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Lettres à une autre inconnue/XXXIII

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Michel Lévy frères (p. 171-173).
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XXXIII


Cannes, 27 novembre 1868.


Madame,


Mille remercîments pour vos excellentes allumettes. Mais vivrai-je assez longtemps pour en voir la fin ? Vous m’en avez envoyé une si grande quantité, et je suis si patraque que j’ai peur d’en laisser à mes héritiers.

J’espère que les beaux yeux de Mademoiselle votre fille sont revenus dans leur état ordinaire, qui est de faire mourir la moitié du genre humain.

Malheureusement, mon ami de Saulcy est en ce moment à Jérusalem ou quelque part aux environs de la mer Morte. Je ne pense pas qu’il revienne en Europe avant l’année prochaine. Il est mort tant de gens à l’Académie des inscriptions, qu’à présent je n’y ai presque plus de contemporains, et c’est à peine si je connais la figure de la moitié de mes confrères. J’ai écrit à ceux sur qui je puis avoir un peu de crédit.

Il paraît que l’impératrice ne revient pas aussi vite qu’on l’avait annoncé d’abord, et, maintenant qu’il est impossible qu’elle assiste à la séance impériale du 29, je ne vois pas de raison qui puisse l’obliger à se hâter. J’ai vu aujourd’hui une lettre d’Égypte. Tout s’est passé aussi bien que possible ; je parle du canal et non du mariage de M. de Lesseps, dont on ne donnait pas de nouvelles.

Adieu, Madame ; veuillez me rappeler au souvenir de mari et de fille et agréer l’expression de tous mes respectueux hommages.