Épaves (Prudhomme)/La Vénus de Milo

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ÉpavesAlphonse Lemerre. (p. 75-76).


LA VÉNUS DE MILO


La Nature accomplit lentement ses desseins.
Elle ébauchait de loin la forme des poitrines
En faisant onduler les surfaces marines,
Se soulever les monts, se creuser les bassins ;

Elle apprêtait aux cœurs leurs suaves coussins
En courbant les profils enchanteurs des collines ;
Qui sait après combien d’esquisses féminines,
Au temps des premiers lys elle moula les seins ?

 
Et de ses longs essais le dernier n’est pas Ève :
Son chef-d’œuvre attendu d’âge en âge s’achève,
Et la beauté, de femme en femme, éclôt toujours,

Jusqu’au type suprême où l’Art triomphe et trace
D’un corps humain parfait les surhumains contours,
Et ce modèle, ô Grèce, est la fleur de ta race.