Gouvernement des Lacédémoniens (Trad. Talbot)/15

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Gouvernement des Lacédémoniens (Trad. Talbot)
Traduction par Eugène Talbot.
Œuvres complètes de XénophonHachetteTome 2 (p. 478-479).



CHAPITRE XV[1].


Conclusion.


Quant à la question de savoir si, à mon avis, les lois de Lycurgue sont demeurées jusqu’à nous dans leur intégrité primitive, je n’oserais, par Jupiter, la décider. Je sais que les premiers Lacédémoniens aimaient mieux vivre chez eux dans une heureuse médiocrité, que de gouverner des villes conquises et recevoir des hommages corrupteurs. Je sais qu’en un temps ils craignaient d’être pris à posséder de l’or, et que maintenant ils se font gloire d’en posséder. Je sais que jadis ils ont, pour ce motif, exclu les étrangers de chez eux[2], et interdit les voyages à leurs concitoyens, de peur qu’ils n’allassent emprunter à leurs hôtes des habitudes de mollesse, au lieu qu’aujourd’hui l’ambition des premiers citoyens ne peut être satisfaite que par la domination dans une contrée étrangère. Et tandis qu’autrefois on ne s’occupait qu’à se rendre digne de commander, on se donne aujourd’hui beaucoup plus de mal pour le commandement que pour le talent qu’il exige. Par suite, les Grecs, qui allaient autrefois demander à Sparte des chefs contre ceux dont ils craignaient l’oppression, réunissent aujourd’hui leurs forces pour l’empêcher de reprendre son empire[3]. Toutefois, il ne faut pas s’étonner qu’on leur fasse ce reproche, puisqu’il est évident qu’ils n’ont obéi ni aux dieux, ni aux lois de Lycurgue[4].




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  1. Ce chapitre est considéré comme apocryphe par plusieurs éditeurs. Fr. Haase ne doute pas de son authenticité.
  2. Les Grecs donnaient le nom de Xénélasie à cette intolérance civile.
  3. Allusion aux guerres, dont on voit se développer les incidents dans les derniers livres de l’Histoire grecque.
  4. Voyez la fin du chapitre VIII.