Ballade sur le propos d’immanente syphilis

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Chez Léon Vanier, éditeur (p. 27-28).


BALLADE
SUR LE PROPOS D’IMMANENTE SYPHILIS


Toi, jeune homme, ne te désespère point : car tu as un ami dans le Vampire malgré ton opinion contraire. En comptant l’acarus sarcopte qui produit la gale, tu auras deux amis.
Les Chants de Maldoror, chant ier.



Du noble avril musqué de lilas blancs
Hardeaux paillards ne chôment la nuitée.
Mâle braguette et robustes élans
Gardent au bois pucelle amignottée.
Jouvence étreint Mnazile à Galathée.
Un doux combat pâme sur les coussins
Ton flanc menu, Bérengère, et tes seins
Jusques au temps que vendange soit meure.
Or, en ces jours lugubres et malsains,
Amour s’enfuit, mais Vérole demeure.


L’embasicœte aux harnais trop collants
Cherche, par les carrefours, sa pâtée,
— Nourris, Vénus, les mornes icoglans ! —
Ce pendant que matrulle Dosithée
Ouvre aux cafards la porte assermentée.
Las ! nonobstant baudruches et vaccins,
Durable ennui croît des plaisirs succincts.
Aux bords du Guadalquivir et de l’Eure,
Il faut prendre conseil des médecins :
Amour s’enfuit, mais Vérole demeure.

Maint prurigo végète sur vos flancs,
L’humeur peccante a votre chair gâtée,
Jeune héros des entretiens brûlants !
Que l’hydrargyre et l’iode en potée
Lavent ce don cruel d’Épiméthée,
Robé par lui chez les dieux assassins.
Vivez encor pour tels joyeux larcins !
Et Priapus vous gard’ de la male heure.
De Bableuska, des lopes, des roussins :
Amour s’enfuit, mais Vérole demeure.

ENVOI

Prince d’amour que fêtent les buccins,
Imitez la continence des Saints,
Mousse d’Or, et gravez la chantepleure
De Valentine au trescheur de vos seings ;
Amour s’enfuit, mais Vérole demeure.