Les Quatre Saisons (Merrill)/La Ville

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Les Quatre SaisonsSociété du Mercure de France (p. 182-183).

LA VILLE

Ô Ville, la pluie glisse sur tes toits lisses, ou la neige
Fait le silence à doux flocons dans tes rues, ou bien le vent,
Maître léger des nuages au troupeau mouvant,
Couvre d’ombre ou de soleil tes places pleines de cortèges.

Tout change en toi. Tes portes s’ouvrent sur des cimetières
Et ton enceinte se ferme sur ceux qui dansent en rond.
Tour à tour, sur tes palais aux antiques frontons,
Tes drapeaux furent blancs ou rouges selon tes colères.


Tu lances l’appel aérien de tes cloches vers Dieu,
Puis tu vomis, courtisane accroupie, ton sang
Dans le fleuve qui, des glaciers verts, roule vers l’Océan bleu.

Tout change en toi comme en un rêve mortel,
Tout, sauf la plainte incessante des innocents
Qui meurent à ta vie sous la flamme de tes autels.