L’Encyclopédie/1re édition/CHANDELIER

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* CHANDELIER, s. m. (Art. méch.) ustensile qui sert à porter les cierges, bougies, & chandelles destinées à éclairer. Il y a des chandeliers d’église, des chandeliers de ménage, & des chandeliers d’atteliers. Les premiers sont fort grands, ont un pié qui les soûtient, une branche droite qui est solide avec le pié ou qui s’envisse avec lui, une coupe qui forme la partie supérieure du chandelier, & qui est ou envissée ou solide avec la partie supérieure de la branche ou tige ; & au milieu de cette coupe une fiche pointue solide avec la coupe, qui est reçûe dans le trou conique du cierge, & le tient droit & solide. Voyez Cierge. Ces chandeliers peuvent être tout d’une piece. Les chandeliers de ménage ne different guere de ceux d’église, qu’en ce qu’ils sont moins grands, & qu’au lieu d’être terminés par une coupe & par une fiche, on y a pratiqué une cavité qu’on appelle la bobeche ; c’est dans cette cavité qu’on place la bougie ou la chandelle. L’usage de la coupe dans les chandeliers d’église, c’est de recevoir la cire qui tombe fluide du cierge tandis qu’il brûle. Cette piece est suppléée dans les chandeliers domestiques, qu’on appelle flambeaux, par un instrument appellé binet : le binet n’est autre chose qu’une petite coupe percée dans le milieu, & à l’ouverture de laquelle on a adapté ou soudé en-dessous, ou vers la partie convexe, une douille mince ; cette douille entre dans la bobeche du chandelier ; la bougie ou chandelle dans la douille du binet ; & la cire ou le suif qui tombe fluide de la chandelle ou de la bougie, est reçu dans la partie concave de la coupe du binet. Il y a des chandeliers d’atteliers d’une infinité de façons, la chandelle entiere est renfermée dans quelques-uns, son extrémité inférieure entre dans un binet caché au fond de la branche du chandelier, & mobile le long de cette branche, par le moyen d’une queue qui traverse la branche du chandelier, & qui peut glisser de bas en-haut & de haut en-bas, dans une fente pratiquée exprès le long de la branche du chandelier. Celui des Tailleurs, qu’on voit Planche de ces ouvriers, est un branche de bois garnie par un de ses bouts d’une bobeche, & divisée à l’autre bout en quatre entailles, qui reçoivent la croisiere des quatre divisions de la cassette où ils mettent leur fil, & qui lui sert de pié. Les Orfévres, les Fondeurs, les Chaudronniers, les Ferblantiers, & autres ouvriers, font des chandeliers. Il y en a de bois, de terre, de fayence, de verre, de porcelaine, d’étain, de cuivre, d’argent, & d’or. Ceux de métal qui sont de plusieurs pieces qui s’envissent les unes dans les autres, sont de mauvais usage ; la vis & l’écrou s’usent, & l’assemblage cesse d’être solide. La maniere dont on les travaille, soit qu’on les fonde, soit qu’on les construise autrement, n’a rien de particulier. Il n’y a point d’ouvrier en métal, quel qu’il soit, & même en bois, qui ne puisse faire, soit au marteau & à la lime, soit au tour, un chandelier. Les chandeliers des anciens ne différoient en rien des nôtres : on ne sait si nous avons emprunté ceux de nos églises des temples des payens ou des synagogues des Juifs ; ce qu’il y a de certain, c’est que dans des tems où le Christianisme récent n’auroit pû avoir sans scandale le moindre ornement commun avec le paganisme, quelques peres de l’Eglise rejetterent l’usage des chandeliers, par la raison seule que les Payens s’en servoient.

* Chandelier d’or à sept branches. (Hist. ecclésiast.) Il est fait mention de deux chandeliers de cette espece dans les livres de l’ancien testament ; l’un réel, & l’autre mystérieux : Moyse ordonna le premier pour le tabernacle ; il fut battu d’or ; il pesoit un talent, son pié étoit aussi d’or, & il partoit de sa tige sept branches circulaires, terminées chacune par une lampe à bec. Le Saint, l’autel des parfums, & la table des pains de proposition, n’étoient éclairés que par ces lampes qu’on allumoit le soir & qu’on éteignoit le matin. Le chandelier étoit placé vers le midi : Salomon en fit fondre dix pareils dont on décora le même lieu ; cinq furent placés au midi, & cinq au septentrion. Les pincettes & les mouchettes qui accompagnoient les chandeliers de Moyse & de Salomon étoient d’or. Au retour de la captivité on restitua dans le temple un chandelier d’or, qu’on fit sur le modele du chandelier de Moyse. Le second fut emporté par les Romains avec d’autres richesses qu’ils trouverent dans le temple. Ils le placerent avec la table d’or dans le temple que Vespasien fit élever sous le titre de la paix ; & l’on voit encore aujourd’hui sur l’arc de cet empereur, ce chandelier parmi les dépouilles qui ornerent son triomphe.

Le chandelier de la vision du prophete Zacharie étoit aussi à sept branches ; il ne différoit de ceux de Moyse & de Salomon, qu’en ce que l’huile passoit dans les lampes par sept canaux qui sortoient du fond d’une boule élevée à leur hauteur, & qu’elle descendoit dans cette boule par le petit bout de deux conques qui la recevoient latéralement par leurs grandes ouvertures, degouttante des feuilles de deux oliviers placés à chacun de ses côtés.

Chandeliers, (les) Art milit. dans la guerre des siéges sont composés de deux pieces de bois paralleles, sur lesquelles sont élevées perpendiculairement deux autres pieces, ensorte qu’il forme ainsi une espece de coffre qu’on remplit de fascines. Voyez la figure, Pl. XIII. de fortific.

On se sert quelquefois du chandelier pour se couvrir plus promptement du feu de l’ennemi. Le chevalier de Saint-Julien rapporte dans son livre de la forge de Vulcain, qu’un officier Vénitien voyant un sergent qui demandoit des chandeliers pour se couvrir dans un poste avancé, s’écria devant tout le monde : che diavolo vuol cy li far de chandelieri, che fa tanta lace ? « que diable veut-il faire de chandeliers, qu’il fait si clair » ; car c’étoit en plein midi. Ces sotises qui font rire toute une armée, ajoûte cet auteur, font voir aux jeunes officiers qu’ils ne doivent rien négliger pour être instruits des termes de leur profession. (Q)

Chandeliers, en terme de Marine, sont des pieces de bois ou de fer faites en forme de fourches, ou percées seulement pour recevoir & soûtenir différentes choses : elles varient suivant l’usage auquel on les destine. Voici les divers chandeliers :

Chandeliers de pierriers, ce sont des pieces de bois attachées ensemble & percées en long, sur lesquelles on pose le pivot de fer sur lequel le pierrier tourne.

Chandelier de fer de pierrier, est une fourche de fer avec deux anneaux qui soûtiennent les deux tourillons du pierrier ; cette fourche de fer tourne sur un pivot dans un chandelier de bois.

Chandeliers de chaloupe, sont deux fourches de fer qui servent à soûtenir le mât, lorsqu’on ne s’en sert pas, & que la chaloupe va à la rame.

Chandeliers de petits bâtimens, ce sont des appuis de bois qu’on voit sur le pont de quelques petits bâtimens, & qui servent à appuyer & soûtenir le mât lorsqu’il est amené sur le pont.

Chandeliers d’échelles, ce sont des chandeliers de fer à têtes rondes, qu’on met des deux côtés de l’échelle ; on y attache des cordes qu’on laisse traîner jusqu’à l’eau, & qui servent à soulager ceux qui montent dans le vaisseau ou qui en descendent.

Chandeliers de fanal, c’est un grand fer avec un pivot sur lequel on pose un fanal à la poupe. (Z)

Chandelier, en Hydraulique, differe d’un champignon en ce qu’il ne fait point nappe, & que son. eau va former un autre chandelier plus bas. Le jet d’un chandelier est ordinairement plus élevé que celui d’un bouillon, à moins que pour le faire paroître plus gros on ne le noye, & alors l’eau retombe en nappe. Voyez Noyer. (K)

Chandelier, (mettre en) Agricult. Jardinage. maniere de tailler les arbres, qu’on prétend être pernicieuse, & qui consiste à n’y laisser que cinq ou six grosses branches nues, & à couper tous les ans les branches nouvelles qui croissent sur les précédentes, sous prétexte qu’elles ôtent de la force à l’arbre, & qu’elles empêchent les fruits d’être gros. Voyez Taille.

* Chandelier, s. m. Marchand ou ouvrier autorisé à faire & vendre de la chandelle, en qualité de membre de la communauté des chandeliers. Cette communauté est ancienne : ses premiers statuts sont de l’année 1061. L’apprentissage à Paris est de six ans, après lesquels il y a deux années de compagnonage. Quatre jurés, dont deux se renouvellent tous les ans, font les affaires de la communauté. Outre les maîtres de cette communauté, il y a douze chandeliers privilégiés. Voyez l’art. Chandelle.