Astronomie populaire (Arago)/XXVIII/05

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 4p. 398-401).

CHAPITRE V

détermination de la vitesse de la lumière par les éclipses des satellites de jupiter


Revenons maintenant aux satellites de Jupiter pour appliquer à la détermination de la vitesse de la lumière les principes précédents.

Les événements comparés seront une immersion de satellite ayant eu lieu le jour de la conjonction et une immersion subséquente correspondante au jour de l’opposition.

Dans une seconde comparaison, nous prendrons pour premier événement l’émersion qui a lieu le jour de l’opposition, et, pour second événement, l’émersion correspondante au jour de la conjonction.

Le courrier, porteur de la première nouvelle, est le rayon de lumière qui, en partant de J (fig. 335), est arrivé en A. Le second courrier est celui qui, partant de J‴, est de même arrivé en A.

Fig. 335. — Détermination de la vitesse de la lumière par les éclipses des satellites de Jupiter.

Le second terme de comparaison se forme ainsi. Le courrier, ou le rayon de lumière, a eu à parcourir, pour apporter la nouvelle de l’émersion observée en J‴, l’intervalle TJ‴. Le second courrier, donnant les nouvelles de la seconde émersion, a parcouru l’intervalle TJ.

L’intervalle compris entre les immersions correspondantes à J et à J‴ étant le même, en réalité, que l’intervalle entre les émersions comprises entre J‴ et J, il devra y avoir entre ces deux intervalles une différence égale au temps que le courrier lumineux a employé à parcourir la différence des deux distances TJ et TJ‴, c’est-à-dire égale au temps dont la lumière a besoin pour franchir l’intervalle TA. C’est, comme on le voit, de point en point l’application des résultats obtenus quand nous comparions les nouvelles données par des courriers partis d’Orléans et de Bourges.

La différence entre les deux intervalles dont nous venons de parler est-elle sensible et au-dessus des erreurs d’observations ?

À cette question nous répondrons que cette différence est considérable, et qu’elle va jusqu’à 16m 32s. La lumière emploie donc 16m 32s à parcourir le diamètre tout entier de l’orbite terrestre ; il lui faut 8m 16s pour franchir la moitié de cet intervalle, ou pour venir du Soleil à la Terre.

Voici à l’aide de quelles vérifications on s’assure que l’explication que nous avons donnée est très-fondée.

L’intervalle compris entre deux immersions ou deux émersions du premier satellite augmente si la vitesse de la lumière n’est pas infinie, lorsque Jupiter s’éloigne de la Terre ; cet intervalle diminue, au contraire, quand il se rapproche, d’une quantité égale au temps que la lumière emploie à parcourir l’intervalle dont la planète s’est approchée ou s’est éloignée de la Terre entre les deux observations. Or, la quantité dont Jupiter se rapproche de la Terre depuis la conjonction jusqu’à l’opposition, et la quantité dont il s’éloigne depuis l’opposition jusqu’à la conjonction pendant la durée de la révolution synodique d’un satellite, sont très-faciles à calculer ; on pourra donc appliquer à ces révolutions la correction dépendante de la vitesse de la lumière dans la supposition qu’il faille 8m 16s pour que la lumière franchisse l’intervalle qui sépare le Soleil de la Terre.

Quand on a opéré ces corrections, on trouve que les révolutions synodiques des satellites sont exactement égales entre elles. Cette parfaite égalité justifie l’explication à laquelle nous nous étions arrêté ; elle montre de plus que la lumière a dû se mouvoir uniformément dans toute l’étendue de l’espace compris par l’orbite de Jupiter.