Correspondance de Voltaire/1769/Lettre 7500

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Correspondance : année 1769GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 283).
7500. — À M. DE LA HARPE.
À Ferney, ce 10 mars.

Mon cher panégyriste de Henri IV, et vitula tu dignus, et hic[1]. Vous avez bien du talent en vers et en prose. Puisse-t-il servir à votre fortune comme il servira sûrement à votre réputation ! Je vous ai écrit, au sujet du tripot, la lettre ostensible[2] que vous demandiez : j’ai écrit aussi à M. le maréchal de Richelieu[3]. Je crois à présent toutes choses en règle.

L’ouvrage de M. de Saint-Lambert[4] me paraît, à plusieurs égards, fort au-dessus du siècle où nous sommes. Il y a de l’imagination dans l’expression, du tour, de l’harmonie, des portraits attendrissants, et de la hauteur dans la façon de penser. Mais les Parisiens sont-ils capables de goûter le mérite de ce poëme ? Ils ne connaissent les quatre saisons que par celle du bal, celle des Tuileries, celle des vacances du parlement, et celle où l’on va jouer aux cartes à deux lieues de Paris, au coin du feu, dans une maison de campagne. Pour moi, qui suis un bon laboureur, je pense à la Saint-Lambert.

Il m’est venu trois ou quatre A, B, C[5] d’Amsterdam. Si vous voulez je vous en enverrai un.

Je vous embrasse de tout mon cœur, sans cérémonie.

  1. C’est à Gaillard et La Harpe (voyez lettre 7448) que Voltaire applique ces premiers mots du vers 109 de la 3e églogue de Virgile.
  2. Çette lettre ostensible est perdue.
  3. Cette lettre est aussi perdue ; car ce ne peut être du n° 7487 que parle ici Voltaire.
  4. Le poëme des Saisons ; voyez lettre 7497.
  5. Tome XXVII, page 311.