Correspondance de Voltaire/1769/Lettre 7438

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 215-216).
7438. — À M. LE COMTE DE ROCHEFORT.
1er janvier 1709.

Je présente mes tendres et sincères respects au couple aimable qui a honoré de sa présence pendant quelques jours l’ermitage d’un vieux solitaire malingre. Je ne leur souhaite point la bonne année, parce que je sais qu’ils font les beaux jours l’un de l’autre. On ne souhaite point le bonheur à qui le possède et à qui le donne.

Je me flatte qu’un jour Dixhuitans[1] sera le meilleur comme le plus bel appui de la bonne cause. La raison et l’esprit introduiront leur empire dans le Gévaudan, et on sera bien étonné. La bonne cause commence à se faire connaître sourdement partout, et c’est de quoi je bénis Dieu dans ma retraite. J’achève ma vie en travaillant à la vigne du Seigneur, dans l’espérance qu’il viendra de meilleurs apôtres, plus puissants en œuvres et en paroles.

Quoi qu’on dise à Paris que la fête de la Présentation de Notre-Dame[2] doit se célébrer au commencement de janvier, je n’en crois encore rien : car à qui présenter ? à des vierges ? Cela ne serait pas dans l’ordre.

On parle de grandes tracasseries. Je ne connais que celles de Corse. Elles ne réussissent pas plus dans l’Europe que le Tacite de La Bletterie en France. Mais le mal est médiocre ; et, après la guerre de 1756, on ne peut marcher que sur des roses. Pour le parlement, il fait naître le plus d’épines qu’il peut.

  1. Mme de Rochefort avait dix-huit ans.
  2. Pour comprendre ce passage, il faudrait savoir ce que le comte de Rochefort avait écrit à Voltaire. (B.) — Il s’agit sans doute de la présentation de la Du Barry à Versailles. (G. A.)