Anthologie féminine/Duchesse de Nemours

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Anthologie féminineBureau des causeries familières (p. 73-74).

MARIE D’ORLÉANS LONGUEVILLE
duchesse de nemours

(1623-1707)


Femme de beaucoup d’esprit et d’une haute vertu, elle passa la majeure partie de son existence dans une espèce de retraite. Belle-fille de la bruyante duchesse de Longueville, elle avait en haine toute la famille des Condé et ne leur pardonna qu’à son lit de mort.

Elle a laissé un volume de Mémoires spirituels et agréablement écrits, mais dont il faut mettre en doute l’impartialité.


RETOUR DES PRINCES À PARIS
APRÈS LEUR DÉLIVRANCE PAR MAZARIN

Le jeudy gras que les trois princes arrivèrent à Paris, on y fît des feux de joye de leur élargissement, comme on en avoit fait auparavant de leur prison. Mais à dire la vérité, les derniers ne se firent ni d’un si bon cœur, ni avec tant de gayté que les premiers : car le peuple est bien étrange dans ces divers mouvements, et il en avoit donné plusieurs marques au sujet des trois princes.

Monsieur le duc d’Orléans alla au-devant d’eux dans son carrosse, où le duc de Beaufort et le coadjuteur eurent l’honneur de l’accompagner.

Ce furent de grands embrassements et de grands compliments de part et d’autre. Mais voilà à quoi se borna entre eux toute la reconnoissance aussi bien que toute l’amitié.

Monsieur, qui n’avoit point vu la reine depuis leur brouillerie, vint lui présenter les trois princes, et de là il les mena souper au palais d’Orléans. Cette visite fut assez froide et le repas ne fut guère plus échauffé, et comme il n’y arriva rien de plus remarquable, on commença dès lors à se remettre de ce qu’on avoit tant appréhendé de ce retour de Monsieur le Prince. On jugea facilement, par cette retenue qu’on n’attendoit point de lui, qu’il n’avait ni de si grands ni de si violents desseins qu’on se les étoit figurez, et par un commencement si modéré et si peu prévu on jugea même encore de toute la suite de ses démarches.....