Chansons de route/Si le Kronprinz avait voulu

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Librairie Payot et Cie (p. 75-80).


SI LE KRONPRINZ AVAIT VOULU














 


 

SI LE KRONPRINZ AVAIT VOULU

Sur l’air de « La Garonne », de Nadaud.
I

Si le Kronprinz avait voulu,
Lanturlu !
Évitant les lenteurs d’un siège
C’est d’assaut qu’il emportait Liège ;
Puis, en quatre jours, ayant pris
Lille, Nancy, Reims et Paris,
Tout pliant devant sa vaillance.
Si le Kronprinz avait voulu,
(L’euss’s-tu cru ?)
En huit jours, il prenait la France !

II

Si le Kronprinz avait voulu,
Lanturlu !
Gallia sous sa botte mise,
Il vous enfilait la Tamise
Puis, en deux jours, prenant London,
Cardiff, Dublin — et allez donc ! —
Il avait la Galle et l’Irlande :
Si le Kronprinz avait voulu,
(L’euss’s-tu cru ?)
Albion serait Allemande !

III

Si le Kronprinz avait voulu,
Lanturlu !
Revenant chez lui, sans épates,
Il vous dégageait les Karpathes
Et, disait au Tzar : « Quèqu’tu m’off’ ?
Dans ton palais de Péterhoff » ;
Et toi, Grand Duc, dans Pétrograde…
Si le Kronprinz avait voulu,
(L’euss’s-tu cru ?)
Ah ! que prenais-tu pour ton grade ?

IV

Si le Kronprinz avait voulu,
Lanturlu !
Des Balkans, il gagnait l’Afrique,
L’Océanie et l’Amérique
Et, de là, sautait d’un seul bond
Sur la Chine et sur le Japon :
Possesseur de la Mappemonde,
Si le Kronprinz avait voulu,
(L’euss’s-tu cru ?)
Il serait l’Empereur du Monde !

V

Mais le Kronprinz n’a pas voulu,
Lanturlu !
Prendre, à lui seul, toute la Gloire :
« Père, à vous — dit-il — la Victoire :
» Je préfère rester blotti,
» Me faisant petit, tout petit,
» Moi, dans le fond de ma tannière !… »
Non, le Kronprinz n’a pas voulu,
(L’euss’s-tu cru ?)
Humilier Monsieur son père !