La Séparation des Églises et de l’État/Loi du 1er août 1879

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LOI
du 1er août 1879
qui modifie l’organisation de l’Église de la Confession d’Augsbourg
(Promulguée au Journal officiel du 2 août 1879.)

Le Sénat et la Chambre des Députés ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article premier

L’Église évangélique de la Confession d’Augsbourg a des pasteurs, des inspecteurs ecclésiastiques, des conseils presbytéraux. des consistoires, des synodes particuliers et un synode général. Elle a aussi une faculté de théologie.

TITRE PREMIER
Des pasteurs et inspecteurs ecclésiastiques.
Art. 2.

Chaque circonscription paroissiale a un ou plusieurs pasteurs.

Art. 3.

Pour être nommé pasteur, il faut remplir les conditions suivantes :

1o Être Français ou d’origine française ;

2o Être âgé de vingt-cinq ans ;

3o Être pourvu du diplôme de bachelier en théologie, délivré par une faculté française, et d’un acte de consécration.

Art. 4.

Les pasteurs sont nommés par le consistoire, sur la présentation du conseil presbytéral.

La nomination est soumise à l’agrément du Gouvernement.

Dans le cas où le choix du consistoire donne lieu à une réclamation, il est procédé comme il est dit à l’article 21.

Art. 5.

Les pasteurs peuvent être suspendus ou destitués par le synode particulier, conformément à la discipline ecclésiastique. Les motifs de la suspension ou de la destitution, seront présentés au Gouvernement, qui les approuve ou les rejette.

Art. 6.

Les inspecteurs ecclésiastiques sont chargés de la consécration des candidats au saint ministère, de l’installation des pasteurs, de la consécration des églises.

Ils ont la surveillance des pasteurs et des églises de leur ressort, ils veillent à l’exercice régulier du culte et au maintien du bon ordre dans les paroisses.

Ils sont tenus de visiter périodiquement les églises. Ils font chaque année au synode particulier un rapport général sur leur circonscription.

Ils siègent, en leur qualité, au synode général et sont membres de droit de la commission synodale prévue à l’article 20 ci-dessous, mais ils ne la président pas.

Ils sont nommés pour neuf ans par le synode particulier et rééligibles. Ils ne peuvent être révoqués que par le synode général.

TITRE II
Des conseils presbytéraux.
Art. 7.

Chaque église qui ne forme pas à elle seule un consistoire à un conseil presbytéral composé du pasteur ou des pasteurs de la paroisse et d’un nombre d’anciens déterminé par le synode particulier, mais qui ne pourra être moindre de huit.

Art. 8.

Le conseil presbytéral est élu par les fidèles selon les règles actuellement en vigueur. Il est renouvelé par moitié tous les trois ans.

Art. 9.

Le pasteur ou le plus ancien des pasteurs est président du conseil presbytéral.

Art. 10.

Le conseil presbytéral est chargé de veiller à l’ordre, à la discipline et au développement religieux de la paroisse, à l’entretien et à la conservation des édifices religieux et des biens curiaux. Il administre les aumônes et ceux des biens et revenus de la communauté qui sont affectés à l’entretien du culte et des édifices religieux, le tout sous la surveillance du consistoire.

Il délibère sur l’acceptation des legs et donations qui peuvent lui avoir été faits. Il propose au choix des consistoires trois candidats pour les fonctions de receveur paroissial.

Il pourra y avoir un receveur collectif pour la totalité des paroisses d’une même consistoriale ou pour plusieurs d’entre elles.

TITRE III
Des consistoires.
Art. 11.

Le consistoire est composé de tous les pasteurs de la circonscription et d’un nombre double d’anciens délégués par les conseils presbytéraux.

Dans le cas où il existerait dans une paroisse un titre de pasteur auxiliaire, le synode particulier pourra exceptiomiellement attribuer au titulaire droit de présence et voix délibérative au consistoire.

Art. 12.

Le consistoire est renouvelé par moitié tous les trois ans. Les membres sortants sont rééligibles.

Art. 13.

À chaque renouvellement il élit un président ecclésiastique et un secrétaire laïque.

Art. 14.

Le consistoire veille au maintien de la discipline ; il contrôle l’administration des conseils presbytéraux, dont il règle les budgets et arrête les comptes. Il nomme les receveurs des communautés de son ressort, il délibère sur l’acceptation des donations et legs faits au consistoire ou confiés à son administration. Il donne son avis sur les délibérations des conseils presbytéraux qui ont pour objet les donations ou legs faits aux communautés de la circonscription.

TITRE IV
Des synodes particuliers.
Art. 15.

Les circonscriptions réunies de plusieurs consistoires forment le ressort d’un synode particulier.

Art. 16.

Le synode particulier se compose de tous les membres des consistoires du ressort.

Art. 17.

Il se réunit une fois chaque année et nomme son bureau. Les églises de l’Algérie peuvent s’y faire représenter par des délégués choisis dans la mère patrie.

Art. 18.

En cas d’urgence, la commission synodale peut le convoquer en session extraordinaire.

Art. 19.

Le synode délibère sur toutes les questions qui intéressent l’administration, le bon ordre ou la vie religieuse, sur les œuvres de charité, d’éducation et d’évangélisation établies par lui ou placées sous son patronage. Il statue sur l’acceptation des donations ou legs qui lui sont faits.

Il veille au maintien de la constitution de l’Église, à celui de la discipline et à la célébration du culte.

Il prononce sur toutes les contestations survenues dans l’étendue de sa juridiction, sauf appel au synode général.

Art. 20.

Dans l’intervalle de ses sessions, le synode est représenté par une commission synodale prise dans son sein et nommée par lui. Elle se compose de l’inspecteur ecclésiastique, d’un pasteur et de trois laïques. Ces quatre derniers sont nommés pour six ans. La commission synodale se renouvelle par moitié tous les trois ans. Les membres sortants sont rééligibles. La commission synodale nomme son président.

Art. 21.

La commission est chargée de la suite à donner aux affaires et aux questions qui ont fait l’objet des délibérations du synode.

Elle transmet au Gouvernement les nominations de pasteurs faites par les consistoires, lorsque, dans les dix jours de la nomination, il n’est survenu aucune réclamation.

En cas de réclamation, la commission synodale en apprécie le bien ou mal fondé et la soumet, s’il y a lieu, au synode particulier, qui décide.

TITRE V
Du synode général.
Art. 22.

Lee synode général est l’autorité supérieure de l’Église de la Confession d’Augsbourg. Il se compose :

1o De pasteurs et d’un nombre de laïques double de celui des pasteurs, élus par les synodes particuliers ;

2o D’un délégué de la faculté de théologie.

Les membres laïques peuvent être choisis en dehors de la circonscription du synode particulier.

Art. 23.

Les députés au synode général se renouvellent par moitié tous les trois ans dans chaque circonscription de synode particulier. Les membres sortants sont rééligibles.

Art. 24.

Les synodes particuliers sont représentés au synode général, en raison de la population de leur ressort. Toutefois un synode ne pourra être représenté par moins de quinze membres.

Art. 25.

Le synode général veille au maintien de la constitution de l’Église ; il approuve les livres ou formulaires liturgiques qui doivent servir au culte et à l’enseignement religieux.

Il nomme une commission executive qui communique avec le Gouvernement ; cette commission présente, de concert avec les professeurs de théologie de la Confession d’Augsbourg, les candidats aux chaires vacantes et aux places de maîtres des conférences.

Il juge en dernier ressort les difficultés auxquelles peut donner lieu l’application des règlements concernant le régime intérieur de l’Église.

Art. 26.

Le synode général se réunit au moins tous les trois ans, alternativement à Paris et à Montbéliard, ou dans telle autre ville désignée par lui. Il peut, pour un motif grave et sur la demande de l’un des synodes ou du Gouvernement, être convoqué extraordinairement.

Art. 27.

Le synode général peut, si les intérêts de l’Église lui paraissent l’exiger, convoquer un synode constituant. La majorité des deux tiers au moins du nombre des membres du synode est nécessaire pour cette convocation.

Le synode constituant sera composé d’un nombre double de celui des membres du synode général.

Art. 28.

La loi du 18 germinal an X, (articles organiques des cultes protestants) et le décret-loi du 26 mars 1852, portant réorganisation des ciltes protestants, sont abrogés en ce qu’ils ont de contraire aux modifications ci-dessus arrêtées.

La présente loi, délibérée et adoptée, par le Sénat et par la Chambre des Députés, sera exécutée comme loi de l’État.

Fait à Paris, le 1er août 1879.

JULES GRÉVY.
Le Ministre de l’Intérieur et des Cultes,