Correspondance inédite de Hector Berlioz/037

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Texte établi par Daniel Bernard, Calmann Lévy, éditeur (p. 155-156).
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XXXVII.

AU MÊME.


Londres, 8 décembre [1847]

Mon cher Morel,

Toujours des commissions !… Soyez assez bon pour aller au reçu de cette lettre chez mon graveur Parent, 43, rue Rochechouart, et lui dire qu’il m’envoie tout de suite par la diligence les parties d’instruments à vent, harpe et timbales, etc., d’Harold, en double, comme je lui ai indiqué dans une note qu’il a entre les mains ; plus, la feuille volante des altos où se trouvait une faute qu’il doit avoir corrigée ; plus les exemplaires fautifs que je lui ai renvoyés de Londres. J’en ai besoin pour vérifier les corrections. En outre, s’il ne peut m’envoyer une épreuve telle quelle de la partition, il m’en renverra le manuscrit. Je vous recommande de vous assurer de la voie par laquelle tout ceci me parviendra, car vous comprenez que je ne voudrais pas perdre votre partition.

Maintenant, je dois vous dire que l’ouverture de notre grand opéra a eu un succès immense ; toute la presse anglaise s’accorde à nous louer. Madame Gras et Reeves, le ténor (dans Lucie), ont été rappelés quatre ou cinq fois avec frénésie. Et vraiment l’un et l’autre le méritaient. Reeves est une découverte sans prix pour Jullien ; il a une voix charmante, d’un timbre essentiellement distingué et sympathique, il est très bon musicien, sa figure est très expressive et il joue avec son feu national d’Irlandais. À mon entrée à l’orchestre, la salle m’a fait une superbe réception. Nous avons joué pour commencer la belle ouverture d’Éléonore de Beethoven, nº 1, superbement. On a redemandé dans Lucie le grand sextuor en ré bemol, qui commence le final du second acte, et ce soir, à la seconde représentation, on a en outre redemandé le chœur en mi bemol du toisième acte.

notation musicale

Les Anglais sont dans la stupéfaction d’entendre dans un théâtre anglais cette masse de cent vingt choristes et ce bel orchestre, et d’avoir un pareil ténor et une telle prima donna. Il n’y a que le ballet qui est misérable, mais nous aurons mieux dans quelque temps.

Je vais commencer à répéter mes symphonies un mois et demi d’avance, dès que les parties d’orchestre et la partition d’Harold me seront parvenues.

Mille pardons de vous faire ainsi courir pour cette affaire, mais je n’ose me fier qu’à vous.