Œuvres de Turgot (Daire, 1844)/Actes du Ministère de Turgot/Sur l’impôt indirect

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2o DÉCLARATIONS, ÉDITS, ETC., RELATIFS À L’IMPÔT INDIRECT.

Arrêt du Conseil d’État, du 15 septembre 1774, qui supprime les sous pour livre
ajoutés à différents droits établis sur le commerce.

Vu au Conseil d’État du roi, Sa Majesté y étant, l’édit du mois de novembre 1771, et l’arrêt du Conseil du 22 décembre suivant, portant règlement pour la perception des sous pour livre, établis par ledit édit ; par lequel arrêt les droits de péage, passage, travers, barrage, pontonage et autres droits de pareille nature ont été assujettis auxdits sous pour livre : Sa Majesté étant informée que la plupart desdits droits sont d’un objet trop modique pour que les sous pour livre puissent être perçus toujours avec justice, quoique les droits au-dessous de 15 deniers en aient été affranchis pour prévenir tous les abus dans la perception ; considérant d’ailleurs que tous lesdits droits tombent en grande partie sur la portion la plus pauvre de ses sujets, Sa Majesté a voulu leur donner une nouvelle preuve de son affection en sacrifiant à leur soulagement cette branche de ses revenus, dont le recouvrement a souvent servi de prétexte à des perceptions irrégulières : Ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne,

Qu’à compter du jour de la publication du présent arrêt, les droits de péage, halage, passage, pontonage, travers, barrage, coutume, étalage, leyde, afforage, de poids, aunage, marque, chablage, gourmetage, et les droits de bacs appartenant aux princes de son sang, seigneurs et autres particuliers qui les possèdent à titre patrimonial ou autre titre équivalent, seront et demeureront affranchis de la perception des 8 sous pour livre établis en conséquence de l’édit du mois de novembre 1771. Fait Sa Majesté très-expresses inhibitions et défenses à tous propriétaires, fermiers ou régisseurs, de faire à l’avenir la perception desdits 8 sous pour livre en sus du principal desdits droits ; leur enjoignant de se conformer, pour la quotité des articles de perception, aux termes des titres qui établissent lesdits droits, à peine de concussion. N’entend Sa Majesté comprendre dans ladite exemption les droits d’aunage, mesurage et autres de pareille nature appartenant à des compagnies d’officiers, de même que ceux dont jouissent des particuliers à titre d’engagement. Enjoint Sa Majesté aux sieurs intendants et commissaires départis dans les provinces et généralités du royaume, de tenir la main à l’exécution du présent arrêt, etc.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État du 14 octobre 1774, qui révoque celui du 3 octobre 1773, portant règlement pour la fourniture et vente des sels dans les dépôts limitrophes aux pays de gabelle.

Vu par le roi, étant en son Conseil, les mémoires présentés à Sa Majesté par les villes de Riom et Clermont ; par la ville de Châtelleraut et la province de Poitou ; par celle d’Aubusson et autres villes et pays de la haute Marche ; par les maire, échevins et autres officiers municipaux de la ville de Guéret ; par les habitants de la ville du Blanc en Berri, et de ses environs ; par ceux de la ville de Thouars et paroisses ressortissantes du dépôt à sel de ladite ville ; et par ceux de la ville de Saint-Vaulry, généralité de Limoges, d’une part ; et par l’adjudicataire des fermes générales, d’autre part ; ceux des officiers municipaux de Riom et autres villes ci-dessus nommées, contenant leurs représentations contre un arrêt du Conseil du 3 octobre 1773, portant règlement pour la fourniture des sels aux dépôts limitrophes du pays de gabelle, lequel a accordé à l’adjudicataire des fermes le droit exclusif d’approvisionner de sel lesdits dépôts, avec défense aux habitants des villes d’Aubusson et de Riom d’en continuer le commerce ; lesdits mémoires expositifs, entre autres choses, que la province d’Auvergne était du nombre de celles qui ont été anciennement rédimées des droits de gabelle ; qu’il y avait cela de particulier pour cette province, qui rendait son privilège d’autant plus favorable, que ce n’était point par un prix payé comptant qu’elle s’était rédimée, que c’était sous une charge annuelle et perpétuelle, par une augmentation sur la taille, qui a suivi la même progression que la taille elle-même ; que c’était ce que l’on pouvait voir dans les édits des mois d’août 1547, juillet 1549, avril 1550 et octobre 1557 ; quêtant d’édits se trouvaient encore confirmés par les lettres-patentes de 1560, 1563 et 1578 ; que de là venait qu’il n’y avait nulle proportion pour l’imposition de la taille entre les autres provinces du royaume et l’Auvergne, où elle est beaucoup supérieure : que les demandes des fermiers généraux sur lesquelles était intervenu l’arrêt du 3 octobre 1773, étaient le complément du système d’envahissement des privilèges des provinces rédimées, qu’ils avaient conçu depuis plus d’un siècle ; qu’en effet, pour peu qu’on y fît attention, on reconnaîtrait par combien de degrés cet événement avait été préparé : que la vente était totalement libre, au moyen des conventions faites avec elles et

des sommes dont elles avaient contribué, lorsqu’on imposa la formalité gênante des dépôts à l’extrémité des pays rédimés, par laquelle ils touchent au pays de gabelle : qu’il était vrai que cet établissement était antérieur à l’ordonnance de 1680 ; mais que, quoique cette ordonnance en eût fixé irrévocablement les règles et la discipline, cependant en 1722, au lieu de laisser approvisionner les dépôts indifféremment par tout le monde, on avait exigé que les marchands prissent des commissions des juges ; qu’ensuite elles étaient devenues des commissions du fermier, révocables selon sa volonté ; au moyen de quoi il ne restait plus que d’établir en sa faveur la vente exclusive du sel, et que c’était ce qu’avait fait l’arrêt du 3 octobre 1773 : qu’à la vérité il y était bien dit que le prix serait fixé sur celui des salorges les plus voisines, mais que cette vente exclusive une fois établie, il était difficile de rassurer eux habitants des provinces rédimées, sur la crainte que ce prix ne fût successivement augmenté, soit par des sous pour livre établis par le gouvernement, soit par des prétextes que trouveraient les fermiers-généraux eux-mêmes : que d’ailleurs, se trouvant maîtres de la totalité de la denrée dans une partie de la province, qui est plus d’un cinquième de l’Auvergne, il était vraisemblable qu’ils influeraient aisément sur le prix du sel dans les salorges du pays libre ; que cette règle s’étendrait petit à petit dans la province où les dépôts n’ont pas été établis : que la faculté de vendre du sel, ôtée par ledit arrêt du 8 octobre 1773, aux villes de Riom et d’Aubusson, était une preuve convaincante de leurs vues : qu’enfin ce fournissement fait par les fermiers-généraux, de sels qu’ils tiraient directement des marais salants par la Loire et l’Allier, détruirait une branche de commerce très-utile, non-seulement aux provinces où les dépôts sont établis, mais encore à toutes celles qui se trouvent entre ces provinces et la mer, lesquelles trouvaient dans le trafic et voiturage de ces sels des ressources très-avantageuses : que la rupture de la communication établie pour le transport de cette denrée entièrement libre et la partie approvisionnée par les dépôts, et surtout la destruction du commerce du sel dans les villes de Riom et d’Aubusson, portaient le préjudice le plus notable à ces deux villes, et principalement à la dernière, dont les manufactures exigent une infinité de convois de toutes les parties de la province, convois dont le prix était diminué par l’espérance des voituriers de trouver à charger du sel en retour : que c’était enfin causer un préjudice très-grand à ces provinces dans le moment présent, et leur en faire envisager de bien plus grands pour l’avenir, sans que ces maux pussent être balancés par un avantage notable pour les finances de l’État.

Vu aussi les Mémoires des fermiers-généraux en réponse, par lesquels ils auraient de leur côté représenté, entre autres choses, qu’ils n’avaient eu d’autre part à tout ce qui avait été fait sur cet objet, que d’avoir répondu à un Mémoire qui leur avait été communiqué, et d’avoir énoncé ce qui leur avait paru le plus utile pour la régie des droits du roi ; que, comme la proposition par eux faite l’avait été à l’expiration de leur bail, et comme ils n’avaient pas caché que la faculté d’approvisionner eux-mêmes les dépôts opérerait une augmentation de produit sensible, c’était pour le roi que cette augmentation avait lieu, et qu’ils n’avaient pas manqué de la faire entrer en considération dans le prix qu’ils ont donné du bail ; que la preuve de ce fait se trouverait établie par les calculs qu’on avait faits pour en régler le prix ; qu’on leur a fait valoir cette augmentation, et qu’enfin cette faculté est énoncée dans le résultat du Conseil qui leur porte bail : ce qui prouvait, ont-ils dit, qu’elle a été regardée comme faisant partie des conditions de ce bail, et que c’était le roi qui par là devait jouir du bénéfice qui en pouvait résulter, puisque l’effet ne devait commencer qu’en même temps que le nouveau bail, d’où ils induisaient qu’ils étaient absolument sans intérêt pour l’obtention de l’arrêt du 3 octobre 1773 ; et que, s’ils ont donné lieu, par les éclaircissements qui leur avaient été demandés, à ce qu’il fût rendu, ils ne l’avaient fait qu’en l’acquit de leur devoir, pour le maintien et pour la bonification des droits dont la régie leur est confiée ; ajoutant que cette bonification se trouverait principalement dans la facilité que cet établissement leur procurerait pour arrêter les versements que les ressortissants des dépôts font, sur le pays de gabelle, des sels surabondants à leur consommation ; qu’indépendamment de la plus grande vigilance qu’ils emploieraient dans le débit des sels fournis par eux, ils se procureraient encore un moyen très-facile de les empêcher de circuler dans le pays de gabelle, en les fournissant en sel blanc, pendant que les greniers de gabelle le sont en sel gris ; que cette seule précaution, sans violences, sans jugements, sans condamnations, serait une bar rière plus utile contre le faux saunage, que toutes les saisies qu’ils pourraient faire, et tous les commis armés qui ne pourraient s’opposer qu’imparfaitement à des fraudeurs actifs et industrieux, et qui ne peuvent arrêter leurs entreprises téméraires que par la force, et quelquefois aux dépens de la vie des sujets de Sa Majesté ; qu’enfin c’était là le grand avantage qu’ils trouveraient à l’exécution de l’arrêt dont on demandait la révocation, et qu’il était de beaucoup préférable au bénéfice cependant très-réel qu’ils trouveraient dans les moyens économiques de faire eux-mêmes ces fournissements ; soutenant, au surplus, que les provinces rédimées de gabelle avaient très-grand tort de se plaindre des dispositions de l’arrêt du 3 octobre 1773, qui, bien loin, ont-ils dit, de porter atteinte à leurs privilèges, les confirme au contraire authentiquement ; que la régie des dépôts pouvait être en effet regardée comme gênante, mais qu’elle était depuis longtemps établie, et absolument nécessaire pour préserver le pays de vente exclusive des versements frauduleux qui détruiraient en peu de temps cette branche des revenus de l’État ; que, cette régie une fois établie, il devait être absolument indifférent aux ressortissants de bonne foi, que le sel qu’ils consommeront leur soit délivré par les minotiers ou par le fermier, pourvu qu’il ne soit pas plus cher ; à quoi, ont ajouté les fermiers-généraux, il a été pourvu, en ordonnant que ce prix sera toujours réglé par le juge sur celui des salorges les plus prochaines ; qu’il était même vraisemblable que le sel y serait de meilleure qualité, parce qu’eux, fermiers-généraux, ont pour cela bien plus de facilités que les minotiers, dont le débit se réduit à 1,275 minots chacun par an ; qu’ils en ont la preuve dans les quatre dépôts qu’ils fournissent depuis dix ans, qui n’ont donné lieu à aucune plainte, ni sur la qualité, ni sur le prix du sel ; que les prix y ont même été au-dessous de ce qu’ils étaient dans les autres dépôts voisins. Ils ont de plus représenté que, par la vigilance de leur régie, ils se trouveraient dans le cas de donner au ressortissants des dépôts des facilités dont ils ne peuvent jouir dans la position actuelle des choses, et ajouté que ces facilités se trouvent établies par l’arrêt du 18 avril de cette année, rendu sur les représentations même des habitants, qui ont depuis porté leurs plaintes à Sa Majesté contre celui du 3 octobre 1773. Quant à la disposition de ce dernier arrêt, dont on se plaint, qui a privé les villes de Riom et d’Aubusson du droit de faire le commerce du sel, ils ont assuré que cette facilité aurait les plus grands inconvénients pour la ville de Riom ; que d’ailleurs l’intérêt de cette ville à conserver cette faculté était médiocre, puisque le nombre des marchands de cette denrée est actuellement réduit à quatre dans cette ville. À l’égard de celle d’Aubusson, ils conviennent que les choses peuvent être envisagées sous un point de vue différent, et ne contredisent pas la vérité de la plupart des raisons alléguées par les habitants de cette ville. Par ces raisons, eux, fermiers-généraux, suppliaient très-humblement Sa Majesté de considérer que, dans la crainte de compromettre son autorité, ils avaient fait arrêter les sels qu’ils avaient demandés dans les endroits où ils se trouvaient, ce qui leur avait occasionné des frais d’emmagasinage, de loyers et de voitures extraordinaires ; que ces dépenses et toutes les autres qu’ils avaient déjà faites, sur la foi des deux arrêts du Conseil du feu roi, des 3 octobre 1773 et 18 avril dernier, leur faisaient espérer que Sa Majesté ne voudrait pas les dépouiller d’un droit qui paraît leur être acquis par ces arrêts et par leur bail, sans les indemniser de toutes ces dépenses et de la somme dont ils comptaient bénéficier sur le fournissement dont il s’agit, et surtout de l’avantage inestimable pour eux de diminuer la fraude considérable qui nuit au produit des droits de gabelle qui leur sont affermés.

Et Sa Majesté, après s’être sur le tout fait représenter ledit arrêt du 3 octobre 1773, il lui a paru que son exécution, si elle avait lieu, causerait un préjudice notable à ses provinces d’Auvergne, du Limousin, et autres rédimées des droits de gabelle ; et qu’il était de sa justice de les maintenir dans leurs privilèges, et d’avoir en même temps égard aux demandes en indemnité formées par les fermiers-généraux. À quoi voulant pourvoir :

Vu sur ce les articles I, II et IV du titre XVI de l’ordonnance des gabelles du mois de mai 1680, le roi étant en son Conseil, a révoqué et révoque ledit arrêt du 3 octobre 1773. Veut Sa Majesté qu’il demeure comme non avenu, et tout ce qui s’en est ensuivi ; ordonne en conséquence que les fournisseurs et minotiers des dépôts établis dans les provinces rédimées des droits de gabelle continueront d’approvisionner lesdits dépôts comme auparavant ledit arrêt, et qu’à cet effet ils seront tenus de se charger des approvisionnements en sels faits par l’adjudicataire des fermes, à la destination desdits dépôts, et de lui en rembourser le prix, ainsi et de la même manière que cela s’est pratiqué par le passé, et relativement au prix auquel il a été vendu dans les salorges les plus voisines, et à celui de la voiture desdites salorges dans les dépôts, en accordant auxdits minotiers un bénéfice de 20 sous par minot. Ordonne en outre Sa Majesté que ledit adjudicataire des fermes sera pareillement remboursé, par qui et ainsi qu’il sera par elle ordonné, des frais par lui faits pour loyers de greniers ou dépôts et autres frais extraordinaires relatifs aux approvisionnements par lui faits pour la fourniture desdits dépôts, et ce suivant la liquidation qui en sera faite par Sa Majesté sur les états que ledit adjudicataire des fermes sera tenu d’en remettre incessamment au sieur contrôleur-général des finances ; se réservant au surplus Sa Majesté de statuer, s’il y a lieu, sur l’indemnité qui peut être due audit adjudicataire des fermes, à raison de la non-jouissance du fournissement desdits dépôts, et ce après la vérification qui en sera faite pendant la durée ou à la fin de son bail.


Extrait de l’arrêt du conseil d’État, du 27 novembre 1774, qui ordonne que les ecclésiastiques constitués dans les ordres sacrés, qui font partie du clergé de France, et qui seront de condition roturière, continueront de jouir, tant pour les biens de leurs bénéfices que pour leurs biens patrimoniaux, de l’exemption du droit de franc-fief, lequel ne sera exigible et payé que pour raison des biens nobles qu’ils ont acquis ou qu’ils pourront acquérir à l’avenir.

Le préambule de cet arrêt vise : 1o le cahier de l’assemblée du clergé de France tenue en 1770,

Suppliant le roi de vouloir bien maintenir et confirmer les ecclésiastiques constitués dans les ordres sacrés, qui ne sont pas de condition noble, dans l’exemption du droit de franc fief, tant pour leurs biens d’acquêts que pour leurs biens patrimoniaux.

2o Le Mémoire des agents généraux du clergé, disant :

Que l’exemption que le clergé réclame tire sa source de la nature même du droit de franc fief, qui, n’ayant été établi dans l’origine que pour relever le possesseur roturier d’un fief de l’incapacité de le posséder, ne peut être dû par les ecclésiastiques, dans lesquels cette incapacité n’existe pas : les ecclésiastiques sont exempts de toutes les charges et impositions dont les personnes nobles sont exemptes ; la promotion aux ordres sacrés efface en eux la lâche de la roture, les élève au premier rang des citoyens, les rend membres d’un corps qui a le droit de précéder la noblesse, et dès lors une taxe dérogeante, telle que le droit de franc fief, ne peut que leur être étrangère. Dans le contrat passé avec le roi en 1561, en conséquence de la subvention accordée par l’Assemblée de Poissy, Sa Majesté promit qu’il ne serait levé sur le clergé aucuns droits de franc fief[1].

Les agents généraux du clergé citent ensuite les lettres-patentes du 45 octobre 1567, la déclaration du 50 octobre 1571, les lettres-patentes des 20 mars et 25 août 1577, les déclarations des 1er mai 1596 et 9 décembre 1606, les lettres-patentes du 21 juillet 1609, les déclarations des 28 février 1640 et 24 juin 1641, l’arrêt du Conseil du 15 janvier 1657, la déclaration du 8 février même année, les contrats entre le roi et le clergé des années 1666 et 1675, l’arrêt du Conseil du 1er juin 1678, les contrats conformes entre le roi et le clergé qui ont eu lieu dans les années 1685, 1695, 1705, 1715, 1726, 1735 et 1745, le règlement du 13 avril 1751, les contrats plus modernes de 1755 et 1765. Ils argumentent sur les dispositions de ces différents actes.

Le Conseil vise ensuite le Mémoire des fermiers-généraux, qui exposent :

Que, suivant les lois et les maximes du royaume, tout roturier étant incapable de posséder des fiefs et des biens nobles, ne peut être relevé de cette incapacité que par le payement du droit de franc fief ; que les ecclésiastiques qui ne sont pas nobles, sont soumis à l’exercice de ce droit comme les autres sujets de Sa Majesté ; que les privilèges particuliers obtenus par le clergé en différents temps et en considération des secours en argent qu’il fournissait, privilèges toujours limités à des temps fixes ou à certaines espèces de biens, confirment le principe et l’assujettissement au droit ; que c’est une erreur de prétendre que les ecclésiastiques, par leur qualité seule, participent à tous les avantages de la noblesse ; que la réclamation même d’un privilège d’exemption en faveur des ecclésiastiques suffit pour prouver le contraire ; que les personnes nobles ne sont point dans le cas de solliciter un semblable privilège, et n’ont jamais eu besoin de lois pour être affranchies d’un droit auquel les roturiers seuls ont été assujettis ; que, d’ailleurs, si l’admission aux ordres sacrés conférait les avantages et les privilèges de la noblesse, l’exemption du droit de franc fief serait générale pour tous les diocèses, et que cependant il y en a neuf dans le royaume qui y sont assujettis pour tous les biens nobles qu’ils possèdent ; que les seuls ecclésiastiques faisant partie du clergé de France ont été admis à jouir des privilèges limités que le roi a bien voulu leur accorder en considération de leurs contributions aux secours donnés par le clergé ; que ces privilèges, bornés d’abord aux biens amortis et à ceux payant décimes, ont été, par les tentatives continuelles du clergé, successivement étendus pour des temps fixes aux biens particuliers des ecclésiastiques, et enfin limités pour cette dernière partie à leurs biens patrimoniaux.

Ils suivent la gradation des concessions et en développent les motifs pour en fixer l’étendue : c’est un morceau historique, assez long et très-curieux, mais qui n’a point de rapport avec l’objet de ce recueil, uniquement destiné aux œuvres de M. Turgot.

Les fermiers-généraux y établissent qu’on a toujours distingué les droits de franc fief des biens patrimoniaux, de ceux sur les biens de nouvel acquêt.

Et, Sa Majesté s’étant fait représenter le règlement du 13 avril 1751, par l’article XVI duquel les ecclésiastiques constitués dans les ordres sacrés qui font partie du clergé de France ont été déclarés exempts des droits de francs fiefs, tant pour les biens nobles dépendant de leurs bénéfices que pour leurs biens patrimoniaux, Sa Majesté a reconnu que cette dernière exemption, restreinte aux seuls biens que les ecclésiastiques tiennent de la loi et de la nature, peut d’autant moins s’appliquer à ceux dont ils deviennent propriétaires autrement qu’à titre successif, que les biens qu’ils acquièrent ne leur passent que par l’effet d’une détermination libre et volontaire qui les soumet nécessairement, lorsqu’ils ne sont pas de condition noble, à toutes les charges imposées sur ce genre de bien. Et, comme en les maintenant dans la jouissance du privilège particulier qui leur a été accordé relativement à leurs biens patrimoniaux, l’intention de Sa Majesté n’est cependant pas que l’on puisse abuser de cette grâce, ni qu’on lui donne une extension qui serait contraire aux termes mêmes de la concession qui a été faite au clergé, Sa Majesté a cru devoir expliquer plus particulièrement ses intentions sur l’étendue et les justes bornes de ce privilège, à l’effet de faire cesser les incertitudes et les doutes qui paraissent s’être élevés sur cet objet, quoique par lui-même il n’en fût pas susceptible. À quoi désirant pourvoir : ouï le rapport du sieur Turgot, etc., le roi, étant en son Conseil, a ordonné et ordonne

Que l’article XVI du règlement du 15 avril 1751 sera exécuté selon sa forme et teneur ; en conséquence, que les ecclésiastiques constitués dans les ordres sacrés qui font partie du clergé de France, et qui seront de condition roturière, continueront de jouir de l’exemption du droit de franc fief, tant pour les biens nobles dépendant de leurs bénéfices que pour leurs biens patrimoniaux seulement. Et à l’égard des fiefs, terres et autres héritages nobles qu’ils ont acquis ou qu’ils pourront acquérir à l’avenir, veut et entend Sa Majesté qu’ils soient tenus d’en payer le droit de franc fief, à compter du jour de leurs acquisitions, sur les déclarations exactes qu’ils passeront de leur consistance, situation, valeur et revenu, conformément à l’article XXI du même règlement.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État du 27 novembre 1774, qui ordonne que les maisons abbatiales, prieurales et canoniales, et tous autres biens dépendant des lieux claustraux et réguliers, qui ont été ou seront mis dans le commerce, demeureront, par grâce, déchargés du droit d’amortissement, pourvu que l’usage et la destination n’en soient pas changés et dénaturés pour toujours, etc.

Cet arrêt commence par viser les diverses lois rendues sur son objet et en énonce les dispositions, puis indique son motif.

Sa Majesté a reconnu que les terres, maisons et héritages servant de lieux réguliers, de logements et de jardins aux personnes religieuses, ayant toujours joui, par rapport à l’usage auquel ils sont employés, de l’exemption des droits d’amortissement, ces objets n’ont pu être compris dans l’amortissement général, qui n’a été accordé au clergé que pour raison seulement des biens sujets à l’amortissement et non amortis, à cause desquels il aurait pu être recherché. Considérant d’ailleurs Sa Majesté que, les lieux claustraux et réguliers ne pouvant être possédés sans être amortis qu’autant que leur première destination ne reçoit aucun changement et qu’ils ne produisent aucun revenu, il y aurait lieu de déclarer sujettes au droit d’amortissement les maisons abbatiales et prieurales dont les abbés, prieurs et bénéficiers retirent un revenu, et dont ils font des baux au lieu de les habiter par eux-mêmes. Cependant leur location, qui n’est souvent que l’effet de circonstances particulières, ne devant être envisagée que comme momentanée, lorsque leur usage n’est pas dénaturé de manière à les faire considérer comme étant mises dans le commerce pour y rester à perpétuité, et ces maisons pouvant alors retourner à leur destination primitive d’un instant à l’autre, Sa Majesté a cru devoir, en ce cas, réduire par grâce, au droit de nouvel acquêt, celui d’amortissement qui serait exigible d’après les règles et les principes établis sur cette matière ; elle a même jugé convenable d’interdire, quant à présent, toutes recherches relativement aux arrérages des droits échus antérieurement aux vingt dernières années, du jour que la demande en aura été formée, ou de celui de la location. Sur quoi Sa Majesté désirant faire connaître ses intentions ; ouï le rapport du sieur Turgot, etc., le roi, étant en son Conseil, a ordonné et ordonne

Que les maisons abbatiales, prieurales et canoniales, ensemble tous autres biens et héritages dépendant de lieux claustraux et réguliers, qui ont été ou seront mis dans le commerce, demeureront, par grâce, déchargés, tant pour le passé que pour l’avenir, du droit d’amortissement auquel leur location a été déclarée sujette par l’article 11 du règlement du Conseil du 21 janvier 1758, pourvu néanmoins que l’usage et la destination n’en soient pas changés et dénaturés pour toujours, et à la charge que le droit de nouvel acquêt en sera payé, par les abbés, prieurs, bénéficiera et autres gens de main morte, pendant la durée des baux qu’ils en auront faits ou qu’ils pourraient en faire. Voulant Sa Majesté que ledit droit cesse d’être perçu dès que lesdites maisons, biens et héritages retourneront à leur première destination ; et à l’égard des arrérages dudit droit, ordonne qu’ils ne pourront être exigés au delà de vingt ans, antérieurement au jour de la location ou à celui de la demande qui aura été faite, soit dudit droit de nouvel acquêt, soit de celui d’amortissement ; se réservant Sa Majesté d’ordonner à son profit, si elle le juge à propos, le recouvrement desdits arrérages qui seront échus avant l’époque desdites vingt années, etc.


Lettres-patentes, du mois de novembre 1774, en faveur de vingt-trois villes impériales y dénommées, pour l’exemption du droit d’aubaine et la liberté du commerce.

M. Turgot et M. de Vergennes pensaient également qu’il serait très-avantageux à l’État et aux finances d’abolir le droit d’aubaine, qui repoussait l’établissement en France d’un assez grand nombre d’hommes habiles et d’artistes industrieux, de capitalistes et de négociants utiles, qui n’auraient pas demandé mieux que d’y établir le centre de leurs affaires, et même de particuliers riches, attirés par l’agrément des mœurs et de la société, par la douceur du climat et du gouvernement. — Mais M. Turgot croyait qu’il faudrait en conséquence abolir ce droit envers toutes les nations par une loi générale, et sans s’inquiéter de la réciprocité, puisque le bien de cette opération serait certain pour la France, et qu’il n’y aurait de mal que pour les pays dont les souverains ne voudraient pas l’imiter. M. de Vergennes pensait au contraire qu’il ne fallait le supprimer que successivement, et se servir de cette suppression comme d’un appât pour obtenir des autres nations, qui désireraient d’en être exemptées, quelques autres avantages commerciaux.

Les deux ministres se proposaient sur ce point le même but, et ne différaient que relativement à la manière d’y marcher. Ils se concertaient tout de suite, dès que celui qui en faisait un objet de négociation en trouvait le moment favorable. C’est ce qui eut lieu pour les lettres-patentes dont nous venons de rapporter le titre.

Les villes libres et impériales qu’elles concernent sont celles de Schweinfurt, Rothembourg sur le Tanber, Wendsheim, Goslar, Mulhausen en Thuringe, Gemunde en Souabe, Biberac, Weil, Phullendorf, Zell en Souabe, Ravensbourg, Wimpfen, Weissembourg en Franconie, Giengen, Kempten, Ysni, Kaufbeuren, Leutkirch, Ahlen, Buchau, Ruchorn et Ropfingen.

Ces lettres-patentes établissaient dans chacun des deux pays le traitement mutuel le plus favorable pour les personnes et le commerce des citoyens et sujets de l’autre, et le droit réciproque de recueillir tous les legs et toutes les successions testamentaires ou ab intestat, mobilières ou immobilières, à la seule réserve du droit d’un dixième sur le capital de ces successions, que les villes impériales avaient désiré conserver, et qui (et en conséquence établi en France sur les successions ou legs qui pourraient y échoir à leurs citoyens ou sujets. (Dupont de Nemours.)


Déclaration du roi, qui exempte différentes lettres du droit de marc d’or auquel elles étaient assujetties d’après redit du mois de décembre 1770. (Donnée à Versailles le 26 décembre 1774, registrée, le sceau tenant, le 31 des mêmes mois et an.)

Louis, etc. Le feu roi notre très-honoré seigneur et aïeul ayant, par son édit du mois de décembre 1770, ordonné qu’il serait payé un droit de marc d’or pour toutes les provisions, commissions, lettres de noblesse, de dons et autres, qui doivent être scellées en grande chancellerie, nous nous sommes fait représenter l’état des différentes lettres qui se trouvent assujetties audit droit, et nous avons pensé qu’il était de notre justice d’en affranchir plusieurs qui, par la nature de leur objet, nous ont paru ne pas devoir être comprises dans les dispositions générales dudit édit. À ces causes, nous avons, par ces présentes, dit, déclaré et ordonné :

Qu’à l’avenir, et à compter du jour de la publication des présentes, il ne soit plus payé de droit de marc d’or :

1o Pour les lettres contenant permission d’établir des manufactures, forges, verreries, tuileries, et de faire d’autres établissements semblables.

2o Pour les lettres contenant permission de vendre différents remèdes et des ouvrages mécaniques.

3o Pour les lettres portant permission, aux villes, communautés, maisons religieuses et autres gens de mainmorte, de faire des emprunts.

4o Pour les lettres de dispense d’apprentissage.

5o Pour les permissions de faire imprimer.

6o Pour les privilèges pour faire imprimer.

7o Pour les lettres de surséance.

8o Pour les lettres de grâce et de rémission.

9o Pour les lettres portant établissement de foires et marchés.

À l’effet de quoi nous dérogeons, mais pour cet égard seulement, audit édit du mois de décembre 1770, qui pour le surplus sera exécuté en tout son contenu, selon sa forme et teneur, et sans que ceux qui ont payé le marc d’or, pour des lettres de la nature de celles ci-dessus exceptées, puissent en prétendre la restitution[2].


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État du 2 janvier 1775, qui exempte les baux des terres, soit incultes, soit en valeur, et de tous autres biens-fonds de la campagne, dont la durée n’excédera pas vingt-neuf années, qui seront passés à l’avenir par-devant notaires, des droits d’insinuation, centième ou demi-centième denier, et de franc fief.

Après avoir rappelé quelques lois anciennes, partielles et locales sur le même sujet, le préambule continue ainsi :

Sa Majesté, considérant que tous les biens-fonds de quelque genre qu’ils soient, même ceux qui sont en valeur et en pleine culture, sont susceptibles d’améliorations, et que la plupart des cultivateurs ne s’occupent de cet objet important qu’autant qu’ils espèrent trouver, dans une jouissance plus longue que celle des baux ordinaires, le moyen de se dédommager des dépenses qu’entraînent leurs opérations ; voulant d’ailleurs Sa Majesté leur donner de nouveaux encouragements et favoriser de plus en plus le progrès de l’agriculture, elle a résolu de faire jouir tous les fonds et héritages situés dans la campagne, sans aucune exception ni distinction, de l’exemption qui a été restreinte aux seules terres incultes, sans néanmoins que cette faveur puisse être étendue aux maisons, édifices, bâtiments, et à tous autres immeubles situés dans les villes et bourgs, lesquels ne sont point, par leur nature, susceptibles du même genre d’améliorations ; sur quoi Sa Majesté désirant faire connaître ses intentions : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que les baux dont la durée n’excédera pas vingt-neuf années, qui seront passés à l’avenir par-devant notaires, et qui auront pour objet des terres, soit incultes, soit en valeur, et généralement tous autres fonds et héritages situés dans la campagne, seront et demeureront affranchis des droits d’insinuation, centième ou demi-centième denier, et de franc fief. Et à l’égard des baux au-dessus de neuf années, qui auront pour objet des maisons, édifices, bâtiments et tous autres immeubles ou terrains sis dans les villes et bourgs, ou la perception de rentes, cens et droits seigneuriaux, sans aucune exploitation rurale faite par le fermier, ordonne Sa Majesté que lesdits baux continueront d’être assujettis aux droits de centième ou demi-centième denier, conformément aux précédents règlements. Enjoint Sa Majesté aux sieurs intendants et commissaires départis dans les provinces et généralités du royaume de tenir la main à l’exécution du prisent arrêt, qui sera imprimé, lu, publié et affiché partout où besoin sera, et exécuté selon sa forme et teneur, nonobstant toutes oppositions ou autres empêchements généralement quelconques, etc.


Déclaration du roi, portant suspension des droits d’entrée dans la ville de Paris sur le poisson salé, et réduction à moitié de ceux qui se lèvent sur le poisson de mer frais, depuis le premier jour de carême jusqu’à Pâques. (Donnée à Versailles le 8 janvier 1775, registrés en Parlement le 10 janvier audit an.)

Louis, etc. Nous avons reconnu que les droits perçus sur le poisson de mer frais et salé dans notre bonne ville de Paris étaient si considérables, qu’ils nuisaient sensiblement à l’encouragement de la pêche maritime, que nous regardons comme une des branches d’industrie les plus utiles de notre royaume ; que ceux établis sur le poisson salé sont plus particulièrement encore onéreux aux plus pauvres des habitants de cette ville, qui en tiraient un moyen de subsistance, principalement pendant le carême, où les lois de l’Église interdisent la consommation de toute espèce de viande. Nous avons, en conséquence, résolu de diminuer considérablement les droits sur la marée fraîche, et même de suspendre entièrement ceux qui se lèvent sur le poisson salé pendant la durée du carême, nous réservant d’étendre cette diminution et cette suppression à la totalité de l’année, si l’état de nos finances et les circonstances peuvent nous le permettre. À ces causes, etc., nous avons dit, déclaré et ordonné, etc. :

Qu’à commencer du premier jour de carême jusqu’au jour de Pâques exclusivement, il ne soit plus perçu dans notre bonne ville de Paris, sur le poisson de mer frais, que la moitié des droits qui étaient ci-devant perçus tant à notre profit qu’à celui des propriétaires des offices de jurés-vendeurs de poisson de notre hôpital, et généralement tous autres qui pourraient y avoir quelques droits. Voulons pareillement qu’il ne soit plus perçu aucuns droits quelconques, dans la même ville, sur le poisson salé qui y sera consommé pendant la même époque, et que la même diminution et exemption aura lieu toutes les années pendant le carême ; nous réservant d’indemniser tant lesdits officiers et hôpitaux que les fermiers de nos droits, et de les faire jouir des mêmes revenus dont ils ont joui pendant les carêmes des années précédentes. Si donnons en mandement, etc.


Arrêt du Conseil d’État, du 30 janvier 1775, qui ordonne qu’à compter du jour de sa publication les morues sèches de pêche française seront exemptes de tous droits appartenant au roi, tant à l’entrée dans les ports du royaume, que dans la circulation de province à province.

Le roi s’étant fait représenter l’arrêt du Conseil du 24 mars 1773, par lequel les droits de traite et de consommation sur les morues sèches de pêche française ont été réduits seulement aux entrées des ports de Normandie, et Sa Majesté étant informée que non-seulement cette réduction n’a pas produit l’effet qu’on devait en attendre, mais que les droits qu’elle a laissés subsister, tant à l’entrée des autres ports du royaume que dans la circulation intérieure de province à province, restreignent encore la consommation de cette denrée ; et considérant qu’il est cependant très-intéressant de faciliter cette consommation, tant pour encourager les pêches maritimes, qui sont la véritable école des matelots, que pour multiplier un genre de subsistance qui convient beaucoup à la classe la plus indigente du peuple : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Qu’à compter du jour de la publication du présent arrêt, les morues sèches de pêche française seront et demeureront, à toutes les entrées et ports du royaume, exemptes de tous droits de traite, de consommation, aides et autres qui se perçoivent au profit de Sa Majesté ; lesquelles morues sèches pourront circuler aussi en exemption des droits dus à Sa Majesté dans toute l’étendue du royaume, de province à province ; se réservant Sa Majesté d’indemniser l’adjudicataire général de ses fermes sur les états qui seront remis de la perception qui en aura été faite pendant l’année dernière. Enjoint Sa Majesté, aux sieurs intendants et commissaires départis dans les provinces et généralités du royaume, de tenir la main à l’exécution du présent arrêt, qui sera lu, publié et affiché partout où besoin sera, etc.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État, du 24 mars 1775, qui diminue le taux des droits réservés dans la ville, faubourgs et banlieue de Paris.

Le roi étant informé que, pendant la durée des deux premiers dons gratuits qui ont cessé au 1er  juillet 1768, ainsi que pendant la durée de l’abonnement des droits réservés fait au prévôt des marchands et échevins de Paris, par l’arrêt du Conseil du 26 mai 1768, pour six années six mois, commencées au 1er  juillet 1768, et finies au dernier décembre 1774, lesdits prévôt des marchands et échevins n’ont pas fait percevoir ni dans la ville, ni dans la banlieue, la totalité des droits résultant de ladite déclaration du 10 décembre 1758, et rappelés dans l’arrêt dudit jour 26 mai 1768, parce qu’ils ont modéré leur perception à la quotité de droits nécessaires pour atteindre soit à la fixation des deux premiers dons gratuits, soit au montant de leur abonnement des droits réservés, ce qui a procuré aux habitants de la ville de Paris et de la banlieue le soulagement des droits sur une portion des marchandises et denrées qui y avaient été assujetties.

Et s’étant fait représenter l’arrêt de son Conseil du 26 septembre 1773, qui ordonne au sieur Bossuat, régisseur des droits réservés, de les percevoir conformément à l’édit de 1771.

Sa Majesté, toujours animée du désir de faire ressentir à ses peuples les effets de sa bonté, a bien voulu renoncer, quant à présent, à l’augmentation de revenu qui serait résultée de l’exécution entière des règlements concernant la perception des droits réservés dans la ville, faubourgs et banlieue de Paris, et consentir à ne faire percevoir lesdits droits que sur les denrées et marchandises que lesdits prévôt des marchands et échevins y avaient assujetties, et seulement dans les endroits de la banlieue où ils les avaient fait percevoir, avec les huit sous pour livre en sus tels qu’ils se percevaient antérieurement au 1er  janvier dernier. Et voulant Sa Majesté expliquer ses intentions à cet égard : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne ce qui suit :

Art. I. Que lesdits droits énumérés au long en cet article ne seront perçus à l’avenir que sur le pied auquel les prévôt des marchands et échevins les avaient réduits de fait pendant la durée de leur abonnement.

II. Qu’ils ne le seront que pour les denrées et marchandises sur lesquelles la perception s’en faisait, et seulement dans les endroits de la banlieue où ils étaient perçus avant le 1er  janvier 1775.

III. Qu’ils continueront d’être payés par toutes sortes de personnes, de quelque état, qualité et condition qu’elles soient, exemptes et non exemptes, privilégiées et non privilégiées, même par les ecclésiastiques, les nobles et les communautés religieuses, séculières et régulières ; à l’exception seulement des hôpitaux et Hôtels-Dieu pour leur consommation particulière, et encore aux exceptions accordées aux bourgeois de la ville et faubourgs de Paris pour les denrées de leur crû et destinées à leur consommation, en observant par eux les formalités prescrites par la déclaration du 24 août 1755.

IV. Enjoint Sa Majesté audit Bossuat de se conformer aux dispositions du présent arrêt pour la perception des droits réservés dans la ville, faubourgs et banlieue de Paris ; à l’effet de quoi il sera pourvu à l’indemnité qui lui sera due pour raison de la diminution qui en résulte dans les produits de sa perception.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État, du 13 avril 1775, qui règle les droits qui seront perçus à l’avenir sur le poisson de mer frais, et supprime ceux sur le poisson salé, à l’exception des droits de domaine et barrage.

Le roi ayant, par sa déclaration du 8 janvier 1774, ordonné qu’à commencer du premier jour du carême jusqu’au jour de Pâques exclusivement, il ne serait plus perçu dans la ville de Paris, sur le poisson de mer frais, que la moitié des droits qui étaient ci-devant perçus, tant au profit de Sa Majesté que des officiers jurés-vendeurs de poisson et de l’Hôpital, et qu’il ne serait perçu aucun droit sur le poisson salé qui y serait consommé pendant la même époque ; et Sa Majesté ayant reconnu que les motifs qui ont déterminé ces suppression et réduction ne pouvaient avoir l’effet qu’elle s’en était promis qu’autant qu’elles seraient définitives, elle s’est d’autant plus volontiers portée à continuer de faire jouir ses sujets desdites suppression et réduction, que la pêche maritime y trouvant un encouragement permanent, cette branche utile d’industrie deviendra plus féconde, et que le peuple de la capitale aura dans tous les temps un moyen de subsistance que l’excès des droits lui rendait difficile. Sa Majesté voulant faire connaître ses intentions sur des objets si dignes de ses soins : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que les droits sur le poisson de mer frais, réduits à moitié par sa déclaration du 8 janvier 1775, depuis le premier jour de carême jusqu’au jour de Pâques exclusivement, ne seront perçus après cette époque et pour l’avenir que sur le pied de la moitié à laquelle ils ont été réduits ; que la suspension des droits sur le poisson salé prononcée par ladite déclaration, pendant le même intervalle, sera définitive, et que lesdits droits seront et demeureront supprimés. N’entendant néanmoins Sa Majesté comprendre, dans les réduction et suppression ci-dessus, les droits de domaine et barrage, qui, n’étant par leur nature susceptibles d’aucune exemption, seront perçus comme ils l’étaient avant ladite déclaration, et même avant l’établissement de ceux dont la perception est supprimée ou réduite[3]. Se réserve Sa Majesté de prendre les mesures convenables pour indemniser le fermier de ses droits, et les officiers jurés-vendeurs de poisson, de la non-perception ordonnée tant par la déclaration du 8 janvier 1775 que par le présent arrêt, etc.


Arrêt du Conseil d’État, du 23 avril 1775, qui exempte de tous droits d’entrée dans le royaume les livres imprimés ou gravés, soit en français, soit en latin, reliés ou non reliés, vieux ou neufs, venant de l’étranger.

Vu par le roi, étant en son Conseil, les représentations faites à Sa Majesté par les libraires de Paris et de Lyon, contenant : Que, quoique le droit de 20 livres par quintal, imposé par l’arrêt du Conseil du 24 novembre 1771 sur tous les livres venant de l’étranger, ait été, par un nouvel arrêt du 17 octobre 1775, réduit à 6 livres 10 sous et les huit sous pour livre ; ce dernier droit, quelque modéré qu’on puisse le regarder, n’en est pas moins contraire à l’avantage du commerce de la librairie, qui se fait par échange avec l’étranger : il en résulte, en conséquence, que ce droit nuit autant à l’exportation qu’à l’importation ; de plus, l’ouverture des caisses à la frontière cause nécessairement des pertes réelles sur la valeur des livres, qui, après la visite, ne sont jamais rassemblés avec assez de soin pour les bien conserver dans leur route ; pour quoi lesdits libraires auraient très-humblement supplié Sa Majesté de vouloir bien avoir égard à leurs représentations en affranchissant de tous droits d’entrée les livres venant de l’étranger. Et Sa Majesté, considérant que le commerce de la librairie mérite une protection particulière, attendu son utilité pour les lettres et pour l’instruction publique, et voulant sur ce faire connaître ses intentions : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Qu’à compter du jour de la publication du présent arrêt, tous les livres imprimés ou gravés, soit en français ou en latin, reliés ou non reliés, vieux ou neufs, qui seront apportés de l’étranger, ne seront plus assujettis à payer aucuns droits à toutes les entrées du royaume.


Arrêt du Conseil d’État, du 15 mai 1775, qui exempte la ville de Reims de tous droits d’entrée sur toutes sortes de denrées, non-seulement pendant le séjour que le roi fera pour son sacre dans cette ville, mais encore huit jours avant l’arrivée et huit jours après le départ de Sa Majesté.

Le roi s’étant fait rendre compte de la nature et de la quotité des droits qui se perçoivent dans la ville de Reims, Sa Majesté a considéré que, si elle n’arrêtait point la levée de ces différents droits sur les consommations et approvisionnements qui auront lieu à l’occasion de son sacre, il en résulterait un très-fort produit, sur lequel les fermiers desdits droits n’ont pas dû compter, dont ils n’ont point payé le prix, qui retomberait en surcharge pour les consommateurs, et opérerait le renchérissement des denrées ; en conséquence, Sa Majesté, voulant donner à ses sujets une nouvelle preuve de son affection paternelle, et désirant empêcher autant qu’il est en elle que la cérémonie auguste qui demandera sa présence à Reims, ne devienne onéreuse à ceux que leur amour pour leur souverain pourra appeler dans la même ville, et que leur joie ne puisse être troublée par les contraventions auxquelles ils seraient exposés : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que, non-seulement pendant le séjour de Sa Majesté à Reims pour la cérémonie du sacre, mais encore pendant les huit jours qui précéderont l’arriver de Sa Majesté et les huit jours qui suivront son départ inclusivement, la ville de Reims et ses faubourgs jouiront de l’exemption des droits dus à l’arrivée, aux entrées, à la vente en gros et en détail, ou à la consommation sur les liqueurs, vins, eaux-de-vie, bière, cidre ou autres boissons, bestiaux morts ou vils, gibier, volailles, marée, poissons d’eau douce, grains, légumes, fourrages, bois à brûler, charbon, et généralement sur toutes les denrées ou subsistances propres à la consommation ; se réservant Sa Majesté de pourvoir, ainsi qu’il appartiendra, à l’indemnité que pourront prétendre les fermiers-généraux des fermes unies, fermiers d’octrois, régisseurs, propriétaires ou autres, au profit desquels aucuns desdits droits seraient perçus. Défend Sa Majesté à tous commis de procéder à des visites ou à des saisies, relativement auxdits droits, pendant le susdit temps de franchise. Enjoint Sa Majesté, au sieur intendant et commissaire départi en la généralité de Champagne, de tenir la main à l’exécution du présent arrêt, qui sera lu, publié et affiché partout où besoin sera.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État du 6 août 1775, et des Lettres-patentes sur icelui, données à Versailles le 16 septembre 1775, registrées en la Chambre des comptes le 28 mars 1776, qui accordent aux vassaux du roi jusqu’au 1er janvier 1777 pour rendre les foi et hommage dus à cause de son heureux avènement à la couronne[4].

Le roi, étant informé que la plupart des propriétaires de fiefs, terres et seigneuries situées dans la mouvance de Sa Majesté, ne diffèrent de rendre les foi et hommage qu’ils lui doivent à cause de son heureux avènement à la couronne, que par la considération des frais auxquels cette prestation les exposerait, soit relativement aux droits qui sont perçus par les officiers des Chambres des comptes et des bureaux des finances, soit par rapport aux voyages auxquels plusieurs d’entre eux seraient obligés pour faire ces foi et hommage en personne, conformément aux dispositions des coutumes ; Sa Majesté a jugé que, s’il est indispensable que ces devoirs soient remplis avec toute l’exactitude qu’ils exigent, il est en même temps de sa bonté et de sa justice d’accorder un délai convenable, et d’autoriser ceux qui ont déjà fait les foi et hommage pour mutations arrivées de leur chef, à les renouveler par des fondés de procuration, et de les dispenser de tous les frais autres que ceux de papier et parchemin timbrés. À quoi voulant pourvoir : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil,

Accorde, jusqu’au 1er janvier 1777, délai aux seigneurs et vassaux, possédant fiefs et seigneuries dans la mouvance de Sa Majesté, qui n’ont point encore satisfait au renouvellement d’hommage qu’ils lui doivent à cause de son heureux avènement à la couronne.

Fait Sa Majesté mainlevée auxdits vassaux des saisies féodales qui pourraient avoir été ou qui pourraient être faites jusqu’au jour de la publication du présent arrêt, faute du renouvellement d’hommage, en payant par eux les frais desdites saisies. Et. pour soulager lesdits vassaux dans le renouvellement de leurs hommages, Sa Majesté a permis et permet à ceux qui ont fait les foi et hommage dont ils étaient tenus pour la mutation arrivée en leur personne, et qui ne les doivent que pour raison de l’heureux avènement de Sa Majesté à la couronne, de les faire par procureurs fondés de procuration spéciale à cet effet, passée par-devant notaires. Ordonne en outre Sa Majesté que les renouvellements desdits foi-hommage, dus à cause de son heureux avènement à la couronne, seront reçus sans aucuns frais, si ce n’est du papier et parchemin timbrés qui seront employés pour lesdits actes de renouvellement de foi-hommage. Fait Sa Majesté défense, à tous officiers des Chambres des comptes, Bureaux des finances et autres, de prendre, pour raison desdits renouvellements d’hommages, aucuns droits de quelque nature qu’ils puissent être ; le tout à l’égard seulement de ceux qui satisferont audit devoir dans le délai accordé par ledit arrêt, et sans tirer à conséquence pour ceux desdits vassaux qui doivent la foi et hommage de leur chef, et indépendamment de l’heureux avènement de Sa Majesté à la couronne, lesquels ils seront tenus de rendre en la manière ordinaire et dans les délais portés par les coutumes. Et seront sur le présent arrêt toutes lettres nécessaires expédiées.

Les lettres-patentes répètent les dispositions de l’arrêt.


Extrait de l’arrêt du Conseil d’État du 9 septembre 1775, qui ordonne que les actes portant extinction des rentes foncières non rachetables, ensemble ceux par lesquels la faculté d’en faire le rachat sera accordée aux débiteurs, demeureront exempts à l’avenir du droit de centième denier.

Le roi s’étant fait représenter, en son Conseil, la déclaration du 20 mars 1708, par l’article VI de laquelle il a été ordonné que tous les contrats de ventes, échanges, licitations entre héritiers, copropriétaires et coassociés, baux à rentes foncières rachetables et non rachetables, baux emphytéotiques, baux à domaine congéable, ventes à faculté de réméré ou de rachat, antichrèses, contrats pignoratifs, engagements, démissions, abandonnements, contrats de vente à vie, cessions de fonds avec fruits, transports, subrogations, résolutions volontaires de ventes, arrêts, jugements, sentences, et généralement tous actes translatifs et rétrocessifs de propriété de biens-immeubles tenus en fief ou en censive ; ensemble ceux tenus en franc-aleu, franc-bourgades et franches-bourgeoisies, rentes foncières, les contrats de vente de droits de justice, et tous autres droits seigneuriaux et honorifiques, conjointement ou séparément du corps des domaines ou fonds de terre, seraient insinués, et que les droits de centième denier en seraient payés dans les temps et sous les peines portées, tant par les articles XXIV et XXV de l’édit du mois de décembre 1703, que par les articles XVII, XVIII et XX de la déclaration du 19 juillet 1704, encore qu’aucuns desdits biens ne fussent sujets à lods et ventes, et autres droits seigneuriaux :

Vu aussi l’Arrêt du 20 mars 1742, par lequel il a encore été ordonné que la déclaration du 20 mars 1708 serait exécutée suivant sa forme et teneur ; en conséquence, que le droit de centième denier serait payé pour le rachat des rentes foncières non rachetables, sur le pied des sommes payées pour l’extinction desdites rentes.

Sa Majesté a reconnu que la prestation des rentes foncières dont les héritages sont chargés, et dont les débiteurs n’ont point la faculté de se libérer, ne peut qu’apporter beaucoup de gênes et d’obstacles au progrès de l’agriculture, en ce que le produit des fonds se trouvant absorbé en partie par l’acquittement de ces rentes, les propriétaires sont souvent dans l’impossibilité de faire les avances nécessaires pour l’amélioration des terres.

Et Sa Majesté a jugé convenable, dans la vue de faciliter l’extinction de charges aussi onéreuses et aussi contraires à la liberté naturelle dont les fonds de terre doivent jouir, d’affranchir de tout droit de centième denier les actes qui seront passés à l’avenir entre les propriétaires des rentes foncières non rachetables et leurs débiteurs, soit à l’effet d’opérer l’extinction actuelle de ces rentes, soit à l’effet d’accorder aux débiteurs la faculté de les racheter par la suite ; sauf à pourvoir, s’il y a lieu, à l’indemnité de l’adjudicataire général des fermes, et sans néanmoins rien innover, en ce qui concerne les droits de centième denier, qui sont exigibles, aux termes de la déclaration du 20 mars 1708, tant pour les baux à rentes foncières rachetables et non rachetables, que pour les ventes, donations, cessions ou transports desdites rentes foncières, en faveur de toutes personnes autres que les débiteurs.

Sur quoi Sa Majesté, désirant faire connaître ses intentions : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que les actes portant extinction des rentes foncières, ensemble ceux par lesquels la faculté d’en faire le rachat sera accordée aux débiteurs, soit qu’elles aient été stipulées non rachetables par les baux à rentes ou autres actes, soit qu’elles le soient devenues par le laps de temps ou autrement, seront et demeureront exempts à l’avenir de tout droit de centième denier, sauf à pourvoir, s’il y a lieu, à l’indemnité de l’adjudicataire général des fermes. Voulant au surplus Sa Majesté que les baux à rentes foncières, rachetables ou non rachetables, les ventes, cessions, donations, transports et autres actes translatifs de propriété desdites rentes, qui seront faits en faveur de tous particuliers autres que ceux qui en seront débiteurs, continuent d’être insinués, en exécution de l’article VI de la déclaration du 20 mars 1708, et que les droits de centième denier en soient payés dans les temps et sous les peines portées par les précédents règlements.


Arrêt du Conseil d’État, du 10 septembre 1775, qui proroge en faveur du clergé, jusqu’au dernier décembre 1780, les délais accordés, par différentes déclarations et arrêts du Conseil de Sa Majesté, au sujet des foi et hommage, aveux et dénombrements, même dans les provinces données en apanage, fait mainlevée des saisies, etc.

Le roi s’étant fait rendre compte des édits, déclarations, lettres-patentes et arrêts rendus sur le fait des foi et hommage, aveux et dénombrements demandés aux bénéficiers de son royaume par les officiers de son domaine, ensemble des mémoires et remontrances présentés aux rois prédécesseurs de Sa Majesté, tant par les assemblées générales du clergé de France, que par les agents généraux du clergé, tendantes à faire jouir lesdits bénéficiers de l’exemption desdits foi et hommage, aveux et dénombrements, dans l’étendue de son domaine ; Sa Majesté étant en même temps informée des poursuites commencées par les officiers des princes apanages contre les bénéficiers, corps et communautés ecclésiastiques possédant des biens dans l’étendue des apanages, Sa Majesté a reconnu que les droits de son domaine, ceux des princes apanages, et l’intérêt même du clergé, exigent également qu’elle interpose son autorité, et qu’elle fasse connaître ses intentions, à l’effet de terminer toutes difficultés relativement auxdits foi et hommage, aveux et dénombrements : Et, voulant concilier ce que demandent les intérêts de son domaine, ainsi que ceux des princes apanages, avec la justice qu’elle doit à tous ses sujets et la protection qu’elle accordera toujours au clergé de son royaume, à l’exemple des rois ses prédécesseurs, Sa Majesté s’est déterminée à nommer des commissaires de son Conseil, qui seront spécialement chargés d’examiner les représentations et propositions que le clergé croira devoir lui faire. Considérant en outre que, pour assurer à cet examen l’effet que Sa Majesté a droit d’en attendre, il est convenable d’arrêter toutes procédures qui auraient été commencées, ou pourraient commencer dans les tribunaux du royaume ; à l’effet de quoi Sa Majesté a jugé nécessaire de prononcer encore en faveur des bénéficiers de son royaume, une dernière surséance de cinq années, à la prestation des foi et hommage, aveux et dénombrements demandés auxdits bénéficiers, tant par les officiers du domaine de Sa Majesté, que par ceux des princes apanages, se réservant Sa Majesté de faire connaître définitivement ses intentions à l’expiration de ladite surséance, sur le compte qui lui sera rendu par lesdits commissaires de son Conseil. À quoi voulant pourvoir : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. ; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que, par-devant les sieurs Moreau de Beaumont, Bouvard de Fourqueux, Du Four de Villeneuve et Taboureau, conseillers d’État, que le roi a nommés commissaires à cet effet, il sera procédé à l’examen et à la discussion des représentations et propositions que le clergé voudra faire à Sa Majesté ; a prorogé et proroge jusqu’au dernier décembre 1780, et sans espérance d’aucun autre délai, en faveur de tous les bénéficiers, corps et communautés ecclésiastiques, même de ceux possédant des biens situés dans les domaines tenus en apanage, la surséance accordée par le feu roi au clergé par arrêt de son Conseil, en date du 4 août 1770. En conséquence, fait Sa Majesté très-expresses inhibitions et défenses, à ses procureurs-généraux aux Chambres des comptes et à ses procureurs des Bureaux des finances, même à ses procureurs de commissions établies pour la confection des terriers et réformation des domaines, aux fermiers de ses domaines et à tous autres, de faire aucunes poursuites pendant ledit temps ; comme aussi fait défenses Sa Majesté, à tous officiers des princes apanages, de commencer ou continuer pendant lesdites cinq années aucunes poursuites contre les bénéficiers possédant des biens dans l’étendue des domaines tenus en apanage. Fait Sa Majesté mainlevée des saisies féodales qui ont été ou auraient pu être faites sur aucuns desdits bénéficiers ; se réservant Sa Majesté de faire connaître définitivement ses intentions dans le cours de l’année 1781, sur le rapport qui lui sera fait en son Conseil, desdits Mémoires, représentations et propositions du clergé, par le sieur de Tolozan, maître des requêtes ordinaire de l’hôtel de Sa Majesté, en présence et de l’avis desdits sieurs conseillers d’État, commissaires, sans néanmoins qu’en vertu du présent arrêt, ni de ceux précédemment rendus, les possesseurs des biens ecclésiastiques puissent arrêter les poursuites qui se feraient contre ceux que lesdits procureurs-généraux, procureurs du roi, officiers des princes apanages et autres poursuivants, croiront posséder des biens dans la mouvance et directe de Sa Majesté ou des princes apanages, sous prétexte que lesdits biens sont dans la mouvance directe de biens ecclésiastiques. Voulant Sa Majesté audit cas que la présente surséance ne puisse avoir lieu qu’en justifiant par ceux qui seront attaqués, ou par les possesseurs desdits biens ecclésiastiques, de titres ou possession suffisante des droits de mouvance et directe dépendants desdits biens ecclésiastiques, et ce par-devant les juges qui en doivent connaître.


Lettres-patentes, du 22 décembre 1775, qui ordonnent qu’en matière de droits des fermes, et à compter du 1er janvier 1776, le pays de Gex sera réputé pays étranger, et que la vente exclusive du sel et du tabac y sera supprimée, en réglant l’indemnité due à Sa Majesté pour cette suppression.

Louis, etc. Nous nous sommes fait rendre compte des représentations faites en différents temps au feu roi notre très-honoré seigneur et aïeul, et à nous-même depuis notre avènement au trône, par les gens des trois États de notre pays de Gex, contenant que la perception des droits d’entrée et de sortie qui ont lieu dans les provinces sujettes aux droits de nos cinq grosses fermes, ainsi que la régie de la vente exclusive du sel et du tabac, devenait de jour en jour plus difficile dans ce pays, par sa position qui se trouve enclavée entre les terres de Genève, de la Suisse et de la Savoie, et séparée des autres provinces de notre royaume par le mont Jura ; que ces droits d’ailleurs ne pouvaient qu’être fort onéreux aux habitants de notredit pays de Gex, en les privant des avantages que devait naturellement leur procurer cette situation : Nous avons cru qu’il était digne de notre bonté de venir à leur secours par la suppression, tant des droits de traites qui sont établis sur les marchandises qui entrent dans ledit pays ou qui en sortent, pour passer à l’étranger, que du privilège de la vente à notre profit du sel et du tabac, à la charge néanmoins de l’indemnité qui nous sera due, ou à l’adjudicataire de nos fermes, pour raison de ces suppressions, ainsi et de la manière qu’elle sera par nous ordonnée, conformément au désir que nous en ont témoigné les gens des trois États de notredit pays de Gex. À ces causes, etc., nous avons dit, déclaré et ordonné ce qui suit :

Art. I. Voulons qu’à l’avenir, et à commencer du 1er janvier prochain, notredit pays de Gex soit réputé, comme nous le réputons par ces présentes, pays étranger, quant aux droits de nos fermes générales, et comme tel exempt des droits d’entrée et de sortie établis par ledit du mois de septembre 1064, et le tarif du 18 dudit mois y annexé, sur les marchandises et denrées que les habitants de ce pays exporteront à l’étranger, et sur celles qu’ils feront entrer directement et sans emprunter le passage des provinces des grosses fermes. En conséquence, ordonnons que tous les bureaux de traites, et autres établis tant sur les frontières dudit pays de Gex limitrophes aux terres de Genève, de la Suisse et de la Savoie, que dans l’intérieur dudit pays, seront et demeureront supprimés à compter dudit jour 1er janvier prochain.

II. Seront assujetties au payement desdits droits d’entrée et de sortie toutes les marchandises et denrées permises, que les habitants du pays de Gex feront entrer dudit pays dans les autres provinces de notre royaume, ou qu’ils feront transporter de ces provinces dans ledit pays de Gex. À l’effet de quoi, voulons qu’audit jour 1er janvier prochain, et à la diligence de l’adjudicataire de nos fermes, il soit établi sur la frontière du pays de Gex, du côté de notre royaume, tel nombre de bureaux que ledit adjudicataire jugera nécessaire pour la perception desdits droits d’entrée et de sortie, conformément audit édit et tarif du mois de septembre 1664 et autres arrêts et règlements depuis intervenus.

III. Voulons pareillement qu’à commencer dudit jour 1er janvier prochain, la vente exclusive du sel et du tabac à notre profit soit et demeure supprimée dans l’étendue du pays de Gex. Permettons en conséquence aux habitants d’icelui de s’approvisionner de sel et de tabac où bon leur semblera, même d’en faire le commerce avec l’étranger.

IV. Voulons en outre que, pour nous tenir lieu, ou à l’adjudicataire de nos fermes, de la perception des droits de traites et du privilège exclusif de la vente du sel et du tabac ci-dessus supprimés dans le pays de Gex, les syndics du clergé, de la noblesse et du tiers-État dudit pays soient tenus de nous payer annuellement, à commencer dudit jour 1er janvier prochain, entre les mains dudit adjudicataire de nos fermes, la somme de 50,000 livres, laquelle somme nous les avons autorisés et autorisons d’imposer sur les biens-fonds de ladite province et proportionnément à la valeur réelle, soit que lesdits biens-fonds soient possédés par des privilégiés ou non privilégiés, ecclésiastiques, nobles ou roturiers, sans en exempter les propriétaires qui ne font pas leur résidence dans le pays.

V. Ordonnons que, pour tenir lieu audit pays de Gex des crues qui se trouvent supprimées par ces présentes sur le sel vendu et débité dans les greniers et Chambres de la province, et dont le produit était destiné à l’entretien et aux réparations de ses chemins, il sera de la manière ordonnée par l’article précédent, à commencer dudit jour 1er janvier prochain, annuellement imposé sur les biens-fonds dudit pays une somme suffisante pour être employée sans divertissement, et sur les ordonnances du sieur intendant et commissaire départi en Bourgogne, aux réparations et constructions des grandes routes, chemins, ponts et chaussées dudit pays de Gex, au moyen de quoi il ne sera plus exigé de corvées desdits habitants pour la construction des chemins.

VI. Ordonnons en outre que les habitants dudit pays demeureront conservés dans la liberté du commerce des grains, ainsi et de la même manière qu’ils en ont joui ou dû jouir avant ces présentes. Si donnons en mandement[5], etc.


Lettres-patentes, données à Versailles le 25 décembre 1775, portant suppression des droits établis sur les étoffes en passe-debout à Paris. (Registrées en Parlement le 19 mars 1776[6].)

Louis, etc. Les marchands et fabricants d’étoffes, des provinces de notre royaume, nous ont représenté qu’avant les lettres-patentes du 20 mars 1772, les étoffes en passe-debout, pour lesquelles ils empruntaient le passage par la ville de Paris afin de les faire parvenir à leurs différentes destinations, ont été affranchies des droits de régie de la halle dite aux Draps, portés par le tarif annexé aux lettres-patentes du 8 juin 1745 ; que cet avantage procuré au commerce, et qui en augmentait l’activité, a été détruit et anéanti par les lettres-patentes du 20 mars 1772 ; que, par l’article III de ces lettres, les étoffes, même en passe-debout, ont été assujetties à la perception du droit ; qu’il en est résulté que les marchands des différentes provinces, pour se soustraire à cette charge extraordinaire et onéreuse, qui augmente nécessairement le prix des étoffes, ont fait passer leurs marchandises par la banlieue, où il s’est établi des entrepôts destinés à les recevoir, jusqu’à ce qu’elles soient reprises par d’autres voitures pour être conduites à leurs destinations, ce qui exige un circuit autour de Paris ; que les frais et les retards qui en ont résulté, quoique nuisibles au commerce, n’ont donné aucune augmentation au produit desdits droits de la régie, qui a été par là privée de l’avantage que ce nouveau droit paraissait lui promettre ; enfin, que la suppression de cette gêne étant la seule capable de rétablir la liberté dont ces marchands jouissaient avant son établissement, ils nous supplient de la leur accorder. Et, désirant traiter favorablement les marchands et fabricants des provinces de notre royaume, nous avons cru devoir accueillir leurs supplications, et décharger leur commerce de la charge qui lui a été imposée par lesdites lettres-patentes. À ces causes, nous avons dit et ordonné :

Que les étoffes en or et argent, soie, laine, ou mêlées de laine, de soie, de fil et d’autres matières, expédiées des provinces de notre royaume, et déclarées en passe-debout aux barrières de la ville de Paris, seront affranchies des droits de la régie de la balle dite aux Draps, à leur passage dans ladite ville pour être conduites à leurs différentes destinations : dérogeant, quant à ce, en tant que besoin, à l’article III des lettres-patentes du 20 mars 1772 et à tous autres règlements qui pourraient y être contraires ; à la charge que tous les ballots, balles, paquets en passe-debout, seront, suivant l’usage, conduits ou portés à ladite halle, pour être ensuite par les gardes des marchands drapiers et merciers, ou leurs préposés, remis ou envoyés aux bureaux des voitures publiques chargés de les conduire à leur destination, et ce, sans autres frais que le salaire des gagne-deniers qui seront employés à cet effet. Si mandons, etc.


Arrêt du Conseil d’État, du 20 janvier 1776, qui, en confirmant l’exemption du droit d’amortissement accordée aux dîmes acquises par les curés des paroisses au profit de leurs cures, ordonne que tous échanges, concordats, transactions et autres actes par lesquels les (turcs ou vicaires perpétuels céderont des dîmes aux gros décimateurs ou cures primitifs, demeureront pareillement affranchis de tous droits d’amortissement et de nouvel acquêt.

Vu par le roi, étant en son Conseil, le mémoire que le clergé de France a présenté à Sa Majesté lors de sa dernière assemblée, contenant : Que les transactions sur les novales et autres dîmes entre les décimateurs, sont considérées comme étant assujetties au droit d’amortissement ou à celui de nouvel acquêt, lorsque les dîmes sont cédées aux gros décimateurs ou curés primitifs, sous prétexte que l’article XIV du règlement du 13 avril 1751 paraît n’avoir affranchi de l’amortissement les dîmes dépendantes des paroisses, que dans le cas seulement où elles sont acquises par les curés au profit de leurs cures. Le clergé ayant déjà fait des représentations sur cet objet lors de son assemblée tenue en 1769, le feu roi répondit qu’il ne pouvait étendre aux gros décimateurs ou curés primitifs la faveur accordée aux curés ou vicaires perpétuels, relativement aux dîmes qui leur étaient abandonnées : cependant le droit d’amortissement n’est dû que quand les biens temporels sortent du commerce pour entrer dans la possession des gens de mainmorte, et les dîmes (autres que celles inféodées) ne sont point de cette espèce ; elles n’ont jamais circulé dans le commerce ; elles forment un bien purement ecclésiastique, affecté de tout temps au clergé ; ainsi elles sont inamortissables de leur nature : le droit d’amortissement consiste dans une finance qui est payée par les gens de mainmorte pour avoir la permission d’acquérir ; c’est un dédommagement de la perte que le roi souffre lorsque des biens sortent du commerce pour être possédés par les gens de mainmorte, et cela n’est point applicable aux dîmes ecclésiastiques, qui, n’ayant jamais été dans le commerce, n’ont pas été dans le cas d’en sortir : le clergé, dont elles forment le patrimoine, n’a jamais eu besoin de permission, ni de lettres d’amortissement pour les posséder ; conséquemments, les concordat que les gros décimateurs et les curés passent entre eux au sujet des dîmes des paroisses, ne peuvent jamais engendrer ni droit d’amortissement, ni droit de nouvel acquêt, soit que les dîmes soient cédées par les gros décimateurs au curé, ou par le curé aux gros décimateurs ; et il est de toute justice d’étendre à ceux-ci la décharge prononcée en faveur des curés. Vu pareillement l’article XIV du règlement du 13 avril 1751, concernant le recouvrement des droits d’amortissement et franc fief, par lequel, dans la vue de faciliter le retour et la rentrée des dîmes dans les mains des curés des paroisses, il a été ordonné qu’il ne serait payé aucun droit d’amortissement pour raison des transactions, concordats ou acquisitions que les curés pourraient faire au profit de leurs cures, avec les gros décimateurs ou autres ecclésiastiques ou laïques, au sujet des dîmes de leurs paroisses, soit qu’elles fussent ecclésiastiques ou inféodées ; la réponse, faite au cahier présenté par le clergé en l’année 1760, par laquelle, en confirmant l’exemption des droits d’amortissement et de centième denier en faveur des curés ou vicaires perpétuels auxquels la dîme serait abandonnée par des concordats faits entre eux et les gros décimateurs ou curés primitifs, le feu roi a déclaré ne pouvoir étendre cette faveur aux abandons à perpétuité que feraient les curés ou vicaires perpétuels, soit de leurs dîmes, soit des fonds et domaines de leurs cures aux gros décimateurs ou curés primitifs ; ensemble l’arrêt du Conseil du 24 novembre 1774, par lequel Sa Majesté a ordonné que les actes qui seraient faits pendant l’espace de deux années, à compter du 1er  janvier 1775, par lesquels les gros décimateurs ou curés primitifs abandonneraient, soit en totalité, soit en partie, aux curés ou vicaires perpétuels qui n’auraient point fait l’option de la portion congrue en conformité de l’édit du mois de mai 1768, les dîmes anciennes ou novales qui leur appartiendraient dans des cantons déterminés de chaque paroisse, et par lesquels les curés ou vicaires perpétuels céderaient en même temps leurs dîmes novales, dispersées dans leurs paroisses, aux gros décimateurs ou curés primitifs, sans qu’il fût payé de part ni d’autre aucuns deniers à titre de soulte ou autrement, seraient et demeureraient par grâce déchargés de tout droit d’amortissement ; Sa Majesté a reconnu qu’il serait utile au bien des paroisses, non-seulement que les échanges, mais encore que tous autres actes, concordats, transactions et autres arrangements relatifs à la propriété des dîmes, fussent affranchis pour toujours du droit d’amortissement, tant dans le cas où les dîmes seront abandonnées par les gros décimateurs ou curés primitifs aux curés ou vicaires perpétuels, que dans celui où elles seront cédées par les curés ou vicaires perpétuels aux gros décimateurs ou curés primitifs.

À quoi désirant pourvoir : ouï le rapport du sieur Turgot, etc. Le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que les dîmes qui seront acquises par les curés des paroisses continueront de jouir de l’exemption de tous droits d’amortissement et de nouvel acquêt, conformément à l’article XIV du règlement du 13 avril 1751 : ordonne en outre, que tous échanges, concordats, transactions et autres actes par lesquels les curés ou vicaires perpétuels céderont les dîmes aux gros décimateurs ou curés primitifs, seront et demeureront pareillement affranchis de tous droits d’amortissement et de nouvel acquêt ; n’entendant néanmoins que les gros décimateurs ou curés primitifs puissent répéter aucuns droits de ce genre qui auraient été payés avant le présent arrêt.


  1. Ce contrat, le plus ancien de ceux que les agents généraux du clergé invoquassent, montre que jusqu’alors on exigeait le franc fief des ecclésiastiques non nobles ; et que la première exemption qu’ils en ont eue a été la suite d’un contrat motivé par une subvention. (Note de Dupont de Nemours.)
  2. Différents arrêts du Conseil, des 4 décembre 1774, 10 mars, 19 avril, 6 septembre 1775 et 9 février 1776, ont étendu la même faveur à tous les officiers militaires, depuis et compris le grade de capitaine-lieutenant jusques et compris celui de lieutenant-général des armées, aux officiers des milices gardes-côtes, aux commissaires provinciaux et ordinaires des guerres, à la plupart des officiers à la nomination des maréchaux de France, à la plupart des officiers de la maison du roi, aux exempts des chasses et aux receveurs des amendes des capitaineries. Un de ces arrêts a exemple du marc d’or de noblesse les magistrats du Parlement de Bretagne, ceux-ci étant dans l’usage de prouver leur noblesse, avant d’entrer dans la Compagnie : un autre a modéré le même droit pour les magistrats du Châtelet de Paris. (Dupont de Nemours.)
  3. Les droits qu’on appelait de domaine et barrage, étaient des droits domaniaux très-anciennement établis, et devenus d’une fort petite importance par la diminution de la valeur des monnaies. Mais leur qualité domaniale ne permettait pas au roi de les supprimer sans engager une contestation sérieuse avec les parlements et les chambres des comptes, et sans s’exposer à être obligé de déployer une autorité, qu’on aurait appelée arbitraire et subversive des lois dites fondamentales sur l’inaliénabilité du domaine ou des domaines de la couronne. Plusieurs mauvaises institutions étaient ainsi consolidées chez une nation qui n’avait point de corps représentatif, et qui n’y suppléait que par des corporations de magistrats, dont la mission n’était ni bien claire, ni solidement établie, pour se mêler des finances, et que leurs fonctions habituelles accoutumaient à placer leur vertu dans l’exécution stricte de la lettre des lois, sans remontera leurs principes et à leur esprit. (Note de Dupont de Nemours.)
  4. Il paraît que l’arrêt du 22 mars, mentionné précédemment, n’ayant pas été revêtu de lettres-patentes, son exécution aura souffert quelques difficultés qui auront déterminé à le retirer et à en renouveler les dispositions par celui-ci. (Note de Dupont de Nemours.)
  5. Ces lettres-patentes, enregistrées au Parlement de Dijon le 5 février 1776, ne le furent ni aisément, ni sans restrictions.

    Il fallut ordonner l’enregistrement par une lettre de cachet ; et le Parlement inséra dans l’enregistrement des remontrances par lesquelles il demandait que la répartition de l’indemnité et celle de la contribution pour les chemins ne fussent pas faites en raison des revenus, mais par les États du pays de Gex, de la manière qu’ils croiraient la plus égale et la moins onéreuse pour eux-mêmes.

    La répugnance pour les impôts proportionnels aux revenus était invétérée dans tous les parlements ; et, comme elle s’exprimait alors avec plus de violence au Parlement de Paris, relativement à la suppression générale des corvées, comme c’était principalement là qu’il importait de la vaincre, on parut ne donner que peu d’attention aux modifications insérées à Dijon dans l’enregistrement des lettres-patentes pour l’affranchissement du pays de Gex. Les États firent arbitrairement leur répartition, puis ils en vinrent à rétablir, pour payer leur abonnement et leurs chemins, une petite gabelle, à la place de celle dont ils avaient demandé la suppression. Ce fut un mal auquel on se proposait de remédier plus tard, et malgré lequel le pays de Gex se trouva réellement soulagé. (Note de Dupont de Nemours.)

  6. On voit, par le retard de près de trois mois apporté à cet enregistrement, combien le Parlement montrait d’opposition et de répugnance aux opérations, les plus simples et les plus évidemment utiles, que la bonté du roi et les lumières de M. Turgot faisaient pour la liberté du commerce et le soulagement du peuple. (Note de Dupont de Nemours.)