin
Tome cinquième
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ARGUMENT
PHILOSOPHIQUE.


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Le but de ce petit dialogue, ou du moins le seul point sérieux qu’on y puisse apercevoir est l’importante distinction de la manière d’instruire de Socrate d’avec celle des sophistes. Ce n’était point par des cours et des leçons régulières, comme les sophistes, ni par des livres, comme les modernes, que Socrate avait acquis tant d’influence sur l’esprit de ses concitoyens, et qu’il répandait autour de lui les lumières et l’instruction.

Au lieu de l’appareil souvent stérile d’une science d’école, factice et maniérée, tout son art consistait à mettre ceux qui le fréquentaient en contact plus ou moins intime avec son âme, pour féconder et développer la leur, par le charme de la sympathie. Où manquait la sympathie, Socrate lui-même ne pouvait rien. Cet instinct mystérieux, dont la source se cache dans des causes placées hors de la volonté de l’homme, ce lien qui unit les cœurs à leur insu et souvent même en dépit d’eux, ce rapport à-la-fois irrésistible et inexplicable, était nécessaire à Socrate pour qu’il pût agir et être utile, et l’amitié était pour lui la condition et l’instrument de toute grande et noble influence. Aussi, à vrai dire, n’avait-il point d’élèves, mais des jeunes gens qui s’attachaient à lui. Il causait et vivait avec eux ; c’était là son enseignement. Cet enseignement se faisait au hasard, à la promenade, aux gymnases, dans les places publiques, partout et toujours et sur toutes choses, improvisé, naïf, varié, plein de vie. Peut-être ne laissait-il pas dans les esprits tel ou tel système déterminé ; mais il leur inculquait d’excellentes habitudes, et ouvrait en tout sens à la pensée des directions saines et originales. Socrate ne fit pas d’école particulière ; il fit mieux, il créa un mouvement intellectuel qui, se communiquant de proche en proche, embrassa peu-à-peu la Grèce entière, et par la Grèce tout le genre humain.

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