Chants populaires de la Basse-Bretagne/Marie Tili

La bibliothèque libre.


MARIE TILI
________


I

  Esprit-Saint, je vous supplie (invoque),
Et vous aussi, Vierge Marie,
Car je suis sûrement incapable,
Si vous ne me venez en aide, Vierge sainte.

  Marie Tili disait
À son père, un dimanche matin :
— Mon père, je vais me confesser,
Voilà quatre mois que je n’y ai pas été.

  Mon père confesseur, si vous m’aimez,
Vous me donnerez l’absolution ;
Vous me donnerez l’absolution,
Je n’ai jamais commis de péché,

  Jusqu’à hier matin,
Où je fis, hélas ! un péché nouveau ;
Mon père me dit qu’il m’avait élevée,
Et moi je lui répondis : — vous mentez !

  Voilà mon premier péché.
Marie Tili a reçu l’absolution.
Huit tables de monde ont reçu la communion,
Marie Tili s’est présentée à chaque fois.

  À mesure qu’elle recevait les hosties,
Elle les retirait de sa bouche,
Et les enveloppait dans son mouchoir,
Pour les emporter à la maison.

  Marie Tili, en retournant à la maison,
Rencontra son serviteur (amoureux) :
— Moi, dit-elle, mon serviteur,
Je serai dimanche à la maison ;

  Vous, dit-elle, mon serviteur,
Vous viendrez passer votre temps (avec moi),
Il n’y aura que moi à la maison,
Mon père ira à la grand’messe.

II

Ce jeune homme s’est rendu
À son rendez-vous maudit.
Quand son serviteur entra dans la maison,
Elle mit de l’eau à bouillir dans un bassin ;

Elle mit de l’eau à bouillir dans un bassin
Et y jeta les huit hosties
Qui avaient été consacrées sur l’autel,
Par le prêtre, à la grand’messe.

Les hosties se rassemblèrent
Et prirent la forme d’un enfant.
Quand Marie Tili vit (cela),
Elle prit, vite, l’enfant ;

Elle prit, vite, l’enfant,
Et le mit sur la table ;
Elle le mit sur la table,
Et lui donna trois coups de couteau ;

Elle lui donna trois coups de couteau,
Et trois gouttes de sang en jaillirent ;
Trois gouttes de sang belles comme le jour.
Et qui ne s’effaçaient pas !

Quand son serviteur vit (cela),
Il se mit à pleurer :
Et Marie Tili disait
À son serviteur, en le voyant (pleurer) :

— Ne pleurez pas, dit-elle, mon serviteur.
Ceci ne durera pas longtemps ;
Le cheval de mon père est à l’écurie,
Je le (l’enfant) lui porterai à manger !

Quand le cheval vit (l’enfant),
Il se jeta à genoux ;
Le cheval se jeta à genoux
Devant Jésus notre maître divin.

Quand le vieux Tili arriva (à la maison),
Il se rendit à l’écurie ;
Il se rendit à l’écurie,
Et il resta saisi d’étonnement,

En voyant le cheval à genoux
Devant Jésus notre maître divin….
……………………………………………………


  Quand le vieux Tili vit (cela),
Il accourut aussitôt à la maison :
— Ma fille Marie, dites-moi,
Que signifie ce sang sur l’aire de la maison ?

  — Il y avait là deux jeunes coqs
Qui ne faisaient que se battre, tous les jours ;
J’en ai attrapé un,
Et je l’ai saigné sur l’aire de la maison.

  Quand le vieux Tili entendit (cela),
Il retourna à l’écurie.
Le cheval est toujours à genoux
Devant Jésus, notre maître divin.

  Quand le vieux Tili vit (cela),
Il revint aussitôt à la maison :
— Ma fille Marie, vous mentez,
Et, sûrement, il vous faudra mourir !

III

  Marie Tili disait.
En montant sur le plus haut degré de l’échelle :
— Pères et mères, réfléchissez (à mon sort),
Et corrigez vos enfants.

Un jeune homme élevé dans l’amour du vin,
Une fille qui parle latin,
Tirent ordinairement à mauvaise fin !


Chanté par Charles Guillermo,
Fermier au Bois-de-la-Roche — commune de Prat.
(Côtes-du-Nord).