Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7240

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 21-22).
7240. — À M. LE CLERC DE MONTMERCY[1].
16 avril.

Plus j’avance en âge, monsieur, et plus j’aime la philosophie et les philosophes ; jugez si j’ai conservé pour vous les sentiments d’une véritable amitié. Tout ce que vous m’avez jamais écrit a été conforme à ma manière de penser, excepté les éloges dont vous me comblez, éloges dont je suis redevable à votre seule indulgence.

Il est triste que, tandis que la raison élève sa voix dans presque toute l’Europe, le fanatisme fasse toujours entendre ses cris dans Paris. Les honnêtes gens se taisent, ou sont persécutés ; les fripons sont récompensés. Je fais plus de cas d’un philosophe comme vous, qui honore la médiocrité de sa fortune, que d’un hypocrite nageant dans l’opulence et se pavanant dans sa fausse grandeur.

Comptez que je vous suis bien véritablement attaché.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.