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Correspondance de Voltaire/1756/Lettre 3277

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Correspondance de Voltaire/1756
Correspondance : année 1756GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 147).

3277. — DE M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
Ce…[1].

Je suis très-touché, monsieur, de l’affaire de l’amiral Byng : je puis vous assurer que tout ce que j’ai vu et entendu de lui est entièrement à son honneur. Après avoir fait tout ce qu’on pouvait raisonnablement attendre de lui, il ne doit pas être blâmé pour avoir souffert une défaite. Lorsque deux généraux disputent pour la victoire, quoiqu’ils soient également gens d’honneur, il faut nécessairement que l’un des deux soit battu ; et il n’y a contre M. Byng que de l’avoir été. Toute sa conduite est celle d’un habile marin, et digne d’être admirée avec justice. La force des deux flottes était au moins la même : les Anglais avaient treize vaisseaux, et nous douze, mais beaucoup mieux équipés et plus nets. La fortune, qui préside à toutes les batailles, particulièrement à celles qu’on livre sur mer, nous a été plus favorable qu’à nos adversaires, en faisant faire un plus grand effet à nos boulets dans leurs vaisseaux. Je suis convaincu, et c’est le sentiment général, que si les Anglais avaient opiniâtrement continué le combat, toute leur flotte aurait été détruite. Il ne peut y avoir d’acte plus insigne d’injustice que ce qu’on entreprend actuellement contre l’amiral Byng. Tout homme d’honneur, tout officier des armées doit prendre un intérêt particulier à cet événement.

Richelieu.

  1. Cette lettre ou fragment de lettre (voyez n° 3315) que provoqua celle de Voltaire à Richelieu, du 20 décembre 1756 (voyez n° 3273), doit être de la même année, et probablement du 25 ou 26 décembre 1756, mais a pu ne parvenir aux Délices que dans les premiers jours de janvier 1757.