Les Quatre Saisons (Merrill)/Le Secret

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Les Quatre SaisonsSociété du Mercure de France (p. 180-181).
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LE SECRET

Mon âme s’est réfugiée dans l’église noire des pins,
Une heure de cette journée où le monde m’a fait mal.
Le vent chantait sur le mont et dans le val,
Voix même de la terre qui découvre à tous son sein,
Comme une mère à qui ses enfants peuvent confier leur peine.

Et je lui ai dit « Terre qui berces les générations vaines
De ta voix qui ne s’est jamais tue au fond des bois,
Je viens après tant d’autres, hélas ! chercher en toi

Je ne sais quelle réponse refusée à ma foi
Et demander, mendiant enfui des villes, à tes forêts
Éternellement remuantes sur les sommets
Ce qu’elles veulent me révéler de leur antique secret. »

Et la Terre, par les voix innombrables de ses arbres,
Comme l’oracle parmi les chênes de Dodone et les marbres,
M’a répondu : « Le secret que te cache le Sort
Est celui de toutes ces feuilles éparses au vent : la Mort ! »