La région du lac Saint-Jean, grenier de la province de Québec/II

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II.

Le lac Saint-Jean, que les Indiens appellent « Pikouagami, » (lac plat) égoutte l’immense vallée qui porte son nom, et est le réservoir de plusieurs grandes rivières. Sa distance de Québec, en ligne droite, est d’environ 140 milles ; de Chicoutimi 60 milles, et de Tadoussac 120 milles.

Sa plus grande longueur, entre l’embouchure de la Belle-Rivière et celle de la Mistassini, atteint 28 milles, et sa plus grande largeur a été calculée à 25 milles. Un mesurage exact lui donne 365 milles en superficie et une circonférence de 85 milles.

La profondeur d’eau du lac n’est pas considérable, la plus forte moyenne ne dépassant pas 80 pieds. À un seul endroit, vers le centre, on a trouvé 225 pieds, ainsi que le constate un rapport officiel de M. Joseph Rosa, ingénieur, en date du 14 janvier 1885.

Au printemps, les eaux du lac montent ; de 15 à 24 pieds au-dessus de leur niveau ordinaire, et de 3 à 4 pieds seulement, dans les grands vents d’automne.

Il y a tout autour du lac Saint-Jean un vaste système de communications par eau, qui sont naturellement très avantageuses à la colonisation et qui offriront un jour de grandes facilités au commerce de la vallée, quoique les rivières qui composent ce système ne soient navigables, sur une grande partie de leur cours, que pour des embarcations d’un faible tirant d’eau.

Les principales de ces rivières sont, au sud du lac, la Métabetchouane et la Ouiatchouane, à l’est la Belle-Rivière, à l’ouest la Chamouchouane, au nord-ouest la Ticouapee et la Mistassini, au nord et au nord-est la grande et la petite Péribonca.

La Péribonca est navigable, jusqu’à trente milles de son embouchure, pour les vapeurs de dimension ordinaire. Elle est extrêmement longue. Il faut, paraît-il, faire quatre cents milles, en la remontant, avant d’arriver à sa source, et cela sans apercevoir la moindre trace ni le moindre vestige d’habitation, ni même de passage de l’homme.

La Mistassini est navigable sur une longueur de vingt milles ; on peut remonter la Chamouchouane pendant quinze milles, et la Ticouapee le double de cette dernière distance.

Sur la rivière Ouiatchouane, à un mille environ de son entrée dans le lac Saint-Jean, se trouve la fameuse chute de ce nom, qui n’a pas moins de 230 pieds de hauteur et que l’on aperçoit de partout, comme si on l’avait exactement en face de soi, à quelque endroit qu’on se trouve au nord du lac.

Toutes ces rivières égouttent des terrains d’une grande fertilité. Presque partout le sous-sol se compose de roches calcaires, sur lesquelles reposent des couches de terre glaise (argile) qui ont parfois plusieurs centaines de pieds d’épaisseur. Les dépôts superficiels, mêlés à cette terre glaise, se composent d’alluvions sableuses, d’humus et de détritus végétaux qui forment une terre arable d’une grande richesse, surtout à l’ouest et au nord du lac. Comme de raison, il y a des exceptions, des endroits moins fertiles ; mais la description que nous venons de donner s’applique d’une manière générale à toute la contrée.

Cette fertilité, du reste, est établie a priori par la nature même des forêts de cette région, forêts dont les essences dominantes sont l’orme, le frêne, le merisier, l’érable, l’épinette rouge, l’épinette blanche, le pin, le cèdre, la pruche et même le bois blanc.