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Encyclopédie méthodique/Economie politique/ADMINISTRATEUR

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Panckoucke (1p. 54).
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ADMINISTRATEUR, s. m. en général on donne ce nom à tous ceux qui régissent les biens ou la personne d’une autre, comme les tuteurs, les curateurs, &c : on appelle aussi administrateurs ceux qui sont chargés de la régie des biens des hôpitaux.

Le titre d’administrateur se donne souvent à des officiers publics employés par le gouvernement. Par exemple, en France, depuis que la ferme de la poste est supprimée, les régisseurs de cette partie sont appellés administrateurs.

On nomme encore administrateur celui qui fait les fonctions d’un emploi, même les fonctions de la souveraineté, au nom & à la place de celui qui en porte le titre.

Par exemple, l’évêque de Lubec, Adolphe-Frédéric de Holstein (depuis roi de Suède), exerçant la tutelle du jeune duc de Holstein-Gottorp, Charles-Pierre Ulric, après la mort de Charles-Frédéric, portoit le nom d’administrateur de Schleswig-Holstein.

On le donne, chez les catholiques, à celui qui fait les fonctions de l’évêque pendant la vacance du siège épiscopal.

Le métropolitain de Moscou s’appelle administrateur du siège patriarchal ; il en fait les fonctions ; mais il n’a pas le nom de patriarche, ce titre ayant été supprimé.

Administrateur postulé est, chez les protestans d’Allemagne, le chef d’un chapitre, élu par les chanoines selon les statuts, & confirmé par la régence. Ces administrateurs sont qualifiés de révérendissimes ; ils n’ont pourtant pas le titre d’évêques, parce que les protestans, ne reconnoissant pas le pape pour leur chef, n’ont pu obtenir des évêques à la paix d’Osnabrug.

Les ministres des finances sont aussi appellés administrateurs des finances. En méditant sur les qualités nécessaires à un administrateur des finances, voici les réflexions qui se présentent à mon esprit, dit un homme célèbre.

La sensibilité lui donne le desir d’être utile aux hommes : la vertu lui en fait un devoir : le génie lui en ouvre les moyens : le caractère les met en usage, & la connoissance des hommes adapte ces moyens à leurs passions & à leurs foiblesses.

La sensibilité qu’on lui demande n’est pas cette sensibilité commune, qui s’agite à l’aspect d’un misérable, & qui se calme en détournant la vue, mais une sensibilité vaste, durable & profonde, capable de l’unir au bonheur de tout un peuple, qui présente à ses yeux le pauvre obscur au fond d’une province, qui lui fait entendre ses cris, qui lui montre ses larmes, qui, dans l’immensité d’un grand royaume, anéantit les distances qui le séparent des malheureux, & range autour de lui, par la pensée, tous ceux auxquels il peut faire du bien.

La vertu nécessaire à un administrateur des finances, n’est fixée par aucune borne : à chaque instant, le bien public lui demande le sacrifice de son intérêt, de ses affections, & même de sa gloire. Il faut qu’il soit poursuivi par cette pensée, que la bienfaisance d’un homme d’état est une justice inébranlable, que cette justice fait le bonheur d’un peuple, & la faveur celui d’un seul homme ; il faut qu’il soit entraîné vers ces principes, ou par un heureux instinct, ou par une méditation profonde sur les loix de la société, ou par un mouvement plus grand, plus rapide & plus impétueux, par l’idée d’un Dieu qui tient entre ses mains les premiers anneaux de cette vaste chaîne, qui nous a permis d’entrevoir l’harmonie de l’univers, & qui, dans cet exemple magnifique, nous donnant une idée de l’ordre, nous excite à l’observer, par l’ardent desir de lui plaire.

Les facultés de l’esprit qui doivent former le génie de l’administrateur, sont tellement étendues & diversifiées, qu’elles semblent, pour ainsi dire, hors de la domination de la langue.

Il faut, pour s’en faire une idée, réunir l’étendue à la profondeur, la facilité à l’exactitude, la rapidité à la justesse, la sagacité à la force, l’immensité à la mesure.