L’Encyclopédie/1re édition/GUIMAUVE

La bibliothèque libre.
◄  GUIMARAENS
GUIMBARDE  ►

GUIMAUVE, s. f. (Botan.) althæa ou bismalva des Botanistes ; ses caracteres sont les mêmes que ceux de la mauve, voyez Mauve. Ses racines qui sortent d’une tête, sont blanches en-dedans, nombreuses, de la grosseur d’un doigt, fibreuses, & remplies d’un mucilage gluant, ses tiges sont hautes d’environ trois piés & demi, tendres, greles, cylindriques, velues, garnies de feuilles alternes, d’un verd-pâle, arrondies, pointues, blanchâtres, cotonneuses, longues d’environ trois pouces, ondées, dentelées, & portées sur une grande queue. Ses fleurs naissent des aisselles des feuilles ; elles sont d’un blanc tirant sur le rouge, d’une seule piece, partagée en cinq parties jusque vers la base, & garnies dans cet endroit d’un tuyau pyramidal charge d’étamines & de sommets ; le pistil s’emboite dans ce tuyau, & devient un fruit applati & arrondi, composé de plusieurs capsules, disposées en maniere d’anneau, arrangées autour d’un placenta qui occupe le centre. Ces capsules sont membraneuses, minces, en forme de rein, & elles contiennent une graine de même figure.

Il n’est pas aisé de décider si notre guimauve est l’althæa de Dioscoride ; on peut soûtenir également le pour & le contre : mais nos botanistes modernes l’ont trop bien caractérisée, pour qu’on la confonde dans la suite ; elle vient par-tout dans les lieux maritimes, dans les marais, le long des ruisseaux, & fleurit au mois de Juillet. On fait un grand usage en Medecine des feuilles, des fleurs, des graines, & sur-tout des racines de cette plante. (D. J.)

Guimauve, (Pharmacie & Mat. med.) on n’employe ordinairement en Medecine que la racine de cette plante ; elle contient un mucilage abondant : on en retire par une legere ébullition dans l’eau jusqu’à trois gros & quelques grains par once, selon Cartheuser. Mais il est difficile d’estimer au juste la quantité de cette matiere, parce que son poids varie considérablement selon le plus ou le moins d’eau auquel elle est unie. Voyez l’article Mucilage.

Ce mucilage est la vraie partie médicamenteuse de la guimauve.

Les usages médicinaux de la guimauve lui sont communs avec les autres substances végétales mucilagineuses ; & les propriétés particulieres que plusieurs auteurs lui ont accordées contre la pleurésie, l’asthme, les graviers, & les petits calculs des reins & de la vessie, ne sont rien moins que vérifiées. On l’ordonne pour l’usage intérieur sous forme de tisanne, ordinairement avec d’autres remedes analogues, tels que les fruits doux, le chiendent, la réglisse, l’orge, &c.

On doit avoir soin de ne la faire entrer qu’en petite quantité dans ces tisannes, à la dose d’une once tout-au-plus par pinte d’eau, & de ne l’introduire dans la décoction que sur la fin de l’ébullition, parce que trop de mucilage rendroit cette boisson gluante, épaisse, dégoûtante, & nuisible à l’estomac.

On employe encore cette racine en cataplasme, dans la vûe de ramollir les tumeurs inflammatoires, de calmer les douleurs qu’elles causent, & de les mener à suppuration ; on en fait des lotions & des fomentations dans la même vûe : quelques praticiens recommandent ces remedes extérieurs dans quelques affections des parties internes, dans la pleurésie, par exemple, l’inflammation du foie, des reins, & de la vessie. Voyez quel succès on doit attendre de ces remedes aux articles Inflammatoires (maladies), & Topique.

On employe aussi aux mêmes usages, mais beaucoup plus rarement, tant pour l’intérieur que pour l’extérieur, les feuilles, les semences, & les fleurs de guimauve ; ces parties sont moins mucilagineuses que les racines.

On prépare avec la guimauve un sirop simple, & des tablettes ; elle donne son nom au sirop de guimauve composé ou sirop de ibisco, au sirop de guimauve de Fernel, & à la pâte de guimauve, & à l’onguent appellé communément d’althæa.

Sirop de guimauve simple. Prenez des racines fraîches de guimauve mondées & coupées par tranches, six onces : faites-les cuire dans huit livres d’eau commune : passez, ajoûtez six livres de sucre, clarifiez & cuisez en consistence de sirop.

Cette composition a les même usages intérieurs que la décoction de la racine. Elle n’est pas de garde, c’est pourquoi les bons apothicaires la renouvellent très-souvent, sur-tout en été.

Sirop de guimauve de Fernel. Prenez de racines de guimauve deux onces ; de pois chiches une once ; de racines de chiendent, d’asperges & de réglisse, de chacune demi-once ; de raisins secs mondés, demi-once ; de sommités de guimauve, de mauve, de pariétaire, de pimprenelle, de plantain, de capillaire commun, de chacun une once ; des quatre grandes semences froides majeures, & des mineures, de chacune trois gros : cuisez dans demi-livre d’eau jusqu’à la moitié : passez : ajoûtez à la colature quatre livres de sucre : clarifiez & unissez en consistence de sirop.

On ordonne ce sirop depuis demi-once jusqu’à une & deux onces dans les juleps béchiques & diurétiques ; on l’ajoûte en plus grande dose aux tisannes & aux émulsions pour boisson ordinaire ; on le fait prendre aussi par petites cuillerées pour calmer la toux. C’est un remede fort innocent, c’est-à-dire peu dangereux & peu utile.

Le sirop de ibisco est proprement le même que celui-ci ; les seuls de ses ingrédiens qui pourroient l’en faire différer essentiellement, sont les racines de raifort sauvage & de raifort de jardin, qui contiennent, comme on sait, un alkali volatil libre ; mais la décoction que ces racines essuient, remet la partie qu’elles fournissent au sirop dans le rang de simple extrait.

Onguent d’althæa. Prenez d’huile de mucilage, deux livres ; de cire jaune, demi-livre ; de poix résine & de térébenthine claire, de chacune quatre onces : faites fondre le tout à petit feu : retirez du feu, & remuez avec une spatule de bois jusqu’à ce que le mélange soit refroidi, & vous aurez votre onguent.

Il n’y a pas un atome de mucilage de guimauve dans cet onguent (voyez Mucilage) ; il est résolutif, maturatif, & anodyn ; on l’employe quelquefois avec succès dans les rhumatismes legers & dans les douleurs de côté ou fausses pleurésies. Quelques medecins en font faire aussi des frictions legeres sur le côté dans les vraies pleurésies (voyez Pleurésie, Rhumatisme, & Topique).

Tablettes de guimauve de la pharm. de Paris. Prenez de la pulpe de racine de guimauve passée par le tamis, douze onces ; sucre blanc, deux livres ; eau de fleurs d’orange, deux onces : cuisez au bain-marie jusqu’à la consistence d’électuaire solide : faites des tablettes selon l’art. Voyez Tablettes.

L’usage de ces tablettes est très-fréquent dans le rhume. On les laisse fondre dans la bouche ; la salive qui s’en charge peut calmer la toux gutturale & stomacale. La toux pectorale, le vrai rhume, ne paroît point pouvoir être soulagé par ce remede.

Pâte de guimauve. Prenez de la gomme arabique, la plus blanche, deux livres & demie ; du sucre blanc, deux livres & quatre onces ; d’eau commune, huit livres : faites fondre le sucre & la gomme : passez, faites cuire jusqu’à consistence d’extrait en remuant continuellement avec une spatule ; alors remuez & battez fort & sans relâche, en jettant dans votre masse peu-à-peu six blancs d’œufs battus, avec demi-once d’eau de fleurs d’orange : continuez à brasser jusqu’à ce que votre masse devienne d’un beau blanc : enfin cuisez encore sur un feu doux en remuant toûjours, jusqu’à ce qu’en frappant sur la masse avec la main, elle ne s’y colle point. Tirez-la de la bassine encore chaude, jettez-la sur une feuille de papier couverte d’une petite couche de farine, elle s’y étendra d’elle-même, & prendra une épaisseur à-peu-près uniforme, d’un demi-pouce ou environ. Cette préparation est connue sous le nom de pâte de guimauve, parce que dans les dispensaires, la décoction de guimauve est demandée au lieu de l’eau.

On fait de cette pâte le même usage que des tablettes de guimauve.

La racine de guimauve entre dans plusieurs compositions officinales. (b)