L’église habillée de feuilles/Le poète n’est plus jeune comme autrefois

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Le poète n’est plus jeune comme autrefois.
Il a dit à son chien ; chien, il est d’autres bois
que ceux où nous chassions dans le fumeux automne
il est d’autres ajoncs et il est d’autres chaumes :
il y a les fougeraies des ténèbres de Dieu,
les fourrés qui le soir respirent dans les Cieux.
Mais le poète, bien qu’amer devant la vie
qu’il avait tant aimée et qui l’avait trahi,
le poète savait sourire aux jeunes filles
dont les joues sont les pommes rouges des charmilles.
Il faut que, sans savoir pourquoi, ces enfants rient.
Il faut laisser jaser les sources des prairies.


À mesure que le poète allait à Dieu
et que, de plus en plus, se faisait raboteux
le chemin où l’on est forcé de s’engager,
son cœur paisible, bien que déçu, souriait
aux échos des baisers dans les vacances lourdes.
Son âme, ardente et triste et tendrement amère,
à genoux maintenant devant chaque Mystère
devenait l’humble sœur de l’humble coquelourde
qui orne la pauvreté du buis presbytéral…

D’autres jardins s’ouvraient, mais si beaux et si sombres
que leurs feuilles gênaient celui qui voulait voir ;
et la beauté suprême était ce large noir
où se risquait son cœur comme un homme qui plonge.