Des Fleurs de bonne volonté/Mettons le doigt sur la plaie
III
METTONS LE DOIGT SUR LA PLAIE
Que le pur du bonheur m’est bien si je l’escompte !…
Ou ne le cueille qu’en refrains de souvenance !…
Ô rêve, ou jamais plus ! Et fol je me balance
Au-dessus du Présent en Ariel qui a honte.
Mais, le cru, quotidien, et trop voyant Présent !
Et qui vous met au pied du mur, et qui vous dit :
« À l’instant, ou bonsoir ! » et ne fait pas crédit,
Et m’étourdit le cœur de ses airs suffisants !
Tout vibrant de passé, tout pâle d’espérance,
Je fais signe au Présent : « Oh ! sois plus diaphane ? »
Mais il me bat la charge et mine mes organes !
Puis, le bateau parti, j’ulule : « Oh ! recommence… »
Et lui seul est bien vrai ! — mais je me mords la main
Plutôt ! (je suis trop jeune… ou, trop agonisant…)
Ah ! rien qu’un pont entre mon Cœur et le Présent !
Ô lourd Passé, combien ai-je encor de demains ?
Ô cœur aride
Mais sempiterne,
Ô ma citerne
Des Danaïdes !…